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LFT_3/LFT339
Jean de LA FONTAINE
ŒUVRES DIVERSES I
1658-1694
LES AMOURS DE PSYCHÉ ET DE CUPIDON
1669
PSYCHÉ
LIVRE PREMIER
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Sommes-nous, dit-il, en Provence ? 8 a
Quel amas d'arbres toujours verts 8 b
Triomphe ici de l'inclémence 8 a
Des aquilons et des hivers ! 8 b
5 Jasmins dont un air doux s'exhale, 8 c
Fleurs que les vents n'ont pu ternir, 8 d
Aminte en blancheur vous égale ; 8 c
Et vous m'en faites souvenir. 8 d
Orangers, arbres que j'adore, 8 e
10 Que vos parfums me semblent doux ! 8 f
Est-il dans l'empire de Flore 8 e
Rien d'agréable comme vous ? 8 f
Vos.fruits aux écorces solides 8 h
Sont un véritable trésor ; 8 i
15 Et le jardin des Hespérides 8 h
N'avoit point d'autres pommes d'or. 8 i
Lorsque votre automne s'avance, 8 a
On voit encor votre printemps ; 8 j
L'espoir avec la jouissance 8 a
20 Logent chez vous en même temps. 8 j
Vos fleurs ont embaumé tout l'air que je respire : 6+6 k
Toujours un aimable zéphyre 8 k
Autour de vous se va jouant. 8 l
Vous êtes nains ; mais tel arbre géant, 4+6 l
25 Qui déclare au soleil la guerre, 8 m
Ne vous vaut pas, 4 n
Rien qu'il couvre un arpent de terre 8 m
Avec ses bras. 4 n
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Dans l'un, le dieu du jour achève sa carrière. 6+6 m
30 Le sculpteur a marqué ces longs traits de lumière, 6+6 m
Ces rayons dont l'éclat, dans les airs s'épanchant, 6+6 l
Peint d'un si riche émail les portes du couchant. 6+6 l
On voit aux deux côtés le peuple d'Amathonte 6+6 o
Préparer le chemin sur des dauphins qu'il monte. 6+6 o
35 Chaque Amour à l'envi semble se réjouir 6+6 d
De l'approche du dieu dont Thétis va jouir. 6+6 d
Des troupes de zéphirs dans les airs se promènent ; 6+6 p
Les tritons empressés sur les flots vont et viennent. 6+6 p
Le dedans de la grotte est tel, que les regards, 6+6 q
40 Incertains de leur choix, courent de toutes parts. 6+6 q
Tant d'ornements divers, tous capables de plaire, 6+6 m
Font accorder le prix tantôt au statuaire, 6+6 m
Et tantôt à celui dont l'art industrieux 6+6 r
Des trésors d'Amphitrite a revêtu ces lieux. 6+6 r
45 La voûte et le pavé sont d'un rare assemblage : 6+6 s
Ces cailloux que la mer pousse sur son rivage, 6+6 s
Ou qu'enferme en son sein le terrestre élément, 6+6 l
Différents en couleur, font maint compartiment. 6+6 l
Au haut de six piliers d'une égale structure, 6+6 t
50 Six masques de rocaille, à grotesque figure, 6+6 t
Songes de l'art, démons bizarrement forgés, 6+6 u
Au-dessus d'une niche en face sont rangés. 6+6 u
De mille raretés la niche est toute pleine : 6+6 v
Un triton d'un côté, de l'autre une sirène, 6+6 v
55 Ont chacun une conque en leurs mains de rocher ; 6+6 w
Leur souffle pousse un jet qui va loin s'épancher. 6+6 w
Au haut de chaque niche un bassin répand l'onde : 6+6 x
Le masque la vomit de sa gorge profonde ; 6+6 x
Elle retombe en nappe, et compose un tissu 6+6 y
60 Qu'un autre bassin rend sitôt qu'il l'a reçu. 6+6 y
Le bruit, l'éclat de l'eau, sa blancheur transparente, 6+6 z
D'un voile de cristal alors peu différente, 6+6 z
Font goûter un plaisir de cent plaisirs mêlé. 6+6 w
Quand l'eau cesse, et qu'on voit son cristal écoulé, 6+6 w
65 La nacre et le corail en réparent l'absence : 6+6 a
Morceaux pétrifiés, coquillage, croissance, 6+6 a
Caprices infinis du hasard et des eaux, 6+6 a
Reparaissent aux yeux, plus brillants et plus beaux. 6+6 a
Dans le fond de la grotte, une arcade est remplie 6+6 b
