Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAM_1/LAM2
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
PREMIÈRES MÉDITATIONS
1820
DEUXIÈME MÉDITATION
L’HOMME
À LORD BYRON
Toi, dont le monde encore | ignore le vrai nom, 6+6 a
Esprit mystérieux, | mortel, ange ou démon, 6+6 a
Qui que tu sois, Byron, | bon ou fatal génie, 6+6 b
J’aime de tes concerts | la sauvage harmonie, 6+6 b
5 Comme j’aime le bruit | de la foudre et des vents 6+6 a
Se mêlant dans l’orage | à la voix des torrents ! 6+6 a
La nuit est ton séjour, | l’horreur est ton domaine : 6+6 b
L’aigle, loin des déserts, | dédaigne ainsi la plaine ; 6+6 b
Il ne veut, comme toi, | que des rocs escarpés 6+6 a
10 Que l’hiver a blanchis, | que la foudre a frappés, 6+6 a
Des rivages couverts | des débris du naufrage, 6+6 b
Ou des champs tout noircis | des restes de carnage : 6+6 b
Et tandis que l’oiseau | qui chante ses douleurs 6+6 a
Bâtit au bord des eaux | son nid parmi les fleurs, 6+6 a
15 Lui des sommets d’Athos | franchit l’horrible cime, 6+6 b
Suspend aux flancs des monts | son aire sur l’abîme, 6+6 b
Et là, seul, entouré | de membres palpitants, 6+6 a
De rochers d’un sang noir | sans cesse dégouttants, 6+6 a
Trouvant sa volupté | dans les cris de sa proie, 6+6 b
20 Bercé par la tempête, | il s’endort dans sa joie. 6+6 b
Et toi, Byron, semblable | ai ce brigand des airs, 6+6 a
Les cris du désespoir | sont tes plus doux concerts. 6+6 a
Le mal est ton spectacle, | et l’homme est ta victime. 6+6 b
Ton œil, comme Satan, | a mesuré l’abîme, 6+6 b
25 Et ton âme, y plongeant | loin du jour et de Dieu, 6+6 a
A dit à l’espérance | un éternel adieu ! 6+6 a
Comme lui, maintenant, | régnant dans les ténèbres, 6+6 b
Ton génie invincible | éclate en chants funèbres ; 6+6 b
Il triomphe, et ta voix, | sur un mode infernal, 6+6 a
30 Chante l’hymne de gloire | au sombre dieu du mal. 6+6 a
Mais que sert de lutter | contre sa destinée ? 6+6 b
Que peut contre le sort | la raison mutinée ? 6+6 b
Elle n’a, comme l’œil, | qu’un étroit horizon. 6+6 a
Ne porte pas plus loin | tes yeux ni ta raison : 6+6 a
35 Hors de là tout nous fuit, | tout s’éteint, tout s’efface ; 6+6 b
Dans ce cercle borné | Dieu t’a marqué ta place : 6+6 b
Comment ? pourquoi ? qui sait ? | De ses puissantes mains 6+6 a
Il a laissé tomber | le monde et les humains, 6+6 a
Comme il a dans nos champs | répandu la poussière, 6+6 b
40 Ou semé dans les airs | la nuit et la lumière ; 6+6 b
Il le sait, il suffit : | l’univers est à lui, 6+6 a
Et nous n’avons à nous | que le jour d’aujourd’hui ! 6+6 a
Notre crime est d’être homme | et de vouloir connaître : 6+6 b
Ignorer et servir, | c’est la loi de notre être. 6+6 b
45 Byron, ce mot est dur : | longtemps j’en ai douté ; 6+6 a
Mais pourquoi reculer | devant la vérité ? 6+6 a
Ton titre devant Dieu, | c’est d’être son ouvrage, 6+6 b
De sentir, d’adorer | ton divin esclavage ; 6+6 b
Dans l’ordre universel | faible atome emporté, 6+6 a
50 D’unir à ses desseins | ta libre volonté, 6+6 a
D’avoir été conçu | par son intelligence, 6+6 b
De le glorifier | par ta seule existence : 6+6 b
Voilà, voilà ton sort. | Ah ! loin de l’accuser, 6+6 a
Baise plutôt le joug | que tu voudrais briser ; 6+6 a
55 Descends du rang des dieux | qu’usurpait ton audace ; 6+6 b
