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| = césure
LAM_7/LAM136
Alphonse de LAMARTINE
HARMONIES POÉTIQUES ET RELIGIEUSES
1830
LIVRE QUATRIÈME
HARMONIE XIII
A L'ESPRIT SAINT
CANTIQUE
Tu ne dors pas, souffle de vie. 8 a
Puisque l'univers vit toujours ! 8 b
Ta sainte haleine vivifie 8 a
Les premiers et les derniers jours ! 8 b
5 C'est toi qui répondis au Verbe qui te nomme ! 6+6 c
Quand le chaos muet tressaillit comme un homme 6+6 c
Que d'une voix puissante on éveille en sursaut ; 6+6 d
C'est toi qui t'agitas dans l'inerte matière. 6+6 e
Répétas dans les cieux la parole première, 6+6 e
10 Et comme un bleu tapis déroulas la lumière 6+6 e
Sous les pas du Très-Haut ! 6 d
Tu fis aimer, tu fis comprendre 8 a
Ce que la parole avait dit ; 8 b
Tu fis monter, tu fis descendre 8 a
15 Le Verbe qui se répandit ; 8 b
Tu condensas les airs, lu balanças les nues. 6+6 c
Tu sondas des soleils les routes inconnues. 6+6 c
Tu fis tourner le ciel sur l'immortel essieu ; 6+6 d
Tel qu'un guide avan dans une voie obscure, 6+6 e
20 Tu donnas forme et vie à toute créature, 6+6 e
Et, pour tracer sa route à l'aveugle nature. 6+6 e
Tu marchas devant Dieu ! 6 d
Mais tu ne gardas pas sans cesse 8 a
Les mêmes formes à ses yeux ! 8 b
25 Tu les pris toutes, ô Sagesse, 8 a
Afin de glorifier mieux ! 8 b
Tantôt brise et rayons, tantôt foudre et tempêtes, 6+6 c
Son terrible ou plaintif des harpes des prophètes, 6+6 c
Colonne qu'Israël voit marcher devant soi, 6+6 d
30 Parabole touchante ou sanglant sacrifice. 6+6 e
Sueur des oliviers la veille du supplice, 6+6 e
Grâce et vertu coulant de ce divin calice, 6+6 e
C'est toi ! c'est toujours toi ! 6 d
Le genre humain n'est qu'un seul être 8 a
35 Formé de générations. 8 b
Comme un seul homme on le voit naître, 8 a
Ton souffle est dans ses passions ! 8 b
Jeune, son âme immense, orageuse et profonde. 6+6 c
Déborde à flots d'écume et ravage le monde. 6+6 c
40 Tu sèmes ses flocons de climats en climats ; 6+6 d
Ton accent belliqueux a l'éclat du tonnerre, 6+6 e
Ton pas retentissant secoue au loin la terre, 6+6 e
Et le dieu qui te lance est le dieu de la guerre 6+6 e
Servi par le trépas ! 6 d
45 Tu revêts la forme sanglante 8 a
D'un héros, d'un peuple, d'un roi ! 8 b
Tu foules la terre tremblante 8 a
Qui passe et se tait devant toi ! 8 b
Mais quand le sang gla dans ses veines s'arrête, 6+6 c
50 Le genre humain, qui sent que son heure s'apprête, 6+6 c
S'élève de la vie à l'immortalité ; 6+6 d
Tu marches devant lui, sous l'ombre d'une ie ! 6+6 e
D'un immense désir la terre est possée. 6+6 e
Et dans les flots d'erreurs dont elle est inone, 6+6 e
55 Cherche une vérité ! 6 d
Alors tu descends ! lu respires 8 a
Dans ces sages, flambeaux mortels. 8 b
Dans ces mélodieuses lyres 8 a
Qui soupirent près des autels ! 8 b
60 La pensée est ton feu ! la parole est ton glaive ! 6+6 c
L'esprit humain flottant s'abaisse et se relève, 6+6 c
Comme au roulis des mers le mât des matelots ! 6+6 d
Mais tu choisis surtout les bardes dans la foule. 6+6 e
Dans leurs chants immortels l'inspiration coule, 6+6 e
65 Cette onde harmonieuse est le fleuve qui roule 6+6 e
Le plus d'or dans ses flots ! 6 d
Où sont-ils, âme surhumaine, 8 a
Ces instruments de tes desseins ? 8 b
Où sont-ils dès que ton haleine 8 a
70 A cessé d'embraser leurs seins ? 8 b
Ils meurent les premiers !… Foyer qui se consume, 6+6 c
Flots qui rongent la rive et fondent en écume. 6+6 c
Arbres brisés du vent sous qui l'herbe a ployé ! 6+6 d
En néant avant nous ils viennent se résoudre. 6+6 e
75 Tu jettes leur orgueil et leur nom dans la poudre. 6+6 e
Et ton doigt les éteint, comme il éteint la foudre 6+6 e
