LIVRE TROISIÈME |
ARGUMENT
L’OLYMPE OU LE CIEL.
UNION DE L’ÂME HUMAINE AVEC DIEU DANS UNE AUTRE VIE.
L’absence de Psyché attriste l’Amour son époux et fait un
vide dans le ciel. — Éros vient supplier le père des dieux de
mettre un terme aux épreuves et à l’exil de l’âme à laquelle
il doit s’unir éternellement. — Le dieu médiateur, au
moment de la désobéissance de Psyché, avait laissé tomber
la première larme versée par un immortel. — Il pleure de
nouveau, quoique dieu ; il a expié lui-même la faute de
celle qu’il aime en acceptant sa part des douleurs de l’exil.
— Les Grâces, ces augustes messagères des suppliants,
filles de la Piété, personnification du plus doux attribut de
la nature divine, la clémence, les Grâces prient à leur tour
pour Psyché. — Elles révèlent le sens de la faute primitive ;
elles expliquent cette déchéance si amèrement expiée. —
Par la première faute, l’homme, se détachant de l’être infini
et prenant conscience de lui-même, a passé de l’immobilité
dans le mouvement ascensionnel de la vie. — La douleur
était nécessaire à la formation de la personnalité de l’âme
humaine, à cette évolution sublime qui défait ramener
l’humanité dans le sein de Dieu, comme un être distinct,
comme une nouvelle personne admise à participer à la
félicité infinie. — Les dieux, à leur tour, racontent comment
ils ont désiré cet hymen du ciel et de la terre figuré par
leurs amours avec les filles des hommes. — Lorsque le Père
tout-puissant sortit de son repos éternel, il y fut conduit par
un motif d’amour, car l’amour est le motif essentiel de
l’infini. — L’union de Psyché et d’Éros, de l’homme avec
Dieu, est nécessaire, en quelque sorte, pour compléter l’être
et parfaire l’infini. — Jupiter consent au retour de l’âme
dans le ciel, à la réunion des époux mystiques. — Mais
l’âme ne saurait remonter dans le ciel par ses propres
forces et sans un médiateur divin : Éros descend sur la terre
et rapporte dans ses bras Psyché évanouie. — Les noces se
célèbrent dans l’Olympe. — Les Muses font entendre le
chant nuptial. — Au lieu de la première lampe, pâle et
furtive, un astre immortel inonde de lumière la couche de
l’hymen condamné jadis à l’obscurité. — Hymne de
Psyché : Bénie la première faute ! felix culpa ! bénie la
curiosité aujourd’hui satisfaite par la vérité infinie ; béni le
désir assouvi dans l’amour éternel. — La mort est bénie,
car elle a donné naissance à la résurrection ; la vie de la
résurrection est plus belle que la vie d’avant la mort. — De
l’hymen d’Éros et de Psyché, la Volupté naquit dans
l’Olympe. — Le bonheur infini est engendré par l’union de
l’âme et de l’idéal, par le retour de l’humanité au sein de
Dieu. — Les divinités exilées rentrent dans l’Olympe.
L’hymne universel célèbre la vie bienheureuse et
l’anéantissement du mal.
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Un sommet inconnu⎟ même aux regards de l’aigle, |
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a |
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Une belle cité⎟ dont l’amour est la règle, |
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a |
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Où le parfait accord⎟ résonne à tous moments. |
6+6 |
b |
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Où la paix en un seul⎟ fond tous les éléments, |
6+6 |
b |
5 |
En son immensité⎟ riante et constellée, |
6+6 |
a |
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Voit des dieux immortels⎟ la sereine assemblée. |
6+6 |
a |
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Au bord des puits sacrés,⎟ sources des grandes eaux, |
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b |
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Là, des arbres vivants⎟ étendent leurs rameaux ; |
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b |
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De leurs fruits lumineux⎟ et des parfums qu’ils versent, |
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a |
10 |
Jusqu’au fond des vallons⎟ les germes se dispersent. |
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a |
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Là, les astres errant⎟ avant de flamboyer |
6+6 |
b |
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Allument leurs rayons⎟ à l’éternel foyer ; |
6+6 |
b |
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L’être à flots abondants⎟ qui jaillit de ce centre |
6+6 |
a |
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Sans cesse à flots égaux⎟ comme à son terme y rentre. |
6+6 |
a |
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15 |
Là, tournent gravement,⎟ d’un pas mélodieux, |
6+6 |
b |
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Les heures mesurant⎟ les voluptés aux dieux ; |
6+6 |
b |
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Et les pieds des Saisons⎟ dessinent avec elles |
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a |
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Les contours variés⎟ des danses éternelles. |
6+6 |
a |
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Chaque Muse à son tour⎟ de ces groupes charmants |
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b |
20 |
Soumet aux rhythmes saints⎟ les joyeux mouvements, |
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b |
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Sur trois modes divers⎟ régis par les trois Grâces. |
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a |
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Un chœur de dieux bondit⎟ et chante sur leurs traces ; |
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a |
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D’autres lancent au loin⎟ ou le disque ou les traits ; |
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b |
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D’autres, dans les détours⎟ des ombrages secrets, |
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b |
25 |
De leur amour fécond⎟ enivrent les déesses ; |
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a |
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Et tout, les jeux, les chants,⎟ les danses, les caresses, |
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a |
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Observant des accords⎟ les souriantes lois, |
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b |
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De mille bruits réglés⎟ ne forme qu’une voix. |
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b |
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Parfois jusqu’aux humains⎟ la musique suprême |
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a |
30 |
Arrive en se voilant⎟ à travers quelque emblème, |
6+6 |
a |
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Pour rendre aux cœurs dans l’ombre⎟ ici-bas engloutis |
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b |
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L’espoir des lieux sacrés⎟ dont nous sommes sortis. |
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b |
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Après les jeux finis,⎟ et la lutte et la course, |
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a |
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Et les bains odorants⎟ pris à leur tiède source, |
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a |
35 |
La splendeur du banquet⎟ rappelle au loin les dieux |
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b |
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Dans les palais d’airain⎟ aux frontons radieux, |
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b |
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Où, gravant le récit⎟ des saintes origines, |
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a |
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Vulcain sculpta dans l’or⎟ les histoires divines, |
6+6 |
a |
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Et les lois de l’augure⎟ et l’antique Destin |
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b |
40 |
Oui règne sur l’Olympe⎟ invisible et certain. |