70 De marbres à qui l'art a donné de la vie. 6+6 b
Le dieu de ces rochers, sur une urne penché, 6+6 w
Goûte un morne repos, en son antre couché. 6+6 w
L'urne verse un torrent ; tout l'antre s'en abreuve ; 6+6 c
L'eau retombe en glacis, et fait un large fleuve. 6+6 c
75 J'ai pu jusqu'à présent exprimer quelques traits 6+6 d
De ceux que l'on admire en ce moite palais : 6+6 d
Le reste est au-dessus de mon foible génie. 6+6 b
Toi qui lui peux donner une force infinie, 6+6 b
Dieu des vers et du jour, Phébus, inspire-moi : 6+6 e
80 Aussi bien désormais faut-il parler de toi. 6+6 e
Quand le soleil est las, et qu'il a fait sa tâche, 6+6 f
Il descend chez Thétis, et prend quelque relâche : 6+6 f
C'est ainsi que Louis s'en va se délasser 6+6 w
D'un soin que tous les jours il faut recommencer. 6+6 w
85 Si j'étois plus savant en l'art de bien écrire, 6+6 k
Je peindrais ce monarque étendant son empire : 6+6 k
Il lanceroit la foudre ; on verrait à ses pieds 6+6 u
Des peuples abattus, d'autres humiliés. 6+6 u
Je laisse ces sujets aux maîtres du Parnasse ; 6+6 g
90 Et pendant que Louis, peint en dieu de la Thrace, 6+6 g
Fera bruire en leurs vers tout le sacré vallon , 6+6 h
Je le célébrerai sous le nom d'Apollon. 6+6 h
Ce dieu, se reposant sous ces voûtes humides, 6+6 h
Est assis au milieu d'un chœur de néréides. 6+6 h
95 Toutes sont des Vénus, de qui l'air gracieux 6+6 r
N'entre point dans son cœur, et s'arrête à ses j'eux. 6+6 r
Il n'aime que Thétis, et Thétis les surpasse. 6+6 g
Chacune, en le servant, fait office de Grâce. 6+6 g
Doris verse de l'eau sur la main qu'il lui tend. 6+6 i
100 Chloé dans un bassin reçoit l'eau qu'il répand. 6+6 i
A lui laver les pieds Mélicerte s'applique. 6+6 j
Delphire entre ses bras tient un vase à l'antique. 6+6 j
Climène auprès du dieu pousse en vain des soupirs : 6+6 k
Hélas ! c'est un tribut qu'elle envoie aux zéphyrs : 6+6 k
105 Elle rougit parfois, parfois baisse la vue. 6+6 l
( Rougit, autant que peut rougir une statue : 6+6 l
Ce sont des mouvements qu'au défaut du sculpteur 6+6 m
Je veux faire passer dans l'esprit du lecteur.) 6+6 m
Parmi tant de beautés, Apollon est sans flamme ; 6+6 n
110 Celle qu'il s'en va voir seule occupe son âme. 6+6 n
Il songe au doux moment où, libre et sans témoins, 6+6 o
Il reverra l'objet qui dissipe ses soins. 6+6 o
Oh ! qui pourroit décrire en langue du Parnasse 6+6 g
La majesté du dieu, son port si plein de grâce, 6+6 g
115 Cet air que l'on n'a point chez nous autres mortels, 6+6 d
Et pour qui l'âge d'or inventa les autels ! 6+6 d
Les coursiers de Phébus, aux flambantes narines, 6+6 p
Respirent l'ambrosie en des grottes voisines. 6+6 p
Les tritons en ont soin : l'ouvrage est si parfait, 6+6 q
120 Qu'ils semblent panteler du chemin qu'ils ont fait. 6+6 q
Aux deux bouts de la grotte, et dans deux enfonçures, 6+6 r
Le sculpteur a placé deux charmantes figures : 6+6 r
L'une est le jeune Acis, aussi beau que le jour. 6+6 s
Les accords de sa flûte inspirent de l'amour : 6+6 s
125 Debout contre le roc, une jambe croisée, 6+6 t
Il semble par ses sons attirer Galatée ; 6+6 t
Par ses sons, et peut-être aussi par sa beauté. 6+6 w
Le long de ces lambris un doux charme est porté. 6+6 w
Les oiseaux, envieux d'une telle harmonie, 6+6 b
130 Épuisent ce qu'ils ont et d'art et de génie. 6+6 b
Philomèle, à son tour, veut s'entendre louer, 6+6 w
Et chante par ressorts que l'onde fait jouer. 6+6 w
Écho même répond ; Écho, toujours hôtesse 6+6 u
D'une voûte ou d'un roc témoin de sa tristesse. 6+6 u
