Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LAP_12/LAP158
Victor de LAPRADE
TRIBUNS ET COURTISANS
1875
L'ALCADE DE TAMPICO
LE VOYAGE DU PRINCE
COMÉDIE EN CINQ ACTES
PERSONNAGES
ZAPATA, alcade, puis gouverneur et duc de Tampico.
Le Docteur PÉDRO-GIRON, médecin.
CARDENIO.
SIDRACH-BEN-BARUCH, banquier.
OLYMPIA.
LA MARQUISE.
LA PRÉSIDENTE.
LA DIRECTRICE.
Les Membres de l'Ayuntamiento de Tampico, Foule de Bourgeois et de Gens du peuple.
Plusieurs Dames.
La scène se passe dans le nouveau monde. 1851.
ACTE PREMIER
Chez l'alcade ZAPATA.
SCÈNE PREMIÈRE
ZAPATA, LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON, CARDENIO
ZAPATA à Cardenio
Mon manifeste est prêt,je le signe à l'instant : 6+6 a
C'est concis et c'est fier…Vous en serez content. 6+6 a
Lisant.
« Citoyens, un tyranque le Mexique abhorre 6+6 a
A des forfaits nouveauxse préparait encore ; 6+6 a
5 Par un indigne couplonguement médité, 6+6 a
Don Pèdre allait chez noustuer la liberté. 6+6 a
Un héros a surgi !dans sa juste colère, 6+6 a
Alvarez réveillale lion populaire : 6+6 a
On combattit trois jours.— Le peuple a triomphé ! 6+6 a
10 Nos droits sont à l'abri,le monstre est étouffé. 6+6 a
Levons-nous ! imitonscet élan magnifique. 6+6 a
Alerte ! et crions tous :« Vive la république ! » 6+6 a
CARDENIO
Très bien !
LE DOCTEUR
Très bien ! Pourtantsi c'était que de moi, 6+6 a
J'ôterais ces gros mots ;j'en suspecte l'emploi. 6+6 a
15 Il est moins de héros,de monstres qu'on ne pense ; 6+6 a
Le succès fait souventtoute la différence. 6+6 a
Regardez bien l'enverset retournez le gant ; 6+6 a
Hélas ! que de hérossont doublés d'un brigand ! 6+6 a
CARDENIO
Diable de modéré !tais-toi, tu me désoles ; 6+6 a
Laisse-nous donc agir…
LE DOCTEUR
20 Oui, pas tant de paroles. 6+6 a
CARDENIO
Veux-tu me reprochermon métier de rimeur ? 6+6 a
Je viens de l'arsenal…
ZAPATA
Je vais chez l'imprimeur. 6+6 a
LE DOCTEUR
Va vite ! — et que chacunretienne bien son rôle, 6+6 a
L'éloquent ZAPATAportera la parole ; 6+6 a
25 Nous ! prenons le fusil…C'est un bon argument, 6+6 a
Pour qui sait en user,peuple ou gouvernement. 6+6 a
Ils sortent.
SCÈNE II
ZAPATA seul
Au fait, Je vais courirune grosse aventure, 6+6 a
Nous brûlons nos vaisseaux…Bah ! la nouvelle est sûre ; 6+6 a
Trois courriers coup sur coupm'ont dit l'événement, 6+6 a
30 Dans le parti vainqueurrisquons-nous hardiment. 6+6 a
SCÈNE III
ZAPATA, SIDRACH-BEN-BARUCH.
SIDRACH
Vous savez la nouvelle,alcade ?
ZAPATA
Eh ! je suppose 6+6 a
Qu'étant premier édile,on en sait quelque chose. 6+6 a
Mais, tout va pour le mieux,n'ayez aucune peur, 6+6 a
La crise est solennelle,on est à sa hauteur. 6+6 a
35 A tout événementon saura faire face, 6+6 a
Lisez d'abord cecice n'est qu'une préface. 6+6 a
SIDRACH, parcourant le discours
« Citoyens ! un tyran» Le terme est assez doux ! 6+6 a
« Vive la république !» donc en êtes-vous ? 6+6 a
« Le peuple a triomphé.» C'est de l'histoire ancienne 6+6 a
40 Sa montre est, je le vois,en retard sur la mienne. 6+6 a
ZAPATA
Quoi ! le peuple n'a pas…? ai-je bien entendu ? 6+6 a
Et son vaillant tribun?
SIDRACH
Mon cher, il est pendu. 6+6 a
ZAPATA
Alvarez ?
SIDRACH
En personne.
ZAPATA,
Et don Pèdre ?
SIDRACH
Il se nomme. 6+6 a
Dictateur, protecteur,empereur, roi, grand homme. 6+6 a
ZAPATA
45 Impossible ! il étaithier battu, traqué, 6+6 a
Sans le sou ; pour l'Europeil s'était embarqué 6+6 a
SIDRACH
Ajoutez qu'il s'étaitenfui par la fenêtre. 6+6 a
ZAPATA
Du palais et des fortsle peuple était le mtre 6+6 a
SIDRACH
Je le sais comme vous ;j'en fus presque témoin, 6+6 a
50 Mais les gouvernementsreviennent de très loin ; 6+6 a
La nôtre est de retour…
ZAPATA
Ne me faites pas rire. 6+6 a
SIDRACH
Non, vous ne rirez pas ;car je vais tout vous dire : 6+6 a
L'émeute, il est très vrai,grossissant dans son cours 6+6 a
Mtresse de la ville,a dominé trois jours ; 6+6 a
55 Alvarez a parlébien mieux que Démosthènes ; 6+6 a
On a tout proclamé,l'âge d'or, Rome, Athènes, 6+6 a
La vertu, le travail,les nègres libérés. 6+6 a
Le partage des biens…tout ce que vous voudrez 6+6 a
Or pendant ce temps-làl'infortuné monarque 6+6 a
60 Au camp le plus voisindescendait de sa barque, 6+6 a
Et, rentré dans la villeavec dix régiments, 6+6 a
Il venait couper courtà ces beaux sentiments. 6+6 a
A l'heure je vous parle,en frais de politesse, 6+6 a
Les grands corps de l'Étatharanguent Son Altesse ; 6+6 a
65 Ce n'était qu'un héros,le voilà passé dieu 6+6 a
On exile beaucoupet l'on pend quelque peu ; 6+6 a
Nous en pourrons jugertout à l'heure en province. 6+6 a
ZAPATA
Vous vous moquez de moi !
SIDRACH
Nous avons un grand prince. 6+6 a
Les fonds ont remontébien au-dessus du pair. 6+6 a
ZAPATA,
De grâce, expliquez-vous !
SIDRACH
70 Mais mon langage est clair. 6+6 a
Je suis très désoléque cela vous effraie : 6+6 a
Comme on dit aujourd'hui,c'est la vérité vraie. 6+6 a
ZAPATA
Mais d' la savez-vous,le chemin est coupé ? 6+6 a
SIDRACH
Mes pigeons voyageursne m'ont jamais trompé. 6+6 a
ZAPATA
Alors je suis perdu !
SIDRACH
75 Votre fortune est faite. 6+6 a
Mon cher, mais seulementne perdons pas la tête. 6+6 a
Vous n'êtes pas un sot ?
ZAPATA
Je suis trop compromis ; 6+6 a
Tous mes antécédents,ce discours, mes amis… 6+6 a
SIDRACH
Allons au plus pressé ;voyons cette harangue : 6+6 a
80 La langue peut guérirle mal qu'a fait la langue. 6+6 a
Ce terrible papierest resté dans vos mains ? 6+6 a
ZAPATA
Je venais de le lire,hélas ! à deux Romains ! 6+6 a
SIDRACH
Il n'est pas affiché ?… Bah ! dans ces conjonctures, 6+6 a
J'ai vu d'honnêtes gensnier leurs signatures. 6+6 a
85 Nous n'en sommes pas là !mais il faut se presser. 6+6 a
Ceci n'est qu'un brouillonqu'on doit recommencer ; 6+6 a
Le plus simple écoliern'y verrait pas mystère : 6+6 a
C'est un devoir mal faitqu'il s'agit de refaire. 6+6 a
Ce n'est pour vous qu'un jeuvous écrivez si bien. 6+6 a
ZAPATA, la tête dans ses mains
90 Mon cher, je ne me sensplus capable de rien. 6+6 a
Un si brusque retour !j'en ai l'âme obsédée ! 6+6 a
Je ne pourrais, ce soir,accoucher d'une idée. 6+6 a
SIDRACH
Vous allez me forcerà devenir auteur… 6+6 a
Remplissons mes devoirsenvers un débiteur. 6+6 a
95 Voyons !… mais vous tiendrezla plumeau moins, cher mtre. 6+6 a
Donnez-moi ce brouillon,il m'aidera peut-être. 6+6 a
ZAPATA
Maudit papier ! laissezque je le jette au feu. 6+6 a
SIDRACH, prenant le papier
Non, donnez-leÉcrivezet calmez-vous un peu. 6+6 a
Il dicte. Zapata écrit.
« Citoyens ! un hérosque le Mexique adore, 6+6 a
100 A des exploits nouveauxse préparait encore 6+6 a
Par un coup généreuxlonguement médité, 6+6 a
Don Pèdre allait chez nousfonder la liberté. 6+6 a
Un brigand a surgi !dans sa lâche colère, 6+6 a
Alvarez déchnale tigre populaire 6+6 a
105 On combattit trois jours ;le prince a triomphé ! 6+6 a
Nos droits sont à l'abri,le monstre est étouffé. 6+6 a
Reposons-nous enfin,la terre est affranchie ; 6+6 a
Du calme, et crions tous :Vive la monarchie ! » 6+6 a
ZAPATA
Est-ce bien sérieux ?
SIDRACH
N'est-ce pas très ronflant ? 6+6 a
110 Je vous en garantisl'effet mirobolant. 6+6 a
Faites vite afficher.
ZAPATA
Quel homme de ressource ! 6+6 a
SIDRACH
Voilà, mon cher, commenton se forme à la Bourse. 6+6 a
ZAPATA
Quoi ! dans le même jour,passer du noir au blanc ! 6+6 a
A tous mes ennemisje prêterais le flanc ; 6+6 a
115 me cacher aprèsune telle aventure ? 6+6 a
SIDRACH
Sous un bel uniformeau fond d'une voiture, 6+6 a
Muni d'un grand cordonet d'un gros traitement.. 6+6 a
Et tous vos ennemisvous trouveront charmant. 6+6 a
ZAPATA
J'entends crier d'icitoute ma vieille bande. 6+6 a
SIDRACH
120 Bah ! vous leur donnerezleur part du dividende ! 6+6 a
ZAPATA
Ou s'indignera trop,je ne veux pas signer. 6+6 a
SIDRACH
Ce siècle a trop bon cœurpour jamais s'indigner. 6+6 a
De plus huppés que vousont fait pareille chose. 6+6 a
C'est le même morceau,seulement je transpose : 6+6 a
125 C'était pour baryton,je le mets pour ténor ! 6+6 a
Sur cette gamme-là,mon cher, il vaut de l'or. 6+6 a
Je m'y connais ! Allons,citoyen magnanime, 6+6 a
Prenez des actionsdans le nouveau régime ; 6+6 a
J'en ai pris.
ZAPATA
Laissez-moi !je serais un coquin ! 6+6 a
130 Car, enfin, dans le fond,je suis républicain. 6+6 a
SIDRACH
Moi, communisteAu fondl'on garde ce qu'on pense ; 6+6 a
Dans la forme, évitonsl'exil et la potence ; 6+6 a
Et tâchons, quels que soientles vainqueurs, les vaincus, 6+6 a
De sauver, d'augmenter,s'il se peut, nos écus. 6+6 a
ZAPATA
Affreux juif !