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b |
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À sa place choisie⎟ et qui jamais ne change |
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a |
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Aux pieds du souverain,⎟ là chaque dieu se range |
6+6 |
a |
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Dans un cercle, et s’étend⎟ sur l’ivoire des lits |
6+6 |
b |
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Que la pourpre ondoyante⎟ inonde de ses plis. |
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b |
45 |
Des dieux la soif est grande ;⎟ il faut, pour y suffire, |
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a |
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Qu’un breuvage immortel⎟ des cuves de porphyre |
6+6 |
a |
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Jaillisse par torrents⎟ dans le vase d’Hébé. |
6+6 |
b |
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Chacun dans le nectar⎟ de cette urne tombé |
6+6 |
b |
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Boit aux coupes d’onyx⎟ l’éternelle jeunesse. |
6+6 |
a |
50 |
Quand la soif est calmée,⎟ avant qu’elle renaisse, |
6+6 |
a |
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Recommence le chant ;⎟ car le chant créateur |
6+6 |
b |
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Est le devoir des dieux,⎟ comme il est leur bonheur. |
6+6 |
b |
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De son siège plus haut,⎟ du ciel centre immobile |
6+6 |
a |
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D’où rayonne à longs traits⎟ une clarté subtile, |
6+6 |
a |
55 |
Le roi voyait s’unir,⎟ sous ses yeux adorés, |
6+6 |
b |
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Les couples bienheureux⎟ par lui-même engendrés. |
6+6 |
b |
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Sur tous ces fronts divers,⎟ pleins d’une même grâce, |
6+6 |
a |
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Père, il a reconnu⎟ les beautés de sa face. |
6+6 |
a |
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Un sourire charmant,⎟ dont l’Olympe a relui, |
6+6 |
b |
60 |
Du dieu passe à ses fils,⎟ et de ses fils à lui. |
6+6 |
b |
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La terre en a sa part ;⎟ la moisson printanière |
6+6 |
a |
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Sent d’un soleil plus chaud⎟ abonder la lumière, |
6+6 |
a |
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Lui cependant, selon⎟ qu’ordonne le Destin, |
6+6 |
b |
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Se complaît avec eux⎟ au glorieux festin ; |
6+6 |
b |
65 |
Et son jeune échanson⎟ lui verse à fantaisie |
6+6 |
a |
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Le nectar qui fait vivre⎟ et la douce ambroisie. |
6+6 |
a |
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Mais une place est vide⎟ au cercle tout-puissant : |
6+6 |
b |
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Les yeux des immortels⎟ semblent chercher l’absent, |
6+6 |
b |
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Et le festin languit,⎟ et la joie est moins vive ; |
6+6 |
a |
70 |
Le roi même, inquiet,⎟ demande ce convive ; |
6+6 |
a |
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Car dès que son sourire⎟ à l’Olympe est ôté, |
6+6 |
b |
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Le front de tous les dieux⎟ perd sa sérénité. |
6+6 |
b |
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En de communs transports,⎟ c’est lui qui les rallie ; |
6+6 |
a |
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Par lui l’urne d’Hébé⎟ d’ivresse est mieux remplie ; |
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a |
75 |
Il est l’âme du chant ;⎟ sans lui meurent les jeux ; |
6+6 |
b |
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La douceur des parfums⎟ pleut de ses blonds cheveux. |
6+6 |
b |
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Ouvrant des voluptés⎟ les sources recelées, |
6+6 |
a |
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Il fait épanouir⎟ les déesses voilées. |
6+6 |
a |
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Par lui peuplant la terre,⎟ et la mer et le ciel, |
6+6 |
b |
80 |
La vie émane à flots⎟ du père universel ; |
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b |
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C’est lui par qui l’on aime⎟ et par qui l’on féconde, |
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a |
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Éros, le jeune dieu,⎟ charme éternel du monde. |
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a |
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Au banquet des heureux⎟ pourquoi manquer ainsi ? |
6+6 |
b |
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Quel rêve aux bords lointains⎟ t’emporte, ou quel souci |
6+6 |
b |
85 |
T’égare chaque jour,⎟ muet et solitaire, |
6+6 |
a |
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Des sommets de l’Olympe⎟ aux vallons de la terre ? |
6+6 |
a |
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Sous nos joyeux lambris,⎟ où tu pleures souvent, |
6+6 |
b |
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On te voit revenir⎟ le front pâle et rêvant. |
6+6 |
b |
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Bien des yeux de déesse⎟ en vain t’offrent leur flamme. |
6+6 |
a |
90 |
De terrestres amours⎟ ont-ils blessé ton âme ? |
6+6 |
a |
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De tes ennuis, Éros,⎟ tu peux nous faire aveu ; |
6+6 |
b |
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Quelle mortelle ainsi⎟ peut attrister un dieu ? |
6+6 |
b |
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Mais c’est la destinée,⎟ et, tout dieux que nous sommes, |
6+6 |
a |
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Notre cœur en subit⎟ la loi comme les hommes, |
6+6 |
a |
95 |
Ces mots erraient mêlés⎟ au bruit des urnes d’or ; |
6+6 |
b |
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Et le nom de l’Amour⎟ retentissait encor, |
6+6 |
b |
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Quand celui dont les dieux⎟ invoquaient la présence |
6+6 |
a |
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Apparut. Sa douleur⎟ commandait le silence. |
6+6 |
a |
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Il entre, et nul regard⎟ n’est cherché par le sien, |
6+6 |
b |
100 |
Traverse avec lenteur⎟ le cercle olympien, |
6+6 |
b |
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Et marche au roi des dieux,⎟ dont l’auguste visage |
6+6 |
a |
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D’un sourire à son fils⎟ a jeté le présage. |
6+6 |
a |
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Le blond adolescent,⎟ sur son arc appuyé, |
6+6 |
b |
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Pâle, et baissant son front⎟ de pleurs mal essuyé, |
6+6 |
b |
105 |
Lève enfin ses yeux bleus⎟ auxquels rien ne résiste, |
6+6 |
a |
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Et mêlant de soupirs⎟ une voix douce et triste : |
6+6 |
a |
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« Ô père ! n’est-ce pas⎟ l’heure d’être clément ? |
6+6 |
b |
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D’un regard si rapide,⎟ hélas ! et si charmant, |
6+6 |
b |
|
Psyché, par tant de pleurs⎟ et par tant de constance, |
6+6 |
a |
110 |
N’a-t-elle pas assez⎟ expié l’imprudence, |
6+6 |
a |
|
Et payé d’un grand prix,⎟ selon vos saints décrets, |
6+6 |
b |
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L’orgueil prématuré⎟ d’un dieu vu de trop près ? |
6+6 |
b |
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Des larmes de ce dieu⎟ la richesse immortelle |
6+6 |
a |
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N’a-t-elle pas baigné⎟ le ciel même pour elle ? |
6+6 |
a |
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115 |
« Ah ! c’est le temps de rendre⎟ à ce cœur éprouvé |
6+6 |
b |
|
Son époux et l’Olympe,⎟ à l’amour réservé. |
6+6 |
b |