135 L'onde tient sa partie. Il se forme un concert 6+6 v
Où Philomèle, l'eau, la flûte, enfin tout sert. 6+6 v
Deux lustres de rocher de ces voûtes descendent, 6+6 w
En liquide cristal leurs branches se répandent : 6+6 w
L'onde sert de flambeaux ; usage tout nouveau. 6+6 x
140 L'art en mille façons a su prodiguer l'eau : 6+6 x
D'une table de jaspe un jet part en fusée ; 6+6 t
Puis en perles retombe, en vapeur, en rosée. 6+6 t
L'effort impétueux dont il va s'élançant 6+6 l
Fait frapper le lambris au cristal jaillissant. 6+6 l
145 Telle et moins violente est la balle enflammée. 6+6 t
L'onde, malgré son poids, dans le plomb renfermée, 6+6 t
Sort avec un fracas qui marque son dépit 6+6 y
Et plaît aux écoutants, plus il les étourdit. 6+6 y
Mille jets, dont la pluie à l'entour se partage, 6+6 s
150 Mouillent également l'imprudent et le sage. 6+6 s
Craindre ou ne craindre pas à chacun est égal : 6+6 z
Chacun se trouve en butte au liquide cristal. 6+6 z
Plus les jets sont confus, plus leur beauté se montre. 6+6 a
L'eau se croise, se joint, s'écarte, se rencontre, 6+6 a
155 Se rompt, se précipite à travers les rochers, 6+6 u
Et fait, comme alambics, distiller leurs planchers. 6+6 u
Niches, enfoncements, rien ne sert de refuge. 6+6 b
Ma muse est impuissante à peindre ce déluge. 6+6 b
Quand d'une voix de fer je frapperais les cieux, 6+6 r
160 Je ne pourrais nombrer les charmes de ces lieux. 6+6 r
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le dieu qu'on nomme Amour n'est pas exempt d'aimer : 6+6 w
A son flambeau quelquefois il se brûle ; 4+6 c
Et si ses traits ont eu la force d'entamer 6+6 w
Les cœurs de Pluton et d'Hercule, 8 c
165 Il n'est pas inconvénient 8 l
Qu'étant aveugle, étourdi, téméraire, 4+6 m
Il se blesse en les maniant ; 8 l
Je n'y vois rien qui ne se puisse faire : 4+6 m
Témoin Psyché, dont je vous veux conter 4+6 w
170 La gloire et les malheurs, chantés par Apulée. 6+6 t
Cela vaut bien la peine d'écouter ; 4+6 w
L'aventure en est signalée. 8 t
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Mon fils, dit-elle en lui baisant les yeux, 4+6 r
La fille d'un mortel en veut à ma puissance ; 6+6 a
175 Elle a juré de me chasser des lieux 4+6 r
Où l'on me rend obéissance : 8 a
Et qui sait si son insolence 8 a
N'ira pas jusqu'au point de me vouloir ôter 6+6 w
Le rang que dans les cieux je pense mériter ? 6+6 w
180 Paphos n'est plus qu'un séjour importun : 4+6 d
Des Grâces et des Ris la troupe m'abandonne ; 6+6 e
Tous les Amours, sans en excepter un, 4+6 d
S'en vont servir cette personne. 8 e
Si Psyché veut notre couronne, 8 e
185 Il faut la lui donner ; elle seule aussi bien 6+6 f
Fait en Grèce à présent votre office et le mien. 6+6 f
L'un de ces jours je lui vois pour époux 4+6 f
Le plus beau, le mieux fait de tout l'humain lignage, 6+6 s
Sans le tenir de vos traits ni de vous, 4+6 f
190 Sans vous en rendre aucun hommage. 8 s
Il naîtra de leur mariage 8 s
Un autre Cupidon, qui d'un de ses regards 6+6 q
Fera plus mille fois que vous avec vos dards. 6+6 q
Prenez-y garde ; il vous y faut songer : 4+6 w
195 Rendez-la malheureuse ; et que cette cadette, 6+6 g
Malgré les siens, épouse un étranger 4+6 w
Qui ne sache où trouver retraite, 8 g
Qui soit laid, et qui la maltraite, 8 g
La fasse consumer en regrets superflus, 6+6 h
200 Tant que ni vous ni moi nous ne la craignions plus. 6+6 h
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
C'est pourquoi nous dirons en langage rimé 6+6 w
Que l'empire flottant en demeura charmé. 6+6 w
