Métrique en Ligne
HUG_13/HUG1087
Victor HUGO
La Fin de Satan
1886
LIVRE DEUXIÈME
LE GIBET
LE GIBET II
LE CANTIQUE DE BÉTHPHAGE
CHŒUR DE FEMMES
L'ombre des bois d'Aser est toute parfumée. 6+6 a
Quel est celui qui vient par le frais chemin vert ? 6+6 b
Est-ce le bien-aimé qu'attend la bien-aimée ? 6+6 a
Il est jeune, il est doux. Il monte du désert 6+6 b
5 Comme de l'encensoir s'élève une fumée. 6+6 a
Est-ce le bien-aimé qu'attend la bien-aimée ? 6+6 a
UNE JEUNE FILLE
J'aime. O vents, chassez l'hiver. 7 a
Les plaines sont embaumées. 7 b
L'oiseau semble, aux bois d'Aser ; 7 a
10 Une âme dans les ramées. 7 b
L'amante court vers l'amant 7 a
Il me chante et je le chante ; 7 b
Oh ! comme on dort mollement 7 a
Sous une branche penchante ! 7 b
15 Je m'éveille en le chantant ; 7 a
En me chantant il s'éveille ; 7 b
Et l'aube croit qu'elle entend 7 a
Deux bourdonnements d'abeille. 7 b
L'un vers l'autre nous allons ; 7 a
20 Il dit : « O belle des belles, 7 b
« La rose est sous tes talons, 7 a
« L'astre frémit dans tes ailes ! » 7 b
Je dis : « La terre a cent rois ; 7 a
« Les jeunes gens sont sans nombre ; 7 b
25 « Mais c'est lui que j'aime, ô bois ! 7 a
« Il est flamme et je suis ombre. » 7 b
Il reprend : « Viens avec moi 7 a
« Nous perdre au fond des vallées 7 b
« Dans l'éblouissant effroi 7 a
30 « Des vastes nuits étoilées. » 7 b
Et j'ajoute : « Je mourrais 7 a
« Pour un baiser de sa bouche ; 7 b
« Vous le savez, ô forêts, 7 a
« O grand murmure farouche ! » 7 b
35 L'eau coule, le ciel est clair. 7 a
Nos chansons, au vent semées, 7 b
Se croisent comme dans l'air 7 a
Les flèches de deux armées. 7 b
CHŒUR DE FEMMES
L'oiseau semble, aux bois d'Aser, 7 a
40 Une âme dans les ramées. 7 b
UN JEUNE HOMME
Elle dormait, sa tête appuyée à son bras ; 6+6 a
Ne la réveillez pas avant qu'elle le veuille ; 6+6 b
Par les fleurs, par le daim qui tremble sous la feuille, 6+6 b
Par les astres du ciel, ne la réveillez pas ! 6+6 a
45 On ne la croit point femme ; on lui dit : « Quoi ! tu manges, 6+6 a
Tu bois ! c'est à coup sûr quelque sainte liqueur ! » 6+6 b
Tous les parfums ont l'air de sortir de son cœur ; 6+6 b
Elle tient ses pieds joints comme les pieds des anges. 6+6 a
On dirait qu'elle a fait un vase de son corps 6+6 a
50 Pour ces baumes d'en haut qu'aucun miasme n'altère ; 6+6 b
Elle s'occupe aussi des choses de la terre, 6+6 b
Car la feuille du lys est courbée en dehors. 6+6 a
Le bois des rossignols comme le bois des merles 6+6 a
L'admirent, et ses pas sont pour eux des faveurs ; 6+6 b
55 Sa beauté, qui rayonne et luit, rendrait rêveurs 6+6 b
Les rois de l'Inde ayant des coffres pleins de perles. 6+6 a
Quand elle passe, avec des danses et des chants, 6+6 a
Le vieillard qui grondait, sourit ; les plus maussades 6+6 b
L'admettent dans leur pré fermé de palissades ; 6+6 b
60 La forme de son ombre est agréable aux champs. 6+6 a
Je pleure par moments, tant elle est douce et frêle ! 6+6 a
L'autre jour, un oiseau, pas plus grand que le doigt, 6+6 b
S'est posé, frissonnant, sur le bord de mon toit ; 6+6 b
J'ai dit : « Oiseau, soyez béni ! priez pour elle. 6+6 a