Quand elle a foudroyé ! 6 d
Il se fait un vaste silence ! 8 a
L'esprit dans ses ombres se perd. 8 b
80 Le doute étouffe l'espérance 8 a
Et croit que le ciel est désert ! 8 b
Puis tel qu'un chêne obscur, longtemps avant l'orage 6+6 c
Dont frémit tout à coup l'immobile feuillage, 6+6 c
Et dont l'oiseau s'enfuit sans entendre aucun son ; 6+6 d
85 Le monde où nul éclair ne te précède encore, 6+6 e
D'un inquiet ennui se trouble et se dévore, 6+6 e
Et comme à son insu, de l'esprit qu'il ignore 6+6 e
Sent le divin frisson ! 6 d
Et le ciel se couvre ; et la terre 8 a
90 Croit qu'un astre s'est approché, 8 b
Et nul ne comprend ce mystère, 8 a
Car ton maître est un Dieu caché ! 8 b
Mais moi je te comprends, car je baisse la tête ! 6+6 c
J'entends venir de loin la céleste tempête. 6+6 c
95 Et d'un effroi stupide impassible témoin, 6+6 d
Quand de l'antique jour les clartés s'affaiblissent. 6+6 e
Que des lois et des mœurs les colonnes fléchissent, 6+6 e
Que la terre se trouble et que les cieux pâlissent, 6+6 e
Je dis : Il n'est pas loin ! 6 d
100 Les voilà ces heures divines ! 8 a
Les voilà ! mes yeux, ouvrez-vous ! 8 b
La poussière de nos ruines 8 a
S'élève entre le jour et nous ! 8 b
De quel vent soufflera l'esprit que l'homme appelle ? 6+6 c
105 L'âme avec plus de soif jamais l'entendit-elle ? 6+6 c
Jamais passé sur nous croula-t-il plus entier ? 6+6 d
Jamais l'homme vit-il à l'horizon des âges 6+6 e
Gronder sur l'avenir de plus sombres orages ? 6+6 e
Et te prépara-t-il entre plus de nuages 6+6 e
110 Un plus divin sentier ? 6 d
Fends la nue, et suscite un homme ! 8 a
Un homme palpitant de toi ! 8 b
Que son front rayonnant le nomme 8 a
Aux regards qui cherchent ta foi ! 8 b
115 D'un autre Sinaï fais flamboyer la cime, 6+6 c
Retrempe au feu du ciel la parole sublime. 6+6 c
Ce glaive de l'esprit émoussé par le temps ! 6+6 d
De ce glaive vivant arme une main mortelle, 6+6 e
Parais, descends, travaille, agite, et renouvelle, 6+6 e
120 Et ranime de l'œil, et du vent de ton aile 6+6 e
Tes derniers combattants ! 6 d
Que la mer des erreurs s'amasse ! 8 a
Qu'elle soulève son limon 8 b
Pour engloutir l'heureuse race 8 a
125 De ceux qui marchent en ton nom ! 8 b
Sur la mer en courroux que ta droite s'étende ! 6+6 c
Que ton souffle nous creuse une route, et suspende 6+6 c
Ces flots qui sous nos pas s'ouvrent comme un tombeau ! 6+6 d
Que le gouffre trom sur lui-même s'écroule ! 6+6 e
130 Que l'écume des temps dans ses abîmes roule, 6+6 e
Et que le genre humain la traverse et s'écoule, 6+6 e
Vers un désert nouveau ! 6 d
Je le vois ! mon regard devance 8 a
Le pas des siècles plus heureux ! 8 b
135 La colonne de l'espérance 8 a
Marche et m'éclaire de ses feux ! 8 b
Tu souffleras plus pur sur des plages nouvelles ! 6+6 c
Ton aigle pour toujours n'a pas plié ses ailes, 6+6 c
La nature à son Dieu garde encor de l'encens, 6+6 d
140 Il est encor des pleurs sous de saintes paupières, 6+6 e
Du ciel dans les soupirs, dans les cœurs des prières, 6+6 e
Et sur ces harpes d'or qui chantent les dernières 6+6 e
Quelques divins accents ! 6 d
Oh ! puissé-je, souffle suprême, 8 a
145 Instrument de promission. 8 b
Sous ton ombre frémir moi-même, 8 a
Comme une harpe de Sion ! 8 b
Puissé-je, écho mourant des paroles de vie, 6+6 c
De l'hymne universel être une voix choisie, 6+6 c
150 Et quand j'aurai chan mon cantique au Seigneur, 6+6 d
Plein de l'esprit divin qui fait aimer et croire, 6+6 e
Ne laisser ici-bas pour trace et pour mémoire, 6+6 e
Qu'une voix dans le temple, un son qui dise : Gloire 6+6 e
Au souffle créateur ! 6 d
mètre profils métriques : 8, 6, 6+6
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