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HUG_5/HUG885
Victor HUGO
LA LÉGENDE DES SIÈCLES
DERNIÈRE SÉRIE
1883
XIV
RUPTURE AVEC CE QUI AMOINDRIT
Rupture avec ce qui amoindrit
Trêve à toutes ces vaines choses ! 8 a
Vous êtes dans L'ombre, sortons. 8 b
Sans vous brouiller avec les roses, 8 a
Évadez-vous des Jeannetons. 8 b
5 Enfuyez-vous de ces drôlesses. 8 a
Derrière ces bonheurs changeants 8 b
Se dressent de pâles vieillesses 8 a
Qui menacent les jeunes gens. 8 b
Crains Manon qui te tend son verre ; 8 a
10 Crains le grenier où l'on est bien. 8 b
Perse, à l'alcôve de Néère, 8 a
Préférait l'autan libyen. 8 b
Ami, ta vie est mansardée ; 8 a
A ce petit ciel bas, plafond 8 b
15 De la volupté sans idée, 8 a
Les âmes se heurtent le front. 8 b
Le temps déforme la jeunesse 8 a
Comme un vieux décor d'opéra. 8 b
Gare à vous ! c'est par l'ivrognesse 8 a
20 Que la bacchante finira. 8 b
L'églogue serait indignée, 8 a
Dans vos noirs galetas sans jour, 8 b
De voir des toiles d'araignée 8 a
Au bout des ailes de l'Amour. 8 b
25 Le houx sacré, frère du lierre, 8 a
Que cueillait Plaute au fond des bois, 8 b
A Margoton trop familière 8 a
Eût dans l'ombre piqué les doigts. 8 b
L'antique muse tiburtine 8 a
30 Baisait les fleurs, le jasmin pur, 8 b
Le lys, et n'était libertine 8 a
Qu'avec les rayons, dans l'azur. 8 b
Vous avez autre chose à faire 8 a
Que d'engloutir votre raison 8 b
35 Dans la chanson qu'Anna préfère 8 a
Et dans le vin que boit Suzon. 8 b
Il est temps d'avoir d'autres fièvres 8 a
Que de voir se coiffer, le soir, 8 b
Lise, une épingle entre les lèvres, 8 a
40 Éblouissement d'un miroir. 8 b
Frère, l'heure folle est passée. 8 a
Debout, frère ! il est peu séant 8 b
D'attarder l'œil de sa pensée 8 a
A la figure du néant. 8 b
45 Laisse là Fanchon et Fanchette ! 8 a
Fermons les jours faux et charmants. 8 b
L'honneur d'être un homme s'achète 8 a
Par ces graves renoncements. 8 b
Les amourettes énervantes 8 a
50 Fatiguent, sans les émouvoir, 8 b
Les âmes, ces grandes servantes 8 a
De la justice et du devoir. 8 b
Viens aux champs ! les champs sont sévères 8 a
Et pensifs plus que tu ne crois ; 8 b
55 Les monts font songer aux calvaires, 8 a
Les arbres font songer aux croix. 8 b
Oublions les soupers, les veilles, 8 a
Le vin, le brelan, l'écarté ! 8 b
Viens noyer ton cœur aux merveilles 8 a
60 De l'immense sérénité ! 8 b
Fuyez ; prenez votre volée. 8 a
Un peu plus et nous traînerons 8 b
Notre rauque idylle éculée 8 a
Dans le ruisseau des Porcherons. 8 b
65 Ouvrez les ailes de vos âmes ; 8 a
Enfoncez le toit s'il le faut ; 8 b
Les révélations, les flammes, 8 a
Et les ouragans sont là-haut. 8 b
Levez vos cœurs, levez vos têtes. 8 a
70 Allez où l'on a sur le front 8 b
Le vaste espace, les tempêtes, 8 a
Les étoiles, et pas d'affront. 8 b
Vous êtes faits comme les lyres, 8 a
Et pleins d'altiers frémissements ; 8 b
75 De profonds et vagues sourires 8 a
Vous appellent aux firmaments. 8 b
Viens, nous lirons les livres sombres 8 a
Des penseurs et des combattants, 8 b
Pendant que Dieu fera des ombres 8 a
80 Et des clartés dans le printemps. 8 b
