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| = césure
LAC_1/LAC19
Auguste LACAUSSADE
Les Salaziennes
1839
XIX
A mes amis E. et L.G
sur la mort de leur sœur
Pourquoi donc as-tu fui dans le pays des âmes ?
Pourquoi mourir, toi qu'on aimait ?
Élise MOREAU.
Le zéphyre amoureux en vain cherche la rose 6+6 a
Qu'il caressait hier de son souffle embaumé, 6+6 b
Et demain ce ruisseau vers les bords qu'il arrose 6+6 a
Peut-être aura cessé son cours accoutumé. 6+6 b
5 Tout brille et tout s'éteint ! tout vit et tout expire ! 6+6 c
De la mort tôt ou tard nous subissons l'empire. 6+6 c
Sur ces tristes pensers j'aime à fixer mon cœur. 6+6 d
Hélas ! où sont allés ceux pour qui je soupire ? 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
10 Sur le fleuve du temps je poursuivais ma route : 6+6 a
D'un esquif, que berçait le flot silencieux, 6+6 b
Un chant plaintif montait vers la céleste voûte ; 6+6 a
Sur une femme alors j'ai reposé les yeux. 6+6 b
Mais tout à coup la mort l'emporta dans son aile. 6+6 c
15 Sur les flots attristés j'ai dit : « Où donc est-elle ? » 6+6 c
Et mon cœur se perdit dans sa vague douleur. 6+6 d
Mais une voix disait de la voûte éternelle : 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
Tandis qu'elle passait, les fastes de la terre 6+6 a
20 Ont couronné son front de leurs vaines splendeurs ; 6+6 b
Mais ses yeux les ont vus comme une ombre éphémère 6+6 a
S'évanouir bientôt sous le vent des malheurs ; 6+6 b
Et ce front où brillait l'éclat de la richesse, 6+6 c
A porté sans pâlir le poids de sa détresse 6+6 c
25 La fortune a changé sans abattre son cœur. 6+6 d
Mais où reverrons-nous cet objet de tendresse ? 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
Mais nos maux sont d'un jours et la vie est rapide. 6+6 a
L'espérance allégeait sa lourde adversité ; 6+6 b
30 Car elle avait compris dans son âme intrépide 6+6 a
Que l'onde où nous passons roule à l'éternité. 6+6 b
Ah ! de son jeune enfant pressant la tête aimée, 6+6 c
Elle n'a pu douter, mère heureuse et charmée, 6+6 c
Qu'un immortel amour ne soit le seul bonheur ; 6+6 d
35 Et son regard lisait sur la voûte enflammée : 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
Hélas ! elle a passé comme une ombre légère ! 6+6 a
Et vous, frères chéris, qu'en ses derniers instants 6+6 b
Elle a redemandés à la terre étrangère, 6+6 a
40 Vous ne l'entendrez plus sur le fleuve du temps 6+6 b
Charmer par ses accords les échos de la rive. 6+6 c
Sa voix vient d'expirer dans sa note plaintive ; 6+6 c
Et vos regards en vain, dans leur morne douleur, 6+6 d
Chercheraient sur les flots sa trace fugitive. 6+6 c
45 Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
En vain la tendre fleur d'un parfum solitaire 6+6 a
Embauma les gazons et les bois d'alentour, 6+6 b
En vain la tendre fleur fut l'amour de la terre ; 6+6 a
Jamais l'affreux trépas n'eut pitié de l'amour. 6+6 b
50 Riche encor de beauté, de jeunesse et de sève, 6+6 c
L'impitoyable mort la frappa de son glaive. 6+6 c
Hélas ! près des boutons je ne vois plus la fleur ! 6+6 d
Qui leur rendra l'amour que ce jour leur enlève ?… 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
55 Voyez ce chêne antique au paternel ombrage, 6+6 a
Où toujours le malheur rencontrait un abri ; 6+6 b
Les souffles orageux ont brisé son feuillage ; 6+6 a
Il n'est plus désormais qu'un auguste débris. 6+6 b
Il a vu ses rameaux mourir dans leur jeunesse : 6+6 c
60 Deux fleurs restaient encor pour parer sa vieillesse, 6+6 c
Et l'une tombe, hélas ! au souffle du malheur ! 6+6 d
Ah ! qui pourra tarir les pleurs de sa tristesse ? 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
Ces sanglots, ces soupirs, cette plainte éternelle, 6+6 a
65 Sont d'une autre Rachel qui pleure et ne veut pas 6+6 b
Qu'on cherche à consoler sa douleur maternelle, 6+6 a
Car ses fils sont tombés sous la faux du trépas. 6+6 b
Pauvre cœur éploré, pauvre mère abattue, 6+6 c
La mort a dispersé ta famille éperdue ! 6+6 c
70 Dieu seul peut te parler dans ta sainte douleur ; 6+6 d
Et sa voix te redit jusqu'à toi descendue : 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
Quand le tendre ramier a déployer son aile 6+6 a
Pour chercher la pâture aux fils de son amour, 6+6 b
75 En couvrant ses petits, sa compagne fidèle 6+6 a
Meurt sous le bec sanglant du féroce vautour. 6+6 b
C'est ainsi que la mort la trouva sans défense. 6+6 c
Ah ! lorsque le ramier reviendra de l'absence, 6+6 c
Enfants, pour adoucir sa mortelle douleur, 6+6 d
80 Répétez lui parfois ces doux mots d'espérance : 6+6 c
Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
M'abreuvant de tristesse à la voix du zéphyre 6+6 a
Qui se plaint et gémit dans le cyprès des morts, 6+6 b
Je viens sur ce tombeau, de ma voix qui soupire, 6+6 a
85 Mêler l'accent plaintif à des sombres accords. 6+6 b
Et mon front sur mon sein moins tristement retombe 6+6 c
O vous, qu'a délaissés la mourante colombe, 6+6 c
Venez sous ces cyprès consoler votre cœur ; 6+6 d
Car une voix nous dit dans la paix de la tombe : 6+6 c
90 Heureux ceux qui sont morts dans l'esprit du Seigneur ! 6+6 d
mètre profil métrique : 6+6
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