Métrique en Ligne
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| = césure
HUG_3/HUG584
Victor HUGO
LA LÉGENDE DES SIÈCLES
PREMIÈRE SÉRIE
1859
VI
LES TRÔNES D'ORIENT
Sultan Mourad
I
Mourad, fils du sultan Bajazet, fut un homme 6+6 a
Glorieux, plus qu'aucun des Tibères de Rome ; 6+6 a
Dans son sérail veillaient les lions accroupis, 6+6 b
Et Mourad en couvrit de meurtres les tapis ; 6+6 b
5 On y voyait blanchir des os entre les dalles ; 6+6 a
Un long fleuve de sang de dessous ses sandales 6+6 a
Sortait, et s'épandait sur la terre, inondant 6+6 b
L'orient, et fumant dans l'ombre à l'occident ; 6+6 b
Il fit un tel carnage avec son cimeterre 6+6 a
10 Que son cheval semblait au monde une panthère ; 6+6 a
Sous lui Smyrne et Tunis, qui regretta ses beys, 6+6 b
Furent comme des corps qui pendent aux gibets ; 6+6 b
Il fut sublime ; il prit, mêlant la force aux ruses, 6+6 a
Le Caucase aux kirghis et le Liban aux druses ; 6+6 a
15 Il fit, après l'assaut, pendre les magistrats 6+6 b
D'Ephèse, et rouer vifs les prêtres de Patras ; 6+6 b
Grâce à Mourad, suivi des victoires rampantes, 6+6 a
Le vautour essuyait son bec fauve aux charpentes 6+6 a
Du temple de Thésée encor pleines de clous ; 6+6 b
20 Grâce à lui, l'on voyait dans Athènes des loups, 6+6 b
Et la ronce couvrait de sa verte tunique 6+6 a
Tous ces vieux pans de murs écroulés, Salonique, 6+6 a
Corinthe, Argos, Varna, Tyr, Didymothicos, 6+6 b
Où l'on n'entendait plus parler que les échos ; 6+6 b
25 Mourad fut saint ; il fit étrangler ses huit frères ; 6+6 a
Comme les deux derniers, petits, cherchaient leurs mères 6+6 a
Et s'enfuyaient, avant de les faire mourir 6+6 b
Tout autour de la chambre il les laissa courir ; 6+6 b
Mourad, parmi la foule invitée à ses fêtes, 6+6 a
30 Passait, le cangiar à la main, et les têtes 6+6 a
S'envolaient de son sabre ainsi que des oiseaux ; 6+6 b
Mourad, qui ruina Delphe, Ancyre et Naxos, 6+6 b
Comme on cueille un fruit mûr tuait une province ; 6+6 a
Il anéantissait le peuple avec le prince, 6+6 a
35 Les temples et les dieux, les rois et les donjons ; 6+6 b
L'eau n'a pas plus d'essaims d'insectes dans ses joncs 6+6 b
Qu'il n'avait de rois morts et de spectres épiques 6+6 a
Volant autour de lui dans les forêts de piques ; 6+6 a
Mourad, fils étoi de sultans triomphants, 6+6 b
40 Ouvrit, l'un après l'autre et vivants, douze enfants 6+6 b
Pour trouver dans leur ventre une pomme volée ; 6+6 a
Mourad fut magnanime ; il détruisit Élée, 6+6 a
Mégare et Famagouste avec l'aide d'Allah ; 6+6 b
Il effaça de terre Agrigente ; il brûla 6+6 b
45 Fiume et Rhode, voulant avoir des femmes blanches ; 6+6 a
Il fit scier son oncle Achmet entre deux planches 6+6 a
De cèdre, afin de faire honneur à ce vieillard ; 6+6 b
Mourad fut sage et fort ; son père mourut tard, 6+6 b
Mourad l'aida ; ce père avait laissé vingt femmes, 6+6 a
50 Filles d'Europe ayant dans leurs regards des âmes, 6+6 a
Ou filles de Tiflis au sein blanc, au teint clair ; 6+6 b
Sultan Mourad jeta ces femmes à la mer 6+6 b
Dans des sacs convulsifs que la houle profonde 6+6 a
Emporta, se tordant confusément dans l'onde ; 6+6 a
55 Mourad les fit noyer toutes ; ce fut sa loi ; 6+6 b
Et quand quelque santon lui demandait pourquoi, 6+6 b