Cent tritons, la suivant jusqu'au port de Cythère, 6+6 m
Par leurs divers emplois s'efforcent de lui plaire. 6+6 m
205 L'un nage à l'entour d'elle, et l'autre au fond des eaux 6+6 a
Lui cherche du corail et des trésors nouveaux. 6+6 a
L'un lui tient un miroir fait de cristal de roche : 6+6 i
Aux rayons du soleil l'autre en défend l'approche. 6+6 i
Palémon, qui la guide, évite les rochers : 6+6 b
210 Glauque de son cornet fait retentir les mers : 6+6 b
Thétis lui fait ouïr un concert de sirènes. 6+6 j
Tous les vents attentifs retiennent leurs haleines. 6+6 j
Le seul Zéphyre est libre, et d'un souffle amoureux 6+6 r
Il caresse Vénus, se joue à ses cheveux ; 6+6 r
215 Contre ses vêtements parfois il se courrouce. 6+6 k
L'onde, pour la toucher, à longs flots s'entre-pousse ; 6+6 k
Et d'une égale ardeur chaque flot à son tour 6+6 s
S'en vient baiser les pieds de la mère d'Amour. 6+6 s
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
L'époux que les destins gardent à votre fille 6+6 l
220 Est un monstre cruel qui déchire les cœurs, 6+6 m
Qui trouble maint état, détruit mainte famille, 6+6 l
Se nourrit de soupirs, se baigne dans les pleurs. 6+6 m
A l'univers entier il déclare la guerre, 6+6 m
Courant de bout en bout un flambeau dans la main : 6+6 f
225 On le craint dans les cieux, on le craint sur la terre ; 6+6 m
Le Styx n'a pu borner son pouvoir souverain. 6+6 f
C'est un empoisonneur, c'est un incendiaire, 6+6 m
Un tyran qui de fers charge jeunes et vieux. 6+6 r
Qu'on lui livre Psyché ; qu'elle tâche à lui plaire : 6+6 m
230 Tel est l'arrêt du Sort, de l'Amour et des dieux. 6+6 r
Menez-la sur un roc, au haut d'une montagne, 6+6 n
En des lieux où l'attend le monstre son époux ; 6+6 f
Qu'une pompe funèbre en ces lieux l'accompagne, 6+6 n
Car elle doit mourir pour ses sœurs et pour vous. 6+6 f
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
235 L'éloquence elle-même, impuissante à.le dire, 6+6 k
Confesse que ceci n'est point de son empire ; 6+6 k
C'est au silence seul d'exprimer les adieux 6+6 r
Des parents de la belle, au partir de ces lieux. 6+6 r
Je ne décrirai point ni leur douleur amère, 6+6 m
240 Ni les pleurs de Psyché, ni les cris de sa mère 6+6 m
Qui, du fond des rochers renvoyés dans les airs, 6+6 b
Firent de bout en bout retentir ces déserts. 6+6 b
Elle plaint de son sang la cruelle aventure, 6+6 t
Implore le soleil, les astres, la nature ; 6+6 t
245 Croit fléchir par ces cris les auteurs du destin : 6+6 f
Il lui faut arracher sa fille de son sein. 6+6 f
Après mille sanglots enfin on les sépare : 6+6 o
Le soleil, las de voir ce spectacle barbare, 6+6 o
Précipite sa course ; et, passant sous les eaux. 6+6 a
250 Va porter la clarté chez des peuples nouveaux. 6+6 a
L'horreur de ces déserts s'accroît par son absence 6+6 a
La Nuit vient sur un char conduit par le Silence ; 6+6 a
Il amène avec lui la crainte en l'univers. 6+6 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Tout l'univers obéit à l'Amour : 4+6 s
255 Relie Psyché, soumettez-lui votre âme. 4+6 n
Les autres dieux à ce dieu font la cour, 4+6 s
Et leur pouvoir est moins doux que sa flamme. 4+6 n
Des jeunes cœurs c'est le suprême bien : 4+6 f
Aimez, aimez ; tout le reste n'est rien. 4+6 f
260 Sans cet amour, tant d'objets ravissants, 4+6 j
Lambris dorés, bois, jardins, et fontaines, 4+6 j
N'ont point d'appas qui ne soient languissants, 4+6 j
Et leurs plaisirs sont moins doux que ses peines. 4+6 j
Des jeunes cœurs c'est le suprême bien : 4+6 f
265 Aimez, aimez ; tout le reste n'est rien. 4+6 f
