Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LAC_2/LAC49
Auguste LACAUSSADE
Poèmes et Paysages
1852
POÈMES ET PAYSAGES
XVIII
Une Voix lointaine
A la mémoire du poète anglais W. Falconer,
né en Écosse, mort à l'île Bourbon.
Une voix a passédans ma nuit d'insomnie 6+6 a
Des brumeuses forêtsde la Calédonie 6+6 a
Pour me rejoindre elle atraversé l'Océan, 6+6 b
Et la Ligne torrideet le Cap atlantique : 6+6 c
5 Cette voix, c'est la tienne,ô barde au cœur antique, 6+6 c
Fils de Byron et d'Ossian. 7 b
Tu viens, me rappelantnos communes croyances, 6+6 a
Gourmander mes langueursaux mornes défaillances, 6+6 a
Et sous mon ciel de feu,par de virils conseils, 6+6 b
10 Aux luttes du Devoiret de la Poésie 6+6 c
Convier ma dolenteet stérile énergie 6+6 c
Qu'endort le poids des lourds soleils. 8 b
Ignore-les toujoursmes nuits noires et lentes, 6+6 a
Le sommeil éveilléde mes heures brûlantes, 6+6 a
15 Mes doutes, mes désirsde tombe et de cercueil, 6+6 b
Mes révoltes sans fin,mes désespoirs sans nombre, 6+6 c
Et dans ma tête en feul'ébullition sombre 6+6 c
De la colère et de l'orgueil. 8 b
Je dors pas, je songe, ami ! je me recueille. 11 a
20 Je laisse au fruit le tempsde mûrir sous la feuille ; 6+6 a
L'esprit est en travailsous mes fervents ennuis. 6+6 b
Attentif cependantà l'appel poétique, 6+6 c
Je me redis les chantsde ta harpe celtique, 6+6 c
Et pour d'autres je les traduis : 8 b
25 « Qu'as-tu fait de tes pleurs ?Sous leurs gouttes divines, 6+6 a
Au lieu de fleurs, ta glèbea donné des épines, 6+6 a
Et ton âme, étouffantde lyriques transports, 6+6 b
Source sans eau, sol sansgazon, volcan sans lave, 6−6 c
Pour attendrir le mtreet consoler l'esclave 6+6 c
30 Reste muette et sans accords. 8 b
« D'un coupable sommeilréveille-toi, poète ! 6+6 a
Pour le droit opprimé,debout ! et haut la tête ! 6+6 a
Contre un joug sacrilège,entre tous odieux, 6+6 b
Tonne !… puis éteignantta sainte frénésie, 6+6 c
35 Épanche de ton âmeet de ta poésie 6+6 c
L'apaisement mélodieux. 8 b
« Dans l'arène descendsdes sommets de la lyre ! 6+6 a
Quel que soit son orgueil,l'homme subit l'empire 6+6 a
Et des mâles talentset des mâles vouloirs ! 6+6 b
40 Que ton luth soit une âmeà la fibre sonore 6+6 c
Prophétisant le jourdont tu vois l'aube éclore 6+6 c
Dans l'avenir aux longs espoirs. 8 b
« Au camp des opprimésdis ton rêve sublime ! 6+6 a
Dieu, qui bénit leur causeet l'ardeur qui t'anime, 6+6 a
45 Parlera par ta boucheet soutiendra ton cœur ; 6+6 b
Et ton esprit ouvrantses ailes de lumière, 6+6 c
Tu pourras de ta nuitde lutte et de poussière 6+6 c
Sortir rayonnant et vainqueur ! » 8 b
Je puis à ton appel,ami, prêter l'oreille. 6+6 a
50 Mon cœur a devancéce que ton cœur conseille : 6+6 a
La lyre qui pleuraita grondé sous mes doigts. 6+6 b
Je n'ai pas abdiquéma rude et noble tâche ; 6+6 c
Devant le fait brutal,j'ai seul et sans relâche 6+6 c
Protesté du moins de la voix : 8 b
55 « Honte à vous dont l'orgueilest fertile en misères, 6+6 a
Vous dont le lucre a faitun bétail de vos frères ! 6+6 a
D'un spectacle pareille ciel est révolté ! 6+6 b
Plus de droit, de pitié,plus d'élan magnanime ; 6+6 c
Partout la main du Juif,partout la main du crime, 6+6 c
60 Crucifiant l'humanité ! 8 b
« Honte à vous qui versezsur les humbles paupières 6+6 a
L'Érèbe au lieu du jour,l'ombre au lieu des lumières, 6+6 a
Qui redoutez l'éclatlibérateur des cieux ! 6+6 b
A vous qui, vous drapantde vos manteaux funèbres, 6+6 c
65 Venez comme la nuitdérouler vos ténèbres, 6+6 c
Entre les astres et nos yeux ! 8 b
« Et vous, êtres déchus,pitoyables esclaves, 6+6 a
Vous qui baisez les mainsqui vous chargent d'entraves, 6+6 a
