Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LAP_7/LAP76
Victor de LAPRADE
IDYLLES HÉROÏQUES
1858
FRANTZ
I
LA FENAISON
Vois, par-dessus la haie où chantent les fauvettes, 6+6 a
Dans le foin verdoyant aux teintes violettes, 6+6 a
Cachés Jusqu’aux genoux et montant de là-bas, 6+6 a
Les faucheurs, alignés, marchant du même pas. 6+6 a
5 En cercle, à côté d’eux, frappent les faux tournantes ; 6+6 a
Le fer siffle en rasant les tiges frissonnantes. 6+6 a
Et, dans le vert sillon tracé par les râteaux, 6+6 a
L’herbe épaisse à leurs pieds se couche en tas égaux. 6+6 a
À l’ombre, au bout du pré, chacun souffle à sa guise ; 6+6 a
10 Le travailleur s’assied, et sa lame s’aiguise, 6+6 a
Et l’on entend, parmi les gais refrains, dans l’air, 6+6 a
Tinter sous le marteau l’acier sonore et clair. 6+6 a
Plus loin, dans le soleil, qui le sèche à merveille, 6+6 a
Monte en cône arrondi le foin coupé la veille ; 6+6 a
15 Là, vous écoutez rire, autour des peupliers, 6+6 a
Les filles de la ferme en rouges tabliers, 6+6 a
Et la meule y reçoit de la fourche de frêne 6+6 a
Les gerbes de sainfoin que le râteau lui traîne. 6+6 a
Un char, dont l’essieu crie en montant le coteau, 6+6 a
20 Balance au pas des bœufs, son odorant fardeau, 6+6 a
Aux arbres du chemin, chaque fois qu’il se penche, 6+6 a
Laissant fleurs et gazons pendus à chaque branche 6+6 a
Un autre, vide encor, s’arrête ; et les enfants 6+6 a
Assiégeant le timon y grimpent triomphants. 6+6 a
25 Appuyé sur le joug du taureau qui rumine, 6+6 a
Un robuste bouvier, jeune et de fière mine, 6+6 a
Dont la brune faneuse accuse le repos, 6+6 a
Sourit nonchalamment à ses joyeux propos. 6+6 a
Bientôt, parmi les cris, la joie universelle, 6+6 a
30 Le gerbier tout entier sur le char s’amoncelle ; 6+6 a
Tant la gaîté rustique aux lèvres de corail 6+6 a
Sait abréger la peine et doubler le travail. 6+6 a
Toi, qui fuis ces labeurs que la sagesse envie, 6+6 a
Pourquoi, sans t’arrêter, passer devant la vie, 6+6 a
35 Voyageur poursuivi par ton rêve importun, 6+6 a
Et refuser ta part dans le bonheur commun ? 6+6 a
BERTHE
Nouez les ronces aux charmilles 8 a
Et l’aubépine à l’églantier ; 8 b
Tendez vos rets, ô jeunes filles, 8 a
40 Entre les buissons du sentier. 8 b
À ce bel étranger morose 8 a
Qui voit les fleurs sans les cueillir, 8 b
Fermez, d’une chaîne de rose, 8 a
Le chemin qu’il prend pour nous fuir. 8 b
FRANTZ
45 Au rossignol chanteur préparez une cage, 6+6 a
Tressez pour l’enfermer le jonc et le glaïeul ; 6+6 b
Mais au loup, s’il se montre, ouvrez vite un passage 6+6 a
Je suis méchant, et je veux rester seul ! 4+6 b
BERTHE
Ton cœur vaut mieux que tes paroles ! 8 a
50 Tes regards sont tristes, mais doux ; 8 b
Il faut qu’ici tu te consoles, 8 a
Loin des bois où vivent les loups. 8 b
Si la faux t’effraye et te pèse, 8 a
Prends du moins ce râteau léger ; 8 b
55 Avec nous tu peux, à ton aise, 8 a
