Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HRV_1/HRV3
Henriette HERVÉ
DILECTION
1925
SUIVANT L'HUMEUR DES JOURS
QUAND JE L'AURAI DIT…
Quand je l'aurai dit, mon supplice, 8 a
L'auras-tu compris, l'auras-tu ressenti, toi ? 8+4 b
Quel prodigieux artifice 8 a
Ferait jaillir des mots étroits 8 b
5 Un sens immédiat plus vrai, plus chaud, plus vaste ? 6+6 c
Quel poète a vaincu le déchirant contraste 6+6 c
De l'immobilité des mots 8 d
Et du frémissement sans fin de la souffrance ? 6+6 e
…Vois-tu le vent dévaster les moissons immenses 4+8 e
10 Pour quelques épis en faisceau ? 8 d
Il faudrait forger la parole 8 a
Neuve et nue ! Alors, comme une épée, elle irait, 6+6 b
Traversant même un cœur frivole !… 8 a
Les mots usés sont sans secrets ! 8 b
15 Tu les as entendus, tu les as dits peut-être, 6+6 c
Et moi, je ne peux plus bouleverser ton être 6+6 c
Par leurs accents trop bien connus ! 8 d
Et pourtant ils sont vrais ! Quand mon esprit les pense 6+6 e
Ils sont élaborés par toute ma substance 6+6 e
20 Et tordent mes nerfs mis à nu ! 8 d
Mais puis-je faire voir mes larmes 8 a
En disant simplement que je pleure ? Hélas ! non… 6+6 b
Sauras-tu l'ineffable charme 8 a
Et le fléchissant abandon 8 b
25 Que traduit pour mon cœur le vieux mot de tendresse ? 6+6 c
Entendras-tu cette musique enchanteresse 4+4+4 c
Qui ruisselle et retient ma voix 8 d
Quand je redis tout bas des syllabes chéries 6+6 e
Telles vue bien-aimé ?…. Sauras-tu que je prie, 6+6 e
30 Et toute l'ardeur de ma foi ? 8 d
Sens-tu des mots monter la flamme ? 8 a
Son glissement soyeux semble de cuivre et d'or 6+6 b
Et n'atteint d'abord que ton âme… 8 a
Mais l'incendie éclate et mord ! 8 b
35 Il réclame en hurlant cette pourpre fusée 6+6 c
Que donneront ta chair et tes fibres brisées 6+6 c
Par les vocables du désir ! 8 d
Les sens-tu ces brandons et cette flamme haute ? 6+6 e
Sens-tu craquer enfin la membrure des côtes 6+6 e
40 Et tes artères t'assourdir ? 8 d
Et le cri de ma jalousie 8 a
Ira-t-il s'enrouler douze fois à ton col 6+6 b
Et sur ton front qu'il supplicie, 8 a
Parce que j'aurai dit l'envol 8 b
45 De ses souples fouets autour de mes épaules ? 6+6 c
Ce terme sinueux ainsi qu'un brin de saule 6+6 c
Fait-il mieux gicler de ton cœur, 8 d
Par son seul sifflement, le sang toujours plus âcre 6+6 e
Qui dégoutte du mien ?… Alors, le simulacre 6+6 e
50 De mon verbe n'est pas trompeur ! 8 d
Et si je parle de ma joie, 8 a
‒ Un jour d'entre les jours où tu me fus clément 6+6 b
Tu sauras comment se déploie 8 a
La voile sous un coup de vent 8 b
55 Quand bondit sur la mer une tartane neuve 6+6 c
Tu sentiras aussi tous les flots qui l'émeuvent, 6+6 c
Et le poids heureux de ses flancs, 8 d
Où dort une invisible cargaison, quand vibre 6−6 e
Sa figure de proue, audacieuse et libre 6+6 e
60 Qui semble dompter l'océan ! 8 d
Dire ma joie ! Ah ! c'est entendre 8 a
Dans les haillons troués claquer des étendards 6+6 b
C'est rallumer toutes les cendres, 8 a
C'est faire naître des regards !… 8 b
65 Les accords oubliés, les paroles éteintes. 6+6 c
Le parfum disparu d'une lointaine étreinte, 6+6 c
Et cela qui n'est pas encor, 8 d
Tout, ce qui doit venir !… Voilà ce qu'est ma joie 6+6 e
Et. sa double guirlande, il faut que tu la voies, 6+6 e
70 Quand sonne sa trompette d'or ! 8 d
Si ton âme était vraiment prête, 8 a
J'évoquerais l'amour sans avoir dit son nom ! 6+6 b
Le poean du plus grand poète 8 a
Et son thrène le plus profond 8 b
75 Ne peuvent émouvoir par le jeu des spondées ! 6+6 c
Mais si, vibrant, ta lyre à ma lyre accordée, 6+6 c
Tu perçois un chant merveilleux, 8 d
Les arcanes du verbe auront clos leur portique 6+6 e
Car nos cœurs connaîtront leur sens ésotérique 6+6 e
80 Et nous serons pareils aux dieux ! 8 d
mètre profils métriques : 8, 6÷6
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