Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HUG_11/HUG268
Victor HUGO
Les Rayons et les Ombres
1840
XIII
Puits de l'Inde ! tombeaux ! monuments constellés ! 6+6 a
Vous dont l'intérieur n'offre aux regards troublés 6+6 a
Qu'un amas tournoyant de marches et de rampes, 6+6 b
Froids cachots, corridors où rayonnent des lampes, 6+6 b
5 Poutres où l'araignée a tendu ses longs fils, 6+6 a
Blocs ébauchant partout de sinistres profils, 6+6 a
Toits de granit, troués comme une frêle toile, 6+6 b
Par où l'œil voit briller quelque profonde étoile, 6+6 b
Et des chaos de murs, de chambres, de paliers, 6+6 a
10 Où s'écroule au hasard un gouffre d'escaliers ! 6+6 a
Cryptes qui remplissez d'horreur religieuse 6+6 b
Votre voûte sans fin, morne et prodigieuse ! 6+6 b
Cavernes où l'esprit n'ose aller trop avant ! 6+6 a
Devant vos profondeurs j'ai pâli bien souvent 6+6 a
15 Comme sur un abîme ou sur une fournaise, 6+6 b
Effrayantes Babels que rêvait Piranèse ! 6+6 b
Entrez si vous l'osez !
Sur le pavé dormant 6+6 a
Les ombres des arceaux se croisent tristement ; 6+6 a
La dalle par endroits, pliant sous les décombres, 6+6 b
20 S'entr'ouvre pour laisser passer des degrés sombres 6+6 b
Qui fouillent, vis de pierre, un souterrain sans fond ; 6+6 a
D'autres montent là-haut et crèvent le plafond. 6+6 a
Où vont-ils ? Dieu le sait. Du creux d'une arche vide 6+6 b
Une eau qui tombe envoie une lueur livide. 6+6 b
25 Une voûte au front vert s'égoutte dans un puits, 6+6 a
Dans l'ombre un lourd monceau de roches sans appuis 6+6 a
S'arrête retenu par des ronces grimpantes ; 6+6 b
Une corde qui pend d'un amas de charpentes 6+6 b
S'offre, mystérieuse, à la main du passant. 6+6 a
30 Dans un caveau, penché sur un livre, et lisant, 6+6 a
Un vieillard surhumain, sous le roc qui surplombe, 6+6 b
Semble vivre oublié par la mort dans sa tombe. 6+6 b
Des sphinx, des bœufs d'airain, sur l'étrave accroupis, 6+6 a
Ont fait des chapiteaux aux piliers décrépits ; 6+6 a
35 L'aspic à l'œil de braise, agitant ses paupières, 6+6 b
Passe sa tête plate aux crevasses des pierres. 6+6 b
Tout chancelle et fléchit sous les toits entr'ouverts. 6+6 a
Le mur suinte, et l'on voit fourmiller à travers 6+6 a
De grands feuillages roux, sortant d'entre les marbres, 6+6 b
40 Des monstres qu'on prendrait pour des racines d'arbres. 6+6 b
Partout, sur les parois du morne monument, 6+6 a
Quelque chose d'affreux rampe confusément ; 6+6 a
Et celui qui parcourt ce dédale difforme, 6+6 b
Comme s'il était pris par un polype énorme, 6+6 b
45 Sur son front effaré, sous son pied hasardeux, 6+6 a
Sent vivre et remuer l'édifice hideux ! 6+6 a
Aux heures où l'esprit, dont l'œil partout se pose, 6+6 b
Cherche à voir dans la nuit le fond de toute chose, 6+6 b
Dans ces lieux effrayants mon regard se perdit. 6+6 a
50 Bien souvent je les ai contemplés, et j'ai dit : 6+6 a
— Ô rêves de granit ! grottes visionnaires ! 6+6 b
Cryptes ! palais ! tombeaux, pleins de vagues tonnerres ! 6+6 b
Vous êtes moins brumeux, moins noirs, moins ignorés, 6+6 a
Vous êtes moins profonds et moins désespérés 6+6 a
55 Que le destin, cet antre habité par nos craintes, 6+6 b
Où l'âme entend, perdue, en d'affreux labyrinthes, 6+6 b
Au fond, à travers l'ombre, avec mille bruits sourds, 6+6 a
Dans un gouffre inconnu tomber le flot des jours ! — 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
logo du CRISCO logo de l'université