SIDRACH
135 Cher ami !calculons notre affaire. 6+6 a
ZAPATA
Je crains que mon calculdu vôtre ne diffère, 6+6 a
SIDRACH,
C'est vrai, vous empruntez,je prête. Mais je veux 6+6 a
Votre succès à vous ;c'est le bien de tous deux. 6+6 a
Si vous êtes pendu,proscrit, pauvre et malade, 6+6 a
140 Si de ce mauvais trouvous restez l'humble alcade, 6+6 a
C'est trois cent mille écusque j'y perds, sûrement ; 6+6 a
Donc, je dois travaillerà votre avancement. 6+6 a
Dans l'ère nous entronsj'ai mis des espérances ; 6+6 a
Je la crois très propiceaux hommes de finances. 6+6 a
145 Puis, je vous l'avrai,— car je suis bon enfant, — 6+6 a
J'avais pris les billetsdu héros triomphant. 6+6 a
Je risquais cent contre un,et d'assez rondes sommes ; 6+6 a
Mais tous mes débiteursdeviennent de grands hommes. 6+6 a
A votre tour, ami,montez sur le pavoi ! 6+6 a
ZAPATA
150 Laissons ces rêves d'or,tout est fini pour moi ; 6+6 a
Je me tiens pour contentde sauver ma personne. 6+6 a
SIDRACH
Elle vaut peu, vraiment,les soins qu'elle vous donne ! 6+6 a
C'est donc comme celaqu'on sait se retourner ? 6+6 a
Vous ! un homme d'esprit…mais c'est à le berner ! 6+6 a
ZAPATA
155 Comprenez donc, mon cher,j'ai des notes sinistres : 6+6 a
J'abats depuis quinze ansdes rois et des ministres, 6+6 a
J'étais né radical,j'ai crié, j'ai mordu 6+6 a
Sur mes antécédentsje dois être pendu. 6+6 a
SIDRACH
Il en est à ce pointque je lui vais apprendre 6+6 a
160 Le prix d'un tel passéquand on sait bien le vendre ; 6+6 a
Mais je donnerais, moi,quatre cent mille francs 6+6 a
Pour avoir autrefoisdévoré des tyrans. 6+6 a
Plus on revient de loin,et mieux on vous accueille. 6+6 a
Je vais être baronj'aurais un portefeuille, 6+6 a
165 Je serais prince et duc,quatre fois enrichi, 6+6 a
Je serais grand viziret grand mamamouchi ! 6+6 a
ZAPATA
Tout cela ne m'est rien !survivant d'un autre âge. 6+6 a
Au moins sauvons l'honneur,je veux finir en sage 6+6 a
SIDRACH
Digne d'un grand journal !Mais, sans vous offenser. 6+6 a
170 Mon cher, c'était par làqu'il fallait commencer. 6+6 a
Pour devenir Brutusil faut s'y prendre jeune ; 6+6 a
Il faut s'y préparerlonguement par le jne. 6+6 a
Quand on veut cultiverdes sentiments si beaux, 6+6 a
On vit de brouet noir,on porte des sabots ; 6+6 a
175 On plante des navetsdans son petit domaine ; 6+6 a
On courtise Toinonet non pas Célimène ; 6+6 a
On ne se meuble pascomme dans un palais… 6+6 a
Et l'on n'emprunte pas,pour des chevaux anglais, 6+6 a
Ces trois cent mille écusdont j'ai l'acte authentique 6+6 a
ZAPATA
180 Qu'a cela de communavec la politique ? 6+6 a
SIDRACH
Le voici : c'est qu'au boutarrivent les huissiers ; 6+6 a
D'argent il en vient peudans les métiers grossiers, 6+6 a
Dans la littératureet dans le jardinage 6+6 a
Les bons coups sont toujourspour un gros personnage ; 6+6 a
185 Il faut le devenir.On fut grand citoyen 6+6 a
On se fait courtisan,c'est le meilleur moyen. 6+6 a
Qu'importe que l'on aitles mains plus ou moins nettes ? 6+6 a
Il s'agit d'être ducou prisonnier pour dettes. 6+6 a
ZAPATA
Retire-toi, Satan !
SIDRACH
Le voilà converti ! 6+6 a
190 Allons, c'est convenu,nous changeons de parti. 6+6 a
Le nouvel arrivantpaye à ravir son monde ; 6+6 a
Puis votre noir passévaut une somme ronde. 6+6 a
On a besoin de vous,on veut un orateur ; 6+6 a
Vous n'avez pas acquistoute votre hauteur ; 6+6 a
195 Vous monterez très haut,j'en ai ferme assurance. 6+6 a
Si vous n'êtes pas duc,je vous donne quittance ! 6+6 a
Signez-moi ce discours,il aura de l'écho ; 6+6 a
Nous allons en couvrirles murs de Tampico. 6+6 a
ZAPATA
Laissez-moi respirer !
SIDRACH. Entre Olympia
C'est trop juste. Et du reste 6+6 a
200 Un ange me remplace,un envoyé céleste. 6+6 a
Qui connt mieux que moile chemin de ce cœur. 6+6 a
A Olympia.
Princesse, je vous laisseavec votre vainqueur ; 6+6 a
Je le prêchais en vain,ma prose l'importune ; 6+6 a
Obtenez qu'il consenteà faire sa fortune. 6+6 a
OLYMPIA
205 Comment ! il se refuseà suivre vos avis ? 6+6 a
SIDRACH
Belle inhumaine, et vous,les avez-vous suivis ? 6+6 a
Il lui baise la main et sort.
SCÈNE IV
ZAPATA, OLYMPIA.
ZAPATA
Ce juif prend avec vousdes façons singulières. 6+6 a
OLYMPIA
Vous en êtes jaloux !… C'est mon homme d'affaires : 6+6 a
Brave homme et très connude nos jeunes lions ; 6+6 a
Il a quatorze enfants…
ZAPATA
210 Et deux cents millions ! 6+6 a
OLYMPIA
Tant mieux pour vous, je crois…mais pas d'enfantillage 6+6 a
Faites ce qu'il vous dit,ce doit être fort sage. 6+6 a
ZAPATA,
Il veut qu'en un clin d'œil,trtre à nos libertés, 6+6 a
Je passe au camp du prince
OLYMPIA
Eh bien, vous hésitez ! 6+6 a
215 Quel fol entêtementvous lie aux entreprises 6+6 a
D'un tas de gens grossierssans gants et sans chemises, 6+6 a
Un homme comme vous,si bien fait pour la cour ! 6+6 a
Toi, mon chéri, galantet beau comme le jour ! 6+6 a
Quand tu peux devenir,en suivant ta nature, 6+6 a
220 Riche comme Sidrach…c'est moi qui te l'assure. 6+6 a
ZAPATA
Toujours rêvant de luxeet d'or, c'est affligeant ! 6+6 a
Moi, je pense à ma gloire,et vous à mon argent. 6+6 a
OLYMPIA
Quelqu'un ici se trompeet la chose est fort drôle, 6+6 a
Il me semble, monsieur,que nous changeons de rôle. 6+6 a
225 Lequel de nous fit partà l'autre de ses biens ? 6+6 a
Sidrach a ses huissiers…j'ai peut-être les miens. 6+6 a
ZAPATA
C'est donc une rupture ?
OLYMPIA
Impossible, on vous aime ! 6+6 a
On t'aime avec fureur,ingrat, et pour toi-même. 6+6 a
On te veut grand, cossu,pourvu d'un haut emploi. 6+6 a
230 Titré… puis partagercette gloire avec toi ; 6+6 a
Se dire avec orgueil :Je l'ai connu bien mince. 6+6 a
Et je trône, à son bras,dans les salons du prince. 6+6 a
ZAPATA
Beau rêve, Olympia !
OLYMPIA
Qui sera vérité. 6+6 a
Va, tu réussiras,tu l'as bien mérité. 6+6 a
235 J'ai mes pressentiments,à moi, que rien n'écarte 6+6 a
J'ai sept fois ce matintourné la bonne carte, 6+6 a
— Ne me désole pasavec cet air moqueur, — 6+6 a
Et j'amenais toujoursla réussite en cœur ! 6+6 a
Grande prospérité !
ZAPATA
Ne crois pas que j'y compte, 6+6 a
240 Je t'aime et j'obéis !plus de mauvaise honte. 6+6 a
C'est trop d'avoir le princeet ce juif sur les bras ; 6+6 a
Vive le dictateur !… tout ce que tu voudras ; 6+6 a
Je mets ma politiqueà tes genoux.
OLYMPIA, l'embrassant
Cher ange ! 6+6 a
Et tu m'épouseras ?
Entre Sidrach.
SIDRACH, sur le seuil de la porte
Pardon, je vous dérange 6+6 a
245 Mais tout, chance et péril,à chaque instant s'accrt. 6+6 a
Ne perdez plus une heure,acclamez le bon droit. 6+6 a
Un ami me prévient,— qui jamais ne me trompe, — 6+6 a
Que le prince est sacréce soir en grande pompe. 6+6 a
On se prosterne en fouleà ses pieds vénérés, 6+6 a
250 — L'archevêque primatet quatre cents curés ; — 6+6 a
Il est huilé, chantétout au long dans la messe, 6+6 a
Du temple au corps de garde,enfin, c'est une ivresse. 6+6 a
Mais ce qui nous importe,à nous, c'est que, demain, 6+6 a
Pour visiter son peupleil se met en chemin ; 6+6 a
255 Et notre bonne villeest, dit-on, la première 6+6 a
Qu'il a daigné marquersur son itinéraire. 6+6 a
Il viendra. Rien enfinne peut plus se cacher. 6+6 a
Vite votre discours,et qu'on aille afficher ; 6+6 a
Faites battre la caisseet réunir la troupe ; 6+6 a
260 Tout va bien !… Vous avez,mon cher, le vent en poupe. 6+6 a
OLYMPIA
Raillerez-vous encorla réussite en cœur ? 6+6 a
ZAPATA
Eh bien, soit ! jetons-nousdans le parti vainqueur. 6+6 a
Tendant le discours à Sidrach.
Emportez ce rouleau.
SIDRACH élève dans sa main et agite le rouleau
Louons la Providence, 6+6 a
Elle a mis dans nos mainsla corne d'abondance- 6+6 a
ACTE II
La salle des séances de l'Ayuntamiento de Tampico,
SCÈNE PREMIÈRE
ZAPATA, CARDENIO, LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON, LES AUTRES MEMBRES DE L'AYUNTAMIENTO.
ZAPATA, assis devant le bureau
265 Messieurs, un grand bonheuret très bien mérité, 6+6 a
Un grand jour va bientôtbriller pour la cité. 6+6 a
L'homme prodigieuxpar qui Dieu nous gouverne, 6+6 a
Le héros, le géantde l'époque moderne, 6+6 a
Le soleil… vers nos mursa dirigé ses pas ; 6+6 a
270 Il y fera sa siesteet cinq ou six repas. 6+6 a
C'est un lot sans pareil,c'est une gloire insigne ; 6+6 a
Tampico, par vos soins,saura s'en montrer digne, 6+6 a
Les transports de la fouleet son enivrement 6+6 a
Seront réglés par vous,messieurs, très largement ; 6+6 a
275 S'ils baissaient d'un degrédans leur température. 6+6 a
De notre part, à nous,ce serait forfaiture. 6+6 a
Donc, nous allons dresserun programme inouï ; 6+6 a
Des fêtes dont le mondeentier soit ébloui ; 6+6 a
Qui portent jusqu'au ciella gloire du Mexique, 6+6 a
280 Qui soient dignes, enfin,de notre grand cacique. 6+6 a
Songez-y mûrement !rien ne doit vous troubler 6+6 a
Et quiconque m'approuvea le droit de parler. 6+6 a
TOUS, excepté Cardenio et le docteur
Très bien ! très bien ! très bien !
