Métrique en Ligne
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C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LEC_1/LEC80
Charles-Marie LECONTE DE LISLE
POÈMES BARBARES
1862
La Tristesse du Diable
Silencieux, les poings aux dents, le dos ployé, 6+6 a
Enveloppé du noir manteau de ses deux ailes, 6+6 b
Sur un pic hérissé de neiges éternelles, 6+6 b
Une nuit, s'arrêta l'antique Foudroyé. 6+6 a
5 La terre prolongeait en bas, immense et sombre, 6+6 a
Les continents battus par la houle des mers ; 6+6 b
Au-dessus flamboyait le ciel plein d'univers ; 6+6 b
Mais Lui ne regardait que l'abîme de l'ombre. 6+6 a
Il était là, dardant ses yeux ensanglantés 6+6 a
10 Dans ce gouffre où la vie amasse ses tempêtes, 6+6 b
Où le fourmillement des hommes et des bêtes 6+6 b
Pullule sous le vol des siècles irrités. 6+6 a
Il entendait monter les hosannas serviles, 6+6 a
Le cri des égorgeurs, les Te Deum des rois, 6+6 b
15 L'appel désespéré des nations en croix 6+6 b
Et des justes râlant sur le fumier des villes. 6+6 a
Ce lugubre concert du mal universel, 6+6 a
Aussi vieux que le monde et que la race humaine, 6+6 b
Plus fort, plus acharné, plus ardent que sa haine, 6+6 b
20 Tourbillonnait autour du sinistre Immortel. 6+6 a
Il remonta d'un bond vers les temps insondables 6+6 a
Où sa gloire allumait le céleste matin, 6+6 b
Et, devant la stupide horreur de son destin, 6+6 b
Un grand frisson courut dans ses reins formidables. 6+6 a
25 Et se tordant les bras, et crispant ses orteils, 6+6 a
Lui, le premier rêveur, la plus vieille victime, 6+6 b
Il cria par delà l'immensité sublime 6+6 b
Où déferle en brûlant l'écume des soleils : 6+6 a
— Les monotones jours, comme une horrible pluie, 6+6 a
30 S'amassent, sans l'emplir, dans mon éternité ; 6+6 b
Force, orgueil, désespoir, tout n'est que vanité ; 6+6 b
Et la fureur me pèse, et le combat m'ennuie. 6+6 a
Presque autant que l'amour la haine m'a menti : 6+6 a
J'ai bu toute la mer des larmes infécondes. 6+6 b
35 Tombez, écrasez-moi, foudres, monceaux des mondes ! 6+6 b
Dans le sommeil sacré que je sois englouti ! 6+6 a
Et les lâches heureux, et les races damnées, 6+6 a
Par l'espace éclatant qui n'a ni fond ni bord, 6+6 b
Entendront une Voix disant : Satan est mort ! 6+6 b
40 Et ce sera ta fin, Œuvre des six Journées ! 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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