65 Si je l'épouse, oh non ! je ne veux plus partir. 6+6 a
Je ne m'en irai pas d'auprès de toi que j'aime, 6+6 b
Je ne m'en irai pas d'auprès de toi, quand même 6+6 b
Salomon m'enverrait vers Hiram roi de Tyr ! 6+6 a
Son cœur, tout en dormant, m'adorait ; douce gloire ! 6+6 a
70 Un ange qui venait des cieux, passant par là, 6+6 b
Vit son amour, en prit sa part, et s'envola ; 6+6 b
Car où la vierge boit la colombe peut boire. 6+6 a
Elle dormait ainsi qu'Annah rêvant d'Esdras ; 6+6 a
O ma beauté, je fus le jour où vous m'aimâtes, 6+6 b
75 Ivre comme la biche au mont des aromates ; 6+6 b
Son sein pur soulevait la blancheur de ses draps. 6+6 a
CHŒUR DE FEMMES
Ne la réveillez pas avant qu'elle le veuille ; 6+6 c
Par les fleurs, par le daim qui tremble sous la feuille, 6+6 c
Par les astres du ciel, ne la réveillez pas ! 6+6 a
LA JEUNE FILLE
80 Par l'ouverture de ma porte 8 a
Mon bien-aimé passa sa main, 8 b
El je me réveillai, de sorte 8 a
Que nous nous marions demain. 8 b
Mon bien-aimé passa sa main 8 b
85 Par l'ouverture de ma porte. 8 a
De la montagne de l'encens 8 a
A la colline de la myrrhe, 8 b
C'est lui que souhaitent mes sens, 8 a
Et c'est lui que mon âme admire 8 b
90 De la colline de la myrrhe, 8 a
À la montagne de l'encens. 8 b
Je ne sais comment le lui dire, 8 a
J'ai dépouillé mes vêtements ; 8 b
Dites-le lui, cieux ! Il soupire, 8 a
95 Et moi je brûle, ô firmaments ! 8 b
J'ai dépouillé mes vêtements ; 8 b
Je ne sais comment le lui dire. 8 a
CHŒUR DE FEMMES
Cieux ! c'est lui que son âme admire, 8 a
C'est lui que souhaitent ses sens 8 b
100 De la colline de la myrrhe 8 a
À la montagne de l'encens. 8 b
LE JEUNE HOMME
Elle m'enflamme et je l'embrase, 8 a
Et je vais l'appelant, le cœur gonflé d'extase. 6+6 a
O nuages, elle est ce que j'aime le mieux. 6+6 a
105 Comme elle est belle avec son rire d'épousée, 6+6 b
L'œil plein d'un ciel mystérieux, 8 a
Et les pieds nus dans la rosée ! 8 b
Je la parfumerai de nard. 8 a
O rêve ! elle mettra, dans notre couche étroite, 6+6 b
110 A mon front sa main gauche, à mon cœur sa main droite. 6+6 b
La nuit mes yeux joyeux font peur au loup hagard. 6+6 a
Je ressemble à celui qui trouve une émeraude. 6+6 c
Ma fierté fond sous son regard 8 a
Comme la neige sous l'eau chaude. 8 c
115 Son cou se passe de colliers ; 8 a
La sagesse à la grâce en ses discours se mêle 6+6 b
Comme le ramier vole auprès de sa femelle ; 6+6 b
Les séraphins lui font des signes familiers ; 6+6 a
Cette vierge, ô David, ô roi rempli de gloire, 6+6 c
120 Ressemble à votre tour d'ivoire 8 c
Où pendent mille boucliers. 8 a
Femmes, croyez-vous qu'elle sorte ? 8 a
Elle reste au logis et tourne son fuseau. 6+6 b
Et je l'appelle… mais je suis aimé, qu'importe ! 6+6 a
125 Je bondis comme un faon des monts Nabujesso, 6+6 b
Comme si je planais dans l'air qui me réclame, 6+6 c
Et comme si j'avais une âme 8 c
Faite avec des plumes d'oiseau. 8 b
Venez voir quelqu'un de superbe ! 8 a
130 Venez voir l'amant, fier comme un palmier dans l'herbe, 6+6 a
Beau comme l'aloès en fleur au mois d'élul ! 6+6 a
Venez voir l'amoureux qui vaincrait les colosses ! 6+6 b
Venez voir le grand roi Saül 8 a
