Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAM_1/LAM6
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
PREMIÈRES MÉDITATIONS
1820
SIXIÈME MÉDITATION
LE VALLON
Mon cœur, lassé de tout, même de l’espérance, 6+6 a
N’ira plus de ses vœux importuner le sort ; 6+6 b
Prêtez-moi seulement, vallon de mon enfance, 6+6 a
Un asile d’un jour pour attendre la mort. 6+6 b
5 Voici l’étroit sentier de l’obscure vallée : 6+6 a
Du flanc de ces coteaux pendent des bois épais, 6+6 b
Qui, courbant sur mon front leur ombre entremêlée, 6+6 a
Me couvrent tout entier de silence et de paix. 6+6 b
Là, deux ruisseaux cachés sous des ponts de verdure 6+6 a
10 Tracent en serpentant les contours du vallon ; 6+6 b
Ils mêlent un moment leur onde et leur murmure, 6+6 a
Et non loin de leur source ils se perdent sans nom. 6+6 b
La source de mes jours comme eux s’est écoulée ; 6+6 a
Elle a passé sans bruit, sans nom et sans retour : 6+6 b
15 Mais leur onde est limpide, et mon âme troublée 6+6 a
N’aura pas réfléchi les clartés d’un beau jour. 6+6 b
La frcheur de leurs lits, l’ombre qui les couronne, 6+6 a
M’enchaînent tout le jour sur les bords des ruisseaux ; 6+6 b
Comme un enfant bercé par un chant monotone, 6+6 a
20 Mon âme s’assoupit au murmure des eaux. 6+6 b
Ah ! c’est là qu’entou d’un rempart de verdure, 6+6 a
D’un horizon borné qui suffit à mes yeux, 6+6 b
J’aime à fixer mes pas, et, seul dans la nature, 6+6 a
À n’entendre que l’onde, à ne voir que les cieux. 6+6 b
25 J’ai trop vu, trop senti, trop aimé dans ma vie ; 6+6 a
Je viens chercher vivant le calme du Léthé. 6+6 b
Beaux lieux, soyez pour moi les bords où l’on oublie : 6+6 a
L’oubli seul désormais est ma félicité. 6+6 b
Mon cœur est en repos, mon âme est en silence ; 6+6 a
30 Le bruit lointain du monde expire en arrivant, 6+6 b
Comme un son éloigné qu’affaiblit la distance, 6+6 a
À l’oreille incertaine apporté par le vent. 6+6 b
D’ici je vois la vie, à travers un nuage, 6+6 a
S’évanouir pour moi dans l’ombre du passé ; 6+6 b
35 L’amour seul est resté, comme une grande image 6+6 a
Survit seule au réveil dans un songe effacé. 6+6 b
Repose-toi, mon âme, en ce dernier asile, 6+6 a
Ainsi qu’un voyageur qui, le cœur plein d’espoir, 6+6 b
S’assied, avant d’entrer, aux portes de la ville, 6+6 a
40 Et respire un moment l’air embaumé du soir. 6+6 b
Comme lui, de nos pieds secouons la poussière ; 6+6 a
L’homme par ce chemin ne repasse jamais : 6+6 b
Comme lui, respirons au bout de la carrière 6+6 a
Ce calme avant-coureur de l’éternelle paix. 6+6 b
45 Tes jours, sombres et courts comme les jours d’automne, 6+6 a
Déclinent comme l’ombre au penchant des coteaux ; 6+6 b
L’amitié te trahit, la pitié t’abandonne, 6+6 a
Et, seule, tu descends le sentier des tombeaux. 6+6 b
Mais la nature est là qui t’invite et qui t’aime ; 6+6 a
50 Plonge-toi dans son sein qu’elle t’ouvre toujours : 6+6 b
Quand tout change pour toi, la nature est la même, 6+6 a
Et le même soleil se lève sur tes jours. 6+6 b
De lumière et d’ombrage elle t’entoure encore : 6+6 a
Détache ton amour des faux biens que tu perds ; 6+6 b
55 Adore ici l’écho qu’adorait Pythagore, 6+6 a
Prête avec lui l’oreille aux célestes concerts. 6+6 b
Suis le jour dans le ciel, suis l’ombre sur la terre ; 6+6 a
Dans les plaines de l’air vole avec l’aquilon ; 6+6 b
Avec le doux rayon de l’astre du mystère. 6+6 a
60 Glisse à travers les bois dans l’ombre du vallon. 6+6 b
Dieu, pour le concevoir, a fait l’intelligence : 6+6 a
Sous la nature enfin découvre son auteur ! 6+6 b
Une voix à l’esprit parle dans son silence : 6+6 a
Qui n’a pas entendu cette voix dans son cœur ? 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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