Il donnait pour raison : « C'est qu'elles étaient grosses. » 6+6 a
D'Aden et d'Erzeroum il fit de larges fosses, 6+6 a
Un charnier de Modon vaincue, et trois amas 6+6 b
60 De cadavres d'Alep, de Brousse et de Damas ; 6+6 b
Un jour, tirant de l'arc, il prit son fils pour cible, 6+6 a
Et le tua ; Mourad sultan fut invincible ; 6+6 a
Vlad, boyard de Tarvis, appelé Belzébuth, 6+6 b
Refuse de payer au sultan son tribut, 6+6 b
65 Prend l'ambassade turque et la fait périr toute 6+6 a
Sur trente pals, plantés aux deux bords d'une route ; 6+6 a
Mourad accourt, brûlant moissons, granges, greniers, 6+6 b
Bat le boyard, lui fait vingt mille prisonniers, 6+6 b
Puis, autour de l'immense et noir champ de bataille, 6+6 a
70 Bâtit un large mur tout en pierre de taille, 6+6 a
Et fait dans les créneaux, pleins d'affreux cris plaintifs, 6+6 b
Maçonner et murer les vingt mille captifs, 6+6 b
Laissant des trous par où l'on voit leurs yeux dans l'ombre, 6+6 a
Et part, après avoir écrit sur leur mur sombre : 6+6 a
75 « Mourad, tailleur de pierre, à Vlad, planteur de pieux. » 6+6 b
Mourad était croyant, Mourad était pieux ; 6+6 b
Il brûla cent couvents de chrétiens en Eubée, 6+6 a
Où par hasard sa foudre était un jour tombée ; 6+6 a
Mourad fut quarante ans l'éclatant meurtrier 6+6 b
80 Sabrant le monde, ayant Dieu sous son étrier ; 6+6 b
Il eut le Rhamséion et le Généralife ; 6+6 a
Il fut le padischah, l'empereur, le calife, 6+6 a
Et les prêtres disaient : « Allah ! Mourad est grand. » 6+6 b
II
Législateur horrible et pire conquérant, 6+6 b
85 N'ayant autour de lui que des troupeaux infâmes, 6+6 a
De la foule, de l'homme en poussière, des âmes 6+6 a
D'où des langues sortaient pour lui lécher les pieds, 6+6 b
Loué pour ses forfaits toujours inexpiés, 6+6 b
Flatté par ses vaincus et baisé par ses proies, 6+6 a
90 Il vivait dans l'encens, dans l'orgueil, dans les joies, 6+6 a
Avec l'immense ennui du méchant adoré. 6+6 b
Il était le faucheur, la terre était le pré. 6+6 b
III
Un jour, comme il passait à pied dans une rue 6+6 a
A Bagdad, tête auguste au vil peuple apparue, 6+6 a
95 A l'heure où les maisons, les arbres et les blés 6+6 b
Jettent sur les chemins de soleil accablés 6+6 b
Leur frange d'ombre au bord d'un tapis de lumière, 6+6 a
Il vit, à quelques pas du seuil d'une chaumière, 6+6 a
Gisant à terre, un porc fétide qu'un boucher 6+6 b
100 Venait de saigner vif avant de l'écorcher ; 6+6 b
Cette bête râlait devant cette masure ; 6+6 a
Son cou s'ouvrait, béant d'une affreuse blessure ; 6+6 a
Le soleil de midi brûlait l'agonisant ; 6+6 b
Dans la plaie implacable et sombre, dont le sang 6+6 b
105 Faisait un lac fumant à la porte du bouge, 6+6 a
Chacun de ses rayons entrait comme un fer rouge ; 6+6 a
Comme s'ils accouraient à l'appel du soleil, 6+6 b
Cent moustiques suçaient la plaie au bord vermeil ; 6+6 b
Comme autour de leur lit voltigent les colombes, 6+6 a
110 Ils allaient et venaient, parasites des tombes, 6+6 a
Les pattes dans le sang, l'aile dans le rayon ; 6+6 b
Car la mort, l'agonie et la corruption 6+6 b
Sont ici-bas le seul mystérieux désastre 6+6 a
Où la mouche travaille en même temps que l'astre ; 6+6 a
115 Le porc ne pouvait faire un mouvement, livré 6+6 b
