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12 longueur métrique
6-6 mètre
HUG_7/HUG622
Victor HUGO
Les Chansons des rues et des bois
1865
LIVRE PREMIER
JEUNESSE
III
POUR JEANNE SEULE
VII
LES ÉTOILES FILANTES
I
À qui donc le grand ciel sombre 7 a
Jette-t-il ses astres d'or ? 7 b
Pluie éclatante de l'ombre, 7 a
Ils tombent…Encor ! encor ! 7 b
5 Encor !lueurs éloignées, 7 a
Feux purs, pâles orients, 7 b
Ils scintillent…ô poignées 7 a
De diamant effrayants ! 7 b
C'est de la splendeur qui rôde, 7 a
10 Ce sont des points univers, 7 b
La foudre dans l'émeraude ! 7 a
Des bleuets dans des éclairs ! 7 b
Réalités et chimères 7 a
Traversant nos soirs d'été ! 7 b
15 Escarboucles éphémères 7 a
De l'obscure éternité ! 7 b
De quelle main sortent-elles ? 7 a
Cieux, à qui donc jette-t-on 7 b
Ces tourbillons d'étincelles ? 7 a
20 Est-ce à l'âme de Platon ? 7 b
Est-ce à l'esprit de Virgile ? 7 a
Est-ce aux monts ? est-ce au flot vert ? 7 b
Est-ce à l'immense évangile 7 a
Que Jésus-Christ tient ouvert ? 7 b
25 Est-ce à la tiare énorme 7 a
De quelque Moïse enfant 7 b
Dont l'âme a déjà la forme 7 a
Du firmament triomphant ? 7 b
Ces feux vont-ils aux prières ? 7 a
30 À qui l'Inconnu profond 7 b
Ajoute-t-il ces lumières, 7 a
Vagues flammes de son front ? 7 b
Est-ce, dans l'azur superbe, 7 a
Aux religions que Dieu, 7 b
35 Pour accentuer son verbe, 7 a
Jette ces langues de feu ? 7 b
Est-ce au-dessus de la Bible 7 a
Que flamboie, éclate et luit 7 b
L'éparpillement terrible 7 a
40 Du sombre écrin de la nuit ? 7 b
Nos questions en vain pressent 7 a
Le ciel, fatal ou béni. 7 b
Qui peut dire à qui s'adressent 7 a
Ces envois de l'infini ? 7 b
45 Qu'est-ce que c'est que ces chutes 7 a
D'éclairs au ciel arrachés ? 7 b
Mystère ! Sont-ce des luttes ? 7 a
Sont-ce des hymens ? Cherchez. 7 b
Sont-ce les anges du soufre ? 7 a
50 Voyons-nous quelque essaim bleu 7 b
D'argyraspides du gouffre 7 a
Fuir sur des chevaux de feu ? 7 b
Est-ce le Dieu des désastres, 7 a
Le Sabaoth irrité, 7 b
55 Qui lapide avec des astres 7 a
Quelque soleil révolté ? 7 b
II
Mais qu'importe ! l'herbe est verte, 7 a
Et c'est l'été ! Ne pensons, 7 b
Jeanne qu'à l'ombre entrouverte, 7 a
60 Qu'aux parfums et qu'aux chansons. 7 b
La grande saison joyeuse 7 a
Nous offre les prés, les eaux, 7 b
Les cressons mouillés, l'yeuse, 7 a
Et l'exemple des oiseaux. 7 b
65 L'été, vainqueur des tempêtes, 7 a
Doreur des cieux essuyés, 7 b
Met des rayons sur nos têtes 7 a
Et des fraises sous nos pieds. 7 b
Été sacré ! l'air soupire. 7 a
70 Dieu, qui veut tout apaiser, 7 b
Fait le jour pour le sourire 7 a
Et la nuit pour le baiser. 7 b
L'étang frémit sous les aulnes ; 7 a
La plaine est un gouffre d'or 7 b
75 Où court, dans les grands blés jaunes, 7 a
Le frisson de messidor. 7 b
C'est l'instant qu'il faut qu'on aime, 7 a
Et qu'on le dise aux forêts, 7 b
Et qu'on ait pour but suprême 7 a
80 La mousse des antres frais ! 7 b
À quoi bon songer aux choses 7 a
Qui se passent dans les cieux ? 7 b
Viens, donnons notre âme aux roses ; 7 a
C'est ce qui l'emplit le mieux. 7 b
85 Viens, laissons là tous ces rêves, 7 a
Puisque nous sommes aux mois 7 b
Où les charmilles, les grèves, 7 a
Et les cœurs, sont pleins de voix ! 7 b
L'amant entraîne l'amante, 7 a
90 Enhardi dans son dessein 7 b
Par la trahison charmante 7 a
Du fichu montrant le sein. 7 b
Ton pied sous ta robe passe, 7 a
Jeanne, et j'aime mieux le voir, 7 b
95 Que d'écouter dans l'espace 7 a
Les sombres strophes du soir. 7 b
Il ne faut pas craindre, ô belle, 7 a
