Métrique en Ligne
GUE_1/GUE44
Charles GUÉRIN
Le Cœur Solitaire
1895
V
A LA MEMOIRE DE SAMAIN
XLIV
Dans ton décor naïf tu m'apparais, Jenny, 6+6 a
Doux fantôme où revit la romance, ouvrière 6+6 b
Qui brodais en levant parfois sur l'infini 6+6 a
Des cils-rêveurs et deux yeux purs pleins de prière. 6+6 b
5 Ta mansarde fleurie ouvre sur l'orient ; 6+6 a
Prompte à quitter ton lit de vierge, tu vois naître 6+6 b
L'aube qui te regarde à son tour en riant 6+6 a
Arroser, ô Jenny, les lys de ta fenêtre. 6+6 b
À ton poignet glissant déjà ta boîte au lait, 6+6 a
10 Devant le bruit que font tes colombes entre elles 6+6 b
Tu hausses ton bras nu pour suspendre au volet 6+6 a
La cage de ces tourterelles. 8 b
Puis tu descends d'un pas léger d'ombre ou d'oiseau 6+6 a
L'escalier pauvre où flotte une triste lumière, 6+6 b
15 Svelte fille, et ta main balance le réseau 6+6 a
Que va gonfler d'achats modestes la crémière. 6+6 b
Assise à ta croisée et sa plus fraîche fleur, 6+6 a
Tu courberas, Jenny, tout le jour, sur l'ouvrage 6+6 b
Ce cou dont un ruban relève la pâleur, 6+6 a
20 Ce front blanc qu'un bandeau de noirs cheveux ombrage ; 6+6 b
Tout le jour, détournant tes songes du baiser, 6+6 a
Au lieu d'un compagnon fidèle qui t'enlace, 6+6 b
Sur tes chastes genoux tu sentiras peser 6+6 a
La toile âpre aux doigts qu'elle lasse. 8 b
25 Mais que le soir, voilé de bleu, sur la cité 6+6 a
Répande sa tendresse obscure et son mystère, 6+6 b
Ton coeur secrètement alors sollicité 6+6 a
Regrettera l'amour et d'être solitaire ; 6+6 b
Et, réduite aux langueurs d'un plaisir décevant, 6+6 a
30 Sombre, avec un soupir de feu, la nuit venue, 6+6 b
Tu laisseras le souffle insidieux du vent 6+6 a
Émouvoir d'un désir amer ta gorge nue. 6+6 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
forme globale type : suite périodique
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