Au féroce soleil, des mouches dévoré ; 6+6 b
On voyait tressaillir l'effroyable coupure ; 6+6 a
Tous les passants fuyaient loin de la bête impure ; 6+6 a
Qui donc eût eu pitié de ce malheur hideux ? 6+6 b
120 Le porc et le sultan étaient seuls tous les deux ; 6+6 b
L'un torturé, mourant, maudit, infect, immonde ; 6+6 a
L'autre, empereur, puissant, vainqueur, maître du monde, 6+6 a
Triomphant aussi haut que l'homme peut monter, 6+6 b
Comme si le destin eût voulu confronter 6+6 b
125 Les deux extrémités sinistres des ténèbres. 6+6 a
Le porc, dont un frisson agitait les vertèbres, 6+6 a
Râlait, triste, épuisé, morne ; et le padischah 6+6 b
De cet être difforme et sanglant s'approcha, 6+6 b
Comme on s'arrête au bord d'un gouffre qui se creuse ; 6+6 a
130 Mourad pencha son front sur la bête lépreuse, 6+6 a
Puis la poussa du pied dans l'ombre du chemin, 6+6 b
Et, de ce même geste énorme et surhumain 6+6 b
Dont il chassait les rois, Mourad chassa les mouches. 6+6 a
Le porc mourant rouvrit ses paupières farouches, 6+6 a
135 Regarda d'un regard ineffable, un moment, 6+6 b
L'homme qui l'assistait dans son accablement ; 6+6 b
Puis son œil se perdit dans l'immense mystère ; 6+6 a
Il expira
IV
Le jour où ceci sur la terre 6+6 a
S'accomplissait, voici ce que voyait le ciel : 6+6 b
140 C'était dans l'endroit calme, apaisé, solennel, 6+6 b
Où luit l'astre idéal sous l'idéal nuage, 6+6 a
Au-delà de la vie, et de l'heure, et de l'âge, 6+6 a
Hors de ce qu'on appelle espace, et des contours 6+6 b
Des songes qu'ici-bas nous nommons nuits et jours ; 6+6 b
145 Lieu d'évidence où l'âme enfin peut voir les causes, 6+6 a
Où, voyant le revers inattendu des choses, 6+6 a
On comprend, et l'on dit : C'est bien ! — l'autre cô 6+6 b
De la chimère sombre étant la vérité ; 6+6 b
Lieu blanc, chaste, où le mal s'évanouit et sombre. 6+6 a
150 L'étoile en cet azur semble une goutte d'ombre. 6+6 a
Ce qui rayonne là, ce n'est pas un vain jour 6+6 b
Qui naît et meurt, riant et pleurant tour à tour, 6+6 b
Jaillissant, puis rentrant dans la noirceur première, 6+6 a
Et, comme notre aurore, un sanglot de lumière ; 6+6 a
155 C'est un grand jour divin, regardé dans les cieux 6+6 b
Par les soleils, comme est le nôtre par les yeux ; 6+6 b
Jour pur, expliquant tout, quoiqu'il soit le problème ; 6+6 a
Jour qui terrifierait s'il n'était l'espoir même ; 6+6 a
De toute l'étendue éclairant l'épaisseur, 6+6 b
160 Foudre par l'épouvante, aube par la douceur. 6+6 b
Là, toutes les beautés tonnent épanouies ; 6+6 a
Là, frissonnent en paix les lueurs inouïes ; 6+6 a
Là, les ressuscités ouvrent leur œil béni 6+6 b
Au resplendissement de l'éclair infini ; 6+6 b
165 Là, les vastes rayons passent comme des ondes. 6+6 a
C'était sur le sommet du Sinaï des mondes ; 6+6 a
C'était là.
Le nuage auguste, par moments, 6+6 b
Se fendait, et jetait des éblouissements. 6+6 b
Toute la profondeur entourait cette cime. 6+6 a
170 On distinguait, avec un tremblement sublime, 6+6 a
Quelqu'un d'inexprimable au fond de la clarté. 6+6 b
Et tout frémissait, tout, l'aube et l'obscurité, 6+6 b
Les anges, les soleils, et les êtres suprêmes, 6+6 a
Devant un vague front couvert de diadèmes. 6+6 a
Dieu médisait.
