Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LFT_2/LFT310
Jean de LA FONTAINE
CONTES ET NOUVELLES
1668-1694
LIVRE QUATRIÈME
XVII
LE TABLEAU
On m’engage à conterd’une manière honnête 6+6 a
 Le sujet d’un de ces tableaux 8 b
 Sur lequel on met des rideaux ; 8 b
 Il me faut tirer dé ma tête 8 a
5 Nombre de traits nouveaux,piquants et délicats, 6+6 a
 Qui disent et ne disent pas, 8 a
 Et qui soient entendus, sans notes, 8 a
 Des Agnès même, les plus sottes. 8 a
Ce n’est pas coucher gros :ces extrêmes Agnès 6+6 a
10  Sont oiseaux qu’on ne vit jamais. 8 a
Toute matrone sage,à ce que dit Catulle, 6+6 a
Regarde volontiersle gigantesque don 6+6 b
Fait au fruit de Vénuspar la main de Junon : 6+6 b
À ce plaisant objet,si quelqu’une recule, 6+6 a
15  Cette quelqu’une dissimule. 8 a
Ce principe posé,pourquoi plus de scrupule, 6+6 a
Pourquoi moins de silenceaux oreilles qu’aux yeux ? 6+6 a
Puisqu’on le veut ainsi,je ferai de mon mieux : 6+6 a
Nuls traits à découvertn’auront ici de place ; 6+6 a
20 Tout y sera voilé,mais de gaze, et si bien 6+6 b
 Que je crois qu’on n’en perdra rien. 8 b
Qui pense finementet s’exprime avec grâce, 6+6 a
 Fait tout passer ; car tout passe ; 7 a
 Je l’ai cent fois éprouvé : 7 a
25  Quand le mot est bien trouvé, 7 a
Le sexe, en sa faveur,à la chose pardonne ; 6+6 a
Ce n’est plus elle alors,c’est elle encor pourtant ; 6+6 b
 Vous ne faites rougir personne, 8 a
 Et tout le monde vous entend. 8 b
30 J’ai besoin aujourd’huide cet art important. 6+6 b
Pourquoi ? me dira-t-on,puisque sur ces merveilles 6+6 a
Le sexe porte l’oeilsans toutes ces façons ? 6+6 b
Je réponds à cela :Chastes sont ses oreilles, 6+6 a
 Encor que les yeux soient fripons. 8 b
35 Je veux, quoi qu’il en soit,expliquer à des belles 6+6 a
Cette chaise rompue,et ce rustre tombé. 6+6 b
Muses, venez m’aider :mais vous êtes pucelles, 6+6 a
Au joli jeu d’amourne sachant A ni BBé. 6+6 b
Muses, ne bougez donc ;seulement, par bonté, 6+6 b
40 Dites au dieu des vers,que dans mon entreprise 6+6 a
 Il est bon qu’il me favorise, 8 a
 Et de mes mots fasse le choix, 8 b
 Ou je dirai quelque sottise 8 a
Qui me fera donnerdu busque sur les doigts. 6+6 b
45 C’est assez raisonner ;venons à la peinture : 6+6 a
 Elle contient une aventure 8 a
 Arrivée aux pays d’Amours. 8 a
 Jadis la ville de Cythère 8 b
 Avoit en l’un dé ses faubourgs 8 a
50  Un monastère ; 4 b
 Vénus en fît un séminaire : 8 a
Il étoit de nonnains,et je puis dire ainsi 6+6 b
 Qu’il étoit de galants aussi. 8 b
 En ce lieu hantoient d’ordinaire 8 a
55 Gens de cour, gens de ville,et sacrificateurs, 6+6 a
 Et docteurs, 3 a
Et bacheliers surtout.Un de ce dernier ordre 6+6 a
Passoit dans la maisonpour être des amis. 6+6 b
Propre, toujours rasé,bien disant, et beau fils, 6+6 b
60 Sur son chapeau luisant,sur son rabat bien mis, 6+6 b
 La médisance n’t su mordre. 8 a
 Ce qu’il avoit de plus charmant, 8 a
C’est que deux des nonnainsalternativement 6+6 a
 En tiroient maint et maint service. 8 a
65 L’une n’avoit quittéles atours dé novice, 6+6 a
Que depuis quelques mois ;l’autre encor les portoit. 6+6 a
 La moins jeune à peindre comptoit 8 a
 Un an entier par-dessus seize : 8 a
 Age propre a soutenir thèse, 8 a
70  Thèse d’amour : le bachelier 8 a
 Leur avoit rendu familier 8 a
 Chaque point de cette science, 8 a
 Et le tout par expérience. 8 a
Une assignation,pleine d’impatience, 6+6 a
75 Fut, un jour, par les sœurs,donnée à cet amant ; 6+6 a
Et, pour rendre completle divertissement, 6+6 a
Bacchus avec Cérès,de qui la compagnie 6+6 b
 Met Vénus en train bien souvent, 8 a
Dévoient être, ce coup,de la cérémonie. 6+6 b
80 Propreté toucha seuleaux apprêts du régal ; 6+6 a