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Fidèle à cet hymen⎟ qu’elle connut à peine, |
6+6 |
a |
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À travers les douleurs⎟ de sa carrière humaine, |
6+6 |
a |
|
Son souvenir jamais⎟ n’abjura l’idéal. |
6+6 |
b |
120 |
Pleurant l’amant perdu⎟ plus que son propre mal, |
6+6 |
b |
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Sous ses haillons d’esclave⎟ ou sa pourpre splendide, |
6+6 |
a |
|
Son cœur en a toujours⎟ gardé la place vide ; |
6+6 |
a |
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Et les trésors qui font⎟ tout homme ambitieux, |
6+6 |
b |
|
Sans effleurer son âme,⎟ ont passé sous ses yeux. |
6+6 |
b |
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125 |
« Dans l’Olympe avec moi⎟ permets donc qu’elle habite, |
6+6 |
a |
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Et que le lit d’hymen,⎟ d’où l’épouse est proscrite, |
6+6 |
a |
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De son lin parfumé⎟ lui rouvrant les douceurs, |
6+6 |
b |
|
Pour nous en ces jardins⎟ se dresse entre les fleurs. |
6+6 |
b |
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Qu’elle goûte au nectar⎟ que les déesses boivent ; |
6+6 |
a |
130 |
Que la danse et le chant⎟ et les jeux la reçoivent ; |
6+6 |
a |
|
Sa voix et sa beauté⎟ la font digne du ciel : |
6+6 |
b |
|
Elle n’y rompra pas⎟ l’accord universel. |
6+6 |
b |
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|
« Si donc je suis ta vie⎟ et ta joie, ô mon père ! |
6+6 |
a |
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Et du grand chœur des dieux⎟ le charme nécessaire ; |
6+6 |
a |
135 |
Si leur puissance augmente⎟ alors que je souris, |
6+6 |
b |
|
Et si l’Amour absent,⎟ le ciel même est sans prix, |
6+6 |
b |
|
Ô père ! et vous, ô dieux !⎟ pour que l’Amour vous reste, |
6+6 |
a |
|
Recevez à jamais⎟ dans l’empire céleste |
6+6 |
a |
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Cette âme qui m’implore,⎟ et qui m’a pour tout bien |
6+6 |
b |
140 |
Car un nœud immortel⎟ lia mon être au sien. » |
6+6 |
b |
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|
Il dit, et, quoique dieu,⎟ supplie avec des larmes. |
6+6 |
a |
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Trois sœurs aux fronts divers,⎟ mais égales en charmes, |
6+6 |
a |
|
Parurent après lui.⎟ Des tissus clairs et blancs |
6+6 |
b |
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Voilent de plis légers⎟ leur sein chaste et leurs flancs, |
6+6 |
b |
145 |
Et chaque mouvement⎟ de leurs pas mélodiques |
6+6 |
a |
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Décèle une beauté⎟ dans leurs formes pudiques. |
6+6 |
a |
|
D’une voix qui se glisse⎟ et vibre au fond des cœurs, |
6+6 |
b |
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Voici ce que disaient⎟ les Grâces, ces trois sœurs : |
6+6 |
b |
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|
« Ô dieu, père des dieux,⎟ qui seul n’as pas d’ancêtres, |
6+6 |
a |
150 |
Rouvre à l’âme ce sein,⎟ source et terme des êtres ; |
6+6 |
a |
|
Rappelle à nous Psyché ;⎟ nous qui vivons en toi, |
6+6 |
b |
|
À tes embrassements⎟ nous l’offrirons, ô roi ! |
6+6 |
b |
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|
« Tu la laisseras boire,⎟ au bout de ses épreuves, |
6+6 |
a |
|
Dans les flots du nectar⎟ où toi-même t’abreuves : |
6+6 |
a |
155 |
Car ton cœur est ouvert⎟ à notre œil filial : |
6+6 |
b |
|
Nous savons le vrai sens⎟ de la vie et du mal. |
6+6 |
b |
|
L’homme encourut-il donc⎟ ta haine et ta vengeance, |
6+6 |
a |
|
Lorsqu’au prix des douleurs⎟ il conquit la science ; |
6+6 |
a |
|
L’ardeur de voir son dieu,⎟ ce désir infini, |
6+6 |
b |
160 |
D’un supplice éternel⎟ doit-il être puni ? |
6+6 |
b |
|
|
« Pourquoi donc mettre en eux⎟ cette soif de connaître, |
6+6 |
a |
|
Et ce besoin d’amour,⎟ si tu devais, ô maître ! |
6+6 |
a |
|
Frappant l’humble mortel,⎟ qui ne peut s’y ravir, |
6+6 |
b |
|
Sans cesse l’exciter,⎟ et jamais l’assouvir ? |
6+6 |
b |
165 |
L’âme, en suivant sa loi⎟ par toi-même donnée, |
6+6 |
a |
|
Appela la lumière⎟ au sein de l’hyménée. |
6+6 |
a |
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Et qui donc façonna⎟ ses yeux pour la clarté, |
6+6 |
b |
|
Du baiser à sa lèvre⎟ apprit la volupté ? |
6+6 |
b |
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Qui donc fit le désir⎟ si profond, si sublime, |
6+6 |
a |
170 |
Que le seul infini⎟ peut en combler l’abîme ? |
6+6 |
a |
|
|
« Peut-être elle a touché⎟ l’arbre avant la saison |
6+6 |
b |
|
Où le fruit du savoir⎟ est mûr pour la raison ; |
6+6 |
b |
|
Son cœur vola trop tôt⎟ vers la suprême joie ; |
6+6 |
a |
|
Il ne s’est pas du moins⎟ égaré dans sa voie. |
6+6 |
a |
175 |
L’épouse fut fidèle,⎟ et ses regards si doux |
6+6 |
b |
|
N’étaient pas adressés⎟ à d’autres qu’à l’époux ; |
6+6 |
b |
|
Et sa lampe indiscrète,⎟ écartant le mystère, |
6+6 |
a |
|
N’a pas brillé du moins⎟ sur un lit adultère. |
6+6 |
a |
|
|
« À son nocturne hymen⎟ si bornant ses désirs, |
6+6 |
b |
180 |
Avec son ignorance⎟ acceptant ses plaisirs, |
6+6 |
b |
|
Elle eût de l’âge d’or⎟ gardé la paix oisive, |
6+6 |
a |
|
Son âme aurait manqué⎟ le but où tout arrive, |
6+6 |
a |
|
Mais elle a, franchissant⎟ chaque jour un degré, |
6+6 |
b |
|
Suivi de tes desseins⎟ le mouvement sacré, |
6+6 |
b |
185 |
Et fait sa part aussi⎟ dans l’œuvre créatrice. |
6+6 |
a |
|
Or le temps est venu⎟ que son labeur finisse. |
6+6 |
a |
|
|
« Donne-lui le bonheur ;⎟ elle peut le porter. |
6+6 |
b |
|
Si la seule douleur⎟ enseigne à le goûter, |
6+6 |
b |
|
S’il faut conquérir l’être⎟ en un combat suprême, |
6+6 |
a |
190 |
S’il faut avoir lutté⎟ pour devenir soi-même, |
6+6 |
a |
|
Elle peut s’arracher⎟ à l’épreuve du mal, |
6+6 |
b |
|
Et rentrer sans s’y perdre⎟ au sein de l’idéal. |
6+6 |
b |
|
« Comme on doit limiter⎟ par les contours du moule |
6+6 |
a |
|
La lave du métal⎟ qui bouillonne et qui coule, |
6+6 |
a |
195 |
Pour imposer à l’or⎟ dans l’argile arrêté |
6+6 |
b |
|
La figure d’un dieu,⎟ la vie et la beauté ; |
6+6 |
b |
|
S’il faut que la souffrance⎟ enveloppe ainsi l’âme, |
6+6 |
a |
|
Qu’une chair misérable⎟ enveloppe sa flamme, |
6+6 |
a |
|
Afin de condenser⎟ sa vie et son pouvoir, |
6+6 |
b |
200 |
Pour qu’elle n’aille pas,⎟ sans force et sans vouloir, |
6+6 |
b |
|
Dans la vaste nature⎟ et ses métamorphoses, |
6+6 |
a |
|
Comme un fluide éther⎟ se perdre au sein des choses ; |
6+6 |
a |
|
Si la douleur enfin⎟ est le moule sacré |
6+6 |
b |
|
Pour cette humaine essence⎟ avec art préparé, |
6+6 |
b |
205 |
Arrache ta statue⎟ à sa prison d’argile : |
6+6 |
a |
|
Le métal dans sa forme⎟ est enfin immobile, |
6+6 |
a |
|
Ô maître ! et près de toi,⎟ de ton bras paternel, |
6+6 |
b |
|
Pose ta fille d’or⎟ sur un socle éternel ! |
6+6 |
b |
|
|
« Reçois, reçois cette âme ;⎟ elle te revient toute : |
6+6 |
a |
210 |
La douleur n’en a pas⎟ laissé perdre une goutte. |
6+6 |
a |
|
|
« Sur un globe imparfait,⎟ si c’est pour le finir, |
6+6 |
b |
|
Maître, que tu mis l’âme,⎟ elle en doit revenir ; |
6+6 |
b |
|
L’ouvrage est achevé ;⎟ l’ouvrière est assise, |
6+6 |
a |
|
Régnant sur la nature⎟ à son pouvoir conquise. |
6+6 |
a |
215 |
Vois sa main égalant⎟ les merveilles des dieux ; |
6+6 |
b |
|
Vois les lions domptés,⎟ vois les flots furieux, |
6+6 |
b |
|
Les monts portant son joug⎟ sur leurs têtes tranquilles, |
6+6 |
a |
|
Et la lyre élevant⎟ les murailles des villes. |
6+6 |
a |
|
Vois le doux olivier,⎟ parmi les blés épais, |
6+6 |
b |
220 |
Fleurir sur son passage⎟ avec l’antique paix ; |
6+6 |
b |
|
Vois serf et maître unis⎟ dans la ronde sacrée, |
6+6 |
a |
|
Ainsi qu’aux jours heureux⎟ de Saturne et de Rhée. |
6+6 |
a |
|
Vois aux sources du vrai⎟ l’homme enfin s’abreuvant, |
6+6 |
b |
|
Et l’accord fraternel⎟ de tout être vivant. |
6+6 |
b |
225 |
C’est Psyché qui marqua⎟ l’univers de ton signe. |
6+6 |
a |
|
De l’époux idéal⎟ par son cœur elle est digne ; |
6+6 |
a |
|
Sous ses doigts patients⎟ pétri jusqu’à ce jour, |
6+6 |
b |
|
Maître, le monde a pris⎟ la forme de l’amour. |
6+6 |
b |
|
Pour mériter l’hymen⎟ qu’interrompit sa faute, |
6+6 |
a |
230 |
Imaginerais-tu⎟ quelque offrande plus haute ! |
6+6 |
a |
|
|