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
On fit ses murs d'un marbre aussi blanc que l'albâtre. 6+6
Les dedans sont ornés d'un porphyre luisant. 6+6 l
Ces ordres dont les Grecs nous ont fait un présent, 6+6 l
Le dorique sans fard, l'élégant ionique, 6+6 j
270 Et le corinthien superbe et magnifique, 6+6 j
L'un sur l'autre placés, élèvent jusqu'aux cieux 6+6 r
Ce pompeux édifice où tout charme les yeux. 6+6 r
Pour servir d'ornement à ses divers étages. 6+6 p
L'architecte y posa les vivantes images 6+6 p
275 De ces objets divins, Cléopâtres, Phrynés, 6+6 u
Par qui sont les héros en triomphe menés. 6+6 u
Ces fameuses beautés dont la Grèce se vante, 6+6 z
Celles que le Parnasse en ses fables nous chante, 6+6 z
Ou de qui nos romans font de si beaux portraits, 6+6 d
280 A l'envi, sur le marbre étaloient leurs attraits 6+6 d
L'enchanteresse Armide, héroïne du Tasse, 6+6 g
A côté d'Angélique avoit trouvé sa place. 6+6 g
On y voyoit surtout Hélène au cœur léger, 6+6 w
Qui causa tant de maux pour un prince berger. 6+6 w
285 Psyché dans le milieu voit aussi sa statue, 6+6 l
De ces reines des cœurs pour reine reconnue : 6+6 l
La belle à cet aspect s'applaudit en secret, 6+6 q
Et n'en peut détacher ses beaux yeux qu'à regret. 6+6 q
Mais on lui montre encor d'autres marques de gloire : 6+6 q
290 Là ses traits sont de marbre, ailleurs ils sont d'ivoire. 6+6 q
Les disciples d'Arachne, à l'envi des pinceaux, 6+6 a
En ont aussi formé de différents tableaux. 6+6 a
Dans l'un on voit les Ris divertir cette belle ; 6+6 r
Dans l'autre, les Amours dansent à l'entour d'elle : 6+6 r
295 Et, sur cette autre toile, Euphrosine et ses sœurs 6+6 m
Ornent ses blonds cheveux de guirlandes de fleurs. 6+6 m
Enfin, soit aux couleurs, ou bien dans la sculpture 6+6 t
Psyché dans mille endroits rencontre sa figure ; 6+6 t
Sans parler des miroirs et du cristal des eaux, 6+6 a
300 Que ses traits imprimés font paraître plus beaux. 6+6 a
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Dans la première on voyoit un chaos, 4+6 s
Masse confuse, et de qui l'assemblage 4+6 s
Faisoit lutter contre l'orgueil des flots 4+6 s
Des tourbillons d'une flamme volage. 4+6 s
305 Non loin de là, dans un même monceau, 4+6 x
L'air gémissoit sous le poids de la terre : 4+6 m
Ainsi le feu, l'air, la terre, avec l'eau, 4+6 x
Entretenoient une cruelle guerre. 4+6 m
Que fait l'Amour ? volant de bout en bout, 4+6 t
310 Ce jeune enfant, sans beaucoup de mystère, 4+6 m
En badinant vous débrouille le tout, 4+6 t
Mille fois mieux qu'un sage n'eût su faire. 4+6 m
Dans la seconde, un cyclope amoureux, 4+6 r
Pour plaire aux yeux d'une nymphe jolie, 4+6 b
315 Se démêloit la barbe et les cheveux ; 4+6 r
Ce qu'il n'avoit encor fait de sa vie. 4+6 b
En se moquant la nymphe s'enfuyoit : 4+6 u
Amour l'atteint : et l'on voyoit la belle, 4+6 r
Qui, dans un bois, le cyclope prioit 4+6 u
320 Qu'il l'excusât d'avoir été rebelle. 4+6 r
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Assemblez, sans aller si loin, 8 v
Vaux, Liancourt, et leurs naïades, 8 w
Y joignant, en cas de besoin, 8 v
Ruel avecque ses cascades. 8 w
325 Cela fait, de tous les côtés, 8 u
Placez en ces lieux enchantés 8 u
Force jets affrontant la nue, 8 l
Des canaux à perte de vue ; 8 l
Bordez-les d'orangers, de myrtes, de jasmins. 6+6 x
330 Qui soient aussi géants que les nôtres sont nains 6+6 x
Entassez-en des pépinières ; 8 y
Plantez-en des forêts entières ; 8 y
Des forêts, où chante en tout temps 8 j
Philomèle, honneur des bocages, 8 p
