Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_15/HUG9
Victor HUGO
PREMIÈRES PUBLICATIONS
(à l'exception des pièces recueillies dans les Odes et Ballades)
1819-1820
CÉSAR PASSE LE RUBICON
Jarn gelidas cursu Cesar superaverat Alpes, etc.
(LUCAIN, Phars., lib. 1.)
Déjà, des monts Alpins, qu'il avait su franchir, 6+6 a
César voyait au loin les vieux sommets blanchir ; 6+6 a
Des bords du Rubicon menaçant l'Italie, 6+6 b
De la guerre à venir son âme était remplie. 6+6 b
5 Une nuit, à ses yeux apparaît, toute en pleurs, 6+6 a
La tremblante Patrie, exhalant ses douleurs ; 6+6 a
Ses cheveux sont épars ; triste, le regard sombre, 6+6 b
D'une pâle lueur elle brille dans l'ombre, 6+6 b
Et les bras nus, levant son front chargé de tours : 6+6 a
10 « Arrêtez ! contre qui tournez-vous mes secours ? 6+6 a
Où courez-vous ? restez sur ces bords déplorables. 6+6 b
Jusqu'ici citoyens ! un pas vous rend coupables » 6+6 b
Elle s'enfuit : César a frissonné d'horreur ; 6+6 a
Sur la rive longtemps l'enchaîne sa terreur. 6+6 a
15 « Ô toi, dit-il enfin, qui vois Rome et la terre 6+6 b
De ce roc Tarpéien où gronde ton tonnerre ; 6+6 b
Vous, dieux puissants d'Iüle ; et toi, grand Quirinus ; 6+6 a
Jupiter, dont l'œil veille aux murs de Latinus ; 6+6 a
Feux sacrés de Vesta ; toi, devant qui tout tremble, 6+6 b
20 Toi, qui peux plus sur moi que tous les dieux ensemble, 6+6 b
Rome, écoute ma voix : César victorieux 6+6 a
Ne veut point t'accabler sous ton bras furieux. 6+6 a
O Rome ! heureux vainqueur de la terre et de l'onde, 6+6 b
Ton esclave ne veut que t'asservir le monde. 6+6 b
25 Parle, et César encor peut être ton soutien ; 6+6 a
C'est ton ennemi seul qui me rendra le tien. » 6+6 a
Il dit, et sans tarder, fendant les flots rapides, 6+6 b
Il plante à l'autre bord ses aigles intrépides. 6+6 b
Ainsi, quand un lion, dans ses déserts brûlants, 6+6 a
30 Voit de loin l'ennemi s'avancer à pas lents ; 6+6 a
Par de longs coups de queue excitant son courage, 6+6 b
Il s'arrête incertain, et rassemble sa rage. 6+6 b
Sa vaste gueule exhale un sourd rugissement, 6+6 a
Sa crinière à grands flots couvre son corps fumant, 6+6 a
35 Il la dresse, il bondit, et si le dard d'un Maure, 6+6 b
Dans son flanc enfoncé, de son sang se colore, 6+6 b
Blessé, mais fier encor, vainqueur en succombant, 6+6 a
Il fond sur le chasseur et l'écrase en tombant. 6+6 a
Le Rubicon pourpré, sortant d'une humble source, 6+6 b
40 Roule en de beaux vallons qu'il arrose en sa course ; 6+6 b
Ses eaux, marquant les bords asservis à nos lois, 6+6 a
Quand l'été les tarit, bornent les champs Gaulois. 6+6 a
Alors, des noirs torrents de leurs neiges fangeuses 6+6 b
Les Alpes grossissaient ses vagues orageuses ; 6+6 b
45 Chaque escadron, brisant leur cours impétueux, 6+6 a
Oppose un front oblique aux flots tumultueux, 6+6 a
Et l'armée, avançant dans l'onde ralentie, 6+6 b
Guide au sein du courant sa marche appesantie. 6+6 b
César, touchant ces bords qu'il n'eût point dû revoir : 6+6 a
50 « Loin, dit-il, vains traités ! vaines lois du devoir ! 6+6 a
Fortune, je te suis ; la victoire est mon titre. 6+6 b
J'ai trop cru les destins, que Mars soit mon arbitre. » 6+6 b
Soudain, tel qu'un caillou, par la fronde chassé, 6+6 a
Tel qu'un trait que le Parthe en fuyant a lancé, 6+6 a
55 Il vole : encourageant ses bataillons qu'il guide, 6+6 b
Il hâte dans la nuit son armée intrépide, 6+6 b
Et, vers l'heure où Phé voit pâlir son croissant, 6+6 a
Il entre à Riminum en vainqueur menaçant. 6+6 a
V. D'AUVERNEV
mètre profil métrique : 6+6
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