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| = césure
GLA_1/GLA3
Albert GLATIGNY
Le Fer rouge
1870
III
CHANT DE LA GAZETTE DE COLOGNE
Nos pères ont eu cette honte 8 a
De connaître la liberté ; 8 b
Ils étaient ceux que rien ne dompte, 8 a
Ils bravaient l'éclair irrité. 8 b
5 Les miasmes venus de France 8 a
Avaient empoisonné leurs cœurs ; 8 b
On lisait : paix et délivrance 8 a
Sur leurs jeunes drapeaux vainqueurs. 8 b
Leur rire semblait un tonnerre 8 a
10 Et, comme les feuilles des bois, 8 b
Balayait tout ce qu'on vénère, 8 a
Les princes, les ducs et les rois, 8 b
Et rien n'était affligeant comme 8 a
Leur orgueil téméraire et vain : 8 b
15 Ils proclamaient les droits de l'homme 8 a
Supérieurs au droit divin ! 8 b
Ils osaient dire qu'une altesse 8 a
Diffère du premier venu 8 b
Par un peu de scélératesse 8 a
20 Et d'aveuglement ingénu ! 8 b
Mais nous, leurs fils, c'est autre chose ! 8 a
Nous sommes de bons chiens couchants ; 8 b
Nous voulons qu'un roi nous impose 8 a
Ses soins paternels et touchants. 8 b
25 Nous sommes des sujets d'élite, 8 a
Nous allons, fiers, le front baissé, 8 b
Notre zèle réhabilite 8 a
Aux yeux du maître le passé. 8 b
Nous étions allemands, nous sommes 8 a
30 De bons prussiens ; nous portons 8 b
Notre hommage à des gentilshommes 8 a
Dont les mains tiennent des bâtons. 8 b
Rien aujourd'hui ne nous divise. 8 a
Nous sommes heureux, hosanna ! 8 b
35 Et nous avons pris pour devise : 8 a
Johann Maria Farina ! 8 b
Oh ! Cologne est la ville sainte 8 a
De la choucroute et du tabac ; 8 b
Le vieux Rhin baigne son enceinte, 8 a
40 Nous revendiquons Offenbach ! 8 b
Nous exportons de la morale, 8 a
De la peinture, des vieux suifs ; 8 b
Nous avons une cathédrale 8 a
Que nous exploitons en vrais juifs. 8 b
45 Aussi, quand un peuple se lève 8 a
Et réclame ses libertés, 8 b
En voyant l'éclair de son glaive, 8 a
Nous nous sentons tous insultés. 8 b
Dociles comme une machine, 8 a
50 Prêts à supporter tous les bâts, 8 b
Quand nous plions si bien l'échine, 8 a
Voici qu'on est brave là-bas ! 8 b
Trouvant que le droit humain chôme, 8 a
Voici que la France, en fureur, 8 b
55 Quand nous gardons notre Guillaume, 8 a
Vient de vomir son empereur. 8 b
Un peuple libre sur la carte ! 8 a
Un souverain sur le pavé ! 8 b
Oh ! Relevons ce Bonaparte, 8 a
60 Bien qu'il soit de sang mal prouvé. 8 b
Car un prince est bien lamentable 8 a
Lorsque des parchemins joyeux 8 b
N'offrent pas un tas respectable 8 a
De bandits parmi ses aïeux ; 8 b
65 Lorsque sa généalogie, 8 a
Superbe, n'a pas traversé 8 b
Les siècles disparus, rougie 8 a
Du sang sur l'échafaud versé. 8 b
Toute maison de bonne souche 8 a
70 A son histoire où le poison 8 b
Joue un rôle sombre et farouche 8 a
Dans les mains de la trahison, 8 b
Et la noblesse n'est sincère 8 a
Qu'autant qu'on dit comment advint, 8 b
75 Qu'un jour, égrenant son rosaire, 8 a
Vers l'an douze ou treize cent vingt, 8 b
La noble dame châtelaine, 8 a
Son époux allant guerroyer, 8 b
Mêla chastement son haleine 8 a
80 Au souffle d'un jeune écuyer. 8 b
Nos princes, Dieu les accompagne 8 a
Et les conduise par la main ! 8 b
Déjà du temps de Charlemagne, 8 a
Étaient voleurs de grand chemin, 8 b
85 Et, grâce au ciel ! Les adultères, 8 a
Les faux, les empoisonnements 8 b
Projettent des lueurs austères 8 a
Jusque sur leurs commencements. 8 b
Mais au bout du compte, un roi, même 8 a
90 Sans meurtrier antique au bout 8 b
D'un passé ténébreux et blême, 8 a
Vaut mieux que pas de roi du tout ; 8 b
Et puis, s'il faut qu'on se départe 8 a
De la saine tradition, 8 b
95 Bien que récents, les Bonaparte 8 a
Méritent quelque attention ; 8 b
Dix-huit brumaire et deux décembre, 8 a
Double date, double sommet 8 b
Au haut duquel la mort se cambre ! 8 a
100 C'est une race qui promet. 8 b
Ettenheim sent son moyen âge ; 8 a
Hoche brusquement expirant 8 b
Rehausse encor le personnage 8 a
Nommé Napoléon Le Grand. 8 b
105 Règne donc la famille corse 8 a
Au bec sanglant et carnassier ! 8 b
Qu'elle-même allume l'amorce 8 a
Des sinistres canons d'acier ! 8 b
Car nous qu'on outrage et qu'on lie, 8 a
110 Nous qui voulons des majestés, 8 b
Vraiment cela nous humilie 8 a
Que l'on soit libre à nos côtés. 8 b
Car notre abjection profonde 8 a
Pâlirait nécessairement 8 b
115 Lorsque s'étendrait sur le monde 8 a
L'universel abaissement ; 8 b
Quand les peuples, comme à Cologne, 8 a
Chérissant les affronts soufferts, 8 b
S'écrîraient partout sans vergogne : 8 a
120 « De l'argent ! Des bâillons ! Des fers ! » 8 b
Ô bons marchands de vulnéraire, 8 a
Soyez infâmes ! Vautrez-vous 8 b
Toujours dans l'ombre funéraire 8 a
De vos rois mystiques et fous ! 8 b
125 Aimez la main qui vous fustige, 8 a
Léchez les pieds les plus fangeux, 8 b
Soyez lâches jusqu'au vertige, 8 a
Valets soumis et nuageux ! 8 b
La révolution sacrée 8 a
130 Jette à la face des bourreaux 8 b
Les trônes brisés, elle crée 8 a
Un peuple de jeunes héros ; 8 b
Et vous assisterez, farouches, 8 a
Au grand réveil des nations, 8 b
135 Et l'on blessera vos yeux louches 8 a
Avec des flèches de rayons. 8 b
Vous serez contraints de vous taire 8 a
Quand, dans le jour, dans la clarté, 8 b
Nous ferons entendre à la terre 8 a
140 Le cantique de liberté ! 8 b
Alors, maudissant vos entraves, 8 a
Trahis par vos tyrans, meurtris, 8 b
Vous nous tendrez vos mains d'esclaves, 8 a
Et vous pousserez de grands cris ; 8 b
145 Et la république sereine 8 a
Répondra de sa forte voix : 8 b
« Laquais, dans la nuit souterraine, 8 a
Allez pourrir avec vos rois ! » 8 b
mètre profil métrique : 8
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