Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
HUG_17/HUG395
Victor HUGO
CHÂTIMENTS
1853
LUX
I
 Temps futurs ! vision sublime ! 8 a
 Les peuples sont hors de l'abîme. 8 a
 Le désert morne est traversé. 8 b
 Après les sables, la pelouse ; 8 c
5  Et la terre est comme une épouse, 8 c
 Et l'homme est comme un fiancé ! 8 b
 Dès à présent l'œil qui s'élève 8 a
 Voit distinctement ce beau rêve 8 a
 Qui sera le réel un jour ; 8 b
10  Car Dieu dénouera toute chne, 8 c
 Car le passé se nomme haine 8 c
 Et l'avenir s'appelle amour ! 8 b
 Dès à présent dans nos misères 8 a
 Germe l'hymen des peuples frères ; 8 a
15  Volant sur nos sombres rameaux, 8 b
 Comme un frelon que l'aube éveille, 8 c
 Le progrès, ténébreuse abeille, 8 c
 Fait du bonheur avec nos maux. 8 b
 Oh ! voyez ! la nuit se dissipe ; 8 a
20  Sur le monde qui s'émancipe, 8 a
 Oubliant Césars et Capets, 8 b
 Et sur les nations nubiles, 8 c
 S'ouvrent dans l'azur, immobiles, 8 c
 Les vastes ailes de la paix ! 8 b
25  Ô libre France enfin surgie ! 8 a
 Ô robe blanche après l'orgie ! 8 a
 Ô triomphe après les douleurs ! 8 b
 Le travail bruit dans les forges, 8 c
 Le ciel rit, et les rouges-gorges 8 c
30  Chantent dans l'aubépine en fleurs ! 8 b
 La rouille mord les hallebardes. 8 a
 De vos canons, de vos bombardes, 8 a
 Il ne reste pas un morceau 8 b
 Qui soit assez grand, capitaines, 8 c
35  Pour qu'on puisse prendre aux fontaines 8 c
 De quoi faire boire un oiseau. 8 b
 Les rancunes sont effacées ; 8 a
 Tous les cœurs, toutes les pensées, 8 a
 Qu'anime le même dessein, 8 b
40  Ne font plus qu'un faisceau superbe ; 8 c
 Dieu prend pour lier cette gerbe 8 c
 La vieille corde du tocsin. 8 b
 Au fond des cieux un point scintille ; 8 a
 Regardez, il grandit, il brille, 8 a
45  Il approche, énorme et vermeil. 8 b
 Ô République universelle ! 8 c
 Tu n'es encor que l'étincelle, 8 c
 Demain tu seras le soleil ! 8 b
II
Fêtes dans les cités,fêtes dans les campagnes ! 6+6 a
50 Les cieux n'ont plus d'enfers,les lois n'ont plus de bagnes. 6+6 a
donc est l'échafaud ?ce monstre a disparu. 6+6 b
Tout rent. Le bonheurde chacun est accru 6+6 b
De la félicitédes nations entières. 6+6 a
Plus de soldats l'épéeau poing, plus de frontières, 6+6 a
55 Plus de fisc, plus de glaiveayant forme de croix. 6+6 b
L'Europe en rougissantdit : — quoi ! j'avais des rois ! 6+6 b
Et l'Amérique dit :— quoi ! j'avais des esclaves ! 6+6 a
Science, art, poésie,ont dissous les entraves 6+6 a
De tout le genre humain. sont les maux soufferts ?… 6+6 b
60 Les libres pieds de l'hommeont oublié les fers 6+6 b
Tout l'univers n'est plusqu'une famille unie. 6+6 a
Le saint labeur de tousse fond en harmonie ; 6+6 a
Et la Société,qui d'hymnes retentit, 6+6 b
Accueille avec transportl'effort du plus petit ; 6+6 b
65 L'ouvrage du plus humbleau fond de sa chaumière 6+6 a
Émeut l'immense peupleheureux dans la lumière ; 6+6 a
Toute l'humanité,dans sa splendide ampleur, 6+6 b
Sent le don que lui faitle moindre travailleur ; 6+6 b
Ainsi les verts sapins,vainqueurs des avalanches, 6+6 a
70 Les grands chênes remplisde feuilles et de branches, 6+6 a
Les vieux cèdres touffus,plus durs que le granit, 6+6 b
Quand la fauvette en maivient y faire son nid, 6+6 b
Tressaillent dans leur forceet leur hauteur superbe, 6+6 a
Tout joyeux qu'un oiseauleur apporte un brin d'herbe. 6+6 a
75 Radieux avenir.Essor universel ! 6+6 a
Épanouissementde l'homme sous le ciel ! 6+6 a
III
 Ô proscrits ! hommes de l'épreuve, 8 a
 Mes compagnons vaillants et doux, 8 b
 Bien des fois, assis près du fleuve, 8 a
80  J'ai chanté ce chant parmi vous ; 8 b
 Bien des fois, quand vous m'entendîtes, 8 a
 Plusieurs m'ont dit : « Perds ton espoir. 8 b
