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| = césure
HUG_10/HUG154
Victor HUGO
Les feuilles d'automne
1831
XI
DÉDAIN
Yo contra todos y todos contra yo
ROMANCE DE VIEJO ARIAS.
I
Qui peut savoir combien de jalouses pensées, 6+6 a
De haines, par l'envie en tous lieux ramassées, 6+6 a
De sourds ressentiments, d'inimitiés sans frein, 6+6 b
D'orages à courber les plus sublimes têtes, 6+6 c
5 Combien de passions, de fureurs, de tempêtes, 6+6 c
Grondent autour de toi, jeune homme au front serein ! 6+6 b
Tu ne le sais pas, toi ! — Car tandis qu'à ta base 6+6 a
La gueule des serpents s'élargit et s'écrase, 6+6 a
Tandis que ces rivaux, que tu croyais meilleurs, 6+6 b
10 Vont t'assiégeant en foule, ou dans la nuit secrète 6+6 c
Creusent maint piège infâme à ta marche distraite, 6+6 c
Pensif, tu regardes ailleurs ! 8 b
Ou si parfois leurs cris montent jusqu'à ton âme, 6+6 a
Si ta colère, ouvrant ses deux ailes de flamme, 6+6 a
15 Veut foudroyer leur foule acharnée à ton nom, 6+6 b
Avant que le volcan n'ait trouvé son issue, 6+6 c
Avant que tu n'aies mis la main à ta massue, 6+6 c
Tu te prends à sourire et tu dis : À quoi bon ? 6+6 b
Puis voilà que revient ta chère rêverie, 6+6 a
20 Famille, enfance, amour, Dieu, liberté, patrie ; 6+6 a
La lyre à réveiller ; la scène à rajeunir ; 6+6 b
Napoléon, ce dieu dont tu seras le prêtre ; 6+6 c
Les grands hommes, mépris du temps qui les voit naître, 6+6 c
Religion de l'avenir ! 8 b
II
25 Allez donc ! ennemis de son nom ! foule vaine ! 6+6 a
Autour de son génie épuisez votre haleine ! 6+6 a
Recommencez toujours ! ni trêve, ni remord. 6+6 b
Allez, recommencez, veillez, et sans relâche 6+6 c
Roulez votre rocher, refaites votre tâche, 6+6 c
30 Envieux ! — Lui, poète, il chante, il rêve, il dort. 6+6 b
Votre voix, qui s'aiguise et vibre comme un glaive, 6+6 a
N'est qu'une voix de plus dans le bruit qu'il soulève. 6+6 a
La gloire est un concert de mille échos épars, 6+6 b
Chœurs de démons, accords divins, chants angéliques, 6+6 c
35 Pareil au bruit que font dans les places publiques 6+6 c
Une multitude de chars. 8 b
Il ne vous connaît pas. — Il dit par intervalles 6+6 a
Qu'il faut aux jours d'été l'aigre cri des cigales, 6+6 a
L'épine à mainte fleur ; que c'est le sort commun ; 6+6 b
40 Que ce serait pitié d'écraser la cigale ; 6+6 c
Que le trop bien est mal ! que la rose au Bengale 6+6 c
Pour être sans épine est aussi sans parfum. 6+6 b
Et puis, qu'importe ! amis, ennemis, tout s'écroule. 6+6 a
C'est au même tombeau que va toute la foule. 6+6 a
45 Rien ne touche un esprit que Dieu même a saisi. 6+6 b
Trônes, sceptres, lauriers, temples, chars de victoire, 6+6 c
On ferait à des rois des couronnes de gloire 6+6 c
De tout ce qu'il dédaigne ici ! 8 b
Que lui font donc ces cris où votre voix s'enroue ? 6+6 a
50 Que sert au flot amer d'écumer sur la proue ? 6+6 a
Il ignore vos noms, il n'en a point souci, 6+6 b
Et quand, pour ébranler l'édifice qu'il fonde, 6+6 c
La sueur de vos fronts ruisselle et vous inonde, 6+6 c
Il ne sait même pas qui vous fatigue ainsi ! 6+6 b
III
55 Puis, quand il le voudra, scribes, docteurs, poètes, 6+6 a
Il sait qu'il peut, d'un souffle, en vos bouches muettes 6+6 a
Éteindre vos clameurs, 6 b
Et qu'il emportera toutes vos voix ensemble 6+6 c
Comme le vent de mer emporte où bon lui semble 6+6 c
60 La chanson des rameurs ! 6 b
En vain vos légions l'environnent sans nombre, 6+6 a
Il n'a qu'à se lever pour couvrir de son ombre 6+6 a
À la fois tous vos fronts ; 6 b
Il n'a qu'à dire un mot pour couvrir vos voix grêles, 6+6 c
65 Comme un char en passant couvre le bruit des ailes 6+6 c
De mille moucherons ! 6 b
Quand il veut, vos flambeaux, sublimes auréoles 6+6 a
Dont vous illuminez vos temples, vos idoles, 6+6 a
Vos dieux, votre foyer, 6 b
70 Phares éblouissants, clartés universelles, 6+6 c
Pâlissent à l'éclat des moindres étincelles 6+6 c
Du pied de son coursier ! 6 b
mètre profils métriques : 8, 6, 6+6
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