Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAF_2/LAF79
Jules LAFORGUE
Les Complaintes
1885
COMPLAINTE DU SAGE DE PARIS
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Aimer, uniquement, ces jupes éphémères ? 6+6 a
Autant dire aux soleils : fêtez vos centenaires. 6+6 a
Mais tu peux déguster, dans leurs jardins d'un jour, 6+6 a
Comme à cette dînette unique Tout concourt ; 6+6 a
5 Déguster, en menant les rites réciproques, 6+6 a
Les trucs Inconscients dans leur œuf, à la coque. 6+6 a
Soit en pontifiant, avec toute ta foi 6+6 a
D'Exécuteur des hautes-œuvres de la Loi ; 6−6 a
Soit en vivisectant ces claviers anonymes, 6+6 a
10 Pour l'art, sans espérer leur ut d'hostie ultime. 6+6 a
Car, crois pas que l'hostie où dort ton paradis 6+6 a
Sera d'une farine aux levains inédits. 6+6 a
Mais quoi, leurs yeux sont tout ! Et puis la nappe est mise, 6+6 a
Et l'Orgue juvénile à l'aveugle improvise. 6+6 a
15 Et, sans noce, voyage, curieux colis, 6−6 a
Cancans, et fadeur d'hôpital du même lit, 8+4 a
Mais pour avoir des vitraux fiers à domicile, 4+4+4 a
Vivre à deux seuls est encor le moins imbécile. 4+8 a
Vois-là donc, comme d'ailleurs, et loyalement, 4+4+4 a
20 Les passants, les mots, les choses, les firmaments. 6−6 a
Vendange chez les arts enfantins ; sois en fête 6+6 a
D'une fugue, d'un mot, d'un ton, d'un air de tête. 6+6 a
La science, outre qu'elle ne peut rien savoir, 4+8 a
Trouve, tels les ballons, l'Irrespirable Noir. 6+6 a
25 Ne force jamais tes pouvoirs de Créature, 6−6 a
Tout est écrit et vrai, rien n'est contre-nature. 6+6 a
Vivre et peser selon le Beau, le Bien, le Vrai ? 6+6 a
Ô parfums, ô regards, ô fois ! Soit, j'essaierai ; 6+6 a
Mais, tel Brennus avec son épée, et d'avance, 6+6 a
30 Suis-je pas dans l'un des plateaux de la balance ? 6−6 a
Des casiers de bureau, le Beau, le Vrai, le Bien ; 6+6 a
Rime et sois grand, la Loi reconntra les siens. 6+6 a
Ah ! Démaillote-toi, mon enfant, de ces langes 6+6 a
D'Occident ! Va faire une pleine eau dans le Gange. 4+4+4 a
35 La logique, la morale, c'est vite dit ; 12 a
Mais ! Gisements d'instincts, virtuels paradis, 6+6 a
Nuit des hérédités et limbes des latences ! 6+6 a
Actif ? Passif ? Ô pelouses des Défaillances, 4+8 a
Tamis de pores ! Et les bas-fonds sous-marins, 6+6 a
40 Infini sans foyer, forêt vierge à tous crins ! 6+6 a
Pour voir, jetez la sonde, ou plongez sous la cloche ; 6+6 a
Oh ! Les velléités, les anguilles sous roche, 6+6 a
Les polypes sournois attendant l'hameçon, 6+6 a
Les vœux sans état-civil, ni chair, ni poisson ! 8+4 a
45 Les guanos à Geysers, les astres en syncope, 6+6 a
Et les métaux qui font loucher nos spectroscopes ! 6+6 a
Une capsule éclate, un monde de facteurs 6+6 a
En prurit, s'éparpille assiéger les hauteurs ; 6+6 a
D'autres titubent sous les butins génitoires, 6−6 a
50 Ou font un feu d'enfer dans leurs laboratoires ! 6+6 a
Allez ! Laissez passer, laisser faire ; l'Amour 6+6 a
Reconntra les siens : il est aveugle et sourd. 6+6 a
Car la vie innombrable va, vannant les germes 8+4 a
Aux concurrences des êtres sans droits, sans terme. 6−6 a
55 Vivotez et passez, à la grâce de Tout ; 6+6 a
Et voilà la pitié, l'amour et le bon goût. 6+6 a
L'inconscient, c'est l'Éden-Levant que tout saigne ; 4+8 a
Si la Terre ne veut sécher, qu'elle s'y baigne ! 6+6 a
C'est la grande Nounou où nous nous aimerions 6+6 a
60 À la grâce des divines sélections. 12 a
C'est le Tout-Vrai, l'Omniversel Ombelliforme 4+4+4 a
Mancenilier, sous qui, mes bébés, faut qu'on dorme ! 6+6 a
(Nos découvertes scientifiques étant 4+8 a
Ses feuilles mortes, qui tombent de temps en temps.) 6+6 a
65 Là, sur des oreillers d'étiquettes d'éthiques, 6+6 a
Lévite félin aux égaux ronrons lyriques, 6−6 a
Sans songer : « Suis-je moi ? Tout est si compliqué ! 6+6 a
« Où serais-je à présent, pour tel coche manqué ? » 6+6 a
Sans colère, rire, ou pathos, d'une foi pâle, 6+6 a
70 Aux riches flirtations des pompes argutiales, 6+6 a
Mais sans rite emprunté, car c'est bien malséant, 6+6 a
Sirote chaque jour ta tasse de néant ; 6+6 a
Lavé comme une hostie, en quelconques costumes 6+6 a
Blancs ou deuil, bref calice au vent qu'un rien parfume. 6+6 a
75 ‒ « Mais, tout est un rire à la Justice ! Et d'où vient 6−6 a
Mon cœur, ah ! Mon sacré-cœur, s'il ne rime à rien ? » 6−6 a
‒ Du calme et des fleurs. Peu t'importe de connaître 6+6 a
Ce que tu fus, dans l'à jamais, avant de naître ? 6−6 a
Eh bien, que l'autre éterni qui, Très-Sans-Toi, 4+4+4 a
80 Grouillera, te laisse aussi pieusement froid. 12 a
Quant à ta mort, l'éclair aveugle en est en route 6+6 a
Qui saura te choser, va, sans que tu t'en doutes. 6+6 a
‒ « Il rit d'oiseaux, le pin dont mon cercueil viendra ! 6+6 a
‒ Mais ton cercueil sera sa mort ! Etcetcetera 6+6 a
85 Allons, tu m'as compris. Va, que ta seule étude 6+6 a
Soit de vivre sans but, fou de mansuétude. 6+6 a
mètre profil métrique : 6÷6
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