Métrique en Ligne
HUG_23/HUG1011
Victor HUGO
LES QUATRE VENTS DE L'ESPRIT
1881
I
LE LIVRE SATIRIQUE
— LE SIÈCLE —
XXXVIII
Oui, vous avez raison, je suis un imbécile. 6+6 a
Le ciel qui cache au fond des antres de Sicile 6+6 a
La flûte de Moschus, chère aux échos profonds, 6+6 b
Livre Arioste au vol fantasque des griffons, 6+6 b
5 Et fait dialoguer le prophète avec l’aigle, 6+6 a
Ce grand ciel d’où sur nous descend l’ombre et la règle, 6+6 a
M’avait créé pensif, de sorte que j’avais 6+6 b
L’œil fixé sur la route incertaine où je vais, 6+6 b
Et que je n’étais guère autre chose qu’un homme 6+6 a
10 Attendri, de colère et de haine économe, 6+6 a
Vieux par les souvenirs, jeune par les penchants, 6+6 b
Fait pour la vénérable allégresse des champs. 6+6 b
Mais en même temps j’ai, comme Eschyle, deux âmes, 6+6 a
L’une où croissent les fleurs, l’autre où couvent les flammes ; 6+6 a
15 Théocrite en mon cœur rencontre d’Aubigné ; 6+6 b
Ce qui fait que parfois j’ai, d’un œil indigné, 6+6 b
Regardé, dans ce siècle ainsi que dans l’histoire, 6+6 a
Cette méchanceté qu’on nomme la victoire. 6+6 a
Ma pente est de bénir dans l’enfer les maudits. 6+6 b
20 Et vous me raillez. Soit. Eh bien, je vous le dis, 6+6 b
Je ne me repens point. Je trouve bon, limpide, 6+6 a
Consolant, honorable et doux, d’être stupide. 6+6 a
Être inepte me plaît, me charme et me sourit, 6+6 b
Puisque je vois comment sont faits les gens d’esprit. 6+6 b
25 Je suis de mon plein gré rentré dans la tempête. 6+6 a
Oui, rarement on eut l’audace d’être bête 6+6 a
À ce point, et mon deuil comprend votre gaîté ; 6+6 b
J’étais en terre ferme, au port, en sûreté ; 6+6 b
J’ai vu des naufragés qui s’enfonçaient dans l’ombre, 6+6 a
30 Sans aide, et j’ai sauté sur le vaisseau qui sombre, 6+6 a
Aimant mieux leur malheur que votre joie à tous, 6+6 b
Et périr avec eux que régner avec vous. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de distiques
schéma : 16((aa))
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