« Ô père ! reçois donc⎟ Psyché, la veuve en pleurs. |
6+6 |
b |
|
Laisse-nous l’amener,⎟ nous, les Grâces ses sœurs ; |
6+6 |
b |
|
Nous, tes plus purs rayons ;⎟ nous, filles du sourire, |
6+6 |
a |
|
Du regard complaisant⎟ que cette âme a vu luire, |
6+6 |
a |
235 |
Quand du jeune univers⎟ tu lui faisais le don, |
6+6 |
b |
|
Quand tu jugeais ton œuvre⎟ en disant : Tout est bon ! |
6+6 |
b |
|
Nous trois qui, par la main⎟ nous tenant sur tes traces, |
6+6 |
a |
|
Secouons des parfums⎟ en tous lieux où tu passes : |
6+6 |
a |
|
Qui doucement vers toi⎟ guidons les suppliants ; |
6+6 |
b |
240 |
Qui, des belles vertus,⎟ te présentons l’encens ; |
6+6 |
b |
|
Nous, de tes dons sacrés⎟ les fidèles courrières, |
6+6 |
a |
|
Par qui la Pitié sainte⎟ et le chœur des Prières |
6+6 |
a |
|
Au mode lydien⎟ ont cadencé leur chant, |
6+6 |
b |
|
Et levé chastement⎟ leur voile en t’approchant ; |
6+6 |
b |
245 |
Nous par qui la senteur⎟ dans l’arbre s’insinue, |
6+6 |
a |
|
Et le tendre penser⎟ dans la vierge ingénue ; |
6+6 |
a |
|
Nous par qui l’âme aux yeux⎟ brille à travers le corps, |
6+6 |
b |
|
Par qui tout est rangé⎟ sous la loi des accords ; |
6+6 |
b |
|
Qui revêtons le bien⎟ de la beauté suprême : |
6+6 |
a |
250 |
Nous les trois Charités⎟ qu’on admire et qu’on aime ! » |
6+6 |
a |
|
|
Et de leur coupe pleine⎟ oublieux un moment, |
6+6 |
b |
|
Les dieux parlaient aussi⎟ pour l’amante et l’amant. |
6+6 |
b |
|
« Ouvrons, ouvrons l’Olympe⎟ à la belle mortelle, |
6+6 |
a |
|
Et que le lit d’hymen⎟ s’y prépare pour elle ; |
6+6 |
a |
255 |
Qu’Éros par ses baisers⎟ de l’exil soit guéri ; |
6+6 |
b |
|
Quand cet hôte est chagrin⎟ le ciel est assombri. |
6+6 |
b |
|
|
« Quel Dieu ne s’est troublé⎟ pour une vierge humaine |
6+6 |
a |
|
Qu’il vit porter l’amphore⎟ au bord de la fontaine, |
6+6 |
a |
|
Ou qu’il surprit sans voile⎟ à travers les roseaux, |
6+6 |
b |
260 |
Quand d’un pied rougissant⎟ elle effleurait les eaux, |
6+6 |
b |
|
Ou quand d’une voix fraîche⎟ en ses vives cadences, |
6+6 |
a |
|
Sur les gazons en fleur⎟ elle réglait les danses ! |
6+6 |
a |
|
Qui n’a sous les lauriers,⎟ et sous les grands épis, |
6+6 |
b |
|
Éveillé d’un baiser⎟ deux beaux yeux assoupis, |
6+6 |
b |
265 |
Et dormi dans la grotte,⎟ aux voluptés ouverte, |
6+6 |
a |
|
Entre deux bras d’albâtre⎟ et sur la mousse verte ? |
6+6 |
a |
|
|
« Retenu loin du ciel⎟ par d’amoureux liens, |
6+6 |
b |
|
Quel dieu n’a pas connu⎟ les champs helléniens, |
6+6 |
b |
|
Et n’a vu ni Tempé,⎟ ni la Crète aux cent villes, |
6+6 |
a |
270 |
Ni l’Arcadie aux bois⎟ odorants et tranquilles, |
6+6 |
a |
|
Ni le frais Cithéron,⎟ ni l’Égypte aux grands blés, |
6+6 |
b |
|
Ni les flancs du Taygète⎟ en cadence foulés ? |
6+6 |
b |
|
« Que de fois, s’égarant⎟ aux terrestres montagnes, |
6+6 |
a |
|
Des dieux olympiens⎟ les volages compagnes |
6+6 |
a |
275 |
Ont poursuivi d’amour⎟ les pasteurs les plus beaux, |
6+6 |
b |
|
Sous le hêtre chantant⎟ au milieu des troupeaux ! |
6+6 |
b |
|
|
« Que de fois un chasseur,⎟ au bord de l’Ërymanthe, |
6+6 |
a |
|
Implora sous l’ombrage⎟ une céleste amante, |
6+6 |
a |
|
Foulant ses javelots⎟ et son arc oubliés ! |
6+6 |
b |
280 |
Les chiens trouvaient en vain⎟ le pas des sangliers ; |
6+6 |
b |
|
Vainement fleurs et fruits⎟ jetés d’entre les saules, |
6+6 |
a |
|
Atteignaient le rêveur⎟ à ses brunes épaules : |
6+6 |
a |
|
Négligeant Amymone⎟ et le plaisir certain, |
6+6 |
b |
|
Son cœur suivait Diane⎟ et le croissant lointain. |
6+6 |
b |
|
285 |
« Que de fois, près du puits⎟ posant son urne pleine |
6+6 |
a |
|
Sur le métier oisif⎟ laissant dormir la laine, |
6+6 |
a |
|
Seule à travers les bois,⎟ et s’écartant des jeux, |
6+6 |
b |
|
D’Argos ou de Corinthe⎟ une fille aux doux yeux, |
6+6 |
b |
|
Lassant de ses mépris⎟ des amoureux sans nombre, |
6+6 |
a |
290 |
Rêva d’un jeune dieu⎟ qu’elle entrevit dans l’ombre ! |
6+6 |
a |
|
|
« Les enfants de la terre⎟ et les enfants du ciel |
6+6 |
b |
|
Se poursuivent ainsi⎟ d’un désir mutuel. |
6+6 |
b |
|
|
« Le nectar coule à flots⎟ dans nos coupes divines ; |
6+6 |
a |
|
Quel vin pareil mûrit,⎟ ô terre ! en tes collines ? |
6+6 |
a |
295 |
Et pourtant, attirés⎟ de nos palais d’azur, |
6+6 |
b |
|
Nous dirigeons nos chars⎟ vers quelque toit obscur ! |
6+6 |
b |
|
Hors des jardins féconds⎟ du céleste domaine, |
6+6 |
a |
|
Qui pousse ainsi les dieux⎟ parmi la foule humaine, |
6+6 |
a |
|
Et, quand le lit d’hymen⎟ abonde en voluptés, |
6+6 |
b |
300 |
Leur fait chercher l’amour⎟ des terrestres beautés, |
6+6 |
b |
|
Soumettre à la douleur⎟ leur nature impassible |
6+6 |
a |
|
Pour le cœur d’un enfant,⎟ quelquefois insensible ; |
6+6 |
a |
|
Subir la faim, le froid,⎟ tous les travaux du corps : |
6+6 |
b |
|
Et, sanglant, traverser⎟ le noir séjour des morts ? |
6+6 |
b |
|
305 |
« Sans doute du Destin,⎟ qui régit le ciel même, |
6+6 |
a |
|
Cet attrait invincible⎟ est une loi suprême. |
6+6 |
a |
|
Vers le séjour des dieux⎟ l’homme aspire d’en bas, |
6+6 |
b |
|
Et vers l’homme en secret⎟ les dieux portent leurs pas. |
6+6 |
b |
|
Par un désir pareil⎟ nos races attirées |
6+6 |
a |
310 |
Doivent-elles toujours⎟ être ainsi séparées ? |
6+6 |
a |
|
|
« Sans doute, pour un temps,⎟ l’homme triste et banni, |
6+6 |
b |
|
Comme nous lui manquons,⎟ manque à notre infini ; |
6+6 |
b |
|
Et votre hymen, Éros,⎟ est attendu peut-être, |
6+6 |
a |
|
Pour peupler tout le ciel⎟ et pour parfaire l’Être. |
6+6 |
a |
315 |
À l’accord idéal⎟ du chant olympien, |
6+6 |
b |
|
L’homme, pour l’achever,⎟ doit réunir le sien, |
6+6 |
b |
|
Et lier, de ses mains,⎟ en y prenant sa place, |
6+6 |
a |
|
|
Le grand cercle dansant⎟ qui tourne dans l’espace. |
6+6 |
a |
|
« Relève donc, Éros,⎟ ton front pâle et penché ; |
6+6 |
b |
320 |
Nous voulons partager⎟ le ciel avec Psyché. |
6+6 |
b |
|
Nous avons comme toi⎟ souvent gémi sur elle ; |
6+6 |
a |
|
Son sort nous est connu,⎟ nous savons qu’elle est belle. |
6+6 |
a |
|
Sèche tes yeux, Éros ;⎟ tes pleurs ont tout guéri. |
6+6 |
b |
|
Vois, le père des dieux⎟ avec nous t’a souri : |
6+6 |
b |
325 |
Car notre esprit est un,⎟ nos volontés sont unes, |
6+6 |
a |
|
Et les lois du Destin⎟ à tous nous sont communes. |
6+6 |
a |
|
Par lui souffrit Psyché ;⎟ tout ce qu’il fait est bon. |
6+6 |
b |
|
Ton hymen attend l’âme⎟ et sera son pardon ; |
6+6 |
b |
|
Au banquet immortel⎟ elle peut prendre place ; |
6+6 |
a |
330 |
Des fleurs neuves au ciel⎟ germeront sur sa trace ; |
6+6 |
a |
|
Chaque Dieu lui gardant⎟ son présent le meilleur |
6+6 |
b |
|
La voit avec tes yeux⎟ et l’aime avec ton cœur. |
6+6 |
b |
|
C’est d’elle que nous vient⎟ l’attrait plein de mystère |
6+6 |
a |
|
Qui nous invite encore⎟ à fréquenter la terre ; |
6+6 |
a |
335 |
Elle que nous cherchons ;⎟ c’est toi, bel être humain, |
6+6 |
b |
|
Que l’amour chez les dieux⎟ conduira par la main. |
6+6 |
b |
|
|
« À sentir ton retour⎟ chez nous la joie est grande : |
6+6 |
a |
|
Viens, pour se compléter,⎟ l’Olympe te demande. |
6+6 |
a |
|
Ta tâche est accomplie,⎟ et Dieu t’ouvre son sein. |
6+6 |
b |
340 |
Ton œil dans l’idéal⎟ peut plonger sans larcin ; |
6+6 |
b |
|
Un astre y brille au lieu⎟ de la lampe première. |
6+6 |
a |
|
Viens connaître l’époux⎟ sur un lit de lumière ; |
6+6 |
a |
|
Nous nous réjouissons⎟ d’entendre dans le ciel |
6+6 |
b |
|
Sur vos lèvres chanter⎟ un baiser éternel ! |
6+6 |
b |
|
345 |
« Vers la terre d’épreuve⎟ où gît ta pale amante, |
6+6 |
a |
|
Toi, vole, ô jeune Éros !⎟ sur sa tête charmante |
6+6 |
a |
|
L’extatique désir⎟ brisé dans son effort |
6+6 |
b |
|
Répand un froid sommeil⎟ avant-coureur de mort. |
6+6 |
b |
|
Serre-la dans tes bras,⎟ vole, et nous la ramène ; |
6+6 |
a |
350 |
Ses roses renaîtront⎟ au feu de ton haleine ; |
6+6 |
a |
|
Les Grâces, la prenant⎟ à la porte des cieux, |
6+6 |
b |
|
Au son des lyres d’or⎟ feront ouvrir ses yeux. » |
6+6 |
b |
|
|
|
Le père avec amour⎟ contemplait sa pensée |
6+6 |
a |
|
En sons harmonieux⎟ par ses fils retracée. |
6+6 |
a |
355 |
Ses décrets éternels⎟ par leurs voix ont parlé ; |
6+6 |
b |
|
Et le pardon promis,⎟ d’un sourire scellé, |
6+6 |
b |
|
De son front abaissé⎟ sur le dieu qui l’implore, |
6+6 |
a |
|
Comme sur un sommet⎟ le regard de l’aurore |
6+6 |
a |
|
Tombe, et de ses cheveux⎟ agités doucement, |