335 De qui le règne, en nos ombrages, 8 p
Naît et meurt avec le printemps : 8 j
Mêlez-y les sons éclatants 8 j
De tout ce que les bois ont d'agréables chantres. 6+6 z
Chassez de ces forêts les sinistres oiseaux ; 6+6 a
340 Que les fleurs bordent leurs ruisseaux ; 8 a
Que l'Amour habite leurs antres. 8 z
N'y laissez entrer toutefois 8 a
Aucune hôtesse de ces bois 8 a
Qu'avec un paisible zéphyre, 8 k
345 Et jamais avec un satyre. 8 k
Point de tels amants dans ces lieux ; 8 r
Psyché s'en tiendroit offensée : 8 t
Ne les offrez point à ses yeux ; 8 r
Et moins encore à sa pensée. 8 t
350 Qu'en ce canton délicieux 8 r
Flore et Pomone, à qui mieux mieux, 8 r
Fassent montre de leurs richesses ; 8 b
Et que ce couple de déesses 8 b
Y renouvelle ses présents 8 j
355 Quatre fois au moins tous les ans. 8 j
Que tout y naisse sans culture ; 8 t
Toujours fraîcheur, toujours verdure, 8 t
Toujours l'haleine et les soupirs 8 k
D'une brigade de zéphyrs. 8 k
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
360 Il étoit témoin de la fête, 8 g
Paré d'un magnifique atour ; 8 s
Et, caché le reste du jour, 8 s
Sur le soir il montrait sa tête. 8 g
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Ainsi qu'en usent les amants 8 j
365 Dans les vers et dans les romans ; 8 j
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Ruisseaux, enseignez-moi l'objet de mon amour ; 6+6 s
Guidez vers lui mes pas, vous dont l'onde est si pure. 6+6 t
Ne dormiroit-il point en ce sombre séjour, 6+6 s
Payant un doux tribut à votre doux murmure ? 6+6 t
370 En vain pour le savoir, Psyché vous fait la cour, 6+6 s
En vain elle vous vient conter son aventure. 6+6 t
Vous n'osez déceler cet ennemi du jour, 6+6 s
Qui rit en quelque coin du tourment que j'endure 6+6 t
Il s'envole avec l'ombre, et me laisse appeler. 6+6 w
375 Hélas ! j'use au hasard de ce mot d'envoler : 6+6 w
Car je ne sais pas même encor s'il a des ailes. 6+6 c
J'ai beau suivre vos bords, et chercher en tous lieux : 6+6 r
Les antres seulement m'en disent des nouvelles, 6+6 c
Et ce que je chéris n'est pas fait pour mes yeux. 6+6 r
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
380 Ce méchant couple amenoit avec lui 4+6 d
La curieuse et misérable Envie, 4+6 b
Pâle démon, que le bonheur d'autrui 4+6 d
Nourrit de fiel et de mélancolie. 4+6 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Les voici, dit ce couple ; et nous vous assurons 6+6 e
385 De la clarté que fait la lampe. 8 f
Pour le poignard, il est des bons, 8 e
Bien affilé, de bonne trempe. 8 f
Comme nous vous aimons, et ne négligeons rien 6+6 f
Quand il s'agit de votre bien, 8 f
390 Nous avons eu le soin d'empoisonner la lame : 6+6 n
Tenez-vous sûre de ses coups ; 8 f
C'est fait du monstre votre époux, 8 f
Pour peu que ce poignard l'entame. 8 n
A ces mots, un trait de pitié 8 w
395 Toucha le cœur de notre belle. 8 r
Je vous rends grâce, leur dit-elle, 8 r
De tant de marques d'amitié. 8 w
A pas tremblants et suspendus, 8 h
Elle arrive enfin où repose 8 g
400 Son époux aux bras étendus, 8 h
Époux plus beau qu'aucune chose : 8 g
C'étoit aussi l'Amour : son teint par sa fraîcheur, 6+6 m
Par son éclat, par sa blancheur, 8 m
Rendoit le lis jaloux, faisoit honte à la rose. 6+6 g
405 Avant que de parler du teint, 8 h
Je devrais vous avoir dépeint, 8 h
Pour aller par ordre en l'affaire, 8 m
La posture du dieu. Son col étoit penché : 6+6 w
C'est ainsi que le Somme en sa grotte est couché ; 6+6 w
410 Ce qu'il ne falloit pas vous taire. 8 m