Tout est bien, tout est bon, | tout est grand à sa place ; 6+6 b
Aux regards de celui | qui fit l’immensité 6+6 a
L’insecte vaut un monde : | ils ont autant coûté ! 6+6 a
Mais cette loi, dis-tu, | révolte ta justice ; 6+6 b
60 Elle n’est a tes yeux | qu’un bizarre caprice, 6+6 b
Un piége où la raison | trébuche a chaque pas. 6+6 a
Confessons-la, Byron, | et ne la jugeons pas. 6+6 a
Comme toi, ma raison | en ténèbres abonde, 6+6 b
Et ce n’est pas à moi | de t’expliquer le monde. 6+6 b
65 Que celui qui l’a fait | t’explique l’univers : 6+6 a
Plus je sonde l’abîme, | hélas ! plus je m’y perds. 6+6 a
Ici-bas, la douleur | à la douleur s’enchaîne, 6+6 b
Le jour succède au jour, | et la peine à la peine. 6+6 b
Borné dans sa nature, | infini dans ses vœux, 6+6 a
70 L’homme est un dieu tombé | qui se souvient des cieux : 6+6 a
Soit que, déshérité | de son antique gloire, 6+6 b
De ses destins perdus | il garde la mémoire ; 6+6 b
Soit que de ses désirs | l’immense profondeur 6+6 a
Lui présage de loin | sa future grandeur, 6+6 a
75 Imparfait ou déchu, | l’homme est le grand mystère. 6+6 b
Dans la prison des sens | enchaîné sur la terre, 6+6 b
Esclave, il sent un cœur | né pour la liberté ; 6+6 a
Malheureux, il aspire | à la félicité ; 6+6 a
Il veut sonder le monde, | et son œil est débile ; 6+6 b
80 Il veut aimer toujours : | ce qu’il aime est fragile ! 6+6 b
Tout mortel est semblable | et l’exilé d’Éden : 6+6 a
Lorsque Dieu l’eut banni | du céleste jardin, 6+6 a
Mesurant d’un regard | les fatales limites, 6+6 b
Il s’assit en pleurant | aux portes interdites. 6+6 b
85 Il entendit de loin | dans le divin séjour 6+6 a
L’harmonieux soupir | de l’éternel amour, 6+6 a
Les accents du bonheur, | les saints concerts des anges 6+6 b
Qui, dans le sein de Dieu, | célébraient ses louanges ; 6+6 b
Et, s’arrachant du ciel | dans un pénible effort, 6+6 a
90 Son œil avec effroi | retomba sur son sort. 6+6 a
Malheur à qui du fond | de l’exil de la vie 6+6 b
Entendit ces concerts | d’un monde qu’il envie ! 6+6 b
Du nectar idéal | sitôt qu’elle a goûté, 6+6 a
La nature répugne | à la réalité ; 6+6 a
95 Dans le sein du possible | en songe elle s’élance ; 6+6 b
Le réel est étroit, | le possible est immense ; 6+6 b
L’âme avec ses désirs | s’y bâtit un séjour 6+6 a
Où l’on puise à jamais | la science et l’amour ; 6+6 a
Où, dans des océans | de beauté, de lumière, 6+6 b
100 L’homme, altéré toujours, | toujours se désaltère, 6+6 b
Et, de songes si beaux | enivrant son sommeil, 6+6 a
Ne se reconnaît plus | au moment du réveil. 6+6 a
Hélas ! tel fut ton sort, | telle est ma destinée. 6+6 b
J’ai vidé comme toi | la coupe empoisonnée ; 6+6 b
105 Mes yeux, comme les tiens, | sans voir se sont ouverts ; 6+6 a
J’ai cherché vainement | le mot de l’univers, 6+6 a
J’ai demandé sa cause | à toute la nature, 6+6 b
J’ai demandé sa fin | à toute créature ; 6+6 b
Dans l’abîme sans fond | mon regard a plongé ; 6+6 a
110 De l’atome au soleil | j’ai tout interrogé, 6+6 a
J’ai devancé les temps, | j’ai remonté les âges : 6+6 b
Tantôt passant les mers | pour écouter les sages ; 6+6 b
Mais le monde à l’orgueil | est un livre fermé ! 6+6 a
Tantôt, pour deviner | le monde inanimé, 6+6 a
115 Fuyant avec mon âme | au sein de la nature, 6+6 b
J’ai cru trouver un sens | à cette langue obscure. 6+6 b
