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| = césure
HUG_24/HUG1330
Victor HUGO
TOUTE LA LYRE
1888-1893
V
XLI
À MADAME D'A.-SH.
Vous demandez à quoi je rêve ? 8 a
Je me souviens qu'un jour, jadis, 8 b
À l'heure où l'aube qui se lève 8 a
Ouvre ses yeux de paradis, 8 b
5 Je passais, parmi des colombes, 8 a
Dans un cimetière, jardin 8 b
Qui, couvrant de roses les tombes, 8 a
Cache le néant sous l'éden. 8 b
J'errais dans cette ombre insalubre 8 a
10 Où les croix noires sont debout… 8 b
Une grande pierre lugubre 8 a
Se mit à vivre tout à coup. 8 b
C'était, dans l'herbe et les pervenches, 8 a
Un sépulcre sombre et hautain 8 b
15 Qu'effleura soudain sous les branches 8 a
Un furtif éclair du matin ; 8 b
Il était là sous une yeuse, 7 a
Triste, et comme pour l'apaiser, 8 b
La jeune aube mystérieuse 8 a
20 Donnait à ce spectre un baiser. 8 b
Et cela rendit, ô merveille, 8 a
La vie au sépulcre hagard. 8 b
Ce sourd-muet ouvrit l'oreille 8 a
Et cet aveugle eut un regard. 8 b
25 En voyant venir la lumière, 8 a
Comme au désert le noir Sina, 8 b
Ce sinistre linceul de pierre 8 a
Où pleure une âme, rayonna. 8 b
Et je le vis, dans le bois sombre, 8 a
30 Dans le champ pestilentiel, 8 b
Comme transfiguré dans l'ombre 8 a
Par cette dorure du ciel. 8 b
Ce n'était plus la dalle affreuse, 8 a
Qui se dresse hors de tout bruit, 8 b
35 Sous laquelle un gouffre se creuse, 8 a
Plein d'étoiles, mais plein de nuit ; 8 b
— Ce n'était plus la tombe où rêve 8 a
Un vague fantôme banni, 8 b
Abîme où le fini s'achève, 8 a
40 Borne où-commence l'infini. 8 b
Grâce à l'aube, au pied du vieil arbre, 8 a
Dans la ronce et dans le genêt, 8 b
Le froid granit, l'orgueilleux marbre 8 a
Que le ver de terre connaît, 8 b
45 Illuminait ces bois funèbres, 8 a
Craints de l'homme, aimés du corbeau, 8 b
Et, calme, avait dans les ténèbres 8 a
On ne sait quel air de flambeau. 8 b
Il cessa d'être le fantôme. 8 a
50 Le liseron fut ébloui, 8 b
Et l'œillet lui jeta son baume ; 8 a
Les fleurs n'eurent plus peur de lui. 8 b
Les roses que nos yeux admirent 8 a
Baisèrent son socle détruit, 8 b
55 Et les petits oiseaux se mirent 8 a
À chanter autour de sa nuit. 8 b
Noble femme aux vaincus fidèle, 8 a
Votre sourire frais et beau, 8 b
Quand il luit sur moi, me rappelle 8 a
60 Cette aurore sur ce tombeau. 8 b
H. H.
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