Nous scruterons les maux, les guerres, 8 a
Et le creux fatal qu'a laissé 8 b
Le pied tragique île nos pères 8 a
Dans l'âpre fange du passé. 8 b
85 Nous examinerons les songes, 8 a
L'autel, les corans, les clergés, 8 b
Les sceptres mêlés aux mensonges, 8 a
Les dieux mêlés aux préjugés. 8 b
Molière, au fourbe ôtant sa guimpe, 8 a
90 Mina Bossuet comme il put ; 8 b
Pascal frappa ; Swift à l'Olympe 8 a
Offrit ce miroir, Lilliput. 8 b
Nous regarderons sur la terre 8 a
Ce tas d'erreurs que Beaumarchais, 8 b
95 Rabelais, Diderot, Voltaire, 8 a
Ont remué de leurs crochets. 8 b
Nous saluerons ces Diogènes 8 a
De la raison et du bon sens ; 8 b
Nous entendrons tomber les chaînes 8 a
100 Derrière ces divins passants. 8 b
O France, grâce à ces sceptiques, 8 a
Tu voyais le fond ; tu trouvais 8 b
Des ordures sous les portiques 8 a
Et sous les dogmes des forfaits. 8 b
105 Ces puissants balayeurs d'étable 8 a
Ont fait un lion d'un baudet ; 8 b
Dans leur cynisme redoutable 8 a
Un tonnerre profond grondait. 8 b
Sur l'homme dans l'ignominie 8 a
110 Ils jetaient leur rude gaîté, 8 b
Sachant que c'est à l'ironie 8 a
Que commence la liberté. 8 b
Dieu fait précéder, quand il change 8 a
En victime, hélas, le bourreau, 8 b
115 L'effrayant glaive de l'archange 8 a
Par le rasoir de Figaro. 8 b
La comédie amère et saine 8 a
Fait entrer Méduse en sortant ; 8 b
Quand Beaumarchais est sur la scène, 8 a
120 Danton dans la coulisse attend. 8 b
Les railleurs sous leur joug lugubre 8 a
Consolent les âges de fer ; 8 b
Leur éclat de rire salubre 8 a
Déconcerte l'antique enfer. 8 b
125 Ils ont fait l'interrogatoire 8 a
Farouche, à travers le bâillon, 8 b
Des religions par l'histoire, 8 a
De la pourpre par le haillon. 8 b
Durs au bigot, fatals au cuistre, 8 a
130 Ils promènent à petit bruit 8 b
Une lueur gaie et sinistre 8 a
Dans le grand bagne de la nuit. 8 b
Escobar est le chat qui rôde 8 a
Et fuit, mais Voltaire est le lynx. 8 b
135 Ils font, sans pitié pour la fraude, 8 a
Rire la Gaule au nez du sphinx. 8 b
Ces douteurs ont frayé nos routes, 8 a
Et sont si grands sous le ciel bleu 8 b
Qu'à cette heure, grâce à leurs doutes, 8 a
140 On peut enfin affirmer Dieu ! 8 b
Leur rouge lanterne nous mène. 8 a
Ces contemplateurs du pavé, 8 b
En fouillant la guenille humaine, 8 a
Cherchaient le peuple, et l'ont trouvé. 8 b
145 Ils ont, dans la nuit où nous sommes, 8 a
Retrouvé la raison, les droits, 8 b
L'égalité volée aux hommes, 8 a
En vidant les poches des rois. 8 b
Ils ont fait, moqueurs nécessaires 8 a
150 Et plus exacts que Mézeray, 8 b
De la torsion des misères 8 a
Tomber goutte à goutte le vrai. 8 b
Ils ont nié la vieille bible ; 8 a
Ces guérisseurs, ces factieux 8 b
155 Ont fait cette chose terrible 8 a
L'ouverture de tous les yeux. 8 b
Ils ont, sur la cime vermeille, 8 a
Montré l'aurore au genre humain ; 8 b
Ils ont été la grande veille 8 a
160 Du formidable lendemain. 8 b
La révolution française 8 a
C'est le salut, d'horreur mêlé. 8 b
De la tête de Louis seize, 8 a
Hélas ! la lumière a coulé. 8 b
mètre profil métrique : 8
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