Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
HUG_4/HUG850
Victor HUGO
LA LÉGENDE DES SIÈCLES
NOUVELLE SÉRIE
1877
XXI
LE TEMPS PRÉSENT
Le Prisonnier
Cet homme a pour prisonl'ignominie immense. 6+6 a
On pouvait le tuer,mais on fut sans clémence, 6+6 a
Il vit.
Il est dans l'âpreet lugubre prison 6+6 b
Invisible, toujoursdebout sur l'horizon, 6+6 b
L'opprobre.
5 Cette toura la hauteur du songe. 6+6 a
Sa crypte jusqu'aux lieuxignorés se prolonge, 6+6 a
Ses remparts ont de noirscréneaux vertigineux, 6+6 b
Si vains qu'on n'y pourraitpendre une corde à nœuds, 6+6 b
Si terribles que rienjamais ne vous procure 6+6 a
10 Une échelle appliquéeà la muraille obscure. 6+6 a
Aucun trousseau de clefsn'ouvre ce qui n'est plus. 6+6 b
On est captif. Dans quoi ?Dans de l'ombre. Et reclus ; 6+6 b
? dans son propre gouffre.On a sur soi le voile. 6+6 a
C'est fini. Deuil ! jamaison ne verra l'étoile 6+6 a
15 Ni l'azur appartreau plafond sidéral. 6+6 b
Là, rien qui puisse rendreà l'affreux général 6+6 b
Cette virginité,la France point trahie. 6+6 a
Sa mémoire est déjàde lui-même haïe. 6+6 a
Pas d'enceinte à ce bagneépars dans tous les sens, 6+6 b
20 Qui va plus loin que tousles nuages passants, 6+6 b
Car l'élargissementdu déshonneur imite 6+6 a
Un rayonnement d'astreet n'a point de limite. 6+6 a
Pour bâtir la prisonqui jamais ne finit 6+6 b
La loi ne se sert pasd'airain ni de granit ; 6+6 b
25 C'est la fange qu'on prend,la fange étant plus dure ; 6+6 a
Cette bastille-làtoujours vit, toujours dure, 6+6 a
Pleine d'un crépusculeau pâle hiver pareil, 6+6 b
Brume manque l'honneurcomme aux nuits le soleil, 6+6 b
Oubliette l'auroreest éteinte, médite 6+6 a
30 Ce qui reste d'une âmeaprès qu'elle est maudite. 6+6 a
Ce misérable est seuldans cette ombre ; son front 6+6 b
Est plié, car la honteest basse de plafond, 6+6 b
Tant l'informe cerveaudu fourbe est peu lucide, 6+6 a
Tant est lourd à porterle poids du parricide ! 6+6 a
35 Si cet homme t voulu,la France triomphait. 6+6 b
Il porte au cou ce noircarcan : ce qu'il a fait. 6+6 b
De la déroute affreuseil fut le vil ministre. 6+6 a
Sa conscience nue,indignée et sinistre, 6+6 a
Est près de lui, disant :L'abject sort du félon, 6+6 b
40 Ganelon de Judaset toi de Ganelon. 6+6 b
Sois le désespéré.Dors si tu peux, je veille. — 6+6 a
Il entend cette voixsans cesse à son oreille. 6+6 a
Morne, il n'a même pluscet espoir, un danger. 6+6 b
Il faut qu'il reste, il fautqu'il vive, pour songer 6+6 b
45 Aux vieilles légionsde France prisonnières, 6+6 a
Pour qu'il soit souffletépar toutes nos bannières 6+6 a
Frémissantes, la nuit,dans ses rêves hideux. 6+6 b
D'ailleurs nos aïeux mortsn'auraient au milieu d'eux 6+6 b
Pas voulu de ce spectre,et leur grand souffle sombre, 6+6 a
50 Certe, t chassé d'abîmeen abîme cette ombre, 6+6 a
Et fouetté, ramené,repris, poussé, trné 6+6 b
Ce fuyard à la fuiteà jamais condamné ! 6+6 b
Car grâce à lui, l'on peutcracher sur notre gloire, 6+6 a
Car c'est par toi, maudit,que nos preux, notre histoire, 6+6 a
55 Nos régiments, de tantde victoire étoilés, 6+6 b
Que Wagram, Austerlitz,Lodi, s'en sont allés 6+6 b
En prison, sous les yeuxde l'anglais et du russe, 6+6 a
Le dos zébré du platdu sabre de la Prusse ! 6+6 a
Inexprimable deuil !