ZAPATA
Voyons, faites vos preuves, 6+6 a
Et pour ce cas nouveautrouvez des choses neuves. 6+6 a
UN MEMBRE DE l'AYUNTAMIENTO
Le soir, bal…
UN AUTRE
285 Le matin,revue et Te Deum. 6+6 a
UN AUTRE
Grand défilé du peupleà travers le Forum. 6+6 a
UN AUTRE,
Btes, feu d'artifice
UN AUTRE
Et des mâts de cocagne. 6+6 a
UN AUTRE, s'animant
Les fontaines versantà flots du vin d'Espagne !… 6+6 a
UN AUTRE
Un orchestre en plein ventjouant des boléros… 6+6 a
UN AUTRE
Hymen d'une rosière
UN AUTRE
290 Et combat de taureaux… 6+6 a
UN AUTRE
Illuminations…
UN AUTRE
Cortège au son des trompes, 6+6 a
Des chevaliers de l'arc,des pompiers et des pompes. 6+6 a
LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON
Si les pompes lançaientde l'eau de Portugal ? 6+6 a
UN AUTRE
Ou de l'eau de Cologne ?
UN AUTRE
Oui !
UN AUTRE
Non !
UN AUTRE
Mais c'est égal ! 6+6 a
UN AUTRE
295 Moi, j'aimerais à voirtoutes les devantures 6+6 a
Couvertes, ce jour-là,d'innombrables tentures. 6+6 a
UN AUTRE
C'est vieux ; l'eau de Cologneétait une primeur. 6+6 a
Au précédent.
Monsieur est tapissier ?
LE PRÉCÉDENT
Monsieur est parfumeur ? 6+6 a
ZAPATA
Je tranche le débatpar l'essence de rose 6+6 a
300 Et la discussions'échauffant reste close. 6+6 a
Maintenant, il s'agit,et c'est le point urgent, 6+6 a
De voter comme il fautla question d'argent. 6+6 a
UN MEMBRE DE L'AYUNTAMIENTO
Un million.
UN AUTRE
Deux !
UN AUTRE
Trois !
UN AUTRE
Quatre.
UN AUTRE
Cinq.
UN AUTRE
Six,
LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON
Quarante ! 6+6 a
ZAPATA, d'un air profondément blesse
Je vous croyais, messieurs,d'humeur moins défiante. 6+6 a
305 Manqué-je de sagesseou bien de probité ? 6+6 a
Qu'est-ce enfin qu'un crédits'il n'est illimité ? 6+6 a
Je le sens ! un affrontcontre moi se médite, 6+6 a
La grandeur de cet hommea-t-elle une limite ? 6+6 a
Nos respects, notre amour,si l'on fait son devoir, 6+6 a
310 Et nos crédits, grand Dieu !peuvent-ils en avoir ? 6+6 a
Ce coup des factions,messieurs, m'est par trop rude ; 6+6 a
Je ne m'attendais pasà cette ingratitude ! 6+6 a
Puisque d'administreron m'ôte tout moyen, 6+6 a
J'abdique et ne suis plusqu'un simple citoyen. 6+6 a
315 Si Tampico s'exposeà de pareilles notes. 6+6 a
Qu'on demande un alcadeau club des sans-culottes ! 6+6 a
UN MEMBRE DE L'AYUNTAMIENTO
Qu'allons-nous devenir !
UN AUTRE
Mon Dieu !
UN AUTRE
C'est fait de nous ! 6+6 a
UN AUTRE
Ah ! monsieur.
UN AUTRE
Monseigneur !
UN AVOCAT,
On est à vos genoux ! 6+6 a
Vous avez mal comprisnos votes unanimes ; 6+6 a
320 La langue est pauvre en motspour les choses sublimes. 6+6 a
On dit un million,quaranteassurément 6+6 a
C'est pour dire beaucoup,sans nombre, infiniment, 6+6 a
Tant que vous en voudrezc'est le sens véritable. 6+6 a
ZAPATA
Soit ! je m'étais trompé.Mais la stupeur m'accable ! 6+6 a
325 Les partis vont saisirtous ces souons en l'air. 6+6 a
Qu'on tâche de parleret de voter plus clair 6+6 a
Et plus rapidement !Messieurs, le temps nous presse. 6+6 a
Suivons l'ordre du jour,rédigeons une adresse, 6+6 a
Chacun peut librementdiscuter les projets. 6+6 a
330 Voici le mien : « Seigneur,vos très humbles sujets… » 6+6 a
CARDENIO, l'interrompant
Pardon ! car jusqu'au boutje ne puis pas me taire ; 6+6 a
Voici le mien ; j'y vaistout droit sans commentaire. 6+6 a
Lisant.
« Prince, vous pouvez tout ;la force est dans vos mains. 6+6 a
Je n'examine pluspar quels ou quels chemins 6+6 a
335 A surgi votre étoile,ou hasard, ou génie 6+6 a
Vous voilà tout-puissant,aveugle qui le nie. 6+6 a
Rien du passé, plus rien,hors vous et votre nom, 6+6 a
Rien ne subsiste encorque le droit du canon. 6+6 a
Jamais fils de cent rois,plus libre de tout faire 6+6 a
340 N'a pu mieux à son grépétrir un hémisphère, 6+6 a
Et tenir en suspens,arbitre du destin, 6+6 a
La perte ou le salutsur le monde incertain. 6+6 a
Le soldat vous rugit,le prêtre vous acclame. 6+6 a
De qui résiste au ferl'or a fait plier l'âme, 6+6 a
345 Et l'on nous dit, à nous,qui saurions tout braver : 6+6 a
« Son pouvoir vient de Dieu.» Tâchez de le prouver ! 6+6 a
Dieu règne, il a voulurégner sans violence, 6+6 a
Il n'a pesé sur nousque par la conscience ; 6+6 a
Il n'attend rien de nous,ni le bien ni le mal. 6+6 a
350 Que librement donnépar ce fier tribunal ; 6+6 a
Il veut que, pour sa perteou son bonheur suprême, 6+6 a
Chacun soit ici-basl'artiste de lui-même. 6+6 a
Ainsi des nations !Qui donc parle aujourd'hui 6+6 a
De faire un pays libreen se passant de lui ? 6+6 a
355 La liberté, pareilleà la vertu du sage, 6+6 a
S'acquiert par la conquêteet grandit par l'usage ; 6+6 a
Et l'on ne monte passans s'efforcer en rien. 6+6 a
Par le métier d'esclaveau rang de citoyen. 6+6 a
Un roi n'y peut aiderque par le bon exemple : 6+6 a
360 Il marche le premier,on suit, on le contemple : 6+6 a
Montrant justice et forceaux cœurs irrésolus ; 6+6 a
Qu'il respecte le droit,il ne peut rien de plus. 6+6 a
Oui, prince, et désormaisje te donne ce titre. 6+6 a
Le droit, le droit chancelle,on t'a pris pour arbitre ; 6+6 a
365 Ce peuple hésite encore,il suffit d'une main 6+6 a
Qui le pousse vers Dieupar le seul vrai chemin. 6+6 a
Nos destins devant toise pèsent en silence. 6+6 a
Mets des vertus et nondu fer dans la balance. 6+6 a
Tu n'es fort, et ton règne,enfin, ne s'accomplit, 6+6 a
370 Que pour prêter ta forceà tout ce qui faiblit. 6+6 a
Regarde ! est-ce le malou le bien qui succombe ? 6+6 a
Vois ces vieilles vertus,on leur creuse une tombe ; 6+6 a
Vois s'en vont l'honneur,!a fierté, le serment ; 6+6 a
Tout se dore, aujourd'hui,tout se farde et tout ment. 6+6 a
375 Vois tous ces insensés,épris de ce qui brille. 6+6 a
Vendre à ce luxe impurle pain de leur famille. 6+6 a
Vois le sol, qu'on arracheà nos champs désertés 6+6 a
Devenir une fangeau milieu des cités. 6+6 a
Vois ce peuple, orgueilleuxd'un facile courage, 6+6 a
380 Si prompt à se ruerdans un lâche esclavage. 6+6 a
Chacun, impatientde la vertu d'autrui. 6+6 a
Est heureux d'abaisserles autres jusqu'à lui, 6+6 a
Ne veut que des égaux,fussent-ils des esclaves, 6+6 a
Et les sayons jalouxrognent les laticlaves. 6+6 a
385 Petit ou grand, chacunfuit son libre manoir, 6+6 a
Le sillon de l'aïeulqui ne rend qu'un pain noir ; 6+6 a
Sous un gant jaune il tendsa main déshonorée. 6+6 a
Tout friand d'un gâteaumangé sous la livrée. 6+6 a
Oui, ce peuple avili,qui se dit souverain, 6+6 a
390 A besoin d'un hérosmodelé dans l'airain ; 6+6 a
Il a besoin d'avoir,et j'approuve qu'il l'aime. 6+6 a
Un homme qui soit roi,qui règne sur lui-même, 6+6 a
Qui refuse le joug,qui se courbe au devoir, 6+6 a
Un héros libre, enfin,plus grand que son pouvoir. 6+6 a
395 Donne-leur donc l'exempleet remplis notre attente : 6+6 a
Il suffit d'écarterle démon qui les tente. 6+6 a
De n'accepter pour toini l'or ni les flatteurs ; 6+6 a
Car nul n'est corrompus'il n'est des corrupteurs. 6+6 a
Tu ne peux suppléeren nous la force absente ; 6+6 a
400 Fais qu'on ne sente pasta main toute-puissante, 6+6 a
Mais qu'à l'égal d'un roichacun soit respecté 6+6 a
Dans le plus humble effortque fait sa liberté. 6+6 a
Chacun est sous son toitou de cèdre ou de chaume, 6+6 a
Un prince, et de Dieu seulil tient ce doux royaume ; 6+6 a
405 Qu'il le sache et soit fier,et qu'il marche debout' 6+6 a
Le rempart de son droitl'environne partout ; 6+6 a
Il est libre, il veut l'être,il aime à le partre. 6+6 a
Nul ne sera valetqui pourra rester mtre. 6+6 a
Au métier de flatteurôte ses vils appas, 6+6 a
410 Et les cœurs les moins fiersne s'y baisseront pas. 6+6 a
Voilà ce que tu dois ;rends au moins ce service, 6+6 a
Abolis, seulement,l'utilité du vice. 6+6 a
A défaut des vertusque tu ne peux donner, 6+6 a
Rends sa laideur au malen cessant de l'orner. 6+6 a
415 Certe, il est plus aiséquand la foule est mtresse, 6+6 a
De régner à l'abrides vices qu'on caresse ! 6+6 a
Si j'avais à régirtous ces cœurs abattus. 6+6 a
J'y voudrais employerleurs dernières vertus. 6+6 a
Essaye : et tu verras,sur ces nouvelles routes, 6+6 a
420 Que tes meilleurs appuissont ceux que tu redoutes. 6+6 a
Pour moi, tu m'apprendras,et sans m'humilier. 6+6 a
Ce que je sais le moinsà cette heure : oublier ; 6+6 a
Et je serai dans l'ombre,ardent à me soumettre, 6+6 a
Jamais ton serviteur…mais ton soldat, peut-être. 6+6 a
425 Car, vois-tu, ce paysqui serait grand par toi. 6+6 a
L'honneur qu'il te devrait,c'est mon idole à moi- 6+6 a
Que l'on touche à sa gloire,et je deviens sans peine 6+6 a
Implacable d'amouraussi bien que de haine ; 6+6 a
Dès le premier éclair la raison m'a lui. 6+6 a
430 J'ai fait vœu de souffriret de mourir pour lui. 6+6 a
Donc, ô chef, prince ou roi,de quel nom qu'on te nomme, 6+6 a
Montre-nous, s'il se peut,un héros honnête homme, 6+6 a
Accoutume un grand peupleà marcher sans secours ; 6+6 a
Règne en sageet que Dieute donne de longs jours. 6+6 a
Long silence.
ZAPATA
Allez, monsieur, allez !
CARDENIO
J'ai dit.
UN MEMBRE
435 C'est effroyable ! 6+6 a
ZAPATA
Nous sommes patients.
