Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAM_1/LAM13
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
PREMIÈRES MÉDITATIONS
1820
TREIZIÈME MÉDITATION
LA RETRAITE
À M. DE C***.
Aux bords de ton lac enchanté, 8 a
Loin des sots préjugés que l’erreur déifie, 6+6 b
Couvert du bouclier de ta philosophie, 6+6 b
Le temps n’emporte rien de ta félicité ; 6+6 a
5 Ton matin fut brillant, et ma jeunesse envie 6+6 b
L’azur calme et serein du beau soir de ta vie. 6+6 b
Ce qu’on appelle nos beaux jours 8 a
N’est qu’un éclair brillant dans une nuit d’orage ; 6+6 b
Et rien, excepté nos amours, 8 a
10 N’y mérite un regret du sage. 8 b
Mais que dis-je ? on aime à tout âge : 8 b
Ce feu durable et doux, dans l’âme renfermé, 6+6 c
Donne plus de chaleur en jetant moins de flamme ; 6+6 d
C’est le souffle divin dont tout homme est formé, 6+6 c
15 Il ne s’éteint qu’avec son âme. 8 d
Étendre son esprit, resserrer ses désirs, 6+6 a
C’est la le grand secret ignoré du vulgaire : 6+6 b
Tu le connais, ami ! cet heureux coin de terre 6+6 b
Renferme tes amours, tes goûts et tes plaisirs ; 6+6 a
20 Tes vœux ne passent point ton champêtre domaine, 6+6 c
Mais ton esprit plus vaste étend son horizon ; 6+6 d
Et, du monde embrassant la scène, 8 c
Le flambeau de l’étude éclaire ta raison. 6+6 d
Tu vois qu’aux bords du Tibre, et du Nil et du Gange, 6+6 a
25 En tout lieu, en tout temps, sous des masques divers, 6+6 b
L’homme partout est l’homme, et qu’en cet univers 6+6 b
Dans un ordre éternel tout passe, et rien ne change ; 6+6 a
Tu vois les nations s’éclipser tour à tour 6+6 c
Comme les astres dans l’espace ; 8 d
30 De mains en mains le sceptre passe ; 8 d
Chaque peuple a son siècle, et chaque homme a son jour. 6+6 c
Sujets à cette loi suprême, 8 a
Empire, gloire, liberté, 8 b
Tout est par le temps emporté : 8 b
35 Le temps emporta les dieux même 8 a
De la crédule antiquité, 8 b
Et ce que les mortels, dans leur orgueil extrême, 6+6 a
Osaient nommer la vérité ! 8 b
Au milieu de ce grand nuage, 8 a
40 Réponds-moi : que fera le sage 8 a
Toujours entre le doute et l’erreur combattu ? 6+6 b
Content du peu de jours qu’il saisit au passage, 6+6 a
Il se hâte d’en faire usage 8 a
Pour le bonheur et la vertu. 8 b
45 J’ai vu ce sage heureux ; dans ses belles demeures 6+6 a
J’ai goûté l’hospitalité : 8 b
À l’ombre du jardin que ses mains ont planté, 6+6 b
Aux doux sens de sa lyre il endormait les heures 6+6 a
En chantant sa félicité. 8 b
50 Soyez touché, grand Dieu, de sa reconnaissance ! 6+6 c
Il ne vous lasse point d’un inutile vœu ; 6+6 d
Gardez-lui seulement sa rustique opulence ; 6+6 c
Donnez tout à celui qui vous demande peu. 6+6 d
Des doux objets de sa tendresse 8 a
55 Qu’à son riant foyer toujours environné, 6+6 b
Sa femme et ses enfants couronnent sa vieillesse, 6+6 a
Comme de ses fruits mûrs un arbre est couronné ; 6+6 b
Que sous l’or des épis ses collines jaunissent ; 6+6 c
Qu’au pied de son rocher son lac soit toujours pur ; 6+6 d
60 Que de ses beaux jasmins les ombres épaississent ; 6+6 c
Que son soleil soit doux, que son ciel soit d’azur, 6+6 d
Et que pour l’étranger toujours ses vins mûrissent ! 6+6 c
Pour moi, loin de ce port de la félicité, 6+6 a
Hélas ! par la jeunesse et l’espoir emporté, 6+6 a
65 Je vais tenter encore et les flots et l’orage ; 6+6 b
Mais, ballotté par l’onde et fatigué du vent, 6+6 c
Au pied de ton rocher sauvage, 8 b
Ami, je reviendrai souvent 8 c
Rattacher, vers le soir, ma barque à ton rivage. 6+6 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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