Elle sut s’en tireravec beaucoup de grâce : 6+6 b
Tout passa par ses mains,et le vin, et la glace, 6+6 b
 Et les carafes de cristal : 8 a
On s’y seroit miré.Flore à l’haleine d’ambre 6+6 a
85  Sema de fleurs toute la chambre : 8 a
Elle en fit un jardin.Sur le linge, ces fleurs 6+6 a
Formoient des lacs d’amour,et le chiffre des sœurs. 6+6 a
 Leurs cltrières Excellences 7 a
 Aimoient fort ces magnificences : 8 a
90 C’est un plaisir de nonne.Au reste, leur beauté 6+6 b
Aiguisoit l’appétitaussi de son côté. 6+6 b
 Mille secrètes circonstances 8 a
 De leurs corps polis et charmants 8 a
 Augmentoient l’ardeur des amants : 8 a
95  Leur taille étoit presque semblable ; 8 a
Blancheur, délicatesse,embonpoint raisonnable, 6+6 a
Fermeté ; tout charmoit,tout étoit fait au tour ; 6+6 a
 En mille endroits nichoit l’Amour, 8 a
Sous une guimpe, un voile,et sous un scapulaire, 6+6 b
100 Sous ceci, sous cela,que voit peu l’oeil du jour, 6+6 a
Si celui du galantne l’appelle au mystère. 6+6 b
 À ces sœurs, l’enfant de Cythère 8 a
 Mille fois le jour s’en venoit, 8 b
 Les bras ouverts, et les prenoit 8 b
105  L’une après l’autre pour sa mère. 8 a
Tel ce couple attendoitle bachelier trop lent ; 6+6 a
 Et de lui, tout en l’attendant, 8 a
Elles disoient du mal,puis du bien ; puis, les belles 6+6 b
 Imputaient son retardement 8 a
110  À quelques amitiés nouvelles. 8 b
« Qui peut le retenir ?disoit l’une. Est-ce amour ? 6+6 a
 Est-ce affaire ? Est-ce maladie ? 8 b
 — Qu’il y revienne de sa vie ! 8 b
 Disoit l’autre ; il aura son tour. ». 8 a
115 Tandis qu’elles cherchoientlà-dessous du mystère, 6+6 a
Passe un Mazet portantà la dépositaire 6+6 a
 Certain fardeau peu nécessaire : 8 a
Ce n’étoit qu’un prétexte ;et, selon qu’on m’a dit, 6+6 a
Celte dépositaire,ayant grand appétit, 6+6 a
120 Faisoit sa portiondes talents de ce rustre, 6+6 a
Ténu, dans tels repas,pour un traiteur illustre. 6+6 a
Le coquin, lourd d’ailleurs,et de très-court esprit, 6+6 a
 À la cellule se méprit : 8 a
 Il alla, chez les attendantes, 8 a
125  Frapper avec ses mains pesantes. 8 a
On ouvre ; on est surpris.On le maudit d’abord, 6+6 a
 Puis, on voit que c’est un trésor. 8 a
 Les nonnains s’éclatent de rire. 8 a
 Toutes deux commencent à dire, 8 a
130 Comme si toutes deuxs’étoient donné le mot : 6+6 a
 « Servons-nous de ce mtre sot ; 8 a
 Il vaut bien l’autre ; que t’en semble ? » 8 a
La professe ajouta :« C’est très-bien avisé. 6+6 b
Qu’attendions-nous ici ?Qu’il nous fût débité 6+6 b
135 De beaux discours ? Non, non,ni rien qui leur ressemble. 6+6 a
Ce pitaud doit valoir,pour le point souhaité, 6+6 b
 Bachelier et docteur ensemble. » 8 a
Elle en jugeoit très-bien :la taille du gaon, 6+6 a
 Sa simplicité, sa façon, 8 a
140 Et le peu d’intérêtqu’en tout il sembloit prendre, 6+6 a
 Faisoient de lui beaucoup attendre. 8 a
C’étoit l’homme d’Ésope ;il ne songeoit à rien ; 6+6 a
 Mais il buvoit et mangeoit bien ; 8 a
 Et, si Xanthus l’t laissé faire, 8 a
145  Il aurait poussé loin l’affaire. 8 a
 Ainsi, bientôt apprivoisé, 8 a
 Il se trouva tout disposé 8 a
 Pour exécuter sans remise 8 a
Les ordres des nonnains,les servant à leur guise 6+6 a
150  Dans son office de Mazet, 8 a
Dont il lui fut donnépar les sœurs un brevet. 6+6 a
 Ici la peinture commence, 8 a
 Nous voilà parvenus au point. 8 b
 Dieu des vers, ne me quitte point, 8 b
155  J’ai recours à ton assistance ! 8 a
 Dis-moi pourquoi ce rustre assis, 8 a
Sans peine de sa part,et très-fort à son aise, 6+6 b
Laisse le soin de toutaux amoureux soucis 6+6 a
 De sœur Claude et de sœur Thérèse. 8 b
160 N’auroit-il pas mieux faitde leur donner la chaise ? 6+6 b
Il me semble déjàque je vois Apollon 6+6 a
