Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
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e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LAM_7/LAM124
Alphonse de LAMARTINE
HARMONIES POÉTIQUES ET RELIGIEUSES
1830
LIVRE QUATRIÈME
HARMONIE I
HYMNE DE LA MORT
Élève-toi, mon âme, au-dessus de toi-même, 6+6 a
Voici l'épreuve de ta foi ! 8 b
Que l'impie assistant à ton heure suprême 6+6 a
Ne dise pas : Voyez, il tremble comme moi ! 6+6 b
5 La voilà, cette heure suivie 8 a
Par l'aube de l'éternité, 8 b
Cette heure qui juge la vie 8 a
Et sonne l'immortalité ; 8 b
Et tu pâlirais devant elle ? 8 a
10 Âme à l'espérance infidèle ! 8 a
Tu démentirais tant de jours. 8 a
Tant de nuits, passés à te dire, 8 b
Je vis, je languis, je soupire ! 8 b
Ah ! mourons pour vivre toujours ! 8 a
15 Oui, tu meurs ! déjà ta dépouille 8 a
De la terre subit les lois, 8 b
Et de la fange qui te souille 8 a
Déjà lu ne sens plus le poids ; 8 b
Sentir ce vil poids c'était vivre ! 8 a
20 Et le moment qui te délivre, 8 a
Les hommes rappellent mourir ! 8 a
Tel un esclave libre à peine 8 b
Croit qu'on emporte avec sa chaîne 8 b
Ses bras qu'il ne sent plus souffrir ! 8 a
25 Ah ! laisse aux sens, à la matière, 8 a
Ces illusions du tombeau ! 8 b
Toi, crois-en à ta vie entière, 8 a
A la foi qui fut ton flambeau ! 8 b
Crois-en à cette soif sublime, 8 a
30 A ce pressentiment intime 8 a
Oui se sent survivre après toi ! 8 a
Meurs, mon âme, avec assurance ; 8 b
L'amour, la vertu, l'espérance. 8 b
En savent plus qu'un jour d'effroi ! 8 a
35 Qu'était-ce que la vie ? Exil, ennui, souffrance, 6+6 a
Un holocauste à l'espérance, 8 a
Un long acte de foi chaque jour répété ! 6+6 a
Tandis que l'insensé buvait à plein calice, 6+6 b
Tu versais à tes pieds ta coupe en sacrifice, 6+6 b
40 El lu disais : J'ai soif, mais d'immortalité ! 6+6 a
Tu vas boire à la source vive 8 a
D'où coulent les temps et les jours. 8 b
Océan sans fond et sans rive. 8 a
Toujours plein, débordant toujours ! 8 b
45 L'astre que tu vas voir éclore 8 a
Ne mesure plus par aurore 8 a
La vie, hélas ! prête à tarir, 8 a
Comme l'astre de nos demeures 8 b
Qui n'ajoute au présent des heures 8 b
50 Qu'en retranchant à l'avenir ! 8 a
Oublie un monde qui s'efface, 8 a
Oublie une obscure prison. 8 b
Que ton regard privé d'espace 8 a
Découvre enfin son horizon ! 8 b
55 Vois-tu ces voûtes azurées 8 a
Dont les arches démesurées 8 a
S'entr'ouvrent pour s'étendre encor .' 8 a
Bientôt leur courbe incalculable 8 b
Te sera ce qu'un grain de sable 8 b
60 Est au vol brûlant du condor ! 8 a
Tu vas voir la céleste armée 8 a
Déployer ses orbes sans fin. 8 b
Comme une poussière animée 8 a
Qu'agite le souffle divin ! 8 b
65 Ces doux soleils dont ta paupière 8 a
Devinait de loin la lumière 8 a
Vont s'épanouir sous tes yeux. 8 a
Et chacun d'eux dans son langage 8 b
Va te saluer au passage 8 b
70 Du grand nom que chantent les cieux ! 8 a
Tu leur demanderas les rêves 8 a
Que ton cœur élançait vers eux. 8 b
Pendant ces nuits où tu te lèves 8 a
Pour te pénétrer de leurs feux ! 8 b
75 Tu leur demanderas les traces 8 a
Des êtres chéris dont les places 8 a
Restèrent vides ici-bas, 8 a
El tu sauras sur quelle flamme 8 b
Leur âme arrachée à ton âme 8 b
80 En montant imprima ses pas ! 8 a
Tu verras quels êtres habitent 8 a
Ces palais flottants de l'éther 8 b
Qui nagent, volent, ou palpitent, 8 a
Enfants de la flamme et de l'air, 8 b
85 Chœurs qui chantent, voix qui bénissent, 8 a
Miroirs de feu qui réfléchissent, 8 a
