Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAP_14/LAP212
Victor de LAPRADE
VARIA
1844-1879
VII
A LA PROVENCE
Puisque assis au foyer de tes chaudes collines, 6+6 a
J'en ai bu les parfums dans l'or de ton soleil, 6+6 b
Puisque tes pins, touchés par les brises marines. 6+6 a
Bercent si doucement mon rêve ou mon sommeil ; 6+6 b
5 Puisqu'en me réchauffant, comme eût fait une mère, 6+6 a
A ton hôte engourdi tu rends force et gaîté, 6+6 b
Je dois, en mes adieux, selon le vieil Homère, 6+6 a
Payer d'une chanson ton hospitalité. 6+6 b
N'es-tu pas, à l'égal de la blonde Ionie. 6+6 a
10 Riche de l'olivier, de la vigne et du miel ; 6+6 b
N'offres-tu pas, comme elle, aux pinceaux du génie 6+6 a
L'azur au bord des mers, la pourpre au fond du ciel ? 6+6 b
A l'abri de tes caps ruisselants de lumière, 6+6 a
Heureux de contempler des horizons connus, 6+6 b
15 Les fils des Phocéens, debout sur leur galère. 6+6 a
Dans le golfe natal se croyaient revenus. 6+6 b
Tes coteaux verdoyants sous le myrte et l'acanthe. 6+6 a
Pareils aux coteaux grecs en ont reçu les noms ; 6+6 b
Et tes rochers de marbre à la cime éclatante 6+6 a
20 Semblent faits pour porter aussi des Parthénons 6+6 b
Sous ton ciel, qui des mers enflamme l'étendue, 6+6 a
D'Athènes à Sunium on croit errer encor ; 6+6 b
La Muse ionienne est chez toi descendue ; 6+6 a
Elle vient m'y parler devant les îles d'Or. 6+6 b
25 Elle habite à jamais ton rivage, ô Provence ; 6+6 a
Elle y donne à tes fils, comme aux Grecs leurs aïeux, 6+6 b
Le fleuve du parler et la vive éloquence, 6+6 a
Et l'âme qui s'épanche à flots mélodieux. 6+6 b
Comme l'huile et le vin coulent de tes amphores. 6+6 a
30 Tes chantres, à ton ciel empruntant ses couleurs. 6+6 b
Sèment, à pleines mains, les riches métaphores : 6+6 a
Leurs faciles chansons naissent comme tes fleurs. 6+6 b
Ton azur plus profond fait leurs ailes plus grandes. 6+6 a
Chez toi, sous ton soleil, le long des chênes verts, 6+6 b
35 Dans l'air tout embaumé de sauges, de lavandes, 6+6 a
J'ai senti de mon cœur voler mes premiers vers. 6+6 b
J'avais couvé longtemps, sous mon ciel incolore ; 6+6 a
Mes pensers endormis par la morne saison ; 6+6 b
Dans ma terre natale ils germaient sans éclore : 6+6 a
40 Ta lumière a percé leur humide prison. 6+6 b
Depuis qu'à tes rayons j'ai vu s'ouvrir mon âme, 6+6 a
La neige et le brouillard n'ont pu la refermer ; 6+6 b
Quand mon corps s'allanguit et quand s'éteint ma flamme, 6+6 a
A ton foyer connu je viens tout rallumer. 6+6 b
45 Car tu m'as conservé des amitiés sacrées, 6+6 a
De chastes oasis habités à vingt ans. 6+6 b
Des souvenirs, pareils à tes cimes dorées. 6+6 a
Qui brillent, comme toi, d'un éternel printemps. 6+6 b
Sans y trouver de cœur ou de saison contraire, 6+6 a
50 Dans tes heureux jardins je fais d'amples moissons ; 6+6 b
De poète en poète accueilli comme un frère, 6+6 a
J'échange avec tes fils mon cœur et mes chansons. 6+6 b
Tu fis naître pour moi, sur tes plages sereines, 6+6 a
Ce frère harmonieux', aux splendides couleurs, 6+6 b
55 Qui sait rendre à tes flots la voix de leurs Syrènes 6+6 a
Et l'accent de Virgile à tes bruns Laboureurs. 6+6 b
Mêlant tous deux notre âme et nos rêves sans nombre 6+6 a
Dans ces chants alternés à la Muse si chers, 6+6 b
L'élégant Phocéen parle au Druide sombre : 6+6 a
60 Moi je dis les grands bois, et lui les blondes mers. 6+6 b
Vers ton soleil, ainsi, lorsque je m'oriente, 6+6 a
Quand le morne brouillard étend chez moi son deuil, 6+6 b
La poésie en fleurs, l'amitié souriante, 6+6 a
Sous ton ciel sans hivers, viennent me faire accueil. 6+6 b
65 En tes fleurs, ô Provence, eu tes fils que j'embrasse. 6+6 a
En tes mille vaisseaux voguant vers l'avenir. 6+6 b
En tes flots, en tes monts dentelés avec grâce, 6+6 a
A l'heure des adieux, laisse-moi te bénir. 6+6 b
Chez toi, sur ces sommets qui surplombent la grève 6+6 a
70 Où le myrte jaillit du rocher qui se fend, 6+6 b
Je veux dresser ma tente… au moins j'en fais le rêve. 6+6 a
Car j'y devins poète et presque ton enfant. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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