CARDENIO
J'ai dit.
MEMBRE DE l'AYUNTAMIENTO
Mais, c'est le diable ! 6+6 a
UN AUTRE
Quel noir tissu d'horreurs !
UN POLITIQUE
Cet homme s'est perdu, 6+6 a
ZAPATA
Eh bien ! messieurs, — eh bien !vous avez entendu ? 6+6 a
On dit que !a paroleest chez nous entravée ; 6+6 a
440 Vous voyez à quel pointla pudeur est bravée ! 6+6 a
En plein sénat, laisserhurler ses passions ! 6+6 a
Trouvez-vous qu'on soit libreeu nos discussions ? 6+6 a
UN MEMBRE QUELCONQUE
On ne peut tolérer
UN AUTRE
Il a perdu la tête. 6+6 a
UN PENSEUR
Cet homme est-il plus fou,plus méchant ou plus bête ? 6+6 a
UN CLASSIQUE
Quel galimatias !
UN BUREAUCRATE
445 Ayez des orateurs ! 6+6 a
UN BOURGEOIS,
Et voilà, cependant,comment sont les auteurs ! 6+6 a
UN BEL ESPRIT
Que veut-il, va-t-il,se comprend-il lui-même ? 6+6 a
AUTRE BEL ESPRIT
Serait-ce de l'algèbre ?
UN SAVANT
Ou peut-être un poème ? 6+6 a
UN FORMALISTE
Dans tous les cas, messieurs,c'est manquer de respect 6+6 a
Au conseil.
UN MEMBRE QUELCONQUE
C'est un rouge !
UN AUTRE
450 Ou du moins un suspect. 6+6 a
UN AUTRE
En prison !
UN AUTRE
Le garrot !
UN AUTRE
La potence !
UN AUTRE,
Aux galères ! 6+6 a
UN MODÉRÉ
Non, à l'ordre, il suffit ;messieurs, pas de colères. 6+6 a
AUTRE MODÉRÉ
Messieurs, soyons clément ;il a le vertigo. 6+6 a
TOUS
A la porte, à la porte !
LE DOCTEUR PEDRO-GIRON
A bas monsieur Gogo ! 6+6 a
ZAPATA, solennellement triste
455 Après un tel scandaleet ce discours infâme, 6+6 a
Un deuil, un deuil profond,messieurs, remplit notre âme. 6+6 a
On insulte le princeavec la nation. 6+6 a
Tout ! Dieu, l'espèce humaineet la création. 6+6 a
Nous sommes trop émusde sentiments contraires. 6+6 a
460 Pour vaquer de sang-froidà nos grandes affaires. 6+6 a
Cette adresse au hérosqu'on ose discuter, 6+6 a
Dans un chaos pareilne peut plus se voter. 6+6 a
J'y songerai tout seul,d'autorité privée ; 6+6 a
J'en accepte le soinla séance est levée. 6+6 a
Tous sortent, excepté Cardenio et le docteur.
SCÈNE II
CARDENIO, LE DOCTEUR PEDRO-GIRON.
CARDENIO
Va, troupeau de laquais !
LE DOCTEUR
465 Tu dois être content, 6+6 a
Éternel écolier !sais-tu ce qui t'attend ? 6+6 a
CARDENIO
Moi ? je les brave tous,je les hais, je m'en moque ! 6+6 a
LE DOCTEUR
Oui, mais le résultat ?il n'est guère équivoque. 6+6 a
Au bout de tout ceci,je vois à l'horizon 6+6 a
470 Poindre pour toi, mon cher,l'exil ou la prison. 6+6 a
CARDENIO
Eh bien, soit ! c'est moi seulque la chose regarde. 6+6 a
LE DOCTEUR
Viens-t'en, pauvre nerveux,je te prends sous ma garde ; 6+6 a
Je suis ton médecinet ton ami, je croi ; 6+6 a
Il est bon de coucherautre part que chez toi. 6+6 a
475 Allons dîner, d'abord,puis, les pieds sur la braise, 6+6 a
Nous pourrons, en fumant,pester tout à notre aise. 6+6 a
Chez moi c'est terrain neutre,et l'on peut s'y cacher, 6+6 a
Zapata, j'en suis sûr,t'y fera mal chercher ; 6+6 a
L'affaire entre nous deuxsera vite assoupie 6+6 a
480 De son premier discoursil sait que j'ai copie. 6+6 a
ACTE III
La grande place de Tampico ; la foule attend le passage du prince.
SCÈNE PREMIÈRE
LE DOCTEUR PEDRO-GIRON, CARDENIO, LE PEUPLE.
LE DOCTEUR
Que fais-tu là ? j'auraisdû te mettre sous clé. 6+6 a
Vraiment, ce diable d'hommea le timbre fêlé ! 6+6 a
vas-tu ? dans les brasde messieurs les gendarmes ; 6+6 a
CARDENIO
Laisse-moi donc, avecles burlesques alarmes. 6+6 a
De quoi suis-je coupable,après tout ?
LE DOCTEUR
485 Mais de rien ; 6+6 a
Demande à ZAPATA,l'alcade citoyen. 6+6 a
Enfin que cherches-tu ?
CARDENIO
Je voudrais, par moi-même, 6+6 a
Voir ce qu'est un héroset le peuple qui l'aime. 6+6 a
J'ai peu connu le peuple,on me l'a fort vanté ; 6+6 a
490 Jugeons-le dans sa forceet dans sa majesté. 6+6 a
Sachons, enfin, commenton monte au Capitole. 6+6 a
LE DOCTEUR
Au moins, reste à mon bras,et pas une parole, 6+6 a
Si tu ne veux savoiraussi beaucoup trop bien, 6+6 a
Comment, par accessoire,on lapide un chrétien. 6+6 a
DEUX BOURGEOIS, au docteur
495 Monsieur, ce ruban-lànous prouve que vous êtes 6+6 a
Sans doute un officier ?
LE DOCTEUR
Vous êtes trop honnêtes. 6+6 a
PREMIER BOURGEOIS
Alors vous saurez biensi don Pèdre à son char 6+6 a
Aura quatre éléphants,comme autrefois César. 6+6 a
LE DOCTEUR
Douze éléphants, messieurs,et vingt-six dromadaires, 6+6 a
500 Huit léopards conduitspar trente bayadères. 6+6 a
SECOND BOURGEOIS
Ah ! c'est prodigieux !
LE DOCTEUR
Ce n'est pas tout encor ; 6+6 a
Chacun des éléphantsporte une cage d'or : 6+6 a
Dans quatre on voit un singeavec deux demoiselles, 6+6 a
Dans sept un Cupidonet dix-neuf tourterelles. 6+6 a
SECOND BOURGEOIS
Et dans l'autre, monsieur ?
LE DOCTEUR
505 Et dans l'autre un coffret, 6+6 a
Mais dont le contenureste encore un secret ; 6+6 a
Le prince doit l'ouvrirce soir à sa fenêtre. 6+6 a
Tâchez d'être assez près.
PREMIER BOURGEOIS
Que pourrait-ce bien être ? 6+6 a
Vous le savez, monsieur !
LE DOCTEUR
Par serment solennel 6+6 a
Je vous jure que non.
LES DEUX BOURGEOIS, s'en allant
510 Merci, mon colonel. 6+6 a
UN OUVRIER
Un colonel ! voilàcelui qui va nous dire 6+6 a
LE DOCTEUR
Tout ce que vous voudrez,mon brave homme, et sans rire, 6+6 a
L'OUVRIER
Mon colonel, a-t-onarrêté l'assassin ? 6+6 a
LE DOCTEUR
Lequel ? j'en connais tant…
L'OUVRIER
C'était un capucin 6+6 a
515 Porteur d'un coutelasbéni, dit-on, à Rome, 6+6 a
Qu'on trouva cette nuitsous le lit du grand homme. 6+6 a
Le chien l'avait saisile poste est accouru 6+6 a
Mais par la cheminéeil avait disparu. 6+6 a
On a dans son couventcommencé les poursuites. 6+6 a
LE DOCTEUR
520 Un capucin, monsieur !c'étaient quatre jésuites 6+6 a
Bien vus et bien comptés ;l'un armé d'un poignard, 6+6 a
L'autre d'un pistolet ;le troisième, un vieillard, 6+6 a
N'avait qu'un goupillon,l'autre une hallebarde 6+6 a
On découvrit sur l'autreun vieux pot à moutarde. 6+6 a
525 Mais rempli d'un poisondont vous allez juger ; 6+6 a
Trois cents foats…
UNE VOIX
Messieurs,le peuple est en danger, 6+6 a
Les sergents ont trouvéchez les visitandines, 6+6 a
Un envoi de Madrid,quatorze guillotines ! 6+6 a
AUTRE VOIX
Mais, grand Dieu ! cas gens-lànous égorgeront tous ! 6+6 a
PLUSIEURS VOIX
530 Sans notre dictateurc'en était fait de nous. 6+6 a
UN PROFOND POLITIQUE
Je vous le disais bien,hier, à la campagne. 6+6 a
Le coup part de Madridet des Bourbons d'Espagne, 6+6 a
UNE VOIX
 Mais leur coup a manqué 6
 Grâce à nos calonniers… 6
EN CHŒUR
535  Dansons la carmagnole, 6
 Vive le son du canon ! 7
On entend le canon.
UNE VOIX
Justement, le canon !
UNE AUTRE
Bravo ! c'est le cortège. 6+6 a
Le défilé commence.
AUTRE VOIX
Voici les timbaliers,or, azur, blanc de neige 6+6 a
UNE AUTRE
Et les hallebardier,rouge, aux galons d'argent… 6+6 a
UNE AUTRE
540 Voici quatre greffiersprécédés d'un sergent. 6+6 a
UNE AUTRE
Voici les grenadiers,puis les dragons vert-pomme. 6+6 a
UNE AUTRE
Voici la garde nègreet vingt canons.
UNE AUTRE
Quel homme ! 6+6 a
Que c'est beau !
UN FRONDEUR
Tout cecidoit cter quelque peu. 6+6 a
UN SATISFAIT
Bah ! trouver de l'argentpour lui ce n'est qu'un jeu ; 6+6 a
545 Il sait, ayant pâlidans les bibliothèques. 6+6 a
Le secret d'un trésorcaché par les Aztèques : 6+6 a
Des perles par boisseaux,un puits à millions… 6+6 a
LE DOCTEUR
Oui, monsieur, mais gardépar quatre cents lions. 6+6 a
Huit cents taureaux jetantdu feu par les narines, 6+6 a
550 Des centaures, des sphinx,mille bêtes marines. 6+6 a
PLUSIEURS VOIX
Pour vaincre tout cela,comment donc a-t-il fait ? 6+6 a
LE DOCTEUR
Il possède un anneaud'un merveilleux effet, 6+6 a
Anneau qui vient, dit-on,du grand empereur Charle 6+6 a
Et qui rend invisible.Au moment je parle, 6+6 a
555 Il est peut-être làtout à côté de nous. 6+6 a
VOIX EFFARÉES
Ah ! mon Dieu, monseigneur !
UN ESPRIT FORT
Oui, gare à ce bijou 6+6 a
A la faveur duquelon se cache, on se glisse ; 6+6 a
Tout despote a le sien,badauds, c'est la police ! 6+6 a
UN OUVRIER,
Que dit l'aristocrate ?
UN AUTRE
Il insulte César ! 6+6 a
LA FOULE
560 Assommons ! assommons !ce doit être un mouchard 6+6 a
Un groupe se précipite en bousculant ce personnage ;
un autre fait cercle autour du docteur.
UNE VOIX
Enfin il a conquisle trésor ?