Ailes qui voilent .Jéhova ! 8 a
Poudre vivante de ce temple, 8 b
Dont chaque atome le contemple, 8 b
90 L'adore et lui crie : Hosanna ! 8 a
Dans ce pur océan de vie 8 a
Bouillonnant de joie et d'amour, 8 b
La mort va te plonger ravie 8 a
Comme une étincelle au grand jour ! 8 b
95 Son flux vers l'éternelle aurore 8 a
Va te porter, obscure encore, 8 a
Jusqu'à l'astre qui toujours luit, 8 a
Comme un flot que la mer soulève 8 b
Roule aux bords où le jour se lève 8 b
100 Sa brillante écume, et s'enfuit ! 8 a
Détestais-tu la tyrannie, 8 a
Adorais-tu la liberté, 8 b
De l'oppression impunie 8 a
Ton œil était-il révolté ; 8 b
105 Avais-tu soif de la justice, 8 a
Horreur du mal, honte du vice ; 8 a
Versais-tu des larmes de sang 8 a
Quand l'imposture ou la bassesse 8 b
Livraient l'innocente faiblesse 8 b
110 Aux serres du crime puissant ; 8 a
Sentais-tu la lutte éternelle 8 a
Du bonheur et de la vertu. 8 b
Et la lutte encor plus cruelle 8 a
Du cœur par le cœur combattu ; 8 b
115 Rougissais-tu de ce nom d'homme 8 a
Dont le ciel rit, quand l'orgueil nomme 8 a
Cette machine à deux ressorts, 8 a
L'un de boue et l'autre de flamme. 8 b
Trop avili s'il n'est qu'une âme. 8 b
120 Trop sublime s'il n'est qu'un corps ; 8 a
Pleurais-tu quand la calomnie 8 a
Souillait la gloire de poison, 8 b
Ou quand les ailes du génie 8 a
Se brisaient contre sa prison ; 8 b
125 Pleurais-tu lorsque Philomèle, 8 a
Couvant ses petits sous son aile, 8 a
Tombait sous l'ongle du vautour ; 8 a
Quand la faux tranchait une rose. 8 b
Ou que la vierge à peine éclose 8 b
130 Mourait à son premier amour ; 8 a
Et sentais-tu ce vide immense 8 a
Et cet inexorable ennui, 8 b
Et ce néant de l'existence, 8 a
Cercle étroit qui tourne sur lui ; 8 b
135 Même en l'enivrant de délices 8 a
Buvais-tu le fond des calices ; 8 a
Heureuse encor n'avais-tu pas 8 a
Et ces amertumes sans causes. 8 b
Et ces désirs brûlants de choses 8 b
140 Qui n'ont que leurs noms ici-bas ? 8 a
Triomphe donc, âme exilée ; 8 a
Tu vas dans un monde meilleur. 8 b
Où toute larme est consolée, 8 a
Où tout désir est le bonheur ! 8 b
145 Où l'être qui se purifie 8 a
N'emporte rien de cette vie 8 a
Que ce qu'il a d'égal aux dieux, 8 a
Comme la cime encore obscure 8 b
Dont l'ombre décroît, à mesure 8 b
150 Que le jour monte dans les cieux. 8 a
Là sont tant de larmes versées 8 a
Pendant ton exil sous les cieux, 8 b
Tant de prières élancées 8 a
Du fond d'un cœur tendre et pieux 8 b
155 Là tant de soupirs de tristesse, 8 a
Tant de beaux songes de jeunesse ! 8 a
Là les amis qui t'ont quitté, 8 a
Épiant ta dernière haleine. 8 b
Te tendent leur main déjà pleine 8 b
160 Des dons de l'immortalité ! 8 a
Ne vois-tu pas des étincelles 8 a
Dans les ombres poindre et flotter 8 b
N'entends-tu pas frémir les ailes 8 a
De l'esprit qui va l'emporter ? 8 b
165 Bientôt, nageant de nue en nue, 8 a
Tu vas te sentir revêtue 8 a
Des rayons du divin séjour, 8 a
Comme une onde qui s'évapore 8 b
Contracte en montant vers l'aurore 8 b
170 La chaleur et l'éclat du jour ! 8 a
Encore une heure de souffrance, 8 a
Encore un douloureux adieu ! 8 b
Puis endors-toi dans l'espérance 8 a
Pour te réveiller dans ton Dieu ! 8 b
175 Tel sur la foi de ses étoiles 8 a
Le pilote pliant ses voiles 8 a
Pressent la terre sans la voir. 8 a
S'endort en rêvant les rivages 8 b
Et trouve en s'éveillant des plages 8 b
180 Plus sereines que son espoir. 8 a
mètre profils métriques : 8, 6+6
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