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HUG_8/HUG30
Victor HUGO
Odes et Ballades
1826
ODES
LIVRE DEUXIÈME
1822-1823
ODE QUATRIÈME
À MON PÈRE
Domestica facta.
HORACE.
I
Quoi ! toujours une lyre et jamais une ée ! 6+6 a
Toujours d'un voile obscur ma vie enveloppée ! 6+6 a
Point d'arène guerrière à mes pas éperdus !… 6+6 b
Mais jeter ma colère en strophes cadenes ! 6+6 c
5 Consumer tous mes jours en stériles penes, 6+6 c
Toute mon âme en chants perdus ! 8 b
Et cependant, livrée aux tyrans qu'elle brave, 6+6 a
La Grèce aux rois chrétiens montre sa croix esclave ! 6+6 a
Et l'Espagne à grands cris appelle nos exploits ! 6+6 b
10 Car elle a de l'erreur connu l'ivresse amère ; 6+6 c
Et, comme un orphelin qu'on arrache à sa mère, 6+6 c
Son vieux trône a perdu l'appui des vieilles lois. 6+6 b
Je rêve quelquefois que je saisis ton glaive, 6+6 a
Ô mon père ! et je vais, dans l'ardeur qui m'enlève, 6+6 a
15 Suivre au pays du Cid nos glorieux soldats, 6+6 b
Ou faire dire aux fils de Sparte révoltée 6+6 c
Qu'un Français, s'il ne put rendre aux Grecs un Tyrtée, 6+6 c
Leur sut rendre un Léonidas. 8 b
Songes vains ! Mais du moins ne crois pas que ma muse 6+6 a
20 Ait pour tes compagnons des chants quelle refuse, 6+6 a
Mon père ! le poète est fidèle aux guerriers. 6+6 b
Des honneurs immortels il revêt la victoire ; 6+6 c
Il chante sur leur vie ; et l'amant de la gloire 6+6 c
Comme toutes les fleurs aime tous les lauriers. 6+6 b
II
25 Ô français ! des combats la palme vous décore : 6+6 a
Courbés sous un tyran, vous étiez grands encore. 6+6 a
Ce Chef prodigieux par vous s'est élevé ; 6+6 b
Son immortali sur vos gloires se fonde, 6+6 c
Et rien n'effacera des annales du monde 6+6 c
30 Son nom, par vos glaives gravé. 8 b
Ajoutant une page à toutes les histoires, 6+6 a
Il attelait des Rois au char de ses victoires. 6+6 a
Dieu dans sa droite aveugle avait mis le trépas. 6+6 b
L'univers haletait sous son poids formidable ; 6+6 c
35 Comme ce qu'un enfant a tracé sur le sable, 6+6 c
Les empires confus s'effaçaient sous ses pas. 6+6 b
Flatté par la fortune, il fut puni par elle. 6+6 a
L'imprudent confiait son destin vaste et frêle 6+6 a
À cet orgueil, toujours sur la terre expié. 6+6 b
40 Où donc, en sa folie, aspirait ta pene, 6+6 c
Malheureux ! qui voulais, dans ta route insene, 6+6 c
Tous les trônes pour marchepied ? 8 b
Son jour vint : on le vit, vers la France alarmée, 6+6 a
Fuir, trnant après lui comme un lambeau d'armée, 6+6 a
45 Chars, coursiers et soldats, pressés de toutes parts. 6+6 b
Tel, en son vol immense atteint du plomb funeste, 6+6 c
Le grand aigle, tombant de l'empire céleste, 6+6 c
Sème sa trace au loin de son plumage épars. 6+6 b
Qu'il dorme maintenant dans son lit de poussière ! 6+6 a
50 On ne voit plus, autour de sa couche guerrière, 6+6 a
Vingt courtisans royaux épier son réveil ; 6+6 b
L'Europe, si longtemps sous son bras palpitante, 6+6 c
Ne compte plus, assise aux portes de sa tente, 6+6 c
Les heures de son noir sommeil. 8 b
55 Reprenez, ô Français ! votre gloire usurpée. 6+6 a
Assez dans tant d'exploits on n'a vu qu'une ée ! 6+6 a
Assez de la louange il fatigua la voix ! 6+6 b
Mesurez la hauteur du géant sur la poudre. 6+6 c
Quel aigle ne vaincrait, armé de votre foudre ? 6+6 c
60 Et qui ne serait grand, du haut de vos pavois ? 6+6 b
L'étoile de Brennus luit encor sur vos têtes. 6+6 a
La Victoire eut toujours des Français à ses fêtes. 6+6 a
La paix du monde entier dépend de leur repos. 6+6 b
Sur les pas des Moreau, des Condé, des Xaintrailles, 6+6 c
65 Ce peuple glorieux dans les champs de batailles 6+6 c
A toujours usé ses drapeaux. 8 b
III
Toi, mon père, ployant ta tente voyageuse, 6+6 a
Conte-nous les écueils de ta route orageuse, 6+6 a
Le soir, d'un cercle étroit en silence entouré. 6+6 b
70 Si d'opulents trésors ne sont plus ton partage, 6+6 c
Va, tes fils sont contents de ton noble héritage : 6+6 c
Le plus beau patrimoine est un nom révéré. 6+6 b
Pour moi, puisqu'il faut voir, et mon cœur en murmure, 6+6 a
Pendre aux lambris poudreux ta vénérable armure ; 6+6 a
75 Puisque ton étendard dort près de ton foyer, 6+6 b
Et que, sous l'humble abri de quelques vieux portiques, 6+6 c
Le coursier, qui m'emporte aux luttes poétiques, 6+6 c
Laisse rouiller ton char guerrier ; 8 b
Lègue à mon luth obscur l'éclat de ton ée ; 6+6 a
80 Et du moins qu'à ma voix, de ta vie occue, 6+6 a
Ce beau souvenir prête un charme solennel. 6+6 b
Je dirai tes combats aux muses attentives, 6+6 c
Comme un enfant joyeux, parmi ses sœurs craintives, 6+6 c
Traîne, débile et fier, le glaive paternel. 6+6 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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