Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
HAR_2/HAR95
Edmond HARAUCOURT
L’Âme nue
1885
I
LA VIE EXTÉRIEURE
LES LOIS — LES CULTES — LES FORMES
LES FORMES
LE CRAPAUD
(ENVOI)
à vous, — vous la beauté,la frcheur et la grâce, — 6+6 a
 J’offre humblement ces humbles vers. 8 b
Je chante les proscritsqui font rire et qu’on chasse. 6+6 a
Car leur chanson m’a ditles maux qu’ils ont soufferts. 6+6 b
5 Je chante les laideurs,je les plains, je les aime, 6+6 a
 Car leur chanson parle à mon cœur ; 8 b
Car j’ai senti souventet senti pour moi-même 6+6 a
Quel mal fait un sourireadorable et moqueur. 6+6 b
Mes vers chantent l’amourridicule et néfaste, 6+6 a
10  Le rêve du déshérité 8 b
Et je vous en fais don,par esprit de contraste, 6+6 a
À vous, — vous la frcheur,la grâce et la beauté 6+6 b
LE CRAPAUD
Là-bas, bien loin, plus loinque les prés de luzernes, 6+6 a
Plus loin que ce torrentaux flots vitreux et ternes 6+6 a
15 Qui polit en grondantla rondeur des galets ; 6+6 a
Dans un champ le soirsème des feux follets, 6+6 a
Là-bas, un marais dort,calme et plat, sur la fange. 6+6 a
Une écume saumâtrea brodé de sa frange, 6+6 a
Comme d’un velours vert,les bords du lit visqueux ; 6+6 a
20 D’âcres exhalaisonspèsent dans l’air aqueux, 6+6 a
Et sous le brun miroir,lourd comme un plomb liquide, 6+6 a
Les débris croupissantsd’une flore morbide 6+6 a
S’étalent sur la boueépaisse, par instant 6+6 a
Des bulles d’un gaz froidmontent en tremblotant… 6+6 a
C’est là qu’il vit.
25 Parfois,quand la nuit est bien noire, 6+6 a
Quand la lune a cachéson large front d’ivoire 6+6 a
Derrière le mur grisdes grands monts dentelés ; 6+6 a
Dans un flux de vapeursquand les astres voilés 6+6 a
Veillent en souriantsur le sommeil des plaines ; 6+6 a
30 Lorsque toutes les voixet toutes les haleines, 6+6 a
Que tout ce qui parlaitet tout ce qui chantait 6+6 a
Dans un dernier frissons’assoupit et se tait, 6+6 a
Alors, il vient…
Du fondde la bourbe qu’il ride, 6+6 a
Il se soulève ; il nageà travers l’eau putride : 6+6 a
35 Dans les joncs gras et mous,péniblement, sans bruit, 6+6 a
Il monteIl sort, rêveuraffamé de la nuit. 6+6 a
Au pied des roseaux fraisque la brise balance, 6+6 a
Morne, il regarde l’ombre,écoute le silence, 6+6 a
Et s’enivre au parfumlointain des fleurs du soir… 6+6 a
40 Il songe au beau soleilqu’il n’a jamais pu voir, 6+6 a
à l’air pur, aux oiseauxà qui Dieu fit des ailes, 6+6 a
Aux papillons dorés,aux sveltes demoiselles, 6+6 a
Aux nuages, au ventqui court sous le ciel chaud, 6+6 a
À tout ce qui peut fuiret s’envoler bien haut ! 6+6 a
45 Il dresse avec lenteurson front chargé de mousse ; 6+6 a
Et lui, l’être hideuxque tout fuit ou repousse, 6+6 a
L’être triste et honteux,le paria du jour, 6+6 a
Seul, lamentablement,pleure son chant d’amour… 6+6 a
Amour ! Amour ! Sa voixs’élance dans l’air libre. 6+6 a
50 Chanter, c’est être deux !La note tremble et vibre : 6+6 a
Soupir doux et plaintif,soupir mélodieux, 6+6 a
Hymne de désir vagueet de naïve extase, 6+6 b
Cri d’une âme en douleurqui râle sur la vase, 6+6 b
Et qui monte en râlantvers l’infini des cieux ! 6+6 a
mètre profils métriques : 8, 6+6
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