UN HOMME BIEN INFORME
Et sans crime ; 6+6 a
Car il en est d'ailleursl'héritier légitime ; 6+6 a
C'est un de ses aïeux,dit-on, qui l'enferma 6+6 a
Il descend de Cortezet de Montézuma. 6+6 a
UNE VOIX
565 Celui-là, certe, est nobleet peut faire trophée ! 6+6 a
UNE AUTRE
D'ailleurs on le sait bien,sa nourrice était fée. 6+6 a
UN CURIEUX
Et tous ces milliardsque vont-ils devenir ? 6+6 a
L'HOMME BIEN INFORMÉ
D'abord selon son rangil doit s'entretenir. 6+6 a
Puis il dote et marieau czar sa sœur cadette. 6+6 a
570 Puis du Mexique, enfin,il paye à fond la dette. 6+6 a
UN HOMME TRÈS BIEN PENSANT
Ce n'est pas tout, monsieur,à chaque citoyen 6+6 a
Il fait cinq cents dollarsde rente, sur son bien. 6+6 a
UNE VOIX, avec enthousiasme
Plus d'impôts !
UN PARTISAN DU DROIT AU TRAVAIL
On pourralaisser la terre en friches. 6+6 a
UN AUTRE
Plus de pauvres, jamais !
UN AUTRE
Et surtout plus de riches ! 6+6 a
C'est là l'essentiel.
TOUS
575 Vive Montézuma ! 6+6 a
PLUSIEURS VOIX
Qu'il soit roi !
— Qu'il soit pape !
Empereur !
LE DOCTEUR
Grand lama ! 6+6 a
UN TRAVAILLEUR
Enfin, on pourra boireet fumer sans rien faire. 6+6 a
UN PATRIOTE
Au Mexique il soumetl'un et l'autre hémisphère, 6+6 a
Il a vaincu les Francs,les Goths, les hidalgos. 6+6 a
UNE BLOUSE, à un habit noir
580 Voyez-vous, citoyen,nous serons tous égaux ; 6+6 a
Plus de savant, de noble,en ces temps nous somme : 6+6 a
C'est à leur poignet seulqu'on distingue les hommes. 6+6 a
Voyez le mien !
Il montre son poing.
L'HABIT NOIR
Monsieur,certes, je vous comprends. 6+6 a
UN HOMME GRAVE
On reforme nos lois,sept codes différents ! 6+6 a
UNE VOIX
Est-il marié ?
UNE AUTRE
Veuf ?
UNE AUTRE
585 Quelle est sa bonne amie ? 6+6 a
L'HOMME GRAVE
On prépare un projetsur la polygamie. 6+6 a
PLUSIEURS VOIX
Très bien !
AUTRES VOIX
Mais c'est affreux !
AUTRES VOIX
C'est charmant !
L'HOMME GRAVE
Pourquoi non ? 6+6 a
Voyez plutôt Jacobet le grand Salomon ; 6+6 a
Voyez tout l'Orient,toute l'histoire ancienne. 6+6 a
UN BOURGEOIS
590 Plusieurs femmes, grand Dieu !moi, j'ai trop de la mienne. 6+6 a
LE DOCTEUR PÉDRO-CIRON
Chacun en dit autant,c'est juste la raison : 6+6 a
Ou se guérit d'un malen prenant d'un poison ; 6+6 a
Nous appelons celade l'homéopathie. 6+6 a
LA FOULE
Les cloches ! le canon !— Son Altesse est partie ! 6+6 a
595 Le voilà ! — Le voilà !— Bravo ! — Bravo ! — Vivat ! 6+6 a
LE DOCTEUR
Mille mille anniset manget et bibat 6+6 a
 Et saignet et tuât ! 6 a
VOIX DANS LA FOULE
A bas donc les chapeaux !qu'on voie un peu, nos mtres ! 6+6 a
AUTRES VOIX
Vive le dictateur !
— Mort aux rois !
— Mort aux prêtres ! 6+6 a
600 — Vive la nationet son nouvel élu ! 6+6 a
— Vive Montézuma,souverain absolu ! 6+6 a
AUTRES VOIX
Vive la poule au pot,— les chansons sous la treille, 6+6 a
— La soupe aux choux, — le vinà deux sous la bouteille ! 6+6 a
— Vive l'amour, la pipeet le jeu d'écarté ! 6+6 a
— Vive san Iago !
CARDENIO, d'une voix forte
605 Vive la liberté ! 6+6 a
VOIX NOMBREUSES
Quel est ce brigand-là ?
— C'est un noir !
— C'est un rouge ! 6+6 a
C'est un blanc !
— C'est un bleu !
— Qu'on l'empoigne, et s'il bouge, 6+6 a
Assommez-le sur place !
A la rivière !
A l'eau ! 6+6 a
LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON
Je prévoyais ce coup !… Messieurs, tout beau, tout beau ! 6+6 a
Je vais vous expliquer
LES MÊMES VOIX.
A bas !
610 — Quel est cet autre ? 6+6 a
A l'eau !
UN OUVRIER
Pour celui-là,camarade, il est nôtre ; 6+6 a
Très sûr ! il a guérimon gaon du carreau 6+6 a
UN AUTRE
Moi du typhus !
UN AUTRE
Et moidu vomito negro. 6+6 a
C'est le docteur ! c'est mieuxque tous ces chiens d'alcades. 6+6 a
Écoutons !
LE DOCTEUR
615 Mes amis,c'est un de mes malades ; 6+6 a
Le pauvre diable est fou,mais pas des plus méchants. 6+6 a
Il a pris de chez moi,tantôt, la clé des champs ; 6+6 a
Cette fois, je le tienset je le garde à vue 6+6 a
Bonsoir, et courez vite,on passe la revue ; 6+6 a
620 Tenez, on voit très bienlà… sur cette hauteur. 6+6 a
LES PRÉCÉDENTS
Bravo ! bravo ! courons !hourrah pour le docteur ! 6+6 a
SCÈNE II
LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON, CARDENIO.
LE DOCTEUR
Eh bien, mon enragé,l'épreuve est-elle bonne ; 6+6 a
As-tu jugé, tâté,vu la foule en personne ? 6+6 a
Sans mes braves clientsnous étions assommés. 6+6 a
CARDENIO
625 Le voilà donc ce peupleet ces chefs bien-aimés ! 6+6 a
Des brigands, un troupeausatisfait qu'on le tonde. 6+6 a
Et c'est sur tout celaqu'un empire se fonde ! 6+6 a
LE DOCTEUR
Oui, mon cher, à ton tourquand tu voudras avoir 6+6 a
Ton jour d'éclat, ton lotde grandeur, de pouvoir, 6+6 a
630 Tu prendras pour étais,comme ces bons apôtres, 6+6 a
La bassesse des uns,la bêtise des autres ; 6+6 a
Et tout ira fort biencar, je te le promets. 6+6 a
Ces deux fondements-làne manqueront jamais. 6+6 a
CARDENIO
C'est hideux ! je croyaisces scènes d'un autre âge. 6+6 a
LE DOCTEUR
635 Grattez l'homme un peu fort,vous aurez le sauvage. 6+6 a
Quoi ! tu voudrais, mon cher,qu'après tantôt cent ans 6+6 a
Qu'on jette à la pudeurces défis insultants. 6+6 a
Que Dieu même, accablésous les coups du génie. 6+6 a
Semble donner victoireà tout ce qui le nie ; 6+6 a
640 Qu'on prend au lupanarles déesses Raison ; 6+6 a
Qu'on voit des fils de roispourrir dans leur prison ; 6+6 a
Que tout gueux se croit faitpour monter à leur place, 6+6 a
S'il est trempé dans l'encreet s'il a de l'audace ; 6+6 a
Qu'après tout ce gâchis,lois, décrets et banquets, 6+6 a
645 Tribuns, laquais jadis,redevenus laquais. 6+6 a
Qu'après ce rire affreuxqui ne peut plus se taire. 6+6 a
Qu'après monsieur Proudhonet monsieur de Voltaire, 6+6 a
On trouve encor le peuple,autour de son curé, 6+6 a
Tout comme un petit clercpudique et tonsuré 6+6 a
650 Jouant dans un parloir nul ne s'émerveille 6+6 a
De voir une madoneaccoucher par l'oreille ? 6+6 a
Moi, pour mon siècle, avecles exemples que j'ai, 6+6 a
Je suis reconnaissantde n'être pas mangé, 6+6 a
Et crois très vertueuxet très sobre en ménage 6+6 a
655 Tout peuple qui n'est pasencore anthropophage. 6+6 a
CARDENIO
Mais, si c'est là le mondeet ceux qui font les lois, 6+6 a
Allons ptre du glandet vivre dans les bois ! 6+6 a
LE DOCTEUR
Tu feras bien, pour l'heure,en ce qui te concerne, 6+6 a
De quitter une ville ZAPATA gouverne. 6+6 a
660 Les lions et la fouleont leur jour de pitié ; 6+6 a
La police, mon cher,ne mord pas à moitié ; 6+6 a
Et, quand un renégatmonte cet hippogriffe. 6+6 a
Gare aux honnêtes genss'ils tombent sous sa griffe ! 6+6 a
A son généreux mtreil t'a dû signaler ; 6+6 a
665 Tu n'es plus supportableavec ton franc parler. 6+6 a
Je flaire autour de toimaint délateur qui rampe. 6+6 a
Or donc, embrassons-nous,prends ma bourse et décampe. 6+6 a
ACTE IV
Le salon de la présidente.
SCÈNE I
LE DOCTEUR PEDRO-GIRON, LA PRÉSIDENTE, LA DIRECTRICE, LA MARQUISE, PLUSIEURS HOMMES ET FEMMES DU MONDE.
LA PRÉSIDENTE
Quel magnifique bal !
UNE DAME
Un miracle ! En trois jours 6+6 a
Sort de terre un palaistout d'or et de velours, 6+6 a
670 Des montagnes de fleurset de feu, des trophées… 6+6 a
UN MONSIEUR
Cet homme a dans ses mainsla baguette des fées. 6+6 a
LE DOCTEUR
Crédit illimitévaut Sésame, ouvre-toi. 6+6 a
UNE DAME
Avouez qu'il en fitun merveilleux emploi. 6+6 a
LA PRÉSIDENTE
Rien de mieux à Paris,
LE DOCTEUR
Paris, belle comtesse, 6+6 a
675 Ne nous vit pas valserau bras de Son Altesse. 6+6 a
LA PRÉSIDENTE
Méchant !
UN MONSIEUR
Et quel souper !
UNE DAME
Quels flots de diamants ! 6+6 a
UN MÉLOMANE
La garde nègre avaitses hautbois allemands. 6+6 a
LE DOCTEUR
Et, pour que la douceuren fût pleine et parfaite. 6+6 a
Les prisons regorgeaientà deux pas de la fête. 6+6 a
680 Il est charmant d'avoir,comme dit un ancien, 6+6 a
Quand on est dans un port l'on soupe fort bien, 6+6 a
D'avoir en perspectiveune mer qui fait rage, 6+6 a
Plus deux ou trois vaisseauxmenacés du naufrage, 6+6 a
Surtout si l'on entenddes sanglots et des cris, 6+6 a
685 Et si quelque navireest chargé de proscrits. 6+6 a
UN MONSIEUR
Quels proscrits ? des gredinsqui voulaient le pillage ! 6+6 a
UN AUTRE
Des rhéteurs, des auteursvivant de gribouillage ! 6+6 a
UNE DAME
Depuis tantôt deux anson n'avait vu de bal. 6+6 a
UN MONSIEUR
Les fers et les cotons,les vins allaient si mal. 6+6 a
UN AUTRE
690 Ils voulaient abolirla famille et les riches. 6+6 a
UN AUTRE
Imposer les chevaux,la poudre et les caniches. 6+6 a
UNE DAME
Défendre les rubans,les chapeaux de Paris. 6+6 a
UNE AUTRE
Nous aurions tous portéle même sarrau gris. 6+6 a
UN MONSIEUR
Puis les clubs, puis la guerreet puis la guillotine 6+6 a
UNE DAME PIEUSE,
695 Et l'état des esprits,monsieur, et la doctrine ! 6+6 a
Leur but n'était rien moins,au bout d'un peu de temps, 6+6 a
Que de nous rendre tousMormons et protestants. 6+6 a
UN MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ PROTECTRICE DES ANIMAUX
Moi, je trouve imprudent,la chose étant certaine. 6+6 a
De ne pas fusillerces gens-là par centaine. 6+6 a
TOUTES LES DAMES ET QUELQUES HOMMES
C'est aussi mon avis !