De montrer aux prés fleuris 7 b
Qu'on est jeune, peu rebelle, 7 a
100 Blanche, et qu'on vient de Paris ! 7 b
La campagne est caressante 7 a
Au frais amour ébloui ; 7 b
L'arbre est gai pourvu qu'il sente 7 a
Que Jeanne va dire oui. 7 b
105 Aimons-nous ! et que les sphères 7 a
Fassent ce qu'elles voudront ! 7 b
Il est nuit ; dans les clairières 7 a
Les chansons dansent en rond ; 7 b
L'ode court dans les rosées ; 7 a
110 Tout chante ; et dans les torrents 7 b
Les idylles déchaussées 7 a
Baignent leurs pieds transparents ; 7 b
La bacchanale de l'ombre 7 a
Se célèbre vaguement 7 b
115 Sous les feuillages sans nombre 7 a
Pénétrés de firmament ; 7 b
Les lutins, les hirondelles, 7 a
Entrevus, évanouis, 7 b
Font un ravissant bruit d'ailes 7 a
120 Dans le bleue horreur des nuits ; 7 b
La fauvette et la sirène 7 a
Chantent des chants alternés 7 b
Dans l'immense ombre sereine 7 a
Qui dit aux âmes : Venez ! 7 b
125 Car les solitudes aiment 7 a
Ces caresses, ces frissons, 7 b
Et, le soir, les rameaux sèment 7 a
Les sylphes sur les gazons ; 7 b
L'elfe tombe des lianes 7 a
130 Avec des fleurs plein les mains ; 7 b
On voit de pâles dianes 7 a
Dans la lueur des chemins ; 7 b
L'ondin baise les nymphées ; 7 a
Le hallier rit quand il sent 7 b
135 Les courbures que les fées 7 a
Font aux brins d'herbe en passant. 7 b
Viens ; les rossignols t'écoutent ; 7 a
Et l'éden n'est pas détruit 7 b
Par deux amants qui s'ajoutent 7 a
140 À ces noces de la nuit. 7 b
Viens, qu'en son nid qui verdoie, 7 a
Le moineau bohémien 7 b
Soit jaloux de voir ma joie, 7 a
Et ton cœur si près du mien ! 7 b
145 Charmons l'arbre et sa ramure 7 a
Du tendre accompagnement 7 b
Que nous faisons au murmure 7 a
Des feuilles, en nous aimant. 7 b
À la face des mystères, 7 a
150 Crions que nous nous aimons ! 7 b
Les grands chênes solitaires 7 a
Y consentent sur les monts. 7 b
Ô Jeanne, c'est pour ces fêtes, 7 a
Pour ces gaietés, pour ces chants, 7 b
155 Pour ces amours, que sont faites 7 a
Toutes les grâces des champs ! 7 b
Ne tremble pas, quoiqu'un songe 7 a
Emplisse mes yeux ardents. 7 b
Ne crains d'eux aucun mensonge 7 a
160 Puisque mon âme est dedans. 7 b
Reste chaste sans panique. 7 a
Sois charmante avec grandeur. 7 b
L'épaisseur de la tunique, 7 a
Jeanne, rend l'amour boudeur. 7 b
165 Pas de terreur, pas de transe ; 7 a
Le ciel diaphane absout 7 b
Du péché de transparence 7 a
La gaze du canezout. 7 b
La nature est attendrie ; 7 a
170 Il faut vivre ! Il faut errer 7 b
Dans la douce effronterie 7 a
De rire et de s'adorer. 7 b
Viens, aime, oublions le monde, 7 a
Mêlons l'âme à l'âme, et vois 7 b
175 Monter la lune profonde 7 a
Entre les branches des bois ! 7 b
III
Les deux amants, sous la nue, 7 a
Songent, charmants et vermeils… 7 b
L'immensité continue 7 a
180 Ses semailles de soleils. 7 b
À travers le ciel sonore, 7 a
Tandis que, du haut des nuits, 7 b
Pleuvent, poussière d'aurore, 7 a
Les astres épanouis, 7 b
185 Tant de feux tombants qui perce 7 a
Le zénith vaste et bruni, 7 b
Braise énorme que disperse 7 a
L'encensoir de l'infini ; 7 b
En bas, parmi la rosée, 7 a
190 Étalant l'arum, l'œillet, 7 b
La pervenche, la pensée, 7 a
Le lys, lueur de juillet, 7 b
De brume à demi noyée, 7 a
Au centre de la forêt, 7 b
195 La prairie est déployée, 7 a
Et frissonne, et l'on dirait 7 b
Que la terre, sous les voiles 7 a
Des grands bois mouillés de pleurs, 7 b
Pour recevoir les étoiles 7 a
200 Tend son tablier de fleurs. 7 b
mètre profil métrique : 7
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