175 Celui qui crée et qui sourit, 6+6 b
Celui qu'en bégayant nous appelons Esprit, 6+6 b
Bonté, Force, Équité, Perfection, Sagesse, 6+6 a
Regarde devant lui, toujours, sans fin, sans cesse, 6+6 a
Fuir les siècles ainsi que des mouches d'été. 6+6 b
180 Car il est éternel avec tranquillité. 6+6 b
Et dans l'ombre hurlait tout un gouffre, la terre. 6+6 a
En bas, sous une brume épaisse, cette sphère 6+6 a
Rampait, monde lugubre où les pâles humains 6+6 b
Passaient et s'écroulaient et se tordaient les mains. 6+6 b
185 On apercevait l'Inde et le Nil, des mêlées 6+6 a
D'exterminations et de villes brûlées, 6+6 a
Et des champs ravagés et des clairons soufflant, 6+6 b
Et l'Europe livide ayant un glaive au flanc ; 6+6 b
Des vapeurs de tombeau, des lueurs de repaire ; 6+6 a
190 Cinq frères tout sanglants ; l'oncle, le fils, le père ; 6+6 a
Des hommes dans des murs, vivants, quoique pourris ; 6+6 b
Des têtes voletant, mornes chauves-souris, 6+6 b
Autour d'un sabre nu, fécond en funérailles ; 6+6 a
Des enfants éventrés soutenant leurs entrailles ; 6+6 a
195 Et de larges bûchers fumaient, et des tronçons 6+6 b
D'êtres sciés en deux rampaient dans les tisons ; 6+6 b
Et le vaste étouffeur des plaintes et des râles, 6+6 a
L'Océan, échouait dans les nuages pâles 6+6 a
D'affreux sacs noirs faisant des gestes effrayants ; 6+6 b
200 Et ce chaos de fronts hagards, de pas fuyants, 6+6 b
D'yeux en pleurs, d'ossements, de larves, de décombres, 6+6 a
Ce brumeux tourbillon de spectres, et ces ombres 6+6 a
Secouant des linceuls, et tous ces morts, saignant 6+6 b
Au loin, d'un continent à l'autre continent, 6+6 b
205 Pendant aux pals, cloués aux croix, nus sur les claies, 6+6 a
Criaient, montrant leurs fers, leur sang, leurs maux, leurs plaies : 6+6 a
— C'est Mourad ! c'est Mourad ! justice, ô Dieu vivant ! 6+6 b
A ce cri, qu'apportait de toutes parts le vent, 6+6 b
Les tonnerres jetaient des grondements étranges, 6+6 a
210 Des flamboiements passaient sur les faces des anges, 6+6 a
Les grilles de l'enfer s'empourpraient, le courroux 6+6 b
En faisait remuer d'eux-mêmes les verrous, 6+6 b
Et l'on voyait sortir de l'abîme insondable 6+6 a
Une sinistre main qui s'ouvrait formidable ; 6+6 a
215 « Justice ! » répétait l'ombre, et le châtiment 6+6 b
Au fond de l'infini se dressait lentement. 6+6 b
Soudain du plus profond des nuits, sur la nuée, 6+6 a
Une bête difforme, affreuse, exténuée, 6+6 a
Un être abject et sombre, un pourceau, s'éleva, 6+6 b
220 Ouvrant un œil sanglant qui cherchait Jéhovah ; 6+6 b
La nuée apporta le porc dans la lumière, 6+6 a
A l'endroit même où luit l'unique sanctuaire, 6+6 a
Le saint des saints, jamais décru, jamais accru ; 6+6 b
Et le porc murmura : — Grâce ! il m'a secouru. 6+6 b
225 Le pourceau misérable et Dieu se regardèrent. 6+6 a
Alors, selon des lois que hâtent ou modèrent 6+6 a
Les volontés de l'Être effrayant qui construit 6+6 b
Dans les ténèbres l'aube et dans le jour la nuit, 6+6 b
On vit, dans le brouillard où rien n'a plus de forme, 6+6 a
230 Vaguement apparaître une balance énorme ; 6+6 a
Cette balance vint d'elle-même, à travers 6+6 b
Tous les enfers béants, tous les cieux entr'ouverts, 6+6 b