— C'est le mien !
700 — C'est le mien ! 6+6 a
LE DOCTEUR
Fusillons, fusillons,puisqu'il n'en cte rien. 6+6 a
Comme un instant de peurnous fait de belles âmes ? 6+6 a
Gare à quiconque effrayeou dérange les dames ! 6+6 a
Pour bien clore un débatentre les citoyens, 6+6 a
705 Je vois que le beau sexeaime les grands moyens. 6+6 a
On traite de brigandstous ceux qu'on appréhende ; 6+6 a
Et les femmes sont làpour crier : Qu'on les pende ! 6+6 a
Ce que c'est qu'un cœur tendreet des nerfs délicats ! 6+6 a
Je sais que plus d'un hommeest dans le même cas ; 6+6 a
710 Mais tout cède en furieà nos belles trembleuses ; 6+6 a
La peur, dans un salon,ferait des tricoteuses. 6+6 a
Après tout, ces gens-làqu'ont-ils donc tant détruit ? 6+6 a
Ils ont crié, hurlé,menacé, fait du bruit… 6+6 a
C'est vrai. Mais à jugerpar ce qu'on vient d'entendre, 6+6 a
715 Le grand monde envers euxn'est pas beaucoup plus tendre. 6+6 a
UN MONSIEUR, bas à un autre, en montrant le docteur
Quel est donc ce monsieur ?il a bien mauvais ton. 6+6 a
L'AUTRE
Je ne sais quel docteurqui tranche du Caton. 6+6 a
On annonce madame la directrice.
LA PRÉSIDENTE
Enfin, mon cœur, enfinvous voilà revenue ! 6+6 a
Étiez-vous à ce bal ?
LA DIRECTRICE
Dites cette cohue. 6+6 a
LA PRÉSIDENTE
Il était fort brillant…
LA DIRECTRICE
720 Oui, mais par trop mêlé ; 6+6 a
On s'étouffait.
LE DOCTEUR
Madame,on se montrait zélé. 6+6 a
LA DIRECTRICE
Inviter avec nousle bourgeois le plus mince ! 6+6 a
UNE DAME, bas au docteur
Elle espérait aussidanser avec le prince. 6+6 a
LA DIRECTRICE
Puis cette Olympiasi près de monseigneur ! 6+6 a
725 Figurer au quadrille,à la table d'honneur, 6+6 a
Et valser avec lui,causer à la fenêtre ! 6+6 a
LA PRÉSIDENTE
Pour cela, j'en conviens,c'était de trop peut-être ! 6+6 a
UN FONCTIONNAIRE
Mais, madame, elle a droitd'être admise à la cour : 6+6 a
Femme du gouverneur…
LA DIRECTRICE
Femme, depuis un jour ! 6+6 a
730 Nous savons trop, monsieur,ce qu'elle était la veille, 6+6 a
LE FONCTIONNAIRE
Elle se tient très bienet reçoit à merveille ; 6+6 a
Elle est duchesse, enfin,car son époux est duc. 6+6 a
LA DIRECTRICE,
Très connus tous les deuxde Sidrach-ben-Baruch. 6+6 a
UNE DAME
Ses bijoux si vantés,quelle en est l'origine ? 6+6 a
UN MONSIEUR
735 Ils viennent d'Israël,à ce que j'imagine ; 6+6 a
Comme tous les trésorsque la belle apporta, 6+6 a
Avec son cœur noviceau duc de ZAPATA. 6+6 a
UN AUTRE
On dit que les huissiers,d'une façon charmante, 6+6 a
Ont transmis au futurles poulets de l'amante. 6+6 a
UN AUTRE
740 Il fallait épouser,ou payer, cas urgent ; 6+6 a
On peut donner son nomquand on a pris l'argent. 6+6 a
LE FONCTIONNAIRE
Ah ! c'est trop oublierles éminents services… 6+6 a
LA DIRECTRICE
Que l'on rend à l'Étaten affichant ses vices ! 6+6 a
Plusieurs visiteurs s'esquivent.
LE DOCTEUR,
Soyez plus indulgents,nous avons tous péché, 6+6 a
LA DIRECTRICE
745 Faites-vous l'avocatde ce honteux marché ! 6+6 a
On annonce la marquise.
LA MARQUISE, au docteur
Je vous cherchais.
LE DOCTEUR
Ce motme charme et m'embarrasse, 6+6 a
Madame.
LA MARQUISE
Ignorez-vous,docteur, ce qui se passe ? 6+6 a
On arrête à l'instantvotre meilleur ami. 6+6 a
LE DOCTEUR Se frappant le front
Pardonnez-moi, mon Dieu,je m'étais endormi. 6+6 a
Il sort précipitamment.
UN MONSIEUR
C'est ce Cardénio ?
UN AUTRE
750 Beau malheur pour la ville ! 6+6 a
LA MARQUISE
Un noble cœur ! monsieur,les comptez-vous par mille ? 6+6 a
LE MONSIEUR
Noble cœur ! on le ditdes esprits de travers. 6+6 a
UN AUTRE
Un de ces bons à rien !
UN AUTRE
Faisait-il pas des vers ? 6+6 a
MADAME PUTIPHAR
Ce sournois ! à quoi doncpassait-il sa jeunesse ? 6+6 a
755 On ne lui connaissaitni dettes ni mtresse. 6+6 a
LA MARQUISE
Peut-être il aurait pucomme un autre en avoir ; 6+6 a
Ailleurs que dans l'amouril mettait son devoir ; 6+6 a
Madame, auprès de vousserait-ce donc un crime ? 6+6 a
Pour moi, je le confesse,il avait mon estime. 6+6 a
UNE PRUDE bas à mie autre
760 Voilà ce qu'on appelleà plaisir s'afficher. 6+6 a
LA MARQUISE
Je puis parler tout haut,je n'ai rien à cacher, 6+6 a
UN VALET annonçant
Madame la duchesseOlympia !
SCÈNE II
LES PRÉCÉDENTS, OLYMPIA.
LA PRÉSIDENTE, se précipitant dans les bras d'Olympia,
Charmante, 6+6 a
Venez qu'on vous embrasseet qu'on vous complimente 6+6 a
Vos succès à ce balont fait bien des jaloux. 6+6 a
OLYMPIA
765 Je venais vous parlerde vos succès, à vous. 6+6 a
Des fêtes de la courvous êtes la merveille, 6+6 a
Le prince, encor hier,me l'a dit à l'oreille. 6+6 a
LA PRÉSIDENTE
Il est si bon !
LES DAMES
Si beau !
— Si doux !
— Si gracieux ! 6+6 a
— Si profond politique !
Il a de si grands yeux 1 6+6 a
— Tant d'esprit !
— Si galant !
770 — De façons si parfaites ! 6+6 a
— Si vaillant au combat !
— Si brillant dans les fêtes ! 6+6 a
OLYMPIA
Il veut bien, et j'en suisencor tout en émoi, 6+6 a
Accepter dans trois joursun nouveau bal chez moi. 6+6 a
Je viens vous inviter
LA PRÉSIDENTE
Merci, ma toute belle. 6+6 a
OLYMPIA aux autres dames
Ces dames y viendront ?
TOUTES LES DAMES excepté la marquise
775 Madame en doute-t-elle ? 6+6 a
OLYMPIA aux hommes
Je puis compter sur vous,messieurs ?
TOUS LES HOMMES
C'est un plaisir, 6+6 a
Un honneur qu'on s'empresseardemment de saisir. 6+6 a
OLYMPIA
Nous avons tout le monde,hormis quelques malades 6+6 a
Les Russes, les Anglais,toutes les ambassades, 6+6 a
780 Six grands d'Espagne, un princeAlonzo Picador. 6+6 a
Quatorze grands colliers,et même un Toison d'or 6+6 a
A la marquise.
Madame la marquiseacceptera, j'espère ? 6+6 a
LA MARQUISE
Je suis en deuil, madame,et je pars pour ma terre. 6+6 a
Elle sort.
OLYMPIA
Cette marquise-làboude et pense très mal. 6+6 a
UN CHAMBELLAN
785 On regrette la dîmeet le droit féodal. 6+6 a
LA PRÉSIDENTE, embarrassés
Je la connais fort peuje la trouve à la messe 6+6 a
Allez-vous au Pradoce soir, chère duchesse ? 6+6 a
Comme on serait heureuxd'y partre avec vous ! 6+6 a
OLYMPIA
Je compte y faire un tour,car le temps est fort doux. 6+6 a
790 Pour écuyers d'honneurs,messieurs, je vous réclame. 6+6 a
TOUS, se précipitant
Ah ! madame ! — Ah ! madame !Ah ! madame ! — Ah ! madame ! 6+6 a
ACTE V
Le cabinet de ZAPATA.