 Nous serions des races maudites, 8 a
 Le ciel ne serait pas plus noir ! 8 b
85  Que veut dire cette inclémence ? 8 a
 Quoi ! le juste a le châtiment ! 8 b
 La vertu s'étonne et commence 8 a
 À regarder Dieu fixement. 8 b
 Dieu se dérobe et nous échappe. 8 a
90  Quoi donc ! l'iniquité prévaut ! 8 b
 Le crime, voyant Dieu frappe, 8 a
 Rit d'un rire impie et dévot. 8 b
 Nous ne comprenons pas ses voies. 8 a
 Comment ce Dieu des nations 8 b
95  Fera-t-il sortir tant de joies 8 a
 De tant de désolations ? 8 b
 Ses desseins nous semblent contraires 8 a
 À l'espoir qui luit dans tes yeux… » 8 b
 — Mais qui donc, ô proscrits, mes frères, 8 a
100  Comprend le grand mystérieux ? 8 b
 Qui donc a traversé l'espace, 8 a
 La terre, l'eau, l'air et le feu, 8 b
 Et l'étendue l'esprit passe ? 8 a
 Qui donc peut dire : « J'ai vu Dieu ! 8 b
105  J' ai vu Jéhovah ! je le nomme ! 8 a
 Tout à l'heure il me réchauffait, 8 b
 Je sais comment il a fait l'homme, 8 a
 Comment il fait tout ce qu'il fait ! 8 b
 J'ai vu cette main inconnue 8 a
110  Qui lâche en s'ouvrant l'âpre hiver, 8 b
 Et les tonnerres dans la nue, 8 a
 Et les tempêtes sur la mer, 8 b
 Tendre et ployer la nuit livide ; 8 a
 Mettre une âme dans l'embryon ; 8 b
115  Appuyer dans l'ombre du vide 8 a
 Le pôle du septentrion ; 8 b
 Amener l'heure tout arrive ; 8 a
 Faire au banquet du roi fêté 8 b
 Entrer la mort, ce noir convive, 8 a
120  Qui vient sans qu'on l'ait invité ; 8 b
 Créer l'araignée et sa toile, 8 a
 Peindre la fleur, mûrir le fruit, 8 b
 Et sans perdre une seule étoile 8 a
 Mener tous les astres la nuit ; 8 b
125  Arrêter la vague à la rive ; 8 a
 Parfumer de roses l'été ; 8 b
 Verser le temps comme une eau vive 8 a
 Des urnes de l'éternité ; 8 b
 D'un souffle, avec ses feux sans nombre, 8 a
130  Faire, dans toute sa hauteur, 8 b
 Frissonner le firmament sombre 8 a
 Comme la tente d'un pasteur ; 8 b
 Attacher les globes aux sphères 8 a
 Par mille invisibles liens ; … 8 b
135  Toutes ces choses sont très-claires, 8 a
 Je sais comment il fait ! j'en viens ! » 8 b
 Qui peut dire cela ? personne. 8 a
 Nuit sur nos cœurs ! nuit sur nos yeux ! 8 b
 L'homme est un vain clairon qui sonne. 8 a
140  Dieu seul parle aux axes des cieux. 8 b
IV
Ne doutons pas ! croyons !la fin, c'est le mystère. 6+6 a
Attendons. Des Néronscomme de la panthère, 6+6 a
 Dieu sait briser la dent. 6 b
Dieu nous essaie, amis.Ayons foi, soyons calmes, 6+6 c
145 Et marchons. Ô désert !s'il fait crtre des palmes, 6+6 c
 C'est dans ton sable ardent ! 6 b
Parce qu'il ne fait passon œuvre tout de suite, 6+6 a
Qu'il livre Rome au prêtreet Jésus au jésuite, 6+6 a
 Et les bons au méchant, 6 b
150 Nous désespérerions !de lui ! du juste immense ! 6+6 c
Non ! non ! lui seul conntle nom de la semence 6+6 c
 Qui germe dans son champ. 6 b
Ne possède-t-il pastoute la certitude ? 6+6 a
Dieu ne remplit-il pasce monde, notre étude, 6+6 a
155  Du Nadir au Zénith ? 6 b
Notre sagesse auprèsde la sienne est démence ; 6+6 c
Et n'est-ce pas à luique la clarté commence, 6+6 c
 Et que l'ombre finit ? 6 b
Ne voit-il pas ramperles hydres sur leurs ventres ? 6+6 a
160 Ne regarde-t-il pasjusqu'au fond de leurs antres 6+6 a
 Atlas et Pélion ? 6 b
Ne connt-il pas l'heure la cigogne émigre ? 6+6 c
Sait-il pas ton entréeet ta sortie, ô tigre, 6+6 c
 Et ton antre, ô lion ? 6 b
165 Hirondelle, réponds,aigle à l'aile sonore, 6+6 a
Parle, avez-vous des nidsque l'Étemel ignore ? 6+6 a
 Ô cerf, quand l'as-tu fui ? 6 b
Renard, ne vois-tu passes yeux dans la broussaille ? 6+6 c
Loup, quand tu sens la nuitune herbe qui tressaille, 6+6 c
170  Ne dis-tu pas : c'est lui ! 6 b
Puisqu'il sait tout cela,puisqu'il peut toute chose, 6+6 a