6+6 |
b |
360 |
L’ambrosienne odeur⎟ pleut à ce mouvement, |
6+6 |
b |
|
Et suit à flots égaux,⎟ dans la vaste étendue, |
6+6 |
a |
|
L’onduleuse clarté⎟ de ses yeux répandue. |
6+6 |
a |
|
De ces saintes lueurs⎟ l’Olympe est radieux ; |
6+6 |
b |
|
Elles ont pénétré⎟ le cœur même des dieux, |
6+6 |
b |
365 |
Et, glissant sur les flancs⎟ des hauteurs qu’ils habitent, |
6+6 |
a |
|
Dans la terrestre plaine⎟ elles se précipitent, |
6+6 |
a |
|
Portent vers les humains⎟ un message d’amour |
6+6 |
b |
|
Et du soleil antique⎟ annoncent le retour. |
6+6 |
b |
|
|
À peine ce sourire⎟ où réside la grâce |
6+6 |
a |
370 |
A du dieu père et roi⎟ fait flamboyer la face, |
6+6 |
a |
|
Le doux mot de pardon⎟ sur ses lèvres encor |
6+6 |
b |
|
Coule comme le miel⎟ versé d’une urne d’or ; |
6+6 |
b |
|
Du signe de ce front⎟ d’où la splendeur émane |
6+6 |
a |
|
L’éther oscille encore⎟ en sa mer diaphane ; |
6+6 |
a |
375 |
Et, plus vite qu’un trait⎟ de son arc d’or chassé, |
6+6 |
b |
|
Déjà vers notre monde⎟ Éros s’est élancé, |
6+6 |
b |
|
À l’épouse apportant⎟ des voluptés certaines, |
6+6 |
a |
|
Et la fin de l’espoir⎟ la plus douce des peines. |
6+6 |
a |
|
|
Au-dessus des cités,⎟ des golfes, des déserts, |
6+6 |
b |
380 |
La flamme de son aile⎟ a sillonné les airs. |
6+6 |
b |
|
Telle, au souffle d’Eurus,⎟ de pourpre et d’or chargée, |
6+6 |
a |
|
Des monts orientaux⎟ jusqu’à la mer Égée, |
6+6 |
a |
|
La nue au sein fécond⎟ vole et rougit les flots |
6+6 |
b |
|
À la fois de Samos,⎟ d’Icare et de Délos, |
6+6 |
b |
385 |
Et va, dans la même heure,⎟ ouvrir ses flots humides |
6+6 |
a |
|
Et baigner les fruits d’or⎟ au fond des Hespérides. |
6+6 |
a |
|
|
Tel, et plus promptement,⎟ vers le cœur plein d’ennui, |
6+6 |
b |
|
Vers l’amante éplorée⎟ et qui se meurt pour lui, |
6+6 |
b |
|
Descend le jeune Éros.⎟ Sur la terre émaillée, |
6+6 |
a |
390 |
Psyché gisait encor⎟ sans s’être réveillée, |
6+6 |
a |
|
Et l’aube au-dessus d’elle⎟ ouvrant ses yeux en pleurs |
6+6 |
b |
|
Mouillait son corps de marbre⎟ en abreuvant les fleurs. |
6+6 |
b |
|
|
Sur ses deux bras pliés⎟ l’époux divin l’enlève ; |
6+6 |
a |
|
Elle dormait toujours⎟ de son sommeil sans rêve ; |
6+6 |
a |
395 |
Et l’Amour, la gardant⎟ pour un réveil plus beau, |
6+6 |
b |
|
Non sans mille baisers,⎟ porte ce doux fardeau, |
6+6 |
b |
|
Par la route éthérée⎟ aux hommes interdite, |
6+6 |
a |
|
Jusqu’au sommet d’Olympe⎟ où l’idéal habite. |
6+6 |
a |
|
|
D’ineffables accords,⎟ quand ils passent le seuil, |
6+6 |
b |
400 |
Des sourires sacrés⎟ partout leur font accueil ; |
6+6 |
b |
|
Un cortège les suit⎟ où la lyre résonne. |
6+6 |
a |
|
Déposant l’âme aux pieds⎟ de celui qui pardonne, |
6+6 |
a |
|
Éros prie, attendant⎟ le regard paternel, |
6+6 |
b |
|
Le dieu qui fit les cœurs⎟ pour en peupler le ciel. |
6+6 |
b |
405 |
Pâle encore est Psyché ;⎟ près d’eux agenouillées, |
6+6 |
a |
|
Les Grâces, blanches sœurs⎟ aux paupières mouillées, |
6+6 |
a |
|
Soutiennent son beau corps.⎟ Le père souverain, |
6+6 |
b |
|
Enveloppant Psyché⎟ d’un sourire serein, |
6+6 |
b |
|
Touchant du doigt ses yeux,⎟ les rouvre ; la jeune âme |
6+6 |
a |
410 |
S’éveille et resplendit⎟ dans un cercle de flamme, |
6+6 |
a |
|
Voit l’Olympe et les dieux,⎟ et sans étonnement |
6+6 |
b |
|
L’invisible conquis⎟ et l’éternel amant. |
6+6 |
b |
|
|
|
Le Père a prononcé⎟ l’arrêt clément et juste |
6+6 |
a |
|
Qui du toit nuptial⎟ ouvre l’asile auguste ; |
6+6 |
a |
415 |
Et les époux, heureux⎟ des malheurs oubliés, |
6+6 |
b |
|
Chez les dieux à jamais⎟ par l’amour sont liés |
6+6 |
b |
|
Et les Muses en chœur⎟ disaient la chanson tendre, |
6+6 |
a |
|
Que le lit de l’hymen⎟ se réjouit d’entendre : |
6+6 |
a |
|
|
« Des longues voluptés⎟ l’asile est prêt pour vous ; |
6+6 |
b |
420 |
Une lampe sans ombre⎟ y sourit aux époux ; |
6+6 |
b |
|
Ouvrant, sans les troubler,⎟ son œil sur leurs caresses, |
6+6 |
a |
|
Elle porte un jour calme⎟ au fond de leurs ivresses. |
6+6 |
a |
|
|
« Là, tout désir sans voile⎟ est saint par son ardeur. |
6+6 |
b |
|
Viens, jeune âme, les dieux⎟ ignorent la pudeur : |
6+6 |
b |
425 |
L’homme la connaît seul.⎟ Amours, beautés humaines, |
6+6 |
a |
|
Redoutent la clarté⎟ comme des ombres vaines. |
6+6 |
a |
|
|
« Là-bas, voir c’est douter,⎟ c’est désirer le mieux ; |
6+6 |
b |
|
L’amour doit s’y garder⎟ de l’atteinte des yeux. |
6+6 |
b |
|
C’est par l’endroit secret,⎟ voilé toujours en elle, |
6+6 |
a |
430 |
Que toute beauté plaît,⎟ et qu’elle reste belle. |
6+6 |
a |
|
Le soleil n’y paraît⎟ que d’ombres entouré. |
6+6 |
b |
|
Là, le cœur est puni⎟ s’il a trop aspiré. |
6+6 |
b |
|
Aux voluptés sans fin⎟ la force se refuse ; |
6+6 |
a |
|
L’attrait meurt du plaisir,⎟ la lèvre aux baisers s’use ; |
6+6 |
a |
435 |
Le corps se meurtrit même⎟ aux roses des coussins ; |
6+6 |
b |
|
Les travaux de l’hymen⎟ déforment les beaux seins ; |
6+6 |
b |
|
En des yeux alanguis⎟ s’éteint la jeune grâce, |
6+6 |
a |
|
Et du front qui charmait⎟ l’enchantement s’efface. |
6+6 |
a |
|
Alors, le cœur s’affaisse⎟ et s’enfuit l’idéal, |
6+6 |
b |
440 |
Comme un feu trop subtil⎟ pour ce faible métal, |
6+6 |
b |
|
Qui dans l’urne fragile⎟ allumé par surprise, |
6+6 |
a |
|
Sous ses flots jaillissants⎟ la fait fondre ou la brise. |
6+6 |
a |
|
« Au pays d’où tu viens,⎟ tout désir fort et grand, |
6+6 |
b |
|
Toute soif de bonheur,⎟ est un mal dévorant ; |
6+6 |
b |
445 |
Une amour combattue,⎟ aussi bien qu’assouvie, |
6+6 |
a |
|
Ravage également⎟ les sources de la vie. |
6+6 |
a |
|
Mais dans l’Olympe, oh ! viens⎟ t’abreuver de ce feu : |
6+6 |
b |
|
Il consume un mortel,⎟ mais il fait vivre un dieu. |
6+6 |
b |
|
|
« Viens boire à ce torrent⎟ sans fin et sans mesure. |
6+6 |
a |
450 |
S’abstenir fut la loi⎟ de l’humaine nature. |
6+6 |
a |
|
Mais, ô déesse ! viens,⎟ cœur d’amour altéré, |
6+6 |
b |
|
Viens, et plonge en délire⎟ au fond du flot sacré ! |
6+6 |
b |
|
|
« L’astre qui luit là-bas⎟ sur la terre profonde |
6+6 |
a |
|
Flétrit s’il fait éclore,⎟ et brûle s’il féconde ; |
6+6 |
a |
455 |
L’ombre seule conserve⎟ aux zéphyrs de demain |
6+6 |
b |
|
La fleur dont l’aube ouvrit⎟ les lèvres de carmin. |
6+6 |
b |
|
Ainsi les fleurs de l’âme⎟ ont besoin du mystère |
6+6 |
a |
|
Pour garder plus d’un jour⎟ leur éclat solitaire. |
6+6 |
a |
|
|
« Mais chez les dieux, l’amour,⎟ ce soleil infini, |
6+6 |
b |
460 |
Père de la beauté,⎟ n’a jamais rien terni. |
6+6 |
b |
|
Quand un rameau languit,⎟ son regard le relève ; |
6+6 |
a |
|
Il y verse à la fois⎟ la chaleur et la sève ; |
6+6 |
a |
|
Et l’arbre en un matin⎟ ouvre tous ses bourgeons |
6+6 |
b |
|
Sans crainte de tarir⎟ aux futures saisons. |
6+6 |
b |
|
465 |
« Sans réserve et sans voile⎟ ici les cœurs se livrent ; |
6+6 |
a |
|
Sans lasser les époux,⎟ leurs bonheurs les enivrent ; |
6+6 |
a |
|
Rien ne redoute en vous⎟ le doigt ni le flambeau ; |
6+6 |
b |
|
Le millième baiser⎟ pour vous sera nouveau. |
6+6 |
b |
|
|
« L’amant vient revêtu⎟ de sa seule lumière |
6+6 |
a |
470 |
Vers la couche de pourpre,⎟ où, montant la première, |
6+6 |
a |
|
L’amante de ses bras⎟ qu’elle dénoue enfin, |
6+6 |
b |
|
Sur les pieds d’or du lit⎟ laisse tomber le lin. |
6+6 |
b |
|
|
« Ah ! tu peux à présent⎟ rassasier ta vue |
6+6 |
a |
|
De la divine forme⎟ autrefois entrevue. |
6+6 |
a |
475 |
Approche-toi, Psyché,⎟ de ton céleste amant ; |
6+6 |
b |
|
Qu’il soit ton seul spectacle⎟ et ton seul vêtement. |
6+6 |
b |
|
Toi, jeune Éros, répands⎟ tes parfums et l’enivre, |
6+6 |
a |
|
Elle qui vit par toi,⎟ comme elle te fait vivre ; |
6+6 |
a |
|
Et que le soleil vrai,⎟ saint, fécond, immortel, |
6+6 |
b |
480 |
Ravonnant sur ta couche,⎟ ô couple aimé du ciel ! |
6+6 |
b |
|
Sur ton amour unique⎟ aux douceurs variées, |
6+6 |
a |
|
Fasse germer l’émail⎟ des fleurs multipliées. |
6+6 |
a |
|
Mêlez-vous l’un à l’autre,⎟ et pour l’éternité, |
6+6 |
b |
|
Sur un lit radieux,⎟ ô vous, Amour, Beauté ! » |
6+6 |
b |
|
485 |
Hors du cercle des dieux,⎟ dont les graves sourires |
6+6 |
a |
|
Les suivent longuement⎟ avec la voix des lyres, |
6+6 |
a |
|
Glissent les deux époux⎟ vers les toits retirés |
6+6 |
b |
|
Que leur garde l’Hymen⎟ au fond des bois sacrés. |
6+6 |
b |
|