SCÈNE PREMIÈRE
ZAPATA, LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON
Enfin ! on te revoit,monsieur le puritain ; 6+6 a
Que te faut-il ? choisista part dans le butin : 6+6 a
Que viens-tu demander ?une ambassade, un titre ? 6+6 a
LE DOCTEUR
795 Je viens traiter, monsieur,un tout autre chapitre : 6+6 a
Je n'ai de vos présentsnul besoin, grâce à Dieu. 6+6 a
Comme vous l'allez voir,je plaisante fort peu. 6+6 a
On a fait dispartreun brave homme que j'aime : 6+6 a
l'a-t-on mis ? réponds !qu'il sorte à l'instant même ! 6+6 a
800 Et qu'il n'y perde pasun seul de ses cheveux… 6+6 a
Ou ce sera, mon drôle,affaire entre nous deux. 6+6 a
ZAPATA
Dieu ! quel début tragiqueet comme il est habile ! 6+6 a
Je t'ai cru plus d'esprit,mon cher, et moins de bile. 6+6 a
Me prends-tu pour un ogre,et de plus pour un sot ? 6+6 a
805 Comment n'as-tu pas sum'entendre à demi-mot ? 6+6 a
J'ai mis Cardéniopour quelques jours à l'ombre ; 6+6 a
Il se serait fait pendreavec sa mine sombre. 6+6 a
Tous nos gens ne sont passi bons enfants que moi : 6+6 a
Il est bien qu'on l'oublieet qu'il se tienne coi. 6+6 a
810 Et, plus tard, s'il guérit,comme je le suppose, 6+6 a
De vous deux, cher docteur,nous ferons quelque chose. 6+6 a
LE DOCTEUR
Hormis la clé des champsnous ne demandons rien ; 6+6 a
Qu'il soit libre, au plus vite !adieu, porte-toi bien. 6+6 a
ZAPATA, le retenant
Je comprends, on est fier,on me garde rancune, 6+6 a
815 Et je suis un coquinpour avoir fait fortune ; 6+6 a
Un trtre, un apostat,tous ces noms saugrenus, 6+6 a
Qu'aux gens bien arrivésjettent les tard-venus. 6+6 a
Je voudrais bien savoirquel cas de ces sornettes 6+6 a
Tu ferais à ma place,et criblé de mes dettes ? 6+6 a
820 J'étais perdu, — saisieet contrainte par corps, — 6+6 a
J'entendais aboyerla meute des recors ; 6+6 a
Il me fallait choisir,comme ont fait bien des nôtres, 6+6 a
Ou d'aller en prisonou d'y mettre les autres. 6+6 a
J'avais pendant quinze ansprêché la liberté. 6+6 a
825 J'ai voulu rester libreet n'ai pas hésité. 6+6 a
Puis j'adorais, mon cher,une femme charmante : 6+6 a
Je dois à nos amourscent mille écus de rente. 6+6 a
Tout cela te confond,toi qui vis de pain sec ! 6+6 a
Mais il nous faut, à nous,quelque autre chose avec. 6+6 a
830 Enfin tout s'écroulait,c'était l'instant suprême, 6+6 a
Je sauvais la patrieet me sauvais moi-même. 6+6 a
Rien qu'en disant amenj'étais grand citoyen. 6+6 a
Je réussis… ergo,j'ai pris le bon moyen. 6+6 a
Et. d'ailleurs, maintenantqu'on a conquis ses grades, 6+6 a
835 Tu vois qu'on est utileaux anciens camarades. 6+6 a
LE DOCTEUR
Je vois que l'on secoue,en faisant son chemin, 6+6 a
La pudeur d'autrefoiset le respect humain. 6+6 a
ZAPATA
Comment ! toi qui faisaisaux préjugés la guerre, 6+6 a
Prêcher aux gens d'espritle respect du vulgaire ! 6+6 a
840 Un penseur, un docteur,un jugeur sans appel, 6+6 a
Qui lient la fibre humaineau bout de son scalpel ! 6+6 a
Tu ne sais pas encorce qu'au temps nous sommes 6+6 a
On peut faire goberà ce troupeau des hommes ! 6+6 a
J'en apprends ces jours-cide toutes les façons. 6+6 a
845 Et pourrais à mon tourte donner des leçons. 6+6 a
Tiens ! si tu veux savoirce qu'on peut par l'audace, 6+6 a
Ce qu'on fait d'un publicavec une grimace, 6+6 a
Lorsqu'on parle très haut,qu'on tient un bon emploi, 6+6 a
Qu'on a les imprimeurset le mtre pour soi, 6+6 a
850 Ce qu'on fait applaudir,quand on garde la caisse, 6+6 a
A d'illustres bourgeoisqui craignent une baisse, 6+6 a
Viens ce soir à la junte,on y tiendra conseil. 6+6 a
Je t'y promets, mon cher,un coup d'œil sans pareil. 6+6 a
Tu trouveras alorsma grandeur légitime, 6+6 a
855 Et le respect humainperdra dans ton estime. 6+6 a
LE DOCTEUR
Soit ! et je consens mêmeà te serrer la main, 6+6 a
Pourvu que notre amisoit libre avant demain. 6+6 a
Dans mes opinionsje suis peu fanatique : 6+6 a
J'eus toujours peu de gtpour la gent politique. 6+6 a
860 Qu'ils soient dorés sur trancheou vêtus de haillons, 6+6 a
j'ai grand'peur de la fouleet des gros bataillons. 6+6 a
Mais dans cette frayeurque le nombre me cause, 6+6 a
Le respect, je l'avoue,entre à bien faible dose. 6+6 a
J'applaudis volontiersl'acteur assez matois 6+6 a
865 Pour berner le publicdans son propre patois. 6+6 a
J'irai donc à la junte,en invoquant les Muses, 6+6 a
Et pardonnerai tout,mon cher, si tu m'amuses. 6+6 a
SECOND TABLEAU
La salle des séances à l'Ayuntamiento.
Des bouteilles cachetées sont rangées sur le bureau.
SCÈNE PREMIÈRE
LE DOCTEUR PEDRO-GIRON, TOUS LES AUTRES MEMBRES DE L'AYUNTAMIENTO, EXCEPTÉ CARDENIO.
UN MEMBRE, regardant les bouteilles
Voilà dans le conseilun luxe inusité. 6+6 a
UN AUTRE
C'est Bacchus qui présideà la solennité ! 6+6 a
UN AUTRE
870 Que fait sur le bureauce long rang de bouteilles ? 6+6 a
UN AUTRE, lorgnant les flacons
Cachets armoriés,liqueurs très peu vermeilles ! 6+6 a
UN AUTRE
C'est du kirsch !
UN AUTRE
C'est du rhum !
UN AUTRE
C'est de l'eau des Chartreux 6+6 a
UN AUTRE
Non ! c'est de l'eau Raspail !
UN AUTRE
C'est un philtre amoureux ! 6+6 a
UN AUTRE
C'est de l'eau du Jourdain !
UN AUTRE
C'est de l'eau de Jouvence ! 6+6 a
UN AUTRE
Pour les vieux cols d'habits ?
UN AUTRE
875 Non, pour la conscience. 6+6 a
UN AUTRE
C'est de l'eau du Léthé ;nous avons grand besoin 6+6 a
D'oublier quelque peu.
UN AUTRE
Ne cherchez pas si loin : 6+6 a
Le cachet de la cour !mais c'est de l'eau bénite, 6+6 a
UN AUTRE
On n'est pas assez vieuxpour devenir ermite. 6+6 a
UN AUTRE
880 Ne vous y trompez pas,on est très bon chrétien. 6+6 a
LE PRÉCÉDENT
Vous m'étonnez un peu.
L'AUTRE, montrant la Gazette officielle
Vous ne lisez donc rien ? 6+6 a
De nos dévotionsle journal tient registre : 6+6 a
« Hier ont communiéle prince et le ministre. » 6+6 a
LE PRÉCÉDENT
Mais c'est bon à savoir,on s'y conformera. 6+6 a
UN HUISSIER, annonçant
885 Le duc de ZAPATA,messieurs, et cœtera. 6+6 a
TOUS LES MEMBRES
Rangeons-nous ! voici l'homme !en place ! en place ! alerte ! 6+6 a
L'HUISSIER
Le gouverneur, messieurs !La séance est ouverte. 6+6 a
SCÈNE II
LES PRÉCÉDENTS, ZAPATA.
ZAPATA d'un ton solennel
Messieurs, nous assistonsà des événements 6+6 a
Qui dépassent le rêveet les pressentiments. 6+6 a
890 Auprès de ce qu'on faitet de ce qu'on propose, 6+6 a
Le paradis terrestreétait fort peu de chose 6+6 a
Ce monde périssait,vieux, poussif, édenté : 6+6 a
L'horloge du progrèssemblait s'être arrêté ; 6+6 a
Un tas de préjugés,une aveugle routine 6+6 a
895 Rongeait le grand ressortd'une rouille intestine ; 6+6 a
Il fallait tout refaireet tout remettre à neuf, 6+6 a
Comme on a fait ailleursen l'an quatre-vingt-neuf. 6+6 a
A force de servirtoute vérité s'use ; 6+6 a
Il fallait réformerles mots dont on abuse. 6+6 a
900 Ce vieux monde caducqui se trne à pas lents 6+6 a
Sur les mêmes vertusvit depuis six mille ans ; 6+6 a
Ces vertus exhalaientune odeur sépulcrale : 6+6 a
Le jour est donc venude changer la morale. 6+6 a
Voilà bien six mille ans,par tout cet univers, 6+6 a
905 Que le cœur est à gaucheet que les prés sont verts, 6+6 a
Qu'en dépit de Garole feu brûle et l'eau mouille. 6+6 a
Que le chêne répugneà porter la citrouille. 6+6 a
Que les fruits sont encorprécédés par les fleurs. 6+6 a
Qu'on prise un honnête hommeet qu'on pend les voleurs, 6+6 a
910 Que le chardon se voitdédaigné pour les roses… 6+6 a
Nous ne pouvions souffrirun tel état de choses ! 6+6 a
Vous comprenez, messieurs,que le siècle a grandi 6+6 a
Et que, s'il faisait jourencor en plein midi, 6+6 a
Que si l'on ne tenaitpour des billevesées 6+6 a
915 Leur vieux droit, leur moraleet ses hautes visées, 6+6 a
Si Caton à vos yeuxvalait plus qu'Arlequin 6+6 a
Moi-même, ici présent,je serais un faquin ! 6+6 a
Moi, duc de ZAPATA !… nos barons, nos alcades, 6+6 a
Chacun vendrait encordu poivre et des muscades. 6+6 a
920 Nous n'aurions ni mandats,ni croix, ni rubans verts ! 6+6 a
Rien enfin !… Et sans nousque ferait l'univers ? 6+6 a
Applaudissements.
Bas au docteur.
Qu'en dis-tu ?
LE DOCTEUR
Mais très bien !
ZAPATA
Tu n'as vu que l'exorde. 6+6 a
LE DOCTEUR
C'est trop les persifler,fais-leur miséricorde. 6+6 a
ZAPATA
Tu ne les connais pas !écoute seulement, 6+6 a
925 Et je vais te donnerquelque peu d'agrément. 6+6 a
Il reprend à très haute voix.
Comment l'homme a-t-il pu,c'est là ce qui m'étonne, 6+6 a
Supporter six mille ansun sort si monotone ? 6+6 a
Pour amener le mondeà son état parfait. 6+6 a
Il fallait tout changer !messieurs, nous l'avons fait. 6+6 a
930 Ce progrès, ce miracleà dérouter l'histoire, 6+6 a
C'est à notre paysqu'en reviendra la gloire : 6+6 a
Nous offrons en exempleaux autres nations 6+6 a
La révolutiondes révolutions. 6+6 a
Aujourd'hui le Mexiqueest le centre du globe, 6+6 a
935 Et tient la libertédans un pan de sa robe. 6+6 a
Nous la tenons, messieurs !
LE DOCTEUR à demi-voix
Et la tenons si bien, 6+6 a
Qu'à coup sûr pour personne,il n'en sortira rien. 6+6 a
ZAPATA
On interrompt, je crois !
VOIX NOMBREUSES
A la porte ! à la porte ! 6+6 a
Donc nous vivons, messieurs,la vieille Europe est morte ; 6+6 a
940 Notre empire au vieux mondeimposant ses décrets 6+6 a
A pris seul dans ses mainsla cause du progrès. 6+6 a
Tout rent, tout fleurit,tout se métamorphose, 6+6 a
Et l'obscur avenirs'est fait couleur de rose. 6+6 a
Applaudissements.
Or, ces fruits et ces fleurs,ces éclairs, ces rayons, 6+6 a
945 Vous savez bien, messieurs,à qui nous les devons. 6+6 a
Un grand homme a surgimais que dis-je ? un grand homme, 6+6 a
On l't proclamé dieudans Athène et dans Rome, 6+6 a
Un immortel, un être,un héros fabuleux, 6+6 a
Prodigieux, fameux,heureux, miraculeux… 6+6 a
Hourras frénétiques.
950 Voyant de nos destinss'embourber la patache, 6+6 a
A saisi fortementla bride et la cravache 6+6 a
Du monde qui va ntreil s'est fait le parrain, 6+6 a
Et vers cet âge d'oril nous mène grand train. 6+6 a
Ce dieu, dont un regardpeut tout réduire en cendre, 6+6 a
955 Dans nos murs, sous nos toits,il a daigné descendre. 6+6 a
Trné dans sa calècheen guise de pavois, 6+6 a
Nous l'avons vu, messieurs,tout comme je vous vois ! 6+6 a
Et Tampico l'heureuseeut de lui trois journées 6+6 a
Qui feront notre orgueilencor dans mille années. 6+6 a
960 Car nous devons, messieurs,léguer à nos enfants 6+6 a
L'enivrant souvenirde ces jours triomphants. 6+6 a
Voici — j'osai la faireà défaut d'un plus digne 6+6 a
Une relationde ce voyage insigne ; 6+6 a
Celle qui pour les cours,Paris, Londres, Berlin, 6+6 a
965 S'imprime en lettres d'oret sur peau de vélin, 6+6 a
Pour se tirer aprèsen formats populaires 6+6 a
A trois cents millionssix cent mille exemplaires ; 6+6 a
Et mandons, ordonnonsqu'en place du marché. 6+6 a
Dans nos villes et bourgsle tout soit affiché ; 6+6 a
970 Durant que les sculpteursachèvent de l'inscrire 6+6 a
Sur des tables d'airain,de marbre et de porphyre. 6+6 a
Applaudissements.