Ses bras à demi nus étaloient des appas, 6+6 n
Non d'un Hercule, ou d'un Atlas, 8 n
D'un Pan, d'un Sylvain, ou d'un Faune, 8 i
Ni même ceux d'une Amazone : 8 i
415 Mais ceux d'une Vénus à l'âge de vingt ans. 6+6 j
Ses cheveux épars et flottants, 8 j
Et que les mains de la Nature 8 t
Avoient frisés à l'aventure, 8 t
Celles de Flore parfumés, 8 u
420 Cachoient quelques attraits dignes d'être estimés ; 6+6 u
Mais Psyché n'en étoit qu'à prendre plus facile : 6+6 l
Car, pour un qu'ils cachoient, elle en soupçonnoit mille. 6+6 l
Leurs anneaux, leurs boucles, leurs nœuds, 8 r
Tour à tour de Psyché reçurent tous des vœux : 6+6 r
425 Chacun eut à part son hommage. 8 s
Une chose nuisit pourtant à ces cheveux ; 6+6 r
Ce fut la beauté du visage. 8 s
Que vous en dirai-je ? et comment 8 l
En parler assez dignement ? 8 l
430 Suppléez à mon impuissance : 8 a
Je ne vous aurois d'aujourd'hui 8 d
Dépeint les beautés de celui 8 d
Qui des beautés a l'intendance. 8 a
Que dirois-je des traits où les Ris sont logés ? 6+6 u
435 De ceux que les Amours ont entre eux partagés ? 6+6 u
Des yeux aux brillantes merveilles, 8 k
Qui sont les portes du désir ; 8 d
Et surtout des lèvres vermeilles, 8 k
Qui sont les sources du plaisir ? 8 d
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
440 Là finit de Psyché le bonheur et la gloire : 6+6 q
Et là votre plaisir pourrait cesser aussi. 6+6 d
Ce n'est pas mon talent d'achever une histoire 6+6 q
Qui se termine ainsi. 6 d
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Là, dans des chars dorés, le prince avec sa cour 6+6 s
445 Va goûter la fraîcheur sur le déclin du jour. 6+6 s
L'un et l'autre Soleil, unique en son espèce. 6+6 u
Étale aux regardants sa pompe et sa richesse. 6+6 u
Phébus brille à l'envi du monarque françois ; 6+6 a
On ne sait bien souvent à qui donner sa voix : 6+6 a
450 Tous deux sont pleins d'éclats et rayonnants de gloire. 6+6 q
Ah ! si j'étois aidé des Filles de mémoire, 6+6 q
De quels traits j'ornerois cette comparaison ! 6+6 h
Versailles, ce seroit le palais d'Apollon : 6+6 h
Les belles de la cour passeraient pour les Heures. 6+6 m
455 Mais peignons seulement ces charmantes demeures. 6+6 m
En face d'un parterre au palais opposé 6+6 w
Est un amphithéâtre en rampes divisé. 6+6 w
La descente en est douce, et presque imperceptible ; 6+6 n
Elles vont vers leur fin d'une pente insensible. 6+6 n
460 D'arbrisseaux toujours verts les bords en sont ornés. 6+6 u
Le myrte, par qui sont les amants couronnés, 6+6 u
Y range son feuillage en globe, en pyramide ; 6+6 o
Tel jadis le tailloient les ministres d'Armide. 6+6 o
Au haut de chaque rampe, un sphinx aux larges flancs 6+6 j
465 Se laisse entortiller de fleurs par des enfants. 6+6 j
Il se joue avec eux, leur rit à sa manière, 6+6 m
Et ne se souvient plus de son humeur si fière. 6+6 m
Au bas de ce degré, Latone et ses gémeaux 6+6 a
De gens durs et grossiers font de vils animaux, 6+6 a
470 Les changent avec l'eau que sur eux ils répandent. 6+6 w
Déjà les doigts de l'un en nageoires s'étendent ; 6+6 w
L'autre en le regardant est métamorphosé : 6+6 w
De l'insecte et de l'homme un autre est composé : 6+6 w
Son épouse le plaint d'une voix de grenouille ; 6+6 p
475 Le corps est femme encor. Tel lui-même se mouille, 6+6 p
Se lave, et plus il croit effacer tous ces traits, 6+6 d
Plus l'onde contribue à les rendre parfaits. 6+6 d
La scène est un bassin d'une vaste étendue. 6+6 l
Sur les bords, cette engeance, insecte devenue, 6+6 l
480 Tâche de lancer l'eau contre les déités. 6+6 u
