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LAM_7/LAM105
Alphonse de LAMARTINE
HARMONIES POÉTIQUES ET RELIGIEUSES
1830
LIVRE DEUXIÈME
HARMONIE VI
IMPRESSIONS DU MATIN ET DU SOIR
HYMNE
L'Orient jaillit comme un fleuve ; 8 a
La lumière coule à long flot, 8 b
La terre lui sourit et le ciel s'en abreuve. 6+6 a
Et de ces cieux vieillis l'aube sort aussi neuve 6+6 a
5 Que l'aurore du jour qui sortit du Très-Haut. 6+6 b
Soleil, voile de feu dont ton maître se couvre, 6+6 a
Quand tu reviens frapper les voûtes de la nuit, 6+6 b
Le firmament résonne et l'espace s'entr'ouvre, 6+6 a
Et Jéhovah se montre à l'ombre qui te fuit. 6+6 b
10 La terre épanouie au rayon qui la dore. 6+6 a
Nage plus mollement dans l'élastique éther, 6+6 b
Comme un léger nuage enlevé par l'aurore 6+6 a
Plane avec majesté sur les vagues de l'air. 6+6 b
Les dômes des forêts que les brises agitent, 6+6 a
15 Bercent le frais, et l'ombre, et les chœurs des oiseaux, 6+6 b
Et le souffle plus pur des ondes qui palpitent 6+6 a
Parfume en s'exhalant le lit voilé des eaux. 6+6 b
Et des pleurs de la nuit le sillon boit la pluie, 6+6 a
Et les lèvres des fleurs distillent leurs encens. 6+6 b
20 Et d'un sein plus léger l'homme aspire la vie, 6+6 a
Et l'esprit plus divin se dégage des sens. 6+6 b
Et tandis que le vice, amoureux des ténèbres. 6+6 a
Ferme les yeux au jour et regrette la nuit, 6+6 b
Et que l'impur serpent presse ses nœuds funèbres, 6+6 a
25 Pour échapper plus vite au rayon qui le suit. 6+6 b
Celui qui sait d'où vient l'aurore qui se lève 6+6 a
Ouvre ses yeux noyés d'allégresse et d'amour, 6+6 b
Il reprend son fardeau que la vertu soulève. 6+6 a
S'élance, et dit : Marchons à la clarté du jour ! 6+6 b
30 Mais déjà les rayons remontent des vallées, 6+6 a
Et le chant des pasteurs plus plaintif et plus lent, 6+6 b
Comme la triste voix des heures écoulées, 6+6 a
Comme le vent qui meurt sur les cimes voilées, 6+6 a
Semble pleurer en s'exhalant. 8 b
35 L'œil aux flancs des coteaux poursuivant la lumière, 6+6 a
Sens le jour défaillir sous sa morne paupière, 6+6 a
Les brises du malin se posent pour dormir, 6+6 a
Le rivage se tait, la voile tombe vide, 6+6 b
La mer roule à ses bords la nuit dans chaque ride, 6+6 b
40 Et tout ce qui chantait semble à présent gémir. 6+6 a
Et les songes menteurs, et les vaines pensées. 6+6 a
Que du front des mortels la lumière a chassées. 6+6 a
Et que la nuit couvait sous ses ailes glacées. 6+6 a
Descendent avec elle et voilent l'horizon ; 6+6 a
45 L'illusion se glisse en notre âme amollie, 6+6 b
Et l'air, plein de silence et de mélancolie, 6+6 b
Des pavots du sommeil enivre la raison. 6+6 a
Et l'oiseau de la nuit sort des antres funèbres. 6+6 a
Ouvre avec volupté ses yeux lourds aux ténèbres. 6+6 a
50 Gémit, et croit chanter, dans l'ombre où son œil luit ; 6+6 a
Et l'homme dont les pas et le cœur aiment l'ombre, 6+6 b
Dit en portant les yeux au firmament plus sombre : 6+6 b
Sortons, Dieu s'est caché ; sortons, voici la nuit ! 6+6 a
El la foule ressemble, en son bruyant délire, 6+6 a
55 A ces aveugles passagers 8 b
Qui prolongent leur veille aux accords de la lyre, 6+6 a
Et dansent sur le pont pendant que le navire 6+6 a
De l'ombre et de la vague affronte les dangers. . 6+6 b
Mais nous, enfants du jour, qui croyons aux étoiles. 6+6 a
60 Nous qui savons l'écueil sous l'écume caché, 6+6 b
Aux hasards de ces nuits ne livrons pas nos voiles, 6+6 a
Sur le phare immortel veillons l'œil attaché. 6+6 b
Rassemblons-nous, prions ! Pendant que le jour tombe, 6+6 a
Craignons, craignons la nuit, image de la tombe ; 6+6 a
65 Dieu seul tient la lumière et l'ombre dans sa main ; 6+6 a
Qui sait si dans le vide où son vieux disque nage, 6+6 b
Le soleil de nos bords reprendra le chemin ? 6+6 a
Prions ! Le jour au jour ne donne point de gage, 6+6 b
Et le dernier rayon, en sortant du nuage, 6+6 b
70 Ne nous a pas juré de remonter demain. 6+6 a
En Dieu seul, ô mortels, fermons donc nos paupières ! 6+6 a
Et du jour à la nuit remettant l'encensoir, 6+6 b
Endormons-nous dans nos prières. 8 a
Comme le jour s'endort dans les parfums du soir. 6+6 b
75 Chaque heure a son tribut, son encens, son hommage, 6+6 a
Qu'elle apporte en mourant aux pieds de Jéhova ; 6+6 b
Ce n'est qu'un même sens dans un divers langage, 6+6 a
Le matin et le soir lui disent : Hosanna ! 6+6 b
La nature a deux chants, de bonheur, de tristesse. 6+6 a
80 Qu'elle rend tour à tour ainsi que noire cœur ; 6+6 b
De l'une à l'autre note elle passe sans cesse : 6+6 a
Homme ! l'une est ta joie, et l'autre ta douleur ! 6+6 b
L'une sort du matin et chante avec l'aurore, 6+6 a
L'autre gémit le soir un triste et long adieu ; 6+6 b
85 Au premier, au second, le ciel répond : Adore ! 6+6 a
Et de l'hymne éternel le mot unique est Dieu ! 6+6 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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