Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_24/HUG1214
Victor HUGO
TOUTE LA LYRE
1888-1893
III
XXXI
L'homme croit avoir fait | un pas dans l'inconnu 6+6 a
Quand il met sur l'autel | quelque faune cornu, 6+6 a
Quelque dragon rampant | sur des membres hybrides, 6+6 b
Ou quelque affreux Brahma | dont il dore les rides ; 6+6 b
5 Il croit s'être avancé | bien loin dans l'idéal 6+6 a
Lorsqu'il a complété | Zeus par Bélial, 6+6 a
Ou lorsqu'il a choisi | pour s'en faire une idole 6+6 b
Quelque apparition | du sommeil, sombre et folle, 6+6 b
Et qu'il s'est prosterné | devant ses cauchemars 6+6 a
10 En les nommant Mithra, | Neptune, Irmensul, Mars ! 6+6 a
Est-il du moins l'auteur | de ces larves ? Non. L'être, 6+6 b
En se décomposant | dans l'ombre, les fait naître ; 6+6 b
Et tous ces dieux, Moloch, | Jupiter, Astarté, 6+6 a
Thor, masques de démence | ou de difformité, 6+6 a
15 Chacun portant son thyrse, | ou sa foudre, ou sa bible, 6+6 b
Sont des types de nuit | flottant dans l'invisible. 6+6 b
Quoiqu'ils soient vils, méchants, | obscènes, odieux, 6+6 a
Homme, tu n'as pas même | enfanté tes faux dieux. 6+6 a
O passant misérable, | ô chercheur éphémère, 6+6 b
20 Tu ne peux rien créer, | pas même une chimère ! 6+6 b
L'Ombre qui t'enveloppe, | ô pauvre être banni, 6+6 a
La Profondeur, qui semble | un mur de l'infini, 6+6 a
L'effrayant fond brumeux | d'où les visions pleuvent, 6+6 b
Sur qui confusément | les atomes se meuvent, 6+6 b
25 Où l'on distingue à peine | et la vie et la mort, 6+6 a
Et les linéaments | mystérieux du sort, 6+6 a
L'immense obscurité, | pleine de vagues porches 6+6 b
Où de tous les autels, | tremblent toutes les torches, 6+6 b
Où des souffles, suivis | d'effacements soudains, 6+6 a
30 Dessinent des enfers, | des pindes, des édens, 6+6 a
Deucalion, Pluton, | Satan, Ève et sa pomme, 6+6 b
Triste, n'accepte pas | des dieux sortis de l'homme. 6+6 b
Crois-tu donc imposer | tes rêves à la nuit ? 6+6 a
Cette grande songeuse | envoie en ton réduit 6+6 a
35 Ses blêmes légions | d'ombres battant de l'aile ; 6+6 b
C'est elle qui les fait, | et tu les reçois d'elle. 6+6 b
Et quand un prêtre dit | tout bas dans son orgueil : 6+6 a
J'invente des démons | qui mettent l'homme en deuil ; 6+6 a
Je suis le créateur | suprême et solitaire 6+6 b
40 D'un tas de spectres, honte | ou frayeur de la terre ; 6+6 b
Et le monde, stupide | et morne, est sous le faix 6+6 a
De tous les dieux impurs | ou sanglants que je fais, 6+6 a
Fô, Dagon, Teutatès, | Vénus aux yeux funèbres ! — 6+6 b
La nuit, qui les créa | d'un pan de ses ténèbres, 6+6 b
45 Rit, et de leur noirceur | a peu d'étonnement. 6+6 a
Le formidable ciel | sait que le prêtre ment. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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