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LAC_2/LAC70
Auguste LACAUSSADE
Poèmes et Paysages
1852
POÈMES ET PAYSAGES
XXXIX
Élégie en mer par une tourmente
Des ombres de la vie, hélas ! mon front se voile ; 6+6 a
Le jour s'est éclipsé, l'horizon est obscur ; 6+6 b
Mais dans mon ciel éteint, ô ma fidèle étoile, 6+6 a
Je vois briller toujours ton rayon fixe et pur. 6+6 b
5 A mes délaissements quand chacun m'abandonne, 6+6 c
Clémente à mes malheurs, ton cœur me les pardonne ; 6+6 c
Sans m'accuser jamais, tu gémis avec moi. 6+6 d
De mes déceptions — ce commun héritage 6+6 e
Tu berces la douleur que ta pitié partage : 6+6 e
10 L'idéale bonté, je l'ai trouvée en toi. 6+6 d
Si d'un sourire encor la sereine nature 6+6 a
Peut réjouir mon œil morne et désenchanté, 6+6 b
C'est qu'elle a de ton âme, ô noble créature, 6+6 a
La candeur virginale et l'auguste beauté. 6+6 b
15 Que la fureur des vents en lutte avec les ondes 6+6 c
Soulève au loin des mers les colères profondes, 6+6 c
Mon cœur peut être ému, mais ce n'est point d'effroi. 6+6 d
Vents et flots déchaînés !… que me font les tempêtes !… 6+6 e
Mais cette vague, hélas ! qui rugit sur nos têtes, 6+6 e
20 M'enlève à ton beau ciel et m'éloigne de toi. 6+6 d
T'en souvient-il ? Assis au flanc de la colline, 6+6 a
Et devant nous la mer, nous rêvions tous les deux. 6+6 b
D'un soir de mai le souffle embaumait ta poitrine, 6+6 a
Mais des larmes voilaient tes yeux tristes et bleus. 6+6 b
25 Ton résigné sourire à mon regard de frère 6+6 c
Révélait de ton cœur l'ineffable mystère : 6+6 c
D'un sort cruel aussi tu subissais la loi. 6+6 d
A confondre nos pleurs j'ai trouvé bien des charmes. 6+6 e
Que m'importe aujourd'hui l'amertume des larmes ! 6+6 e
30 J'ai connu la douceur de pleurer avec toi. 6+6 d
Pourquoi trop tard, pourquoi trop tard l'avoir connue !… 6+6 a
Quand apparut l'étoile en mon noir firmament, 6+6 b
Baignant de ses blancheurs ma route aride et nue, 6+6 a
D'un destin sans merci j'eus le pressentiment. 6+6 b
35 Il ne m'a point trompé… Ma lèvre dut se taire : 6+6 c
O lutte du devoir accepté, lutte austère, 6+6 c
Où mon chaste secret n'a gémi que pour moi ! 6+6 d
Soufflez, vents de l'abîme à ma peine insensibles !… 6+6 e
Nous fatiguons le ciel de nos vœux impossibles ! 6+6 e
40 Le ciel l'avait permis : tu n'étais plus à toi ! 6+6 d
Sœur, à mon amitié tu fus toujours fidèle, 6+6 a
Femme, tu vins à moi quand je fus délaissé, 6+6 b
Ange, tu m'abritas à l'ombre de ton aile : 6+6 a
A me plaindre ton cœur ne s'est jamais lassé. 6+6 b
45 O fleur de ma vallée, o mon lys solitaire, 6+6 c
Je puis songer du moins qu'il est sur cette terre 6+6 c
Une âme riche encor de tendresse et de foi ! 6+6 d
De mon lac trouble ou bleu reste à jamais le cygne, 6+6 e
Toi, la plus dévouée autant que la plus digne 6+6 e
50 Du haut et saint amour dont j'ai vécu par toi ! 6+6 d
Que l'Orgueil me condamne et de mon sort m'accuse, 6+6 a
Que l'Envie au teint vert s'acharne sur mes pas, 6+6 b
Qu'ils raillent en secret mon culte pour la Muse, 6+6 a
Ils pourront me briser, ils ne me ploieront pas ! 6+6 b
55 Partout de les braver la joie en moi fermente ; 6+6 c
Mon âme se dilate au vent de la tourmente, 6+6 c
Et j'aime à voir bondir les flots autour de moi ! 6+6 d
Bercé par les assauts de la vague orageuse, 6+6 e
Je laisse en paix flotter ma barque aventureuse, 6+6 e
60 Insoucieux de l'onde et ne songeant qu'à toi. 6+6 d
Que si, la force un jour trahissant le courage, 6+6 a
Je m'affaissais vaincu sous le flot triomphant, 6+6 b
Mais insoumis toujours, et défiant l'orage 6+6 a
D'un cœur silencieux que sa fierté défend ; 6+6 b
65 En cet instant suprême et roulant vers la tombe, 6+6 c
Ma lèvre déjà froide, ô ma blanche colombe, 6+6 c
Murmurera ton nom pour la dernière fois ; 6+6 d
Et sur les flancs brisés de ma barque qui sombre, 6+6 e
Calme, je descendrai dans la demeure sombre, 6+6 e
70 L'âme et les yeux levés vers le ciel et vers toi. 6+6 d
mètre profil métrique : 6+6
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