Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_12/HUG901
Victor HUGO
l'Art d'être grand-père
1877
I
A GUERNESEY
I
L'EXILÉ SATISFAIT
Solitude ! silence ! oh ! le désert me tente. 6+6 a
L'âme s'apaise là, sévèrement contente ; 6+6 a
Là d'on ne sait quelle ombre on se sent l'éclaireur. 6+6 b
Je vais dans les forêts chercher la vague horreur ; 6+6 b
5 La sauvage épaisseur des branches me procure 6+6 a
Une sorte de joie et d'épouvante obscure ; 6+6 a
Et j'y trouve un oubli presque égal au tombeau. 6+6 b
Mais je ne m'éteins pas ; on peut rester flambeau 6+6 b
Dans l'ombre, et, sous le ciel, sous la crypte sacrée, 6+6 a
10 Seul, frissonner au vent profond de l'empyrée. 6+6 a
Rien n'est diminué dans l'homme pour avoir 6+6 b
Jeté la sonde au fond ténébreux du devoir. 6+6 b
Qui voit de haut, voit bien ; qui voit de loin, voit juste. 6+6 a
La conscience sait qu'une croissance auguste 6+6 a
15 Est possible pour elle, et va sur les hauts lieux 6+6 b
Rayonner et grandir, loin du monde oublieux. 6+6 b
Donc je vais au désert, mais sans quitter le monde. 6+6 a
Parce qu'un songeur vient, dans la forêt profonde 6+6 a
Ou sur l'escarpement des falaises, s'asseoir 6+6 b
20 Tranquille et méditant l'immensité du soir, 6+6 b
Il ne s'isole point de la terre où nous sommes. 6+6 a
Ne sentez-vous donc pas qu'ayant vu beaucoup d'hommes 6+6 a
On a besoin de fuir sous les arbres épais, 6+6 b
Et que toutes les soifs de vérité, de paix, 6+6 b
25 D'équité, de raison et de lumière, augmentent 6+6 a
Au fond d'une âme, après tant de choses qui mentent ? 6+6 a
Mes frères ont toujours tout mon cœur, et, lointain 6+6 b
Mais présent, je regarde et juge le destin ; 6+6 b
Je tiens, pour compléter l'âme humaine ébauchée, 6+6 a
30 L'urne de la pitié sur les peuples penchée, 6+6 a
Je la vide sans cesse et je l'emplis toujours. 6+6 b
Mais je prends pour abri l'ombre des grands bois sourds. 6+6 b
Oh ! j'ai vu de si près les foules misérables, 6+6 a
Les cris, les chocs, l'affront aux têtes vénérables, 6+6 a
35 Tant de lâches grandis par les troubles civils, 6+6 b
Des juges qu'on eût dû juger, des prêtres vils 6+6 b
Servant et souillant Dieu, prêchant pour, prouvant contre, 6+6 a
J'ai tant vu la laideur que notre beauté montre, 6+6 a
Dans notre bien le mal, dans notre vrai le faux, 6+6 b
40 Et le néant passant sous nos arcs triomphaux, 6+6 b
J'ai tant vu ce qui mord, ce qui fuit, ce qui ploie 6+6 a
Que, vieux, faible et vaincu, j'ai désormais pour joie 6+6 a
De rêver immobile en quelque sombre lieu ; 6+6 b
Là, saignant, je médite ; et, lors même qu'un dieu 6+6 b
45 M'offrirait pour rentrer dans les villes la gloire, 6+6 a
La jeunesse, l'amour, la force, la victoire, 6+6 a
Je trouve bon d'avoir un trou dans les forêts, 6+6 b
Car je ne sais pas trop si je consentirais. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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