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| = césure
HUG_24/HUG1312
Victor HUGO
TOUTE LA LYRE
1888-1893
V
XXIII
D.G.D.G.
I
Elle s'est donc en allée, 7 a
Et se tait. 3 b
Ô noire voûte étoilée, 7 a
Rends-nous la grande âme ailée 7 a
5 Qui chantait ! 3 b
Elle était de ceux qu'attire 7 a
Ma maison. 3 b
L'autre année elle y vint luire, 7 a
Et m'éclaira d'un sourire 7 a
10 L'horizon. 3 b
Paix à vous, bon cœur utile, 7 a
Beaux yeux clos, 3 b
Esprit splendide et fertile ! 7 a
Elle aimait ma petite île, 7 a
15 Mes grands flots, 3 b
Ces champs de trèfle et de seigle, 7 a
Ce doux sol, 3 b
L'océan que l'astre règle, 7 a
Et mon noir rocher ou l'aigle 7 a
20 Prend son vol. 3 b
II
La vie à ces âmes fières 7 a
Ne plaît pas ; 3 b
Car les vivants sont des pierres 7 a
Sur leurs fronts et des-poussières 7 a
25 Sous leurs pas. 3 b
Dieu, c'est la nuit que tu sèmes 7 a
En créant 3 b
Les hommes, ces noirs problèmes ; 7 a
Nous sommes les masques blêmes 7 a
30 Du néant. 3 b
Nous sommes l'algue et la houle, 7 a
O semeur ! 3 b
Nous flottons, le vent nous roule ; 7 a
Toute notre œuvre s'écroule 7 a
35 En rumeur. 3 b
Le mal tient les foules viles 7 a
Dans ses nœuds ; 3 b
Multitudes puériles, 7 a
Nous faisons des bruits stériles 7 a
40 Ou haineux. 3 b
Nains errant sur des décombres, 7 a
Embryons, 3 b
Ébauches, fantômes, ombres, 7 a
Dans tes immensités sombres, 7 a
45 Nous crions. 3 b
Dieu ! les hommes, têtes basses, 7 a
Yeux charnels, 3 b
Raillent l'abîme où tu passes, 7 a
Tes profondeurs, tes espaces 7 a
50 Éternels ! 3 b
Ils crachent sur le grand voile 7 a
Du ciel bleu ; 3 b
Blâment tout, mer, barque et voile ; 7 a
Insultent l'ombre et l'étoile, 7 a
55 L'âme et Dieu ! 3 b
Ils insultent l'aube pure, 7 a
L'air vital, 3 b
Le beau, le vrai, la nature, 7 a
Et cette sombre ouverture : 7 a
60 L'idéal ! 3 b
Ils insultent l'invisible, 7 a
Le cyprès, 3 b
Le sort dont ils sont la cible, 7 a
L'onde, et le frisson terrible 7 a
65 Des forêts. 3 b
Ils insultent le pontife, 7 a
La lueur, 3 b
L'être, saint hiéroglyphe, 7 a
Et l'énigme sous ta griffe, 7 a
70 Sphinx rêveur ! 3 b
Leurs voix sont prostituées, 7 a
Jéhovah ! 3 b
Quand l'aigle entend leurs huées, 7 a
Il regarde les nuées 7 a
75 Et s'en va ! 3 b
III
Ô grande âme prisonnière, 7 a
Cœur martyr, 3 b
C'est l'aigle de ma tanière 7 a
Qui t'a montré la manière 7 a
80 De partir. 3 b
Pendant qu'assis sous les branches, 7 a
Nous pleurons, 3 b
Âme, tu souris, tu penches 7 a
Tes deux grandes ailes blanches 7 a
85 Sur nos fronts. 3 b
Et, du fond de nos abîmes, 7 a
Soucieux, 3 b
Nous te voyons sur les cimes, 7 a
Levant tes deux bras sublimes 7 a
90 Vers les cieux. 3 b
IV
Destin ! gouffre aux vents contraires, 7 a
Aux flots sourds ! 3 b
Oh ! que d'urnes funéraires ! 7 a
Ma fille, amis, parents, frères, 7 a
95 Joie, amours ! 3 b
On luit, on brille, un beau rêve 7 a
Vous dit : viens ! 3 b
Et voilà qu'un vent s'élève ; 7 a
Le temps d'un flux sur la grève ; 7 a
100 Et plus rien ! 3 b
La bise éteint, brise, emporte 7 a
Le flambeau, 3 b
Et souffle, toujours plus forte, 7 a
Par-dessous la noire porte 7 a
105 Du tombeau. 3 b
Notre bonheur est livide, 7 a
Et vit peu. 3 b
Hélas ! je me tourne avide 7 a
Vers le sépulcre, ce vide 7 a
110 Plein de Dieu. 3 b
Dieu, là, dans ce sombre monde 7 a
Met l'amour, 3 b
Et tous les ports dans cette onde, 7 a
Et dans cette ombre profonde 7 a
115 Tout le jour. 3 b
Ô vivants qui dans la brume, 7 a
Dans le deuil, 3 b
Passez comme un flot.qui fume, 7 a
Et n'êtes que de l'écume 7 a
120 Sur l'écueil, 3 b
Vivez dans les clartés fausses, 7 a
Expiez ! 3 b
Moi, Dieu bon qui nous exauces ! 7 a
Je sens remuer les fosses 7 a
125 Sous mes pieds. 3 b
Il est temps que je m'en aille 7 a
Loin du bruit, 3 b
Sous la ronce et la broussaille, 7 a
Retrouver ce qui tressaille 7 a
130 Dans la nuit. 3 b
Tous mes nœuds dans le mystère 7 a
Sont dissous. 3 b
L'ombre est ma patrie austère. 7 a
J'ai moins d'amis sur la terre 7 a
135 Que dessous. 3 b
16 juillet 1855.
mètre profils métriques : 7, 3
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