J’étudiai la loi | par qui roulent les cieux ; 6+6 a
Dans leurs brillants déserts | Newton guida mes yeux ; 6+6 a
Des empires détruits | je méditai la cendre ; 6+6 b
120 Dans ses sacrés tombeaux | Rome m’a vu descendre ; 6+6 b
Des mânes les plus saints | troublant le froid repos, 6+6 a
J’ai pesé dans mes mains | la cendre des héros : 6+6 a
J’allais redemander | à leur vaine poussière 6+6 b
Cette immortalité | que tout mortel espère. 6+6 b
125 Que dis-je ? suspendu | sur le lit des mourants, 6+6 a
Mes regards la cherchaient | dans des yeux expirants ; 6+6 a
Sur ces sommets noircis | par d’éternels nuages, 6+6 b
Sur ces flots sillonnés | par d’éternels orages, 6+6 b
J’appelais, je bravais | le choc des éléments. 6+6 a
130 Semblable à la sibylle | en ses emportements, 6+6 a
J’ai cru que la nature, | en ces rares spectacles, 6+6 b
Laissait tomber pour nous | quelqu’un de ses oracles : 6+6 b
J’aimais à m’enfoncer | dans ces sombres horreurs. 6+6 a
Mais en vain dans son calme, | en vain dans ses fureurs, 6+6 a
135 Cherchant ce grand secret | sans pouvoir le surprendre, 6+6 b
J’ai vu partout un Dieu | sans jamais le comprendre ! 6+6 b
J’ai vu le bien, le mal, | sans choix et sans dessein, 6+6 a
Tomber comme au hasard, | échappés de son sein ; 6+6 a
J’ai vu partout le mal | ou le mieux pouvait être, 6+6 b
140 Et je l’ai blasphémé, | ne pouvant le connaître ; 6+6 b
Et ma voix, se brisant | contre ce ciel d’airain, 6+6 a
N’a pas même eu l’honneur | d’irriter le destin. 6+6 a
Mais un jour que, plongé | dans ma propre infortune, 6+6 b
J’avais lassé le ciel | d’une plainte importune, 6+6 b
145 Une clarté d’en haut | dans mon sein descendit, 6+6 a
Me tenta de bénir | ce que j’avais maudit ; 6+6 a
Et, cédant sans combattre | au souffle qui m’inspire, 6+6 b
L’hymne de la raison | s’élança de ma lyre. 6+6 b
« Gloire à toi dans les temps | et dans l’éternité, 6+6 a
150 » Éternelle raison, | suprême volonté ! 6+6 a
» Toi, dont l’immensité | reconnaît la présence ; 6+6 b
» Toi, dont chaque matin | annonce l’existence ! 6+6 b
» Ton souffle créateur | s’est abaissé sur moi ; 6+6 a
» Celui qui n’était pas | a paru devant toi ! 6+6 a
155 » J’ai reconnu ta voix | avant de me connaître, 6+6 b
» Je me suis élancé | jusqu’aux portes de l’Être : 6+6 b
» Me voici ! le néant | te salue en naissant ; 6+6 a
» Me voici ! mais que suis-je ? | un atome pensant. 6+6 a
» Qui peut entre nous deux | mesurer la distance ? 6+6 b
160 » Moi, qui respire en toi | ma rapide existence, 6+6 b
» À l’insu de moi-même, | à ton gré façonné, 6+6 a
» Que me dois-tu, Seigneur, | quand je ne suis pas né ? 6+6 a
» Rien avant, rien après : | gloire à la fin suprême ! 6+6 b
» Qui tira tout de soi | se doit tout à soi-même. 6+6 b
165 » Jouis, grand artisan, | de l’œuvre de tes mains : 6+6 a
» Je suis pour accomplir | tes ordres souverains ; 6+6 a
» Dispose, ordonne, agis ; | dans les temps, dans l’espace, 6+6 b
» Marque-moi pour ta gloire | et mon jour et ma place : 6+6 b
» Mon être, sans se plaindre | et sans t’interroger, 6+6 a
170 » De soi-même, en silence, | accourra s’y ranger. 6+6 a
» Comme ces globes d’or | qui dans les champs du vide 6+6 b
» Suivent avec amour | ton ombre qui les guide, 6+6 b
» Noyé dans la lumière | ou perdu dans la nuit, 6+6 a
