Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_24/HUG1215
Victor HUGO
TOUTE LA LYRE
1888-1893
III
XXXII
— Les écrivains sont tous plus ou moins des démons. 6+6 a
Ils veulent nous ôter le Dieu que nous aimons ! 6+6 a
Prenez garde à l'enfer ! Défiez-vous des livres ! — 6+6 b
Ainsi parlent, avec des gestes de gens ivres, 6+6 b
5 De pauvres hommes noirs, vaguement égarés, 6+6 a
Qui sont fakirs dans l'Inde et parmi nous curés. 6+6 a
Comme ils sont ignorants, ces chers énergumènes ! 6+6 b
Plaignons-les : Leur colère aux phrases inhumaines 6+6 b
S'agite dans de l'ombre, et fait le triste bruit 6+6 a
10 Du torrent dans la chute et du vent dans la nuit. 6+6 a
Un jour, terrifiant le pâtre et la vachère, 6+6 b
Un de ces bonzes-là pérorait dans sa chaire ; 6+6 b
Le bon bavard farouche aux longs bras, au sommet 6+6 a
De son bahut, orné d'un pigeon, écumait ; 6+6 a
15 Ce rustre sombre ; avec l'éloquence patoise 6+6 b
Qui ferait rire Athène et fait trembler Pontoise, 6+6 b
Secouait sur Satan, Voltaire et le bon sens 6+6 a
Toutes sortes de coups de foudre paysans. 6+6 a
C'était de quoi frémir. Nonotte, plus de Maistre. 6+6 b
20 C'était la foi sans fin, le dogme à grand orchestre, 6+6 b
Un Sauveur menaçant qui grinçait et suait, 6+6 a
Et Jocrisse venant secourir Bossuet. 6+6 a
Autour de ce hurleur formidable, les branches 6+6 b
Offraient leur ombre amie aux vagues ailes blanches, 6+6 b
25 Les halliers étaient pleins de la douceur des nids 6+6 a
D'où sortait le rayon des bonheurs infinis ; 6+6 a
Les plaines étalaient la vaste paix champêtre ; 6+6 b
Ce Dieu, que dans l'église obscurcissait le prêtre 6+6 b
À force de credos et de confiteors, 6+6 a
30 Le soleil le prouvait tranquillement dehors. 6+6 a
Mon père, doux passant qui m'a conté la chose, 6+6 b
Était là. Laissez-moi, car ce nom me repose, 6+6 b
Vous dire que mon père était un sage pur, 6+6 a
Un de ces penseurs vrais qui, dans le monde obscur, 6+6 a
35 Montrent un front serein même à l'épreuve austère, 6+6 b
Qui cherchent le côté rassurant du mystère, 6+6 b
Et se font expliquer, l'énigme du destin : 6+6 a
Par le splendide chant des oiseaux le matin. 6+6 a
Il était souriant toujours, jamais sceptique. 6+6 b
40 Aucune Bible, aucune illusion d'optique, 6+6 b
Ne troublaient son regard fixé.sur le réel. 6+6 a
Il était confiant dans la beauté du ciel. 6+6 a
Donc le digne curé faisait rage. Et les chênes, 6+6 b
Les ormes, qui sans peur tremblent, grondent sans haines, 6+6 b
45 Continuaient leur grand murmure dans les bois ; 6+6 a
Une confusion de rumeurs et d'abois 6+6 a
S'éteignait dans les champs et venait de la ville, 6+6 b
Auguste apaisement des clameurs dans l'idylle 6+6 b
Cette conviction que donne aux cœurs l'azur, 6+6 a
50 Sorte de point d'appui mystérieux et sûr, 6+6 a
Était partout sensible, et les molles prairies 6+6 b
Exhalaient ces parfums qu'on nomme rêveries ; 6+6 b
La clémence éternelle était, visible aux yeux ; 6+6 a
Le bon curé semblait d'autant plus furieux ; 6+6 a
55 La foudre au poing, voyant dans Vaugirard Sodome, 6+6 b
Sinistre, il accablait du poids du bon Dieu l'homme ; 6+6 b
Il damnait tout, sans choix, sans trêve, sans répit. 6+6 a
Tout à coup un Gros-Jean quelconque interrompit, 6+6 a
Raillant le prêtre ; ainsi parfois Pyrrhon poignarde 6+6 b
60 Patouillet à travers la blouse campagnarde : 6+6 b
— Si Dieu n'existait-pas ?… répondez à cela ! 6+6 a
— Il faudrait l'inventer, dit mon père.
— Voilà, 6+6 a
S'écria le curé, j'en prends à témoin Rome 6+6 b
Et-le Saint-Père, un cri de l'âme !
Et le bonhomme 6+6 b
65 Sut gré du cri de l'âme à mon père, lequel 6+6 a
L'avait pris dans le diable, édition de Kehl. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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