Métrique en Ligne
LFT_3/LFT342
Jean de LA FONTAINE
ŒUVRES DIVERSES I
1658-1694
FRAGMENTS DU SONGE DE VAUX
1671
FRAGMENT I
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Lorsque l'an se renouvelle, 7 a
En cette aimable saison 7 b
Où Flore amène avec elle 7 a
Les Zéphyrs sur l'horizon ; 7 b
5 Une nuit que le Silence 7 c
Charmoit tout par sa présence, 7 c
Je conjurai le Sommeil 7 d
De suspendre mon réveil 7 d
Bien loin par delà l'aurore. 7 e
10 Le Sommeil n'y manqua pas ; 7 f
Et je dormirois encore, 7 e
Sans Aminte et ses appas. 7 f
Cette fière beauté, qui s'érige un trophée 6+6 g
Du cruel souvenir de mes vœux impuissants, 6+6 h
15 Souffrit que cette nuit les charmes de Morphée 6+6 g
Aussi bien que les siens régnassent sur mes sens. 6+6 h
Il me fit voir en songe un palais magnifique, 6+6 i
Des grottes, des canaux, un superbe portique, 6+6 i
Des lieux que pour leurs beautés 7 j
20 J'aurois pu croire enchantés, 7 j
Si Vaux n'étoit point au monde : 7 k
Ils étoient tels, qu'au soleil 7 d
Ne s'offre au sortir de l'onde . 7 k
Rien que Vaux qui soit pareil. 7 d
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
25 Sous les lambris moussus de ce sombre palais, 6+6 j
Écho ne répond point, et semble être assoupie : 6+6 m
La molle Oisiveté, sur le seuil accroupie, 6+6 m
N'en bouge nuit et jour, et fait qu'aux environs 6+6 n
Jamais le chant des coqs, ni le bruit des clairons, 6+6 n
30 Ne viennent au travail inviter la nature ; 6+6 o
Un ruisseau coule auprès, et forme un doux murmure. 6+6 o
Les simples dédiés au dieu de ce séjour 6+6 p
Sont les seules moissons qu'on cultive à l'entour : 6+6 p
De leurs fleurs en tout temps sa demeure est semée. 6+6 g
35 Il a presque toujours la paupière fermée. 6+6 g
Je le trouvai dormant sur un lit de pavots : 6+6 q
Les Songes l'entouroient sans troubler son repos : 6+6 q
De fantômes divers une cour mensongère, 6+6 r
Vains et frêles enfants d'une vapeur légère, 6+6 r
40 Troupe qui sait charmer le plus profond ennui, 6+6 s
Prête aux ordres du dieu, voloit autour de lui. 6+6 s
Là, cent figures d'air en leurs moules gardées, 6+6 t
Là, des biens et des maux les légères idées, 6+6 t
Prévenant nos destins, trompant notre désir, 6+6 u
45 Formoient des magasins de peine ou de plaisir. 6+6 u
Je regardois sortir et rentrer ces merveilles : 6+6 v
Telles vont au butin les nombreuses abeilles ; 6+6 v
Et tel, dans un état de fourmis composé, 6+6 w
Le peuple rentre et sort en cent parts divisé. 6+6 w
50 Confus, je m'écriai : Toi que chacun réclame, 6+6 x
Sommeil, je ne viens pas t'implorer dans ma flamme ; 6+6 x
Conte à d'autres que moi ces mensonges charmants 6+6 h
Dont tu flattes les vœux des crédules amants ; 6+6 h
Les merveilles de Vaux me tiendront lieu d'Aminte : 6+6 y
55 Fais que par ces démons leur beauté me soit peinte. 6+6 y
Tu sais que j'ai toujours honoré tes autels ; 6+6 l
Je t'offre plus d'encens que pas un des mortels : 6+6 l
Doux Sommeil, rends-toi donc à ma juste prière. 6+6 r
A ces mots, je lui vis entr'ouvrir la paupière ; 6+6 r
60 Et, refermant les yeux presque au même moment : 6+6 z
Contentez ce mortel, dit-il languissamment. 6+6 z
Tout ce peuple obéit sans tarder davantage : 6+6 a
Des merveilles de Vaux ils m'offrirent l'image ; 6+6 a
Comme marbres taillés leur troupe s'entassa ; 6+6 b
65 En colonne aussitôt celui-ci se plaça ; 6+6 b
Celui-là chapiteau vint s'offrir à ma vue ; 6+6 c
L'un se fit piédestal, l'autre se fit statue : 6+6 c
Artisans qui peu chers, mais qui prompts et subtils, 6+6 d
N'ont besoin pour bâtir de marbre ni d'outils, 6+6 d
70 Font croître en un moment des fleurs et des ombrages, 6+6 e
Et, sans l'aide du temps, composent leurs ouvrages. 6+6 e
mètre profils métriques : 7, 6+6
logo du CRISCO logo de l'université