Se tenant par la main,⎟ ils vont : les hautes branches |
6+6 |
a |
490 |
S’inclinent pour toucher⎟ à leurs épaules blanches. |
6+6 |
a |
|
|
Tels on voit s’enfoncer⎟ à travers les roseaux |
6+6 |
b |
|
Deux cygnes amoureux⎟ balancés sur les eaux ; |
6+6 |
b |
|
Tels s’effacent au loin⎟ ces deux corps pleins de grâces |
6+6 |
a |
|
Dans les arbustes verts⎟ refermés sur leurs traces ; |
6+6 |
a |
495 |
Et la grande foret,⎟ ouvrant sa profondeur, |
6+6 |
b |
|
Du couple nuptial⎟ a voilé la splendeur. |
6+6 |
b |
|
|
Quel mode de la lyre,⎟ et quelle voix humaine |
6+6 |
a |
|
Dira du lit d’hymen⎟ où ton dieu te ramène, |
6+6 |
a |
|
Ô Psyché ! la douceur⎟ et les ravissements, |
6+6 |
b |
500 |
Après l’exil souffert,⎟ les discours des amants, |
6+6 |
b |
|
La sainte volupté⎟ déliant leurs ceintures, |
6+6 |
a |
|
L’intime fusion⎟ des divines natures, |
6+6 |
a |
|
Et par les nœuds riants⎟ des baisers infinis |
6+6 |
b |
|
L’Amour et la Beauté⎟ dans la lumière unis ? |
6+6 |
b |
505 |
Celui-là pourrait seul⎟ en retracer quelque ombre |
6+6 |
a |
|
Dont la bouche, abondante⎟ en puissances sans nombre, |
6+6 |
a |
|
Saurait fondre et mêler,⎟ dans l’or de ses chansons, |
6+6 |
b |
|
À la fois des clartés,⎟ des parfums et des sons, |
6+6 |
b |
|
Et dérobant au ciel⎟ la forme inaccessible, |
6+6 |
a |
510 |
Rendre à chacun des sens⎟ la parole visible. |
6+6 |
a |
|
Mais quel artiste ainsi⎟ montre à l’homme charmé, |
6+6 |
b |
|
L’idéal tout entier⎟ dans son verbe enfermé ? |
6+6 |
b |
|
Celui-là, qui de l’être⎟ écrivant le poème, |
6+6 |
a |
|
Dans l’espace rempli⎟ vit en son œuvre même. |
6+6 |
a |
|
|
515 |
Or, les Heures, portant⎟ deux vases inégaux |
6+6 |
b |
|
Qui versent aux mortels⎟ et les biens et les maux, |
6+6 |
b |
|
Autour du genre humain⎟ tournaient dans la durée |
6+6 |
a |
|
D’un pas sombre ou brillant⎟ par elle mesurée ; |
6+6 |
a |
|
Et l’ivresse d’hymen,⎟ si rapide chez nous, |
6+6 |
b |
520 |
Coulait intarissable⎟ aux célestes époux ; |
6+6 |
b |
|
Et dans leur âme encor⎟ vierge après ces délices, |
6+6 |
a |
|
L’amour éternisait⎟ la douceur des prémices. |
6+6 |
a |
|
|
Sans qu’un instant jamais⎟ de la main ou des yeux |
6+6 |
b |
|
L’époux quittât l’épouse,⎟ en ces bois merveilleux, |
6+6 |
b |
525 |
Où l’ombrage odorant⎟ luit de leurs auréoles, |
6+6 |
a |
|
Souvent ils s’en allaient,⎟ échangeant leurs paroles. |
6+6 |
a |
|
L’Olympe recueillait⎟ leur souffle dans ses fleurs, |
6+6 |
b |
|
Et le bruit de leur voix⎟ dans ses oiseaux chanteurs. |
6+6 |
b |
|
|
À travers les clartés⎟ d’une existence neuve, |
6+6 |
a |
530 |
Psyché revoit les temps⎟ du deuil et de l’épreuve ; |
6+6 |
a |
|
Le présent s’embellit⎟ de tous les maux passés, |
6+6 |
b |
|
Des tableaux de l’exil⎟ à l’époux retracés ; |
6+6 |
b |
|
Et l’âme, alors, planant⎟ d’une sphère plus haute, |
6+6 |
a |
|
Rend grâce du bonheur⎟ à la première faute. |
6+6 |
a |
|
535 |
« Oh ! comme ton regard,⎟ séchant mes yeux en pleurs, |
6+6 |
b |
|
A tari vite en moi⎟ la source des douleurs ! |
6+6 |
b |
|
Comme il a dissipé⎟ la nuit et ses mensonges, |
6+6 |
a |
|
Et fait fuir tous mes maux⎟ dans le pays des songes ! |
6+6 |
a |
|
|
« Laisse de tes rayons⎟ mon cœur enveloppé ! |
6+6 |
b |
540 |
Des neiges de l’exil⎟ pauvre oiseau tout trempé, |
6+6 |
b |
|
Frileux, et tout meurtri⎟ par les vents et les grêles, |
6+6 |
a |
|
Ce doux soleil essuie⎟ et réchauffe mes ailes. |
6+6 |
a |
|
|
« Regarde-moi toujours !⎟ C’est à travers tes yeux |
6+6 |
b |
|
Que coule en mon esprit⎟ la lumière des cieux ; |
6+6 |
b |
545 |
C’est par leurs rayons seuls⎟ que s’allume la flamme |
6+6 |
a |
|
Pour s’élancer vers toi⎟ du foyer de mon âme. |
6+6 |
a |
|
|
« Reste sous mes regards,⎟ comme moi sous les tiens ! |
6+6 |
b |
|
Si ta vie est ma vie,⎟ et si tu m’appartiens, |
6+6 |
b |
|
Laisse errer sur ton sein⎟ mes yeux que tu ranimes ; |
6+6 |
a |
550 |
Ouvre-moi de ton cœur⎟ les asiles intimes. |
6+6 |
a |
|
Posséder tout l’Olympe,⎟ être immortel et roi, |
6+6 |
b |
|
Être heureux, ô mon Dieu !⎟ ce n’est que voir en toi ! |
6+6 |
b |
|
|
« Mais moi, pour satisfaire⎟ à ta vue éternelle, |
6+6 |
a |
|
Me suis-je assez parée,⎟ et rendue assez belle ? |
6+6 |
a |
555 |
Suis-je pour quelque chose⎟ au moins dans ton bonheur ? |
6+6 |
b |
|
T’ai-je payé celui⎟ que tu mets dans mon cœur ? |
6+6 |
b |
|
Pour valoir à tes yeux,⎟ pour gagner quelques charmes, |
6+6 |
a |
|
Je recommencerais⎟ et la vie et mes larmes ! |
6+6 |
a |
|
|
« Bénie entre les nuits,⎟ celle où mon jeune instinct |
6+6 |
b |
560 |
M’arma de ce flambeau⎟ voulu par le Destin, |
6+6 |
b |
|
Troubla de ses lueurs⎟ nos voluptés obscures, |
6+6 |
a |
|
Et conquit l’avenir⎟ en bravant les augures ; |
6+6 |
a |
|
Et, même entre tes bras,⎟ me lassant du plaisir, |
6+6 |
b |
|
D’un hymen plus parfait⎟ mit en moi le désir ! |
6+6 |
b |
|
565 |
« Si le bonheur des sens⎟ eût dompté ton amante, |
6+6 |
a |
|
De l’ivresse du corps⎟ et de l’ombre contente ; |
6+6 |
a |
|
Si, pour un temps, mon cœur⎟ de ton âme altéré, |
6+6 |
b |
|
Du miel de tes baisers⎟ n’avait été sevré, |
6+6 |
b |
|
Psyché ne connaîtrait⎟ qu’à travers les ténèbres |
6+6 |
a |
570 |
Son dieu toujours voilé⎟ par des terreurs funèbres ; |
6+6 |
a |
|
Et, d’un étroit jardin⎟ faisant son univers, |
6+6 |
b |
|
N’eût jamais vu l’Olympe⎟ et ses palais ouverts ! |
6+6 |
b |
|
Jamais, en toi plongeant,⎟ ce cœur qui te pénètre |
6+6 |
a |
|
Ne se fût à loisir⎟ enivré de ton être ! |
6+6 |
a |
|
575 |
« T’admirer longuement,⎟ jouir de nos amours |
6+6 |
b |
|
Sans qu’ils soient divisés⎟ par des nuits ou des jours ; |
6+6 |
b |
|
Boire avec toi du ciel⎟ l’extase ardente et pure, |
6+6 |
a |
|
Sans que le Temps avare⎟ à nos cœurs la mesure : |
6+6 |
a |
|
N’être avec toi qu’un dieu !⎟… je le dois à l’orgueil |
6+6 |
b |
580 |
Qui, dans l’antique nuit,⎟ de mon âme ouvrit l’œil ; |
6+6 |
b |
|
Et, las de tout plaisir⎟ que le soleil n’éclaire, |
6+6 |
a |
|
Accepta la douleur⎟ au prix de la lumière. |
6+6 |
a |
|
« Peut-être un cœur plus humble⎟ et par les sens guidé, |
6+6 |
b |
|
Satisfait de l’époux⎟ à demi possédé, |
6+6 |
b |
585 |
Sans chercher de l’amour⎟ l’entière plénitude, |
6+6 |
a |
|
De l’ombre et du sommeil⎟ eût gardé l’habitude. |
6+6 |
a |
|
Mais un esprit plus fier⎟ habita dans mon sein, |
6+6 |
b |
|
Et tu choisis Psyché⎟ pour un plus grand dessein. |
6+6 |
b |
|
Goûter dans l’ignorance⎟ une volupté molle, |
6+6 |
a |
590 |
C’est le lot du troupeau⎟ des êtres sans parole, |
6+6 |
a |
|
De l’argile pétrie,⎟ en qui ne vit nul feu ; |
6+6 |
b |
|
Il fallait autre chose⎟ à l’amante d’un dieu ! |
6+6 |
b |
|
|
« J’ai bien maudit ma lampe⎟ et la clarté nouvelle, |
6+6 |
a |
|
Car en moi la douleur⎟ s’introduisit par elle. |
6+6 |
a |
595 |
L’heure où je l’allumai⎟ reçut un nom fatal ; |
6+6 |
b |
|
La science passa⎟ pour la mère du mal, |
6+6 |
b |
|
Et de l’orgueil sacré⎟ la terre fit un crime. |
6+6 |
a |
|
Mais, pour le ciel conquis,⎟ pour notre hymen sublime, |
6+6 |
a |
|
Pour le flot de splendeur⎟ qui m’inonde aujourd’hui, |
6+6 |
b |
600 |
Je bénis cet orgueil,⎟ car tout est né de lui ! |
6+6 |
b |
|
|
« Désirs, brûlants désirs⎟ de sentir, de connaître, |
6+6 |
a |
|
Par qui Psyché monta⎟ vers les sources de l’être ; |
6+6 |
a |
|
Orgueil, ô Volupté !⎟ soif des biens infinis, |
6+6 |
b |
|
Vous, blasphémés jadis,⎟ enfin, soyez bénis ! |
6+6 |
b |
605 |
Du triste genre humain⎟ le malheur vous accuse ; |
6+6 |
a |
|
Mais le désir demeure,⎟ et la souffrance s’use. |
6+6 |
a |
|
Désirs, vous êtes saints ;⎟ car saint est votre but ; |
6+6 |
b |
|
Et l’Olympe, après tout,⎟ vous doit payer tribut. |
6+6 |
b |
|
À travers tous les maux,⎟ l’homme est né pour vous suivre ; |
6+6 |
a |
610 |
Avant vous j’existais,⎟ et vous m’avez fait vivre ! |
6+6 |
a |
|
|
« Dans la première nuit⎟ je ramperais encor, |
6+6 |
b |
|
Orgueil et Volupté,⎟ sans vos deux ailes d’or. |
6+6 |
b |
|
|
« Jouissant du bonheur⎟ de l’aveugle matière, |
6+6 |
a |
|
L’hymen ne m’eût montré⎟ que sa forme grossière ; |
6+6 |
a |
615 |
J’ignorerais encor⎟ ses secrets les plus doux, |
6+6 |
b |
|
Et je ne verrais pas⎟ que j’ai dieu pour époux ! |
6+6 |
b |
|
Par vous, ô saints désirs,⎟ sur la terre inféconde, |
6+6 |
a |
|
