Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAM_3/LAM71
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
TROISIÈMES MÉDITATIONS
1812-1847
DEUXIÈME MÉDITATION
SULTAN, LE CHEVAL ARABE
À M. DE CHAMPEAUX
1838
Le soleil du désert | ne luit plus sur ta lame, 6+6 a
Ô mon large yatagan | plus poli qu’un miroir, 6+6 b
Où Kaïdha mirait | son visage de femme, 6+6 a
Comme un rayon sortant | des ombres d’un ciel noir ? 6+6 b
5 Tu pends par la poignée | au pilier d’une tente, 6+6 a
Avec mon narghilé, | ma selle, et mon fusil ; 6+6 b
Et, semblable à mon cœur | qui s’use dans l’attente, 6+6 a
La rouille et le repos | te dévorent le fil ! 6+6 b
Et toi, mon fier Sultan, | à la crinière noire, 6+6 a
10 Coursier né des amours | de la foudre et du vent, 6+6 b
Dont quelques poils de jais | tigraient la blanche moire, 6+6 a
Dont le sabot mordait | sur le sable mouvant, 6+6 b
Que fais-tu maintenant, | cher berceur de mes rêves ? 6+6 a
Mon oreille aimait tant | ton pas mélodieux, 6+6 b
15 Quand la bruyante mer, | dont nous suivions les grèves, 6+6 a
Nous jetait sa fraîcheur | et son écume aux yeux ! 6+6 b
Tu rengorgeais si beau | ton cou marbré de veines, 6+6 a
Quand celle que ma main | sur ta croupe élançait 6+6 b
T’appelait par ton nom, | et, retirant tes rênes, 6+6 a
20 Marquetait de baisers | ton poil qui frémissait ! 6+6 b
Je la livrais sans peur | à ton galop sauvage ! 6+6 a
La vague de la mer, | dans le golfe dormant, 6+6 b
Moins amoureusement | berce près du rivage 6+6 a
La barque abandonnée | à son balancement : 6+6 b
25 Car, au plus léger cri | qui gonflait sa poitrine, 6+6 a
Tu t’arrêtais tournant | ton bel œil vers tes flancs, 6+6 b
Et, retenant ton feu | dans ta rose narine, 6+6 a
De l’écume du mors | tu lavais ses pieds blancs. 6+6 b
Penses-tu quelquefois, | le front bas vers la terre, 6+6 a
30 À ce maître venu | dans ton désert natal, 6+6 b
Qui parlait sur ta croupe | une langue étrangère, 6+6 a
Et qui t’avait payé | d’un monceau de métal ? 6+6 b
Penses-tu quelquefois | à la jeune maîtresse 6+6 a
Qui pour parer ta bride, | houri d’un autre ciel, 6+6 b
35 Détachait les rubis | ou les fleurs de sa tresse, 6+6 a
Et dont la main t’offrait | de blancs cristaux de miel ? 6+6 b
Où sont-ils ? que font-ils ? | quels climats les retiennent ? 6+6 a
Les vaisseaux dont tu vois | souvent blanchir les mâts, 6+6 b
Ces grands oiseaux des mers | qui vont et qui reviennent, 6+6 a
40 Sur ton sable doré | ne les déposent pas. 6+6 b
Ne les hennis-tu pas | de ton naseau sonore ? 6+6 a
Ton cœur dans ton poitrail | ne bat-il pas d’amour, 6+6 b
Quand ton oreille entend | dans les champs de l’aurore 6+6 a
Le nom, cher au Liban, | de ce maître d’un jour ? 6+6 b
45 Oh ! oui, car de ta selle, | en détachant mes armes, 6+6 a
Tu me jetas tout triste | un regard presque humain, 6+6 b
Je vis ton œil bronzé | se ternir, et deux larmes, 6+6 a
Le long de tes naseaux, | glissèrent sur ma main ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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