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| = césure
HUG_8/HUG73
Victor HUGO
Odes et Ballades
1826
ODES
LIVRE CINQUIÈME
1819-1828
ODE ONZIÈME
PAYSAGE
Hoc erat in votis !
Horace.
Lorsque j'étais enfant : — « Viens, me disait la Muse, 6+6 a
Viens voir le beau génie assis sur mon autel ! 6+6 b
Il n'est dans mes trésors rien que je te refuse, 6+6 a
Soit que l'altier clairon ou l'humble cornemuse 6+6 a
5 Attendent ton souffle immortel. 8 b
« Mais fuis d'un monde étroit l'impure turbulence ; 6+6 a
Là, rampent les ingrats, là, règnent les méchants. 6+6 b
Sur un luth inspi lorsqu'une âme s'élance, 6+6 a
Il faut que, l'écoutant dans un chaste silence, 6+6 a
10 L'écho lui rende tous ses chants ! 8 b
« Choisis quelque désert pour y cacher ta vie, 6+6 a
Dans une ombre sacrée emporte ton flambeau. 6+6 b
Heureux qui, loin des pas d'une foule asservie, 6+6 a
Dérobant ses concerts aux clameurs de l'envie, 6+6 a
15 Lègue sa gloire à son tombeau ! 8 b
« L'horizon de ton âme est plus haut que la terre. 6+6 a
Mais cherche à ta pensée un monde harmonieux, 6+6 b
Où tout, en l'exaltant, charme ton cœur austère, 6+6 a
Où des saintes clartés, que nulle ombre n'altère, 6+6 a
20 Le doux reflet suive tes yeux. 8 b
« Qu'il soit un frais vallon, ton paisible royaume, 6+6 a
Où parmi l'églantier, le saule et le glaïeul, 6+6 b
Tu penses voir parfois, errant comme un fantôme, 6+6 a
Ces magiques palais qui naissent sous le chaume, 6+6 a
25 Dans les beaux contes de l'aïeul. 8 b
« Qu'une tour en ruine, au flanc de la montagne, 6+6 a
Pende, et jette son ombre aux flots d'un lac d'azur. 6+6 b
Le soir qu'un feu de pâtre, au fond de la campagne, 6+6 a
Comme un ami dont l'œil de loin nous accompagne, 6+6 a
30 Perce le crépuscule obscur. 8 b
« Quand, guidant sur le lac deux rames vagabondes, 6+6 a
Le ciel, dans ce miroir, t'offrira ses tableaux, 6+6 b
Qu'une molle nuée, en déroulant ses ondes, 6+6 a
Montre à tes yeux, baissés sur les vagues profondes, 6+6 a
35 Des flots se jouant dans les flots. 8 b
« Que, visitant parfois une île solitaire 6+6 a
Et des bords ombragés de feuillages mouvants, 6+6 b
Tu puisses, savourant ton exil volontaire, 6+6 a
En silence épier s'il est quelque mystère 6+6 c
40 Dans le bruit des eaux et des vents. 8 b
« Qu'à ton réveil joyeux, les chants des jeunes mères 6+6 c
T'annoncent et l'enfance, et la vie et le jour. 6+6 a
Qu'un ruisseau passe auprès de tes fleurs éphémères, 6+6 b
Comme entre les doux soins et les tendres chimères 6+6 b
45 Passent l'espérance et l'amour. 8 a
« Qu'il soit dans la contrée un souvenir fidèle 6+6 a
De quelque bon seigneur, de hauteur dépourvu, 6+6 b
Ami de l'indigence et toujours aimé d'elle ; 6+6 a
Et que chaque vieillard, le citant pour modèle, 6+6 a
50 Dise : Vous ne l'avez pas vu ! 8 b
« Loin du monde surtout mon culte te réclame. 6+6 a
Sois le Prophète ardent, qui vit le ciel ouvert, 6+6 b
Dont l'œil, au sein des nuits, brillait comme une flamme, 6+6 a
Et qui, de l'Esprit Saint ayant rempli son âme, 6+6 a
55 Allait, parlant dans le désert ! » 8 b
Tu le disais, ô Muse ! Et la cité bruyante 6+6 a
Autour de moi pourtant mêle ses mille voix ! 6+6 b
Muse ! et je ne fuis pas la sphère tournoyante 6+6 a
Où le sort, agitant la foule imprévoyante, 6+6 a
60 Meut tant de destins à la fois ! 8 b
C'est que, pour m'amener au terme où tout aspire, 6+6 a
Il m'est venu du ciel un guide au front joyeux ; 6+6 b
Pour moi, l'air le plus pur est l'air qu'elle respire ; 6+6 a
Je vois tous mes bonheurs, Muse, dans son sourire, 6+6 a
65 Et tous mes rêves dans ses yeux ! 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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