Un éclair descendu⎟ révèle un meilleur monde. |
6+6 |
a |
|
Tout ce qui vit, par vous⎟ arrive au port caché. |
6+6 |
b |
620 |
Par vous, le seuil des dieux⎟ s’est ouvert à Psyché ; |
6+6 |
b |
|
Et l’amant idéal,⎟ cédant à votre audace, |
6+6 |
a |
|
À l’amante mortelle⎟ a dévoilé sa face. » |
6+6 |
a |
|
|
Entre les jeux, souvent,⎟ les baisers, le repos, |
6+6 |
b |
|
Mêlant le discours grave⎟ et les tendres propos, |
6+6 |
b |
625 |
Comme sur l’oranger⎟ aux branches étoilées |
6+6 |
a |
|
Avec l’or des fruits mûrs⎟ les jeunes fleurs mêlées, |
6+6 |
a |
|
À la langue du ciel⎟ empruntant ses doux sons, |
6+6 |
b |
|
L’épouse se parait⎟ d’abondantes chansons. |
6+6 |
b |
|
|
Déployant sur son cœur⎟ les caresses divines, |
6+6 |
a |
630 |
Comme de chauds rayons⎟ sur les vertes collines, |
6+6 |
a |
|
L’époux lui répondait,⎟ et versait à son tour |
6+6 |
b |
|
Le chaste enivrement⎟ des paroles d’amour. |
6+6 |
b |
|
Non, jamais au printemps,⎟ quand la vierge encor pure, |
6+6 |
a |
|
S’abreuve de l’espoir⎟ qu’exhale la nature, |
6+6 |
a |
635 |
Et des premiers aveux,⎟ avec l’air plein d’encens, |
6+6 |
b |
|
Aspire la musique⎟ à travers tous ses sens ; |
6+6 |
b |
|
Même à l’heure où, laissant⎟ tomber ses bras pudiques |
6+6 |
a |
|
Éperdue, elle cède⎟ aux prières magiques ; |
6+6 |
a |
|
Où tous les sons divins,⎟ voix des flots, bruit du vent, |
6+6 |
b |
640 |
Tout semble avoir passé⎟ dans la voix de l’amant, |
6+6 |
b |
|
Jamais femme ici-bas⎟ n’ouït choses pareilles |
6+6 |
a |
|
À la voix, ô Psyché !⎟ qui charmait tes oreilles ! |
6+6 |
a |
|
|
Leur extase ainsi coule⎟ en paisibles discours, |
6+6 |
b |
|
Comme un flot non troublé,⎟ mais qui parle en son cours : |
6+6 |
b |
645 |
Et chaque heure embellit⎟ ce fleuve au bord sonore |
6+6 |
a |
|
Des mille fleurs sans nom⎟ que le ciel voit éclore. |
6+6 |
a |
|
Tantôt des voluptés⎟ les asiles lointains |
6+6 |
b |
|
Abritent leur amour ;⎟ ou, dans les gais festins, |
6+6 |
b |
|
Parmi les immortels⎟ qui cherchent leur sourire, |
6+6 |
a |
650 |
Ils échangent tous deux⎟ et la coupe et la lyre ; |
6+6 |
a |
|
Ou la flûte conduit⎟ leurs pas entrelacés |
6+6 |
b |
|
Sur les modes divers⎟ à la danse tracés. |
6+6 |
b |
|
|
Tantôt penchés ensemble⎟ au bord des sources vives, |
6+6 |
a |
|
Ils tiennent sur les flots⎟ leurs âmes attentives ; |
6+6 |
a |
655 |
Des nids et des bourgeons⎟ surprenant les secrets, |
6+6 |
b |
|
Ils écoutent germer⎟ les célestes forêts. |
6+6 |
b |
|
Convive du nectar,⎟ à l’Amour même unie, |
6+6 |
a |
|
Psyché revêt des dieux⎟ la nature infinie. |
6+6 |
a |
|
Tous ses jours, mesurés⎟ comme on mesure au ciel, |
6+6 |
b |
660 |
Ne forment qu’un instant,⎟ mais il est éternel. |
6+6 |
b |
|
Sans s’épuiser jamais⎟ aux plaisirs qu’elle goûte |
6+6 |
a |
|
Des biens déjà sentis⎟ la volupté s’ajoute ; |
6+6 |
a |
|
Et, des fleuves d’en haut⎟ merveilleux réservoir, |
6+6 |
b |
|
Son cœur toujours rempli,⎟ peut toujours recevoir. |
6+6 |
b |
|
|
665 |
Or, selon les destins,⎟ Psyché devint féconde, |
6+6 |
a |
|
Et l’épouse d’Éros⎟ mit une fille au monde, |
6+6 |
a |
|
Enfant donnée aux cieux⎟ pour en charmer la paix, |
6+6 |
b |
|
Mais cachée aux mortels⎟ sous des voiles épais. |
6+6 |
b |
|
Sans jamais l’entrevoir,⎟ nous aspirons vers elle ; |
6+6 |
a |
670 |
Du peuple des vivants,⎟ c’est la soif éternelle, |
6+6 |
a |
|
L’attrait par qui tout être⎟ au but est excité ; |
6+6 |
b |
|
Mais l’homme n’en sait rien⎟ que son nom : Volupté ! |
6+6 |
b |
|
Nom qu’usurpent chez nous⎟ d’éphémères ivresses ! |
6+6 |
a |
|
Nul n’en goûte ici-bas⎟ les suprêmes caresses ; |
6+6 |
a |
675 |
Elle habite un Olympe⎟ à l’abri du désir ; |
6+6 |
b |
|
On n’en voit rien que l’ombre⎟ à travers le plaisir. |
6+6 |
b |
|
L’amour seul, aux instants⎟ d’extase la plus pure, |
6+6 |
a |
|
En révèle à nos cœurs⎟ l’idée encore obscure. |
6+6 |
a |
|
|
ÉPILOGUE |
|
Chaque fois que je vis,⎟ rêveur adolescent, |
6+6 |
b |
680 |
Comme une aube aux doux feux,⎟ mais éteinte en naissant |
6+6 |
b |
|
Flotter à l’horizon⎟ ta robe purpurine, |
6+6 |
a |
|
Soudain au fond du ciel,⎟ sur la vague marine, |
6+6 |
a |
|
Tes pieds comme un éclair⎟ glissaient, ô Volupté ! |
6+6 |
b |
|
Et, sur la pale mer,⎟ alors, de mon côté, |
6+6 |
b |
685 |
Une figure en deuil⎟ s’avançait à ta place : |
6+6 |
a |
|
Sa grande ombre effaçait⎟ les roses de ta trace. |
6+6 |
a |
|
L’ache et le nénuphar,⎟ dans ses cheveux séchés, |
6+6 |
b |
|
Se posaient sur mon front⎟ en couronne attachés. |
6+6 |
b |
|
Autour d’elle un essaim⎟ de noires mélodies |
6+6 |
a |
690 |
Heurtait en voltigeant⎟ mes tempes engourdies ; |
6+6 |
a |
|
Et comme un flot des mers⎟ affaissé sous son poids, |
6+6 |
b |
|
Mon cœur cessait de battre⎟ au toucher de ses doigts. |
6+6 |
b |
|
|
Sombre Mélancolie !⎟ ô fatale déesse |
6+6 |
a |
|
Qu’à sa place en fuyant⎟ la Volupté nous laisse, |
6+6 |
a |
695 |
De tes pavots amers⎟ goutte à goutte abreuvé, |
6+6 |
b |
|
Nul homme plus que moi⎟ sur ton sein n’a rêvé ; |
6+6 |
b |
|
Nul n’a vu si souvent,⎟ frappé de ton vertige, |
6+6 |
a |
|
Fruits ou fleurs avorter⎟ dès qu’il touchait leur tige ; |
6+6 |
a |
|
Nul, malgré les rayons⎟ pendant l’aube aperçus, |
6+6 |
b |
700 |
N’a plus d’ombre en son âme⎟ et plus d’espoirs déçus ; |
6+6 |
b |
|
Nul n’a mieux, en tout temps,⎟ reconnu sur sa voie |
6+6 |
a |
|
La tristesse présente⎟ au fond de toute joie. |
6+6 |
a |
|
|
Mais oublie, ô poète !⎟ et monte avec tes vers, |
6+6 |
b |
|
Puisqu’ils portent Psyché⎟ dans un autre univers ; |
6+6 |
b |
705 |
Puisqu’au nombre des dieux⎟ tu l’as déjà placée, |
6+6 |
a |
|
Ah ! parle-nous du ciel⎟ sans arrière-pensée ! |
6+6 |
a |
|
Parle-nous d’idéal,⎟ de l’époux inconnu, |
6+6 |
b |
|
Et du jour de l’hymen,⎟ qu’il soit ou non venu ! |
6+6 |
b |
|
Oublie une heure encore,⎟ et fais trêve à la plainte. |
6+6 |
a |
710 |
Laisse arriver à nous⎟ l’écho de l’hymne sainte |
6+6 |
a |
|
Qu’à la fille d’Ëros,⎟ tout étant consommé, |
6+6 |
b |
|
Au bruit des lyres d’or,⎟ dit l’Olympe charmé. |
6+6 |
b |
|
Le chœur olympien,⎟ voix suprême du monde, |
6+6 |
a |
|
Chante, ô couple attendu !⎟ sur ta couche féconde : |
6+6 |
a |
715 |
Car le retour de l’âme⎟ à l’époux amoureux |
6+6 |
b |
|
Nous réjouit autant,⎟ nous parfaits, nous les dieux, |
6+6 |
b |
|
Impassibles, sereins,⎟ éternels que nous sommes, |
6+6 |
a |
|
Que l’aube réjouit⎟ la tristesse des hommes. |
6+6 |
a |
|
|
Le ciel même, ô Psyché !⎟ s’éclaire à ton regard. |
6+6 |
b |
720 |
Déjà depuis mille ans⎟ convives du nectar, |
6+6 |
b |
|
Nous en goûtions l’ivresse⎟ et tu n’étais pas née : |
6+6 |
a |
|
Et pourtant chez les dieux⎟ ta beauté ramenée |
6+6 |
a |
|
Ajoute à ce bonheur⎟ à qui rien ne manquait. |
6+6 |
b |
|
Tu fixeras Ëros⎟ au céleste banquet. |
6+6 |
b |
725 |
Notre vie est en lui,⎟ nous respirons sa flamme ; |
6+6 |
a |
|
Par lui nous t’épousons,⎟ et nous t’aimons, jeune âme ! |
6+6 |
a |
|
Tout être a tressailli⎟ du baiser nuptial |
6+6 |
b |
|
Qui relie en vous deux⎟ la terre et l’idéal ; |
6+6 |
b |
|
Et, des mêmes désirs⎟ calmant les saintes fièvres, |
6+6 |
a |
730 |
L’homme et dieu dans le ciel⎟ s’embrassent par vos lèvres ; |
6+6 |
a |
|
|
Ce berceau nous sourit⎟ d’une fille par vous, |
6+6 |
b |
|
Parure de l’Olympe,⎟ enfant chéri de tous, |
6+6 |
b |
|
Né de la Beauté même,⎟ avec l’Amour unie. |
6+6 |
a |
|
Volupté, Volupté,⎟ doux fruit de l’harmonie ! |
6+6 |
a |
735 |
Joyeux autour de toi,⎟ des plus belles chansons |
6+6 |
b |
|
Chacun te salûra ;⎟ comme au jour des moissons |
6+6 |
b |
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Un chœur sacré, de fleurs⎟ couronné pour la danse, |
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Chante autour de Cérès⎟ espoir de l’abondance. |
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Dieux des bois, dieux des mers,⎟ rentrez, ô dieux épars ! |
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Dieu qui dans l’air guidez⎟ l’or brûlant de vos chars, |
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Dieux répandus partout,⎟ l’Olympe vous rappelle ; |
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Revenez, saluez⎟ la déesse nouvelle ! |
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Des vieux chênes, des flots,⎟ des antres souterrains, |