Honte à vous ! — Dieu qui fitpour les oiseaux les airs, 6+6 b
70 Le soleil radieuxpour éclairer le monde, 6+6 c
Et le vent pour qu'il voleet le flot pour qu'il gronde, 6+6 c
Vous fit-il pour porter des fers ! » 8 b
Ah ! que ne suis-je nédans cette Grèce antique 6+6 a
la vie était libreet la tombe stoïque ; 6+6 a
75 la patrie, armantses sacrés défenseurs, 6+6 b
Roulait sur les tyransune invincible armée ; 6+6 c
Ou de la Libertéla main n'était armée 6+6 c
Que pour frapper les oppresseurs ; 8 b
la brise des merset le vent des collines 6+6 a
80 N'apportaient leurs parfumsqu'à de mâles poitrines ; 6+6 a
, chez tous allumantd'héroïques ardeurs, 6+6 b
L'astre de la lumièreet l'astre de la gloire, 6+6 c
Pour éclairer ces lieuxqu'habitait la victoire, 6+6 c
Mêlaient leurs rivales splendeurs ! 8 b
85 Mais ces temps sont bien morts !L'Europe abâtardie 6+6 a
Dans un sommeil de plombdort et gît engourdie. 6+6 a
Partout le despotismea détrôné les lois ; 6+6 b
Et des plages du Nordaux mers de Salamine, 6+6 c
Sur cette terre esclaveet de gloire orpheline, 6+6 c
90 Pèse acclamé le joug des rois. 8 b
O barde ami, chanteurdont le fervent génie 6+6 a
Exhale en mètres fierssa vibrante harmonie ; 6+6 a
Fidèle aux jours mauvaisnon moins qu'aux jours meilleurs, 6+6 b
Toi qui connais mon âmeet qui sondas ses peines, 6+6 c
95 Puisque l'homme en tous lieuxporte aujourd'hui des chnes, 6+6 c
Viens gémir et mourir ailleurs. 8 b
Je sais dans l'Océanune île la nature 6+6 a
Peut au moins déroulerune page encor pure. 6+6 a
Le soleil est son père,et ce dieu des climats, 6+6 b
100 Inondant de clartéla splendide créole, 6+6 c
De son front couronnéd'une verte auole 6+6 c
A banni brumes et frimas. 8 b
C'est une île au sol riche,au ciel tiède, la femme 6+6 a
A des yeux de gazelleet des baisers de flamme ; 6+6 a
105 l'homme au parler franca l'instinct généreux, 6+6 b
la vague en mourantargente au loin les grèves, 6+6 c
la terre a des fleurs, la vierge a des rêves 6+6 c
Bleus comme son ciel et ses yeux. 8 b
Là comme ailleurs, hélas !pèse la servitude ; 6+6 a
110 Mais nos yeux, sur les montstrouvant la solitude, 6+6 a
Fuiront dans l'avenirun présent douloureux ; 6+6 b
Et les nuages blancsqui montent du rivage 6+6 c
Déplieront, sous nos pieds,nous voilant l'esclavage, 6+6 c
Leur dais errant et vaporeux. 8 b
115 Nous verrons la cascadeà la bouche écumante 6+6 a
Épandre dans les airsune eau vierge et fumante ; 6+6 a
Sous les hauts bancouliersnous irons nous asseoir ; 6+6 b
Ils verseront en nousla paix de leurs feuillages, 6+6 c
les oiseaux des boiset des grands caps sauvages 6+6 c
120 Dorment bercés des vents du soir. 8 b
Sur les flancs du Salazeélevons nos chaumières. 6+6 a
La nature pour nousde ses plus frais mystères 6+6 a
Peuplera les ravins,les torrents et les bois ; 6+6 b
Et ce piton altierque l'ouragan assiège, 6+6 c
125 Au ciel portant sa têteet ses siècles de neige, 6+6 c
Abritera nos humbles toits. 8 b
L'illusion, l'espoir,l'art et la poésie 6+6 a
Feront de notre cœurleur retraite choisie. 6+6 a
Dans la splendeur des jours,dans la splendeur des nuits, 6+6 b
130 Avec le vent qui pleure,avec l'onde qui coule, 6+6 c
Avec le bleu ramierqui gémit et roucoule, 6+6 c
A Dieu nous dirons nos ennuis. 8 b
Et loin du souffle ingratdes cités de la terre, 6+6 a
Nous faisant de notre artun culte solitaire, 6+6 a
135 D'espérance et d'amournous rêverons encor ; 6+6 b
Et quand la mort viendranous délier les ailes, 6+6 c
Vers les cieux étoilésnos âmes fraternelles 6+6 c
Ensemble prendront leur essor. 8 b
mètre profils métriques : 8, 6−6, (7), (11)
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