Faner l’herbe de ce verger. 8 b
Le goûter, au fond des corbeilles, 8 a
Va nous offrir, dans un moment, 8 b
Blanche crème et fraises vermeilles, 8 a
60 Et pain bis mêlé de froment. 8 b
FRANTZ
Là-haut dans les pays où je veux aller vivre, 6+6 a
Il est des fleurs sans nom, il est des fruits divins ; 6+6 b
Et, du tronc de chaque arbre, un miel qui vous enivre 6+6 a
Jaillit à flots plus purs que tous les vins. 4+6 b
BERTHE
65 Nos prés ont des fleurs aussi douces ; 8 a
Essaye un jour de leur odeur. 8 b
Pose un peu sur ton front boudeur 8 b
Ces couronnes que tu repousses. 8 a
À côté de nous reste assis 8 a
70 Sur ces pelouses favorites ; 8 b
Laisse à nos fraîches marguerites 8 b
Effacer tes pâles soucis. 8 a
LES JEUNES FILLES
Vois, là-bas, sur cette gerbe, 7 a
Nu dans l’herbe, 3 a
75 Ce lutin blond et vermeil ; 7 a
L’enfant, déjà si folâtre 7 b
Près de l’âtre, 3 b
Qu’il est gai sous le soleil ! 7 a
Vois briller sa grosse joue ; 7 a
80 Comme il joue ! 3 a
De foin le voilà couvert. 7 a
On dirait un pavot rouge 7 b
Quand il bouge, 3 b
Un pavot dans le blé vert. 7 a
85 Son jeune chien, fou de joie, 7 a
Court, aboie. 3 a
Lèche ses mains, son cou blanc ; 7 a
Dans l’herbe qu’ils éparpillent 7 b
Ils sautillent 3 b
90 Et roulent liane contre flanc. 8 a
Le marmot est tout en nage ; 7 a
Son visage 3 a
Au grand air s’est empourpré ; 7 a
Qu’il est heureux sans mélange, 7 b
95 Le bel ange, 3 b
Quand on fauche dans le pré ! 7 a
BERTHE
Pourquoi t’enfuir, à perdre haleine. 8 a
Vers ces sommets, à l’horizon, 8 b
Quand on est si gai dans la plaine, 8 a
100 Quand le feu flambe à la maison ! 8 b
Voici la nuit, le ciel se couvre, 8 a
Le dernier char vient de partir ; 8 b
Vois, là-bas, la grange qui s’ouvre 8 a
L’éclair brille pour t’avertir. 8 b
105 Viens donc, un râteau sur l’épaule, 8 a
Comme nous, joyeux et chantant, 8 b
Respirer, sous l’ombre du saule, 8 a
L’odeur des foins que j’aime tant. 8 b
Les chars et les faucheurs sont rentrés à la ferme : 6+6 a
110 Sur le pré ras tondu le buisson se referme ; 6+6 a
Mais du gazon plus vert renaît le bouton d’or, 6+6 a
Et l’immense bercail va se peupler encor. 6+6 a
Les vaches, les taureaux, détachés de la crèche, 6+6 a
Las de l’obscure étable et de la paille sèche, 6+6 a
115 Mugissent de plaisir, et, pressant leurs pas lourds, 6+6 a
Frottent leurs bruns naseaux sur le sol de velours. 6+6 a
Sautant de leur cavale à l’inculte crinière 6+6 a
Qu’enivrent l’air plus tiède et l’odeur printanière, 6+6 a
Les pâtres étourdis, voleurs de nids d’oiseaux, 6+6 a
120 Tressent à leurs captifs des prisons de roseaux. 6+6 a
Le chien jappe aux jarrets de la génisse blonde, 6+6 a
Le groupe des chevreaux s’éparpille à la ronde ; 6+6 a
Et là-bas, au soleil, s’étend, calme et serein, 6+6 a
Et dort le taureau noir luisant comme l’airain. 6+6 a
mètre profils métriques : 8, 7, 3, 6+6, 4+6
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