Premier jour ! le canon,les cloches, le tambour 6+6 a
Annoncent le héros.Il entre avec sa cour. 6+6 a
D'innombrables vivatspoursuivent le cortège. 6+6 a
975 De discours et de fleurson l'accable, on l'assiège. 6+6 a
L'encens fume à ses pieds,on casse l'encensoir. 6+6 a
Au palais de l'alcadeon arriva le soir. 6+6 a
On soupa. Son Altesse,en se mettant à table. 6+6 a
Avait grand appétitet l'air le plus aimable ; 6+6 a
980 Elle a daigné nous direen acceptant de tout : 6+6 a
« Ah ! monsieur, ces perdreauxsont d'un merveilleux gt. » 6+6 a
LE DOCTEUR PÉDRO-GIRON
Le grand homme !
ZAPATA,
Et, trois fois,il but dans un grand verre. 6+6 a
Du vieux bordeaux retourde l'Inde, et du madère, 6+6 a
LE DOCTEUR
Le grand homme !
ZAPATA
Après quoidans le grand salon vert, 6+6 a
985 On a mandé l'orchestreet le bal s'est ouvert. 6+6 a
Le fifre et le hautboismarquaient notre allégresse ; 6+6 a
Le prince a fait valsermadame la duchesse. 6+6 a
LE DOCTEUR
Le grand homme !
ZAPATA
Et bientôt,en bâillant, mais sans bruit. 6+6 a
Il nous a dit : « Bonsoirà tous et bonne nuit. » 6+6 a
Applaudissements.
Bas au docteur.
Es-tu content ?
LE DOCTEUR
Parfait !
ZAPATA
990 Nous ferons mieux encore : 6+6 a
Chacun de mes gaillardsattend qu'on le décore ; 6+6 a
Et je puis te servirune scène à ton gré 6+6 a
Devant un auditoireaussi bien préparé. 6+6 a
Reprenant à haute voix.
Second jour. Le canon,le tambour et les cloches. 6+6 a
995 On offre à tout venantdu rhum et des brioches. 6+6 a
Visite à l'arsenal,aux forts, à l'aqueduc, 6+6 a
Déjeuner sans façonavec monsieur le duc. 6+6 a
Le peuple va jouird'une fête imprévue : 6+6 a
On passe à l'hippodromeune immense revue. 6+6 a
1000 Nos chasseurs noirs, surtout,sont beaucoup applaudis ; 6+6 a
Le prince en les voyant :« C'est moi qui vous le dis, 6+6 a
Mexicains ! vous serezdignes de vos ancêtres ; 6+6 a
Ajoutez seulementtrois boutons à ces guêtres. » 6+6 a
LE DOCTEUR
Grand peuple ! homme étonnant !
ZAPATA
Puis le soir autre bal, 6+6 a
1005 Mais plus gai, costumé,tout comme en carnaval ; 6+6 a
Madame la duchesseétant des plus gentilles, 6+6 a
Avec sa majestédanse à tous les quadrilles. 6+6 a
Applaudissements.
Troisième jour. Tambourset cloches et canons. 6+6 a
Le départ ! en pleurant,hélas ! nous l'apprenons… 6+6 a
1010 Messieurs !… que je respireun moment… je chancelle, 6+6 a
Mon cœur bondit… J'arriveà l'heure solennelle. 6+6 a
Acclamations. L'attention redouble. ZAPATA s'incline sur son siège succombant à l'émotion.
DE TOUTES PARTS
Vive Montézuma !vive monsieur le duc ! 6+6 a
UNE VOIX
Il va tomber, docteur,il prend le mal caduc ! 6+6 a
LE DOCTEUR
Soyez sans crainte, il esttrès ferme sur son centre ; 6+6 a
1015 On ne tombe jamaisquand on est à plat ventre. 6+6 a
ZAPATA continue
Donc c'était le départ.Le prince, à son réveil, 6+6 a
Nous dit : « J'aurais dormid'un assez bon sommeil 6+6 a
N'était une chaleur,je ne sais quoi d'étrange, 6+6 a
Qui tout le long du dosm'agace et me démange. 6+6 a
1020 Si je prenais un bain ?— Majesté, c'est un vœu 6+6 a
Tout royal ; nous, au moins,nous en prenons fort peu. » 6+6 a
On apporte aussitôt,on remplit la baignoire. 6+6 a
Alors, messieurs, alorsle héros, dans sa gloire, 6+6 a
Cet astre des humains,ce soleil, ce flambeau, 6+6 a
1025 A dépouillé sa pourpreet s'est plongé dans l'eau. 6+6 a
Prodige éblouissant !tel dans sa course altière 6+6 a
Le dieu du jour, Phœbusà la blonde crinière, 6+6 a
Un instant fatiguéd'éclairer l'univers. 6+6 a
S'endort entre les brasde Téthys aux yeux verts. 6+6 a
DE TOUTES PARTS
1030 Bien ! très bien ! Quel éclat !quelle vive peinture ! 6+6 a
Mais cet homme a vraimentde la littérature ! 6+6 a
ZAPATA
Puis se réconfortantdes présents de Cérès, 6+6 a
Il prit son chocolatet signa douze arrêts. 6+6 a
Lut son journal, — avecdes petits pains au beurre, 6+6 a
1035 Enfin dans l'onde pureil resta toute une heure. 6+6 a
Or cette eau, ce liquide le ciel lui parla, 6+6 a
Cette eau, ce flot sacré,cette onde, la voila ! 6+6 a
Là, ce chaste élément,dont chaque molécule 6+6 a
A baisé la poitrineet les jambes d'Hercule ! 6+6 a
1040 Il est là, ce flot pur !soutiré de mes mains, 6+6 a
Ces urnes de cristalle gardent aux humainsI ! 6+6 a
Pour vous en garantirl'origine plus sûre, 6+6 a
Chacun de ces flaconsporte ma signature. 6+6 a
Chacun vaut, pour le moins,une montagne d'or ; 6+6 a
1045 J'aurais pu tout garderPartageons ce trésor. 6+6 a
LE DOCTEUR, bas à Zapata
Cette fois c'est trop fort,tu charges trop la bête. 6+6 a
Et l'on va te jeterces flacons à la tête. 6+6 a
ZAPATA, bas au docteur
Cela n'est rien encor,réprime ton caquet 6+6 a
Pour la péroraisonlu vas voir le bouquet. 6+6 a
Il reprend avec feu.
1050 Prenez cet élixir,talisman des familles, 6+6 a
La force de vos fils,la vertu de vos filles ! 6+6 a
Touchez cette reliqueet prêtez un serment 6+6 a
Qui soit à la hauteurde cet événement. 6+6 a
Jurez par ce flaconcomme au jour d'un baptême, 6+6 a
1055 Jurez d'être toujoursce que je fus moi-même : 6+6 a
D'adorer à jamaisla raison du plus fort, 6+6 a
Et de crier toujoursque les vaincus ont tort. 6+6 a
Flattez tous les succès,baisez toutes les bottes, 6+6 a
Vous aurez à ce prixd'éternelles ribotes. 6+6 a
Zapata s'essuie le front et boit le verre d'eau sucrée.
UN MEMBRE DE l'AYUNTAMIENTO
1060 Ribotes ! c'est bien fort,moi, j'aurais mis repas ; 6+6 a
On fait ces choses-là,mais on ne les dit pas. 6+6 a
L'orateur va trop loin.
UN AUTRE
Oui, sa verve l'emporte. 6+6 a
UN LIBÉRAL
Jamais homme d'Étatn'a parlé de la sorte ! 6+6 a
J'aimerais ce discours,s'il était plus gazé. 6+6 a
UN AUTRE
1065 Avec son élixiril se sera grisé. 6+6 a
UN AUTRE, au centre
Écoutez donc, messieurs,l'orateur continue ! 6+6 a
UN AUTRE
Quel talent ! comme il tousseet comme il éternue ! 6+6 a
UN AUTRE
Qu'il est supérieurà nos anciens bavards ! 6+6 a
UN AUTRE
L'autorité, messieurs,est la mère des arts ! 6+6 a
ZAPATA reprenant
1070 Flattez tous les succès,baisez toutes les bottes, 6+6 a
Vous aurez à ce prixd'éternelles ribotes ! 6+6 a
En servant un pouvoir,s'il est bien affermi. 6+6 a
Ne soyez jamais platsni rampants à demi ; 6+6 a
Léchez-le tant qu'il mord !sitôt qu'on le discute. 6+6 a
1075 Mordez-lui les mollets…la veille de sa chute. 6+6 a
Jurez-moi de n'avoirjamais d'opinion ; 6+6 a
De dire ou blanc ou noirsuivant l'occasion ; 6+6 a
Sur le soleil levantde régler votre montre 6+6 a
Jurez de voter pourlorsque vous pensez contre. 6+6 a
1080 Quelque jour, à ce jeu,vous deviendrez barons. 6+6 a
Donc, par cet élixir,jurez !
TOUS, avec enthousiasme
Nous le jurons ! 6+6 a
Grands citoyens ! par vousje puis juger des autres. 6+6 a
Avec attendrissement,
Mexique, ô mon pays,quels beaux jours sont les nôtres ! 6+6 a
Montez à ce bureau,messieurs ! embrassons-nous. 6+6 a
1085 Chacun va recevoirsa bouteille à genoux. 6+6 a
Tous accomplissent la cérémonie. Le docteur Pédro-Giron monte le dernier.
UN MEMBRE, à son voisin
Tiens ! ce fameux docteur,il y monte en personne ! 6+6 a
Vois donc à Zapataquelle accolade il donne. 6+6 a
LE DOCTEUR, bas à Zapata
Merveilleux ! et tu tiensplus que tu ne promets ! 6+6 a
Ceux qui ne l'ont pas vune le croiront jamais, 6+6 a
1090 « Le vrai peut quelquefoisn'être pas vraisemblable 6+6 a
Je savais bien de quoinotre siècle est capable ; 6+6 a
Rien ne m'étonnait pluset tu m'as étonné. 6+6 a
Ce bain mis en flacons !qui l't imaginé ? 6+6 a
La sauce du turbot,de piquante mémoire, 6+6 a
1095 Sera fade à côtéde ce bain dans l'histoire. 6+6 a
Pour te rendre immortelet charmer l'univers, 6+6 a
U suffit qu'un rimeurmette la chose en vers. 6+6 a
Tiens ! à Cardéniova la conter toi-même, 6+6 a
Et ce soir, en soupant,il fera le poème 6+6 a
1100 l'on verra passer,en se tenant la main, 6+6 a
Le sénat du Mexiqueet le sénat romain. 6+6 a
UN MEMBRE, à son Voisin
Ils s'en disent bien long !
LE DOCTEUR, se retournant vers l'assemblée
Permettez que j'exprime 6+6 a
A ce cher duc, messieurs,notre ivresse unanime, 6+6 a
Notre admirationet notre émotion 6+6 a
1105 Pour ce coup de génieet cette invention. 6+6 a
Jamais depuis Memphis,Ninive et Babylone, 6+6 a
Rome et les Byzantins,Paris et la colonne, 6+6 a
Sésostris, Gengis-Kan,Nabuchodonosor, 6+6 a
Auguste et Frédéric,quelques autres encor, 6+6 a
1110 Jamais on n'a donnéde plus illustres marques 6+6 a
Du culte qu'un paysdoit rendre à ses monarques. 6+6 a
J'excepte le Thibet…mais nous l'égalerons ! 6+6 a
Sous le prochain Lamade l'ère nous entrons. 6+6 a
Oui, grâce à notre alcade,à ce grand caractère, 6+6 a
1115 Notre empire, à son tour,émerveille la terre. 6+6 a
Grâce à vous tous, enfin,à ce trait sans pareil, 6+6 a
On ne verra plus riende neuf sous le soleil. 6+6 a
Historique ; mais ce n'est pas dans le nouveau monde que la scène s'est passée.
mètre profils métriques : 6, 6+6, (7)
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