Se placer sous la foule immense des victimes ; 6+6 a
Au-dessus du silence horrible des abîmes, 6+6 a
235 Sous l'œil du seul vivant, du seul vrai, du seul grand, 6+6 b
Terrible, elle oscillait, et portait, s'éclairant 6+6 b
D'un jour mystérieux plus profond que le nôtre, 6+6 a
Dans un plateau le monde et le pourceau dans l'autre. 6+6 a
Du côté du pourceau la balance pencha. 6+6 b
V
240 Mourad, le haut calife et l'altier padischah, 6+6 b
En sortant de la rue où les gens de la ville 6+6 a
L'avaient pu voir toucher à cette bête vile, 6+6 a
Fut le soir même pris d'une fièvre, et mourut. 6+6 b
Le tombeau des soudans, bâti de jaspe brut, 6+6 b
245 Couvert d'orfèvrerie, auguste, et dont l'entrée 6+6 a
Semble l'intérieur d'une bête éventrée 6+6 a
Qui serait tout en or et tout en diamants, 6+6 b
Ce monument, superbe entre les monuments, 6+6 b
Qui hérisse, au-dessus d'un mur de briques sèches, 6+6 a
250 Son faîte plein de tours comme un carquois de flèches, 6+6 a
Ce turbé que Bagdad montre encore aujourd'hui, 6+6 b
Reçut le sultan mort et se ferma sur lui. 6+6 b
Quand il fut là, gisant et couché sous la pierre, 6+6 a
Mourad ouvrit les yeux et vit une lumière ; 6+6 a
255 Sans qu'on pût distinguer l'astre ni le flambeau, 6+6 b
Un éblouissement remplissait son tombeau ; 6+6 b
Une aube s'y levait, prodigieuse et douce ; 6+6 a
Et sa prunelle éteinte eut l'étrange secousse 6+6 a
D'une porte de jour qui s'ouvre dans la nuit. 6+6 b
260 Il aperçut l'échelle immense qui conduit 6+6 b
Les actions de l'homme à l'œil qui voit les âmes ; 6+6 a
Et les clartés étaient des roses et des flammes ; 6+6 a
Et Mourad entendit une voix qui disait : 6+6 b
— Mourad, neveu d'Achmet et fils de Bajazet, 6+6 b
265 Tu semblais à jamais perdu ; ton âme infime 6+6 a
N'était plus qu'un ulcère et ton destin un crime ; 6+6 a
Tu sombrais parmi ceux que le mal submergea ; 6+6 b
Déjà Satan était visible en toi ; dé 6+6 b
Sans t'en douter, promis aux tourbillons funèbres 6+6 a
270 Des spectres sous la voûte infâme des ténèbres, 6+6 a
Tu portais sur ton dos les ailes de la nuit ; 6+6 b
De ton pas sépulcral l'enfer guettait le bruit ; 6+6 b
Autour de toi montait, par ton crime attirée, 6+6 a
L'obscurité du gouffre ainsi qu'une marée ; 6+6 a
275 Tu penchais sur l'abîme où l'homme est châtié ; 6+6 b
Mais tu viens d'avoir, monstre, un éclair de pitié ; 6+6 b
Une lueur suprême et désintéressée 6+6 a
A, comme à ton insu, traversé ta pensée, 6+6 a
Et je t'ai fait mourir dans ton bon mouvement ; 6+6 b
280 Il suffit, pour sauver même l'homme inclément, 6+6 b
Même le plus sanglant des bourreaux et des maîtres, 6+6 a
Du moindre des bienfaits sur le dernier des êtres ; 6+6 a
Un seul instant d'amour rouvre l'éden fermé ; 6+6 b
Un pourceau secouru pèse un monde opprimé ; 6+6 b
285 Viens ! le ciel s'offre, avec ses étoiles sans nombre, 6+6 a
En frémissant de joie, à l'évadé de l'ombre ! 6+6 a
Viens ! tu fus bon un jour, sois à jamais heureux. 6+6 b
Entre, transfiguré ; tes crimes ténébreux, 6+6 b
O roi, derrière toi s'effacent dans les gloires ; 6+6 a
290 Tourne la tête, et vois blanchir tes ailes noires. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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