Que ses doigts font jaillirles effets de la cause 6+6 a
 Comme un noyau d'un fruit, 6 b
Puisqu'il peut mettre un verdans les pommes de l'arbre, 6+6 c
175 Et faire disperserles colonnes de marbre 6+6 c
 Par le vent de la nuit ; 6 b
Puisqu'il bat l'océanpareil au bœuf qui beugle, 6+6 a
Puisqu'il est le voyantet que l'homme est l'aveugle, 6+6 a
 Puisqu'il est le milieu, 6 b
180 Puisque son bras nous porte,et puisque à son passage 6+6 c
La comète frissonneainsi qu'en une cage 6+6 c
 Tremble une étoupe en feu ; 6 b
Puisque l'obscure nuitle connt, puisque l'ombre 6+6 a
Le voit, quand il lui plt,sauver la nef qui sombre, 6+6 a
185  Comment douterions-nous, 6 b
Nous qui, fermes et purs,fiers dans nos agonies, 6+6 c
Sommes debout devanttoutes les tyrannies, 6+6 c
 Pour lui seul, à genoux ! 6 b
D'ailleurs pensons. Nos jourssont des jours d'amertume, 6+6 a
190 Mais quand nous étendonsles bras dans cette brume, 6+6 a
 Nous sentons une main ; 6 b
Quand nous marchons, courbés,dans l'ombre du martyre, 6+6 c
Nous entendons quelqu'underrière nous nous dire : 6+6 c
 C'est ici le chemin. 6 b
195 Ô proscrits, l'avenirest aux peuples ! Paix, gloire, 6+6 a
Liberté, reviendrontsur des chars de victoire 6+6 a
 Aux foudroyants essieux ; 6 b
Ce crime qui triompheest fumée et mensonge ; 6+6 c
Voilà ce que je puisaffirmer, moi qui songe 6+6 c
200  L'œil fixé sur les cieux ! 6 b
Les césars sont plus fiersque les vagues marines. 6+6 a
Mais Dieu dit : — Je mettraima boucle en leurs narines, 6+6 a
 Et dans leur bouche un mors, 6 b
Et je les trnerai,qu'on cède ou bien qu'on lutte, 6+6 c
205 Eux et leurs histrionset leurs joueurs de flûte, 6+6 c
 Dans l'ombre sont les morts ! 6 b
Dieu dit ; et le granitque foulait leur semelle 6+6 a
S'écroule, et les voilàdisparus pêle-mêle 6+6 a
 Dans leurs prospérités ! 6 b
210 Aquilon ! aquilon !qui viens battre nos portes, 6+6 c
Oh ! dis-nous, si c'est toi,souffle, qui les emportes, 6+6 c
  les as-tu jetés ? 6 b
IV
Bannis ! bannis ! bannis !c'est là la destinée. 6+6 a
Ce qu'apporta le fluxsera dans la journée 6+6 a
215  Repris par le reflux. 6 b
Les jours mauvais fuirontsans qu'on sache leur nombre, 6+6 c
Et les peuples joyeuxet se penchant sur l'ombre, 6+6 c
 Diront : cela n'est plus ! 6 b
Les temps heureux luiront,non pour la seule France, 6+6 a
220 Mais pour tous. On verra,dans cette délivrance, 6+6 a
 Funeste au seul passé, 6 b
Toute l'humanitéchanter, de fleurs couverte, 6+6 c
Comme un mtre qui rentreen sa maison déserte, 6+6 c
 Dont on l'avait chassé. 6 b
225 Les tyrans s'éteindrontcomme des météores. 6+6 a
Et, comme s'il naissaitde la nuit deux aurores 6+6 a
 Dans le même ciel bleu, 6 b
Nous vous verrons sortirde ce gouffre nous sommes, 6+6 c
Mêlant vos deux rayons,fraternité des hommes, 6+6 c
230  Paternité de Dieu ! 6 b
Oui, je vous le déclare,oui, je vous le répète, 6+6 a
Car le clairon reditce que dit la trompette, 6+6 a
 Tout sera paix et jour ! 6 b
Liberté ! plus de serfet plus de prolétaire ! 6+6 c
235 O sourire d'en haut !ô du ciel pour la terre 6+6 c
 Majestueux amour ! 6 b
L'arbre saint du Progrès,autrefois chimérique, 6+6 a
Crtra, couvrant l'Europeet couvrant l'Amérique, 6+6 a
 Sur le passé détruit, 6 b
240 Et, laissant l'Éther purluire à travers ses branches, 6+6 c
Le jour, appartraplein de colombes blanches, 6+6 c
 Plein d'étoiles, la nuit. 6 b
Et nous qui serons morts,morts dans l'exil peut-être, 6+6 a
Martyrs saignants, pendantque les hommes, sans mtre, 6+6 a
245  Vivront, plus fiers, plus beaux, 6 b
Sous ce grand arbre, amourdes cieux qu'il avoisine, 6+6 c
Nous nous réveilleronspour baiser sa racine 6+6 c
 Au fond de nos tombeaux ! 6 b
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