Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
HUG_23/HUG999
Victor HUGO
LES QUATRE VENTS DE L'ESPRIT
1881
I
LE LIVRE SATIRIQUE
— LE SIÈCLE —
XXVI
LES BONZES
Que je prenne un moment de repos ? Impossible. 6+6 a
Koran, Zend-Avesta, livres sibyllins, Bible, 6+6 a
Talmud, Toldos Jeschut, Védas, lois de Manou, 6+6 b
Brahmes sanglants, santons fléchissant le genou, 6+6 b
5 Les contes, les romans, les terreurs, les croyances, 6+6 a
Les superstitions fouillant les consciences, 6+6 a
Puis-je ne pas sentir ces creusements profonds ? 6+6 b
J’en ai ma part. Veaux d’or, sphinx, chimères, griffons, 6+6 b
Les princes des démons et les princes des prêtres, 6+6 a
10 Synodes, sanhédrins, vils muphtis, scribes traîtres, 6+6 a
Ceux qui des empereurs bénissaient les soldats, 6+6 b
Ceux que payait Tibère et qui payaient Judas, 6+6 b
Ceux qui tendraient encore à Socrate le verre, 6+6 a
Ceux qui redonneraient à Jésus le calvaire, 6+6 a
15 Tous ces sadducéens, tous ces pharisiens, 6+6 b
Ces anges, que Satan reconnaît pour les siens, 6+6 b
Tout cela, c’est partout. C’est la puissance obscure. 6+6 a
Plaie énorme que fait une abjecte piqûre ! 6+6 a
Ce contre-sens : Dieu vrai, les dogmes faux ; cuisson 6+6 b
20 Du mensonge qui s’est glissé dans la raison ! 6+6 b
Démangeaison saignante, incurable, éternelle, 6+6 a
Que sent l’homme en son âme et l’oiseau sous son aile ! 6+6 a
Oh ! L’infâme travail ! Ici Mahomet ; là 6+6 b
Cette tête, Wesley, sur ce corps, Loyola ; 6+6 b
25 Cisneros et Calvin, dont on sent les brûlures. 6+6 a
Ô faux révélateurs ! Ô jongleurs ! Vos allures 6+6 a
Sont louches, et vos pas sont tortueux ; l’effroi, 6+6 b
Et non l’amour, tel est le fond de votre loi ; 6+6 b
Vous faites grimacer l’éternelle figure ; 6+6 a
30 Vous naissez du sépulcre, et l’on sent que l’augure 6+6 a
Et le devin son pleins de l’ombre du tombeau, 6+6 b
Et que tous ces rêveurs, compagnons du corbeau, 6+6 b
Tous ces fakirs d’Ombos, de Stamboul et de Rome, 6+6 a
N’ont pu faire tomber tant de fables sur l’homme 6+6 a
35 Qu’en secouant les plis sinistres des linceuls. 6+6 b
Dieu n’étant aperçu que par les astres seuls, 6+6 b
Les penseurs, sachant bien qu’il est là sous ses voiles, 6+6 a
Ont toujours conseillé d’en croire les étoiles ; 6+6 a
Dieu, c’est un lieu fermé dont l’aurore a la clé, 6+6 b
40 Et la religion, c’est le ciel contemplé. 6+6 b
Mais vous ne voulez pas, prêtres, de cette église. 6+6 a
Vous voulez que la terre en votre livre lise 6+6 a
Tous vos songes, moloch, Vénus, Ève, Astarté, 6+6 b
Au lieu de lire au front des cieux la vérité. 6+6 b
45 De là la foi changée en crédulité ; l’âme 6+6 a
Éclipsant la raison dans une sombre flamme ; 6+6 a
De là tant d’êtres noirs serpentant dans la nuit. 6+6 b
L’imposture, par qui le vrai temple est détruit, 6+6 b
Est un colosse fait d’un amas de pygmées ; 6+6 a
50 Les sauterelles sont d’effrayantes armées ; 6+6 a
Ô mages grecs, romains, payens, indous, hébreux, 6+6 b
Le genre humain, couvert de rongeurs ténébreux, 6+6 b
Sent s’élargir sur lui vos hordes invisibles ; 6+6 a
Vous lui faites rêver tous les enfers possibles ; 6+6 a
55 Le peuple infortuné voit dans son cauchemar 6+6 b
Surgir Torquemada quand disparaît Omar. 6+6 b
Nul répit. Vous aimez les ténèbres utiles, 6+6 a
Et vous y rôdez, vils et vainqueurs, ô reptiles ! 6+6 a
Sur toute cette terre, en tous lieux, dans les bois, 6+6 b
60 Dans le lit nuptial, dans l’alcôve des rois, 6+6 b
Dans les champs, sous l’autel sacré, dans la cellule, 6+6 a
Ce qui se traîne, couve, éclôt, va, vient, pullule, 6+6 a
C’est vous. Vous voulez tout, vous savez tout ; damner, 6+6 b
Bénir, prendre, jurer, tromper, servir, régner, 6+6 b
65 Briller même ; ramper n’empêche pas de luire. 6+6 a
Chuchotement hideux ! Je vous entends bruire. 6+6 a
Vous mangez votre proie énorme avec bonheur, 6+6 b
Et vous vous appelez entre vous monseigneur. 6+6 b
L’acarus au ciron doit donner de l’altesse. 6+6 a
70 Quelles que soient votre ombre et votre petitesse, 6+6 a
Je devine, malgré vos soins pour vous cacher, 6+6 b
Que vous êtes sur nous, et je vous sens marcher 6+6 b
Comme on sent remuer les mineurs dans la mine, 6+6 a
Et je ne puis dormir, tant je hais la vermine ! 6+6 a
75 Vous êtes ce qui hait, ce qui mord, ce qui ment. 6+6 b
Vous êtes l’implacable et noir fourmillement. 6+6 b
Vous êtes ce prodige affreux, l’insaisissable. 6+6 a
Qu’on suppose vivants tous les vils grains de sable, 6+6 a
Ce sera vous. Rien, tout. Zéro, des millions. 6+6 b
80 L’horreur. Moins que des vers et plus que des lions. 6+6 b
L’insecte formidable. Ô monstrueux contraste ! 6+6 a
Pas de nains plus chétifs, pas de pouvoir plus vaste. 6+6 a
L’univers est à vous, puisque vous l’emplissez. 6+6 b
Vous possédez les jours futurs, les jours passés, 6+6 b
85 Le temps, l’éternité, le sommeil, l’insomnie. 6+6 a
Vous êtes l’innombrable, et, dans l’ombre infinie, 6+6 a
Fétides, sur nos peaux mêlant vos petits pas, 6+6 b
Vous vous multipliez ; et je ne comprends pas 6+6 b
Dans quel but Dieu livra les empires, le monde, 6+6 a
90 Les âmes, les enfants dressant leur tête blonde, 6+6 a
Les temples, les foyers, les vierges, les époux, 6+6 b
L’homme, à l’épouvantable immensité des poux. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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