Avec sa couronne de noces ! 8 b
CHŒUR DE FEMMES
135 Venez voir le grand roi Saül 8 a
Avec sa couronne de noces ! 8 b
LA JEUNE FILLE
L'amour porte bonheur. Chantez. L'air était doux, 6+6 a
Je le vis, l'herbe en fleur nous venait aux genoux, 6+6 a
Je riais, et nous nous aimâmes ; 8 a
140 Laissez faire leur nid aux cigognes, laissez 6+6 b
L'amour, qui vient du fond des azurs insensés, 6+6 b
Entrer dans la chambre des âmes ! 8 a
Qu'est-ce que des amants ? Ce sont des nouveau-nés. 6+6 a
Mon bien-aimé, venez des monts, des bois ! venez ! 6+6 a
145 Profitez des portes mal closes, 8 a
Je voudrais bien savoir comment je m'y prendrais 6+6 b
Pour ne pas adorer son rire jeune et frais, 6+6 b
Venez, mon lit est plein de roses ! 8 a
Ma maison est cachée et semble faite exprès ; 6+6 a
150 Le plafond est en cèdre et l'alcôve en cyprès ; 6+6 a
Oh ! le jour où nous nous parlâmes, 8 a
Il était blanc, les nids chantaient, il me semblait 6+6 b
Fils des cygnes qu'on croit lavés avec du lait, 6+6 b
Et je vis dans le ciel des flammes. 8 a
155 Dans l'obscurité, grand, dans la clarté, divin, 6+6 a
Vous régnez ; votre front brille en ce monde vain 6+6 a
Comme un bleuet parmi les seigles ; 8 a
Absent, présent, de loin, de près, vous me tenez ; 6+6 b
Venez de l'ombre où sont les lions, et venez 6+6 b
160 De la lumière où sont les aigles ! 8 a
J'ai cherché dans ma chambre et ne l'ai pas trouvé ; 6+6 a
Et j'ai toute la nuit couru sur le pavé, 6+6 a
Et la lune était froide et blême, 8 a
Et la ville était noire, et le vent était dur, 6+6 b
165 Et j'ai dit au soldat sinistre au haut du mur : 6+6 b
Avez-vous vu celui que j'aime ? 8 a
Quand tu rejetteras la perle en ton reflux, 6+6 a
O mer ; quand le printemps dira : « Je ne veux plus 6+6 a
« Ni de l'ambre, ni du cinname ! » 8 a
170 Quand on verra le mois Nisan congédier 6+6 b
La rose, le jasmin, l'iris et l'amandier, 6+6 b
Je le renverrai de mon âme. 8 a
S'il savait à quel point je l'aime, il pâlirait. 6+6 a
Viens ! le lys s'ouvre ainsi qu'un précieux coffret, 6+6 a
175 Les agneaux sont dans la prairie, 8 a
Le vent passe et me dit : « Ton souffle est embaumé ! » 6+6 b
Mon bien-aimé, mon bien-aimé, mon bien-aimé, 6−6 b
Toute la montagne est fleurie ! 8 a
Oh ! quand donc viendra-t-il, mon amour, mon orgueil ? 6+6 a
180 C'est lui qui me fait gaie ou sombre ; il est mon deuil, 6+6 a
Il est ma joie ; et je l'adore ; 8 a
Il est beau. Tour à tour sur sa tête on peut voir 6+6 b
L'étoile du matin et l'étoile du soir, 6+6 b
Car il est la nuit et l'aurore ! 8 a
185 Pourquoi fais-tu languir celle qui t'aime tant ? 6+6 a
Viens ! Pourquoi perdre une heure ? Hélas, mon cœur attend ; 6+6 a
Je suis triste comme les tombes ; 8 a
Est-ce qu'on met du temps, dis, entre les éclairs 6+6 b
De deux nuages noirs qui roulent dans les airs, 6+6 b
190 Et les baisers de deux colombes ? 8 a
CHŒUR DE FEMMES
Viens ! ô toi qu'on attend ! Chantons ! l'air était doux. 6+6 a
Il la vit ; l'herbe en fleur leur venait aux genoux. 6+6 a
mètre profils métriques : 7, 8, 6−6
forme globale type : suite de strophes
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