Donc cet homme est muré 6+6 b
60 Au fond d'on ne sait quelmépris démesuré ; 6+6 b
Le regard effrayantdu genre humain l'entoure. 6+6 a
Il est la trahisoncomme Cid la bravoure. 6+6 a
Sa complice, la Peur,sa sœur, la Lâcheté, 6+6 b
Le gardent. Ce rebutvivant, ce rejeté, 6+6 b
65 Sous l'exécrationde tous, sur lui vomie, 6+6 a
Râle, et ne peut pas plussortir de l'infamie 6+6 a
Que l'écume ne peutsortir de l'océan. 6+6 b
L'opprobre, ayant horreurde lui, dirait : Va-t'en ! 6+6 b
Les anges justiciers,secouant sur cette âme 6+6 a
70 Leur glaive la lumière,hélas ! s'achève en flamme, 6+6 a
Crieraient : Sors d'ici ! rentreau néant qui t'attend ! 6+6 b
Qu'il ne pourrait ; aucuneouverture n'étant 6+6 b
Possible, ô cieux profonds,hors d'une telle honte ! 6+6 a
Cet homme est le Foat !Qu'il descende ou qu'il monte, 6+6 a
75 Que trouve-t-il ? En basl'abjection ; en haut 6+6 b
L'abjection. Son cœurest brûlé du fer chaud. 6+6 b
Le criminel, t-ilplus d'or qu'il n'en existe, 6+6 a
Ne corrompra jamaisson crime, geôlier triste. 6+6 a
Deux verrous ont fermésa porte pour jamais, 6+6 b
80 L'un qu'on nomme Strasbourg,l'autre qu'on nomme Metz. 6+6 b
Ah ! cet infâme a misle pied sur la patrie. 6+6 a
Quand une âme ici-basest à ce point flétrie, 6+6 a
Lorsqu'on l'a vue au fonddes forfaits se vautrer, 6+6 b
L'honneur libre et vivantn'y peut pas plus rentrer 6+6 b
85 Que l'abeille ne vientsur une rose morte. 6+6 a
Ah ! le Spielberg est noir,la Bastille était forte 6+6 a
Le Saint-Michel remplide cages était haut, 6+6 b
Le vieux château Saint-Angeest un puissant cachot ; 6+6 b
Mais aucun mur n'égaleen épaisseur la honte. 6+6 a
90 Dieu tient ce prisonnieret lui demande compte. 6+6 a
Comment a-t-il changénotre armée en troupeau ? 6+6 b
Qu'a-t-il fait des canons,des soldats, du drapeau, 6+6 b
Du clairon réveillantles camps, de l'espérance, 6+6 a
De nous tous, et combiena-t-il vendu la France ? 6+6 a
95 Oh ! quelle ombre de telscoupables ont sur eux ! 6+6 b
Cave et forêt ! rameauxcroisés ! murs douloureux ! 6+6 b
Stigmate ! abaissement !chute ! dédains horribles ! 6+6 a
Comment fuir de dessousces branchages terribles ? 6+6 a
O chiens, qu'avez-vous doncdans les dents ? C'est son nom. 6+6 b
100 Il habite la faute,éternel cabanon, 6+6 b
Labyrinthe aux replismonstrueux et funèbres, 6+6 a
les ténèbres sontderrière les ténèbres, 6+6 a
Geôle l'on est captiftant qu'on est regardé. 6+6 b
Et qui donc maintenantdit qu'il s'est évadé ? 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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