 Qui me dit : « Tout beau ! ces matières 8 b
 À fond ne s’examinent guères. » 8 b
J’entends ; et l’Amour estun étrange gaon ; 6+6 a
165  J’ai tort d’ériger un fripon 8 a
 En mtre de cérémonies. 8 b
 Dès qu’il entre en une maison, 8 a
 Règles et lois en sont bannies : 8 b
 Sa fantaisie est sa raison. 8 a
170 Le voilà qui rompt tout ;c’est assez sa coutume : 6+6 a
Ses jeux sont violents.À terre, on vit bientôt 6+6 b
Le galant cathedral.Ou soit, par le défaut 6+6 b
De la chaise un peu foible,ou soit que du pitaud 6+6 b
 Le corps ne fût pas fait de plume, 8 a
175 Ou soit que sœur Thérèset chargé d’action 6+6 a
Son discours véhémentet plein d’émotion, 6+6 a
On entendit craquerl’amoureuse tribune : 6+6 a
Le rustre tombe à terreen cette occasion. 6+6 b
 Ce premier point eut, par fortune, 8 a
180  Malheureuse conclusion. 8 b
Censeurs, n’approchez pointd’ici votre oeil profane. 6+6 a
Vous, gens de bien, voyezcomme sœur Claude mit 6+6 b
 Un tel incident à profit ? 8 b
Thérèse, en ce malheur^perdit la tramontane : 6+6 a
185 Claude la débusqua,s’emparant du timon. 6+6 a
 Thérèse, pire qu’un démon, 8 a
Tâche à la retirer,et se remettre au trône ; 6+6 a
 Mais celle-ci n’est pas personne 8 a
 À céder un poste, si doux. 8 a
190  Soeur Claude, prenez garde à vous ! 8 a
 Thérèse en veut venir aux coups ; 8 a
Elle a le poing levé.Qu’elle ait ! C’est bien répondre : 6+6 a
Quiconque est occupécomme vous, ne sent rien. 6+6 b
Je ne m’étonne pasque vous sachiez confondre 6+6 a
195  Un petit mal dans un grand bien ? 8 b
 Malgré la colère marquée 8 c
 Sur le front de la débusquée, 8 c
Claude suit son chemin ;le rustre aussi le sien ! 6+6 b
 Thérèse est mal contente, et gronde. 8 a
200 Les plaisirs de Vénussont sources de débats ; 6+6 b
 Leur fureur n’a point de seconde : 8 a
 J’en prends à témoin les combats 8 b
 Qu’on vit sur la terre et sur l’onde, 8 c
 Lorsque Pâris à Ménélas 8 b
205  Ota la merveille du monde. 8 c
Qu’un pitaut, faisant ntreun aussi grand procès, 6+6 a
Tînt ici lieu d’Hélène,une foi sans excès 6+6 a
Le peut croire, et fort bien :troublez nonne en sa joie, 6+6 a
 Vous verrez la guerre de Troie. 8 a
210  Quoique Bellone ait part ici, 8 a
 J’y vois peu de corps de cuirasse ; 8 b
 Dame Vénus se couvre ainsi, 8 a
Quand elle entre en champ-closavec le dieu de Thrace : 6+6 b
 Cette armure a beaucoup de grâce. 8 b
215 Belles, vous m’entendez ;je n’en dirai pas plus : 6+6 a
 L’habit de guerre de Vénus 8 a
 Est plein de choses admirables : 8 b
 Les Cyclopes aux membres nus 8 a
Forgent peu de harnoisqui lui soient comparables ; 6+6 b
220 Celui du preux Achilleauroit été plus beau, 6+6 a
Si Vulcan t dessusgravé notre tableau. 6+6 a
Or ai-je des nonnainsmis en vers l’aventure, 6+6 a
Mais non avec des traitsdignes de l’action ; 6+6 b
Et comme celle-cidéchoit dans la peinture, 6+6 a
225 La peinture déchoitdans ma description. 6+6 b
Les mots et les couleursne sont choses pareilles ; 6+6 a
 Ni les yeux ne sont les oreilles. 8 a
 J’ai laissé longtemps au filet 8 a
 Soeur Thérèse la détrônée : 8 b
230  Elle eut son tour ; notre Mazet 8 a
 Partagea si bien sa journée, 8 b
Que chacun fut content.L’histoire finit là : 6+6 a
Du festin, pas un mot.Je veux croire, et pour, cause, 6+6 b
 Que l’on but et que l’on mangea ; 8 a
235  Ce fut l’intermède et la pause. 8 b
Enfin tout alla bien,hormis qu’en bonne foi 6+6 a
L’heure du rendez-vousm’embarrasse. Et pourquoi ? 6+6 a
Si l’amant ne vint pas,sœur Claude et sœur Thérèse 6+6 a
Eurent, à tout le moins,de quoi se consoler ; 6+6 b
240 S’il vint, on sut cacherle lourdaud et la chaise : 6+6 a
L’amant trouva bientôtencore à qui parler. 6+6 b
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