» Je marcherai comme eux | où ton doigt me conduit : 6+6 a
175 » Soit que, choisi par toi | pour éclairer les mondes, 6+6 b
» Réfléchissant sur eux | les feux dont tu m’inondes, 6+6 b
» Je m’élance entouré | d’esclaves radieux, 6+6 a
» Et franchisse d’un pas | tout l’abîme des cieux ; 6+6 a
» Soit que, me reléguant | loin, bien loin de ta vue, 6+6 b
180 » Tu ne fasses de moi, | créature inconnue, 6+6 b
» Qu’un atome oublié | sur les bords du néant, 6+6 a
» Ou qu’un grain de poussière | emporté par le vent, 6+6 a
» Glorieux de mon sort, | puisqu’il est ton ouvrage, 6+6 b
» J’irai, j’irai partout | te rendre un même hommage, 6+6 b
185 » Et, d’un égal amour | accomplissant ta loi, 6+6 a
» Jusqu’aux bords du néant | murmurer : Gloire à toi ! 6+6 a
» Ni si haut, ni si bas ! | simple enfant de la terre, 6+6 b
» Mon sort est un problème, | et ma fin un mystère ; 6+6 b
» Je ressemble, Seigneur, | au globe de la nuit, 6+6 a
190 » Qui, dans la route obscure | où ton doigt le conduit, 6+6 a
» Réfléchit d’un côté | les clartés éternelles, 6+6 b
» Et de l’autre est plongé | dans les ombres mortelles. 6+6 b
» L’homme est le point fatal | où les deux infinis 6+6 a
» Par la toute-puissance | ont été réunis. 6+6 a
195 » À tout autre degré, | moins malheureux peut-être, 6+6 b
» J’eusse été… Mais je suis | ce que je devais être ; 6+6 b
» J’adore sans la voir | ta suprême raison : 6+6 a
» Gloire à toi qui m’as fait ! | ce que tu fais est bon. 6+6 a
» Cependant, accablé | sous le poids de ma chaîne, 6+6 b
200 » Du néant au tombeau | l’adversité m’entraîne ; 6+6 b
» Je marche dans la nuit | par un chemin mauvais, 6+6 a
» Ignorant d’où je viens, | incertain où je vais, 6+6 a
» Et je rappelle en vain | ma jeunesse écoulée, 6+6 b
» Comme l’eau du torrent | dans sa source troublée. 6+6 b
205 » Gloire à toi ! Le malheur | en naissant m’a choisi ; 6+6 a
» Comme un jouet vivant | ta droite m’a saisi ; 6+6 a
» J’ai mangé dans les pleurs | le pain de ma misère, 6+6 b
» Et tu m’as abreuvé | des eaux de ta colère. 6+6 b
» Gloire à toi ! J’ai crié, | tu n’as pas répondu ; 6+6 a
210 » J’ai jeté sur la terre | un regard confondu ; 6+6 a
» J’ai cherché dans le ciel | le jour de ta justice ; 6+6 b
» Il s’est levé, Seigneur, | et c’est pour mon supplice. 6+6 b
» Gloire à toi ! L’innocence | est coupable à tes yeux : 6+6 a
» Un seul être, du moins, | me restait sous les cieux ; 6+6 a
215 » Toi-même de nos jours | avais mêlé la trame, 6+6 b
» Sa vie était ma vie, | et son âme mon âme ; 6+6 b
» Comme un fruit encor vert | du rameau détaché, 6+6 a
» Je l’ai vu de mon sein | avant l’âge arraché ! 6+6 a
» Ce coup, que tu voulais | me rendre plus terrible, 6+6 b
220 » La frappa lentement | pour m’être plus sensible : 6+6 b
» Dans ses traits expirants, | où je lisais mon sort, 6+6 a
» J’ai vu lutter ensemble | et l’amour et la mort ; 6+6 a
» J’ai vu dans ses regards | la flamme de la vie, 6+6 b
» Sous la main du trépas | par degrés assoupie, 6+6 b
225 » Se ranimer encore | au souffle de l’amour. 6+6 a
» Je disais chaque jour : | Soleil, encore un jour ! 6+6 a
» Semblable au criminel | qui, plongé dans les ombres, 6+6 b
» Et descendu vivant | dans les demeures sombres, 6+6 b
» Près du dernier flambeau | qui doive l’éclairer, 6+6 a