A l'entour de ce lieu, pour comble de beautés, 6+6 u
Une troupe immobile et sans pieds se repose, 6+6 g
Nymphes, héros, et dieux de la métamorphose, 6+6 g
Termes, de qui le sort semblerait ennuyeux 6+6 r
485 S'ils n'étoient enchantés par l'aspect de ces lieux. 6+6 r
Deux parterres ensuite entretiennent la vue. 6+6 l
Tous deux ont leurs fleurons d'herbe tendre et menue, 6+6 l
Tous deux ont un bassin qui lance ses trésors, 6+6 q
Dans le centre en aigrette, en arcs le long des bords. 6+6 q
490 L'onde sort du gosier de différents reptiles. 6+6 r
Là sifflent les lézards, germains des crocodiles : 6+6 r
Et là mainte tortue, apportant, sa maison, 6+6 h
Allonge en vain le col pour sortir de prison. 6+6 h
Enfin, par une allée aussi large que belle, 6+6 r
495 On descend vers deux mers d'une forme nouvelle. 6+6 r
L'une est un rond à pans, l'autre est un long canal, 6+6 z
Miroirs où l'on n'a point, épargné le cristal. 6+6 z
Au milieu du premier, Phébus, sortant, de l'onde, 6+6 x
A quitté de Thétis la demeure profonde. 6+6 x
500 En rayons infinis l'eau sort de son flambeau ; 6+6 x
On voit presque en vapeur se résoudre cette eau. 6+6 x
Telle la chaux exhale une blanche fumée. 6+6 t
D'atomes de cristal une nue est formée : 6+6 t
Et lorsque le soleil se trouve vis-à-vis, 6+6 s
505 Son éclat l'enrichit des couleurs de l'iris. 6+6 s
Les coursiers de ce dieu, commençant leur carrière, 6+6 m
A peine ont hors de l'eau la croupe tout entière : 6+6 m
Cependant on les voit impatients du frein ; 6+6 f
Ils forment la rosée en secouant leur crin. 6+6 f
510 Phébus quitte à regret ces humides demeures : 6+6 m
Il se plaint à Thétis de la hâte des Heures. 6+6 m
Elles poussent son char par leurs mains préparé, 6+6 w
Et disent que le Somme en sa grotte est rentré. 6+6 w
Cette figure à pans d'une place est suivie. 6+6 b
515 Mainte allée en étoile, à son centre aboutie, 6+6 b
Mène aux extrémités de ce vaste pourpris. 6+6 s
De tant d'objets divers les regards sont surpris. 6+6 s
Par sentiers alignés l'œil va de part et d'autre : 6+6 t
Tout chemin est allée au royaume du Nostre. 6+6 t
520 Muses, n'oublions pas à parler du canal. 6+6 z
Cherchons des mots choisis pour peindre son cristal. 6+6 z
Qu'il soit pur, transparent ; que cette onde argentée 6+6 t
Loge en son moite sein la blanche Galatée. 6+6 t
Jamais on n'a trouvé ses rives sans zéphyrs : 6+6 k
525 Flore s'y rafraîchit au vent de leurs soupirs. 6+6 k
Les nymphes d'alentour souvent dans les nuits sombres 6+6 v
S'y vont baigner en troupe à la faveur des ombres. 6+6 v
Les lieux que j'ai dépeints, le canal, le rond-d'eau, 6+6 x
Parterres d'un dessin agréable et nouveau, 6+6 x
530 Amphithéâtres, jets, tous au palais répondent, 6+6 w
Sans que de tant d'objets les beautés se confondent. 6+6 w
Heureux ceux de qui l'art a ces traits inventés ! 6+6 u
On ne connoissoit point autrefois ces beautés. 6+6 u
Tous parcs étoient vergers du temps de nos ancêtres ; 6+6 x
535 Tous vergers sont faits parcs : le savoir de ces maîtres 6+6 x
Change en jardins royaux ceux des simples bourgeois, 6+6 a
Comme en jardins de dieux il change ceux des rois. 6+6 a
Que ce qu'ils ont planté dure mille ans encore ! 6+6 e
Tant qu'on aura des yeux, tant qu'on chérira Flore, 6+6 e
540 Les nymphes des jardins loueront incessamment 6+6 l
Cet art qui les savoit loger si richement. 6+6 l
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mètre profils métriques : 8, 4, 6+6, 4+6, (6)
forme globale type :
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