Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
HAR_2/HAR49
Edmond HARAUCOURT
L’Âme nue
1885
I
LA VIE EXTÉRIEURE
LES LOIS — LES CULTES — LES FORMES
LES LOIS
L’OCÉAN
À FRANÇOIS COPPÉE
— C’est l’Océan ! Vois-tu déferler les étoiles, 6+6 a
La mer, la vaste mer immobile à nos yeux, 6+6 b
Où vogue avec ennui, comme un vaisseau sans voiles, 6+6 a
La lune, nef d’argent qui glisse sur les cieux ? 6+6 b
5 Loin ! Vois-tu poudroyer, très loin, des vapeurs blondes, 6+6 a
Tourbillon d’astres clairs dans les gouffres vermeils, 6+6 b
Flot dont l’écume ardente est faite avec des mondes, 6+6 a
Houle insondable où bout la mousse des soleils ? 6+6 b
Regarde ! L’ombre bouge… Entends-tu le silence, 6+6 a
10 Le silence que font ces milliards de bruits ? 6+6 b
Tout se tait : c’est la mer astrale qui s’élance 6+6 a
Et gronde immensément dans l’abîme des nuits. 6+6 b
Viens ! Monte ! Enlève-toi sur la crête des vagues, 6+6 a
Pareil aux alcyons emportés dans leurs nids ! 6+6 b
15 — Oh ! là-haut, oh ! là-bas, indéfiniment vagues. 6+6 a
Je vois des golfes d’or sourdre des infinis… 6+6 b
— Viens ! — J’ai peur ! — Cette lame, ô nain, c’est la première, 6+6 a
La seule dont notre œil devine les remous : 6+6 b
C’est là, mais c’est si loin qu’un rayon de lumière 6+6 a
20 Court des siècles, avant d’arriver jusqu’à nous ! 6+6 b
— Loin ! Dans la perspective innombrable et confuse, 6+6 a
Un tranquille brouillard commence à s’azurer… 6+6 b
— Passe : il est si profond que l’Éternité s’use 6+6 a
À brûler des soleils sans pouvoir l’éclairer ! 6+6 b
25 — Des mers ! Des mers ! — Ce n’est qu’un reflux de comètes : 6+6 a
Passe. — Nul horizon ! La mer moutonne encor… 6+6 b
Et des mers ! Et partout, sous nos pieds, sur nos têtes, 6+6 a
Tournoie et s’élargit le monstrueux décor ! 6+6 b
— Ce n’est qu’un point du ciel et qu’un chiffre du nombre ! 6+6 a
30 Marche, tu n’as rien vu, marche. — Je suis fourbu : 6+6 b
Quand donc trouverons-nous la fin, les murs de l’ombre ? 6+6 a
— Cours mille fois mille ans et tu n’auras rien vu ! 6+6 b
Va l’infini de temps dans l’infini d’espace ! 6+6 a
Toujours le feu des feux gronde et rugit sur toi : 6+6 b
35 Et tout s’entraîne, fuit, disparaît, vient, repasse 6+6 a
Et roule éperdument dans les vents de la Loi ! 6+6 b
Et tout peuplé, vivant, pensant, créant des rêves, 6+6 a
Lançant des cris d’espoir et des soupirs de deuil, 6+6 b
Aimant, souffrant, croyant, et sans buts, et sans trêves, 6+6 a
40 Sans rien savoir, sans rien voir… — Et j’ai de l’orgueil ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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