230 » Se penche sur sa lampe | et la voit expirer, 6+6 a
» Je voulais retenir | l’âme qui s’évapore ; 6+6 b
» Dans son dernier regard | je la cherchais encore ! 6+6 b
» Ce soupir, ô mon Dieu, | dans ton sein s’exhala : 6+6 a
» Hors du monde avec lui | mon espoir s’envola ! 6+6 a
235 » Pardonne au désespoir | un moment de blasphème, 6+6 b
» J’osai… Je me repens ; | Gloire au maître suprême ! 6+6 b
» Il fit l’eau pour couler, | l’aquilon pour courir, 6+6 a
» Les soleils pour brûler, | et l’homme pour souffrir ! 6+6 a
» Que j’ai bien accompli | cette loi de mon être ! 6+6 b
240 » La nature insensible | obéit sans connaître, 6+6 b
» Moi seul, te découvrant | sous la nécessité, 6+6 a
» J’immole avec amour | ma propre volonté ; 6+6 a
» Moi seul je t’obéis | avec intelligence ; 6+6 b
» Moi seul je me complais | dans cette obéissance ; 6+6 b
245 » Je jouis de remplir | en tout temps, en tout lieu, 6+6 a
» La loi de ma nature | et l’ordre de mon Dieu ; 6+6 a
» J’adore en mes destins | ta sagesse suprême, 6+6 b
» J’aime ta volonté | dans mes supplices même : 6+6 b
» Gloire à toi ! gloire à toi ! | Frappe, anéantis-moi ! 6+6 a
250 » Tu n’entendras qu’un cri : | Gloire à jamais à toi ! » 6+6 a
Ainsi ma voix monta | vers la voûte céleste : 6+6 b
Je rendis gloire au ciel, | et le ciel fit le reste. 6+6 b
Mais silence, ô ma lyre ! | Et toi, qui dans tes mains 6+6 a
Tiens le cœur palpitant | des sensibles humains, 6+6 a
255 Byron, viens en tirer | des torrents d’harmonie : 6+6 b
C’est pour la vérité | que Dieu fit le génie. 6+6 b
Jette un cri vers le ciel, | ô chantre des enfers ! 6+6 a
Le ciel même aux damnés | enviera tes concerts. 6+6 a
Peut-être qu’à ta voix, | de la vivante flamme 6+6 b
260 Un rayon descendra | dans l’ombre de ton âme ; 6+6 b
Peut-être que ton cœur, | ému de saints transports, 6+6 a
S’apaisera soi-même | a tes propres accords, 6+6 a
Et qu’un éclair d’en haut | perçant ta nuit profonde, 6+6 b
Tu verseras sur nous | la clarté qui t’inonde. 6+6 b
265 Ah ! si jamais ton luth, | amolli par tes pleurs, 6+6 a
Soupirait sous tes doigts | l’hymne de tes douleurs, 6+6 a
Ou si, du sein profond | des ombres éternelles, 6+6 b
Comme un ange tombé | tu secouais tes ailes, 6+6 b
Et, prenant vers le jour | un lumineux essor, 6+6 a
270 Parmi les chœurs sacrés | tu t’essayais encor ; 6+6 a
Jamais, jamais l’écho | de la céleste voûte, 6+6 b
Jamais ces harpes d’or | que Dieu lui-même écoute, 6+6 b
Jamais des séraphins | les chœurs mélodieux 6+6 a
De plus divins accords | n’auraient ravi les cieux ! 6+6 a
275 Courage, enfant déchu | d’une race divine ! 6+6 b
Tu portes sur ton front | ta superbe origine ; 6+6 b
Tout homme, en te voyant, | reconnaît dans tes yeux 6+6 a
Un rayon éclipsé | de la splendeur des cieux ! 6+6 a
Roi des chants immortels, | reconnais-toi toi-même ! 6+6 b
280 Laisse aux fils de la nuit | le doute et le blasphème ; 6+6 b
Dédaigne un faux encens | qu’on t’offre de si bas : 6+6 a
La gloire ne peut être | où la vertu n’est pas. 6+6 a
Viens reprendre ton rang | dans ta splendeur première 6+6 b
Parmi ces purs enfants | de gloire et de lumière 6+6 b
285 Que d’un souffle choisi | Dieu voulut animer, 6+6 a
Et qu’il fit pour chanter, | pour croire, et pour aimer ! 6+6 a
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