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Dieux, ministres de l’Être,⎟ ô Cyclopes, Sylvains, |
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Nymphes, Zéphyrs, Tritons,⎟ dieux légers, dieux énormes, |
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Esprits universels⎟ qui supportez les formes : |
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Rentrez dans votre ciel,⎟ dieux exilés là-bas ! |
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Et vous, Titans, l’Olympe⎟ est ouvert sans combats ! |
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Entre les dieux rivaux,⎟ toute haine s’oublie ; |
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Leur chaîne par tes mains⎟ à ses deux bouts se lie, |
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Ô Psyché ! toi par qui⎟ l’amour est triomphant ! |
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La ronde au pied sonore⎟ entoure ton enfant, |
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Et la couvre de fleurs,⎟ et chante, et la dit reine, |
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Et respire à longs traits⎟ sa grâce souveraine. |
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Esprits des éléments,⎟ loin du foyer bannis, |
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Chantez, ô dieux ! chantez,⎟ vos travaux sont finis ! |
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Esprits du feu, de l’air,⎟ de la terre et des fleuves, |
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Serfs ou tyrans de l’homme,⎟ instruments des épreuves, |
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Par qui l’âme a senti,⎟ souffert, lutté, vaincu, |
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Venez ! assez de jours⎟ la Discorde a vécu. |
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L’amour a tout guéri ;⎟ l’être a retrouvé l’être ; |
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Cet hymen est fécond,⎟ Volupté vient de naître ! |
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Elle rassemble autour⎟ de son berceau sacré |
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Le grand peuple des dieux⎟ pour un temps séparé. |
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Prenez-vous par la main,⎟ formez la danse unique, |
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Chantez à l’unisson⎟ l’éternelle musique. |
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Dans l’Olympe natal⎟ revenez tous, ô Dieux ! |
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Comme y revient Psyché.⎟ Flots épars en tous lieux |
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Où l’exilée a bu,⎟ revenez à la source. |
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Oiseaux, rentrez au nid.⎟ Rayons qui de sa course |
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Éclairiez les détours,⎟ ô peuple universel ! |
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Rentrez dans l’unité⎟ de l’astre paternel. |
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Et vous, voiles, tombez ;⎟ songes, vapeurs, chimères, |
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Pales ombres de l’être,⎟ ô formes éphémères ! |
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Ô voiles de l’époux,⎟ l’âme a su vous percer. |
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Sur son sein qu’à loisir⎟ elle peut embrasser, |
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Elle voit désormais⎟ l’éternelle substance, |
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Et l’amour la nourrit⎟ sans fin de son essence ; |
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Elle touche au réel.⎟ Apparences, tombez ! |
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À toi vont tous les flots,⎟ en un flot absorbés, |
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Ô vaste Olympe ! étends⎟ tes plaines sans limite, |
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Puisque l’amour brisa⎟ ta barrière interdite. |
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Tout un peuple t’arrive ;⎟ oh ! pour le recevoir, |
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Grandis, sois infini⎟ comme était son espoir ! |
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Ouvre à tous les vivants⎟ ta voûte heureuse et sainte ; |
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Rien ne doit exister⎟ par delà ton enceinte. |
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Vous, mondes ; vous, soleil ;⎟ toi, globe des humains, |
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Germes errants dans l’air⎟ sans trouver vos chemins, |
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Âmes des feux éteints,⎟ fleurs sèches, races mortes, |
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Venez à flots pressés,⎟ l’Olympe ouvre ses portes ; |
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Habitez en un seul⎟ réunis pour toujours ; |
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Il n’est plus aujourd’hui⎟ deux peuples, deux séjours : |
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Ici joie et clarté ;⎟ là souffrance et mystère, |
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Dans l’azur un Olympe⎟ et dans l’ombre une terre. |
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Pour l’éternel palais⎟ de l’Être universel, |
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Il n’est plus qu’un seul monde,⎟ et ce monde est le Ciel. |
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Dans l’Olympe nouveau⎟ que toute vie habite ! |
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Vers votre enfant, Ëros,⎟ l’heureux peuple gravite. |
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Règne, ô fille d’amour !⎟ sur le chaos dompté ; |
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Règne dans l’harmonie,⎟ ô sainte Volupté ! |
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Et toi meurs, ô Douleur !⎟ vieille reine des hommes ! |
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Leur terre est arrivée⎟ avec eux où nous sommes : |
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Tout vit là d’où jamais⎟ tu ne pus approcher : |
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Quel asile te reste,⎟ ô Mal ! pour t’y cacher ? |
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Meurs ! Psyché brave ici⎟ ta poursuite fatale ; |
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Le dieu qui la rend mère⎟ en a fait son égale. |
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Meurs ! La Volupté nait⎟ de leur hymen puissant. |
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Tu ne fus rien, ô Mal !⎟ que l’idéal absent, |
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Et caché par l’époux⎟ aux âmes qu’il éprouve ; |
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Tu n’es rien, maintenant⎟ que Psyché le retrouve, |
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Rien près de cette couche,⎟ aux transports infinis, |
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Où l’éternel baiser⎟ les garde réunis. |
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Meurs donc ! Mais, ô Douleur !⎟ simple absence de l’être, |
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Tu n’as pas à mourir,⎟ ô Mal ! pour disparaître. |
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Qu’es-tu ? vide et néant,⎟ ombre sans fixité |
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Des choses que le jour⎟ frappait d’un seul côté. |
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Meurs ! Tout baigne aujourd’hui⎟ dans la clarté suprême, |
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Et l’être abonde ici,⎟ c’est un monde où l’on aime ; |
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Monde en qui tout afflue⎟ et qui contient tous lieux. |
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Expire donc, ô Mal !⎟ il n’est plus que des dieux ! |
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b |
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mètre |
profil métrique : 6+6
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