Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_26/HUG1504
Victor HUGO
LES ANNÉES FUNESTES
1898
IX
Triomphe. Pas de brume | en ce splendide azur. 6+6 a
Marche dans tous les sens | sur ton crime ; il est sûr. 6+6 a
Danse dessus, bâtis | dessus ; il est solide. 6+6 b
Le droit divin te garde | en habit d'invalide ; 6+6 b
5 Le pape te bénit, | le sultan te bénit. 6+6 a
Ta constellation | resplendit au zénith ; 6+6 a
Qu'elle est belle ! Nemrod | géant, Rhamsès farouche, 6+6 b
Charlemagne, César, | Napoléon, Cartouche ! 6+6 b
L'aurore, a pour toi, prince, | un sourire charmant. 6+6 a
10 Le bleu du bonheur monstre, |emplit ton firmament. 6+6 a
Pas un plaisir, permis | ou non, que tu n'effleures 6+6 b
Dans l'entrelacement | voluptueux des heures ; 6+6 b
Ta journée est un long | festin renouvelé. 6+6 a
Par chaque instant qui passe, | heureux, chantant, ailé. 6+6 a
15 Que veux-tu ? le, pouvoir ? | Sonne La France vote. 6+6 b
Elle est voltairienne, | elle sera dévote, — 6+6 b
Pour te plaire. Veux-tu | des palais ? Prends. Choisis. 6+6 a
Sois chez toi. Sur quel trône | est-on le mieux assis ? 6+6 a
Prends celui de Versaille | ou prends celui du Louvre. 6+6 b
20 La planche de sapin | qu'un peu de velours couvre 6+6 b
A du bon, certe, et vaut | les meilleurs piédestaux 6+6 a
Quand Brumaire et Décembre | en sont les deux tréteaux. 6+6 a
Brumaire, c'est le droit, | Décembre, c'est la force. 6+6 b
Un profil hollandais | doublé d'un profil corse, 6+6 b
25 De face, cela fait | un visage français. 6+6 a
Veux-tu la gloire ? prends | son masque, le Succès. 6+6 a
Tu n'es plus tout à fait | un jeune homme. Qu'importe ! 6+6 b
Cupidon vient gratter | doucement à ta porte ; 6+6 b
Vénus par Bacciochi | t'envoie un tendre aveu. 6+6 a
30 Pas un moment du jour, | ô César, ô neveu, 6+6 a
Qui pour toi, comme un flot | qui sur des fleurs s'épanche, 6+6 b
Ne soit gloire, bonheur, | splendeur.
Le soir, revanche. 6+6 b
L'ombre n'est pas à toi. | Dormir, c'est être pris. 6+6 a
Une main, qui saisit | par l'aile les esprits, 6+6 a
35 S'ouvre, et lâche le songe | où luit la catastrophe ; 6+6 b
Le vrai surgit ; tu fais | d'affreux rêves. Ma strophe 6+6 b
La nuit devient ta femme, | et, spectre, dans tes draps 6+6 a
Se couche, et tu l'entends | dire : — Tu ne seras 6+6 a
Pas même lampion ; | toi qui prends des airs d'astre ! — 6+6 b
40 Ton destin t'apparaît. | Tu te vois, ô désastre ! 6+6 b
Ô deuil ! redevenu | l'aventurier gueusard, 6+6 a
Le prince bric-à-brac, | l'altesse de hasard, 6+6 a
Portant pour diadème | un feutre qui s'effondre, 6+6 b
N'ayant, ô dur retour | des maigres jours de Londre, 6+6 b
45 Plus de sceptre à la main | ni de bottes aux pieds ; 6+6 a
Et tout, empire, encens, | Te Deum expiés, 6+6 a
S'évanouit devant | tes prunelles hagardes, 6+6 b
Tout, depuis les cent sous, | hélas ! jusqu'aux cent gardes ! 6+6 b
Et tu ne comprends plus, | effaré sous le vent, 6+6 a
50 Ton propre sort ; tu dis : | Est-ce après ? est-ce avant ? 6+6 a
Tu voudrais t'éveiller. | Non. Le remords t'accable 6+6 b
Et te tient, et te cloue | au sommeil implacable, 6+6 b
Et de partout sur toi, | maudit, tombe l'affront, 6+6 a
Et tous tes forfaits vont | et viennent sur ton front, 6+6 a
55 Montmartre, les fourgons | cahotant les cadavres, 6+6 b
Les chaînes dans les forts, | les pontons dans les havres, 6+6 b
La mitraille, Charlet, | Cirasse, Cuisinier, 6+6 a
Les votes ; l'urne traître | auprès du noir panier, 6+6 a
Bidauré fusillé | deux fois, Mazas, Cayenne, 6+6 b
60 Les proscrits, Lambessa | que vient flairer l'hyène ; 6+6 b
Le ruisseau de la rue | au sang habitué, 6+6 a
Baudin tué, Dussoubs | tué, l'enfant tué ; 6+6 a
Tu ne vois plus qu'horreur, | billots, linceuls, tempêtes, 6+6 b
Têtes cherchant leurs corps | et corps cherchant leurs têtes, 6+6 b
65 Et ton oreille entend, | à travers l'aquilon, 6+6 a
Rouler dans l'avenir | le boulet de Toulon. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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