Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HAR_2/HAR84
Edmond HARAUCOURT
L’Âme nue
1885
I
LA VIE EXTÉRIEURE
LES LOIS — LES CULTES — LES FORMES
LES FORMES
ALMA PARENS
À CHARLES MORICE
Puis, un rayon po sur un toit de chaumière, 6+6 a
Un bois où le ciel bleu fait des trous de lumière, 6+6 a
Un nuage qui court vers le soleil levant ; 6+6 b
Et là, paisible et pur, comme un saint dans sa fierte, 6+6 c
5 Droit dans sa châsse d’ombre aromatique et verte, 6+6 c
Un muguet qui se berce au vent ; 8 b
Puis, la fuite indécise et blonde des collines, 6+6 a
Où de blanches vapeurs traînent leurs mousselines, 6+6 a
Comme des jours de Pâque aux marches des parvis ; 6+6 b
10 Et la mare aux tons d’huile où s’endorment les raines, 6+6 c
Et l’herbe où deux pinsons vont picoter des graines 6+6 c
Autour d’un brin de chènevis ; 8 b
Et, sur l’inclinaison des ravines fleuries, 6+6 a
C’est un ruissellement de folles pierreries : 6+6 a
15 La plaine, sous l’éclat des bijoux et des fards, 6+6 b
Regarde en souriant pendre sa robe neuve, 6+6 c
Dont la frange se mouille aux vasques du grand fleuve 6+6 c
Qui descend sous les nénuphars. 8 b
Et c’est la mer, là-bas, la mer omnicolore, 6+6 a
20 La vaste fleur que chaque aurore fait éclore, 6+6 a
L’immense voyageuse aux somptueux courants 6+6 b
Qui joue avec la lune et qui chante aux étoiles, 6+6 c
Et qui tout en chantant jette ou porte les voiles 6+6 c
Sur des mondes exubérants : 8 b
25 Sur des pays où l’or micace les rivières, 6+6 a
Où l’éclair des oiseaux fait trembler les paupières, 6+6 a
Où l’on entend sonner dans l’air lourd de parfums 6+6 b
Et glisser le beau corps onduleux des crotales, 6+6 c
Où les corolles ont de si larges pétales 6+6 c
30 Qu’on y peut coucher les défunts ; 8 b
Et c’est l’immensi des déserts et du pôle, 6+6 a
Les forêts de bambous où le tigre miaule, 6+6 a
Les steppes où s’enfuit le troupeau des bisons ; 6+6 b
C’est le miroitement limpide et bleu des glaces 6+6 c
35 Et le soleil qui tourne avec des lenteurs lasses 6+6 c
Sur l’argent mat des horizons. 8 b
Feu des soirs, bleu des nuits, midis blancs, matins roses, 6+6 a
C’est la communion de l’air avec les choses ! 6+6 a
C’est l’hymne hyménéal et l’éternel A 6+6 b
40 Des formes aux senteurs et des sons aux lumières, 6+6 c
Tout ce qui s’est perdu des époques premières, 6+6 c
Et tout ce qu’on n’a pas rêvé ! 8 b
— Ô Nature ! ô splendeur ! ô richesse infinie ! 6+6 a
Qui rendra par des mots l’œuvre de ton génie ? 6+6 a
45 Tout notre effort s’épuise et râle vers le beau, 6+6 b
Et toi, Mère, toujours jeune et toujours féconde, 6+6 c
Tu poses en riant à tous les coins du monde 6+6 c
Un chef-d’œuvre toujours nouveau. 8 b
Notre plume se rompt, notre pinceau se brise, 6+6 a
50 Et notre seule gloire est de l’avoir comprise, 6+6 a
Nous qui voudrions tant et qui pouvons si peu ! 6+6 b
Reine unique de l’art, c’est ton doigt qui nous mène, 6+6 c
Et quand nous te chantons, la poésie humaine 6+6 c
Chante le poème de Dieu ! 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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