Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAM_1/LAM1
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
PREMIÈRES MÉDITATIONS
1820
PREMIÈRE MÉDITATION
L’ISOLEMENT
Souvent sur la montagne, | à l’ombre du vieux chêne, 6+6 a
Au coucher du soleil, | tristement je m’assieds ; 6+6 b
Je promène au hasard | mes regards sur la plaine, 6+6 a
Dont le tableau changeant | se déroule à mes pieds. 6+6 b
5 Ici gronde le fleuve | aux vagues écumantes ; 6+6 a
Il serpente et s’enfonce | en un lointain obscur ; 6+6 b
Là, le lac immobile | étend ses eaux dormantes 6+6 a
Où l’étoile du soir | se lève dans l’azur. 6+6 b
Au sommet de ces monts | couronnés de bois sombres 6+6 a
10 Le crépuscule encor | jette un dernier rayon ; 6+6 b
Et le char vaporeux | de la reine des ombres 6+6 a
Monte et blanchit déjà | les bords de l’horizon. 6+6 b
Cependant, s’élançant | de la flèche gothique, 6+6 a
Un son religieux | se répand dans les airs : 6+6 b
15 Le voyageur s’arrête, | et la cloche rustique 6+6 a
Aux derniers bruits du jour | mêle de saints concerts. 6+6 b
Mais à ces doux tableaux | mon âme indifférente 6+6 a
N’éprouve devant eux | ni charme ni transports ; 6+6 b
Je contemple la terre | ainsi qu’une âme errante : 6+6 a
20 Le soleil des vivants | n’échauffe plus les morts. 6+6 b
De colline en colline | en vain portant ma vue, 6+6 a
Du sud à l’aquilon, | de l’aurore au couchant, 6+6 b
Je parcours tous les points | de l’immense étendue, 6+6 a
Et je dis : Nulle part | le bonheur ne m’attend. 6+6 b
25 Que me font ces vallons, | ces palais, ces chaumières, 6+6 a
Vains objets dont pour moi | le charme est envolé ? 6+6 b
Fleuves, rochers, forêts, | solitudes si chères, 6+6 a
Un seul être vous manque, | et tout est dépeuplé ! 6+6 b
Quand le tour du soleil | ou commence ou s’achève, 6+6 a
30 D’un œil indifférent | je le suis dans son cours ; 6+6 b
En un ciel sombre ou pur | qu’il se couche ou se lève, 6+6 a
Qu’importe le soleil ? | je n’attends rien des jours. 6+6 b
Quand je pourrais le suivre | en sa vaste carrière, 6+6 a
Mes yeux verraient partout | le vide et les déserts ; 6+6 b
35 Je ne désire rien | de tout ce qu’il éclaire ; 6+6 a
Je ne demande rien | à l’immense univers. 6+6 b
Mais peut-être au delà | des bornes de sa sphère, 6+6 a
Lieux où le vrai soleil | éclaire d’autres cieux, 6+6 b
Si je pouvais laisser | ma dépouille à la terre, 6+6 a
40 Ce que j’ai tant rêvé | paraîtrait à mes yeux ! 6+6 b
Là, je m’enivrerais | à la source où j’aspire ; 6+6 a
Là, je retrouverais | et l’espoir et l’amour, 6+6 b
Et ce bien idéal | que toute âme désire, 6+6 a
Et qui n’a pas de nom | au terrestre séjour ! 6+6 b
45 Que ne puis-je, porté | sur le char de l’aurore, 6+6 a
Vague objet de mes vœux, | m’élancer jusqu’à toi ! 6+6 b
Sur la terre d’exil | pourquoi resté-je encore ? 6+6 a
Il n’est rien de commun | entre la terre et moi. 6+6 b
Quand la feuille des bois | tombe dans la prairie, 6+6 a
50 Le vent du soir s’élève | et l’arrache aux vallons ; 6+6 b
Et moi, je suis semblable | à la feuille flétrie : 6+6 a
Emportez-moi comme elle, | orageux aquilons ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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