Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
GLA_1/GLA11
Albert GLATIGNY
Le Fer rouge
1870
XI
MÊME ÉPROUVÉE
Même éprouvée ainsi | que je te vois, ô France ! 6+6 a
Dans ces temps douloureux | où tes plus jeunes fils 6+6 b
Vont mourir pour ta délivrance, 8 a
Et lancent aux échos | les suprêmes défis ; 6+6 b
5 Avec tes champs brûlés, | tes forêts sépulcrales 6+6 a
Où reviennent, le soir, | des fantômes sanglants, 6+6 b
Avec tes hameaux pleins de râles, 8 a
Que lèche l'incendie | aux reflets aveuglants ; 6+6 b
Sanglotant, par moments, | comme une pauvre femme 6+6 a
10 Qui se lamente auprès | de son foyer désert, 6+6 b
Montrant le couteau que l'infâme 8 a
En fuyant a laissé | dans ton flanc entr'ouvert ; 6+6 b
Oui, France ! Même en deuil | et sur tant de victimes 6+6 a
Promenant lentement | ton regard triste et fier, 6+6 b
15 Et penchée au bord des abîmes, 8 a
Je te préfère encore | à la France d'hier ; 6+6 b
À la France joyeuse, | à la France éclatante 6+6 a
Où, comme des serpents, | rampaient les délateurs, 6+6 b
Où la vénalité contente 8 a
20 Mêlait dans son bazar | filles et sénateurs. 6+6 b
Et pourtant, cette France | à voir était superbe ; 6+6 a
Elle gaspillait l'or, | elle chantait gaîment, 6+6 b
Elle avait au front une gerbe 8 a
De strass qui remplissait | l'œil d'éblouissement ; 6+6 b
25 Musiques, danses, chants, | personnages obliques, 6+6 a
Ministres frauduleux | décorant des forçats ; 6+6 b
L'honneur, les libertés publiques 8 a
Ayant pour tout refuge | ou Bicêtre ou Mazas ; 6+6 b
La presse basse et vile | ou sinon muselée, 6+6 a
30 Ayant pour noms Tarbé, | Wolff, Aurélien Scholl, 6+6 b
Ainsi qu'une grue affolée, 8 a
Riant de voir tomber | les vaincus sur le sol ! 6+6 b
Fard, paillettes, clinquant, | velours, robes de soie, 6+6 a
Orgie, oubli de tout, | ni pudeur, ni remord ; 6+6 b
35 Oui, mais sous toute cette joie, 8 a
On sentait vaguement | comme une odeur de mort. 6+6 b
C'est que tout était mort | en effet, ou sénile, 6+6 a
Et rien ne réveillait | ces obstinés dormants, 6+6 b
Même quand du fond de son île 8 a
40 Victor Hugo faisait | tonner les châtiments ! 6+6 b
Par instants, un vieillard, | pénible à voir, teint blême, 6+6 a
Chancelant, fatigué, | jaune, faisant horreur, 6+6 b
Dans ce bal de la mi-carême 8 a
Passait, et l'on disait | tout bas : « c'est l'empereur. » 6+6 b
45 Sa femme et son enfant | suivaient, comme des ombres, 6+6 a
Ce spectre dégradé | qu'un archange poursuit, 6+6 b
Et les chants devenaient plus sombres, 8 a
Et l'on sentait passer | le vent froid de la nuit. 6+6 b
Ô France ! Ta douleur | vaut mieux que cette joie. 6+6 a
50 Tu saignes, mais tu vis, | mais tu dresses le front 6+6 b
Sous l'orage qui le foudroie ; 8 a
Mais à tes ennemis | tu rejettes l'affront ; 6+6 b
Mais tu comprends les mots | d'honneur et de patrie ; 6+6 a
Ton courage s'accroît | de tous les maux soufferts ; 6+6 b
55 D'autant plus forte que meurtrie, 8 a
Tu fais une arme avec | les débris de tes fers ! 6+6 b
L'épreuve sera courte. | Un nouveau sang afflue 6+6 a
Dans tes veines, ô France ! | Un sang pur et vermeil. 6+6 b
Tes fils ont l'âme résolue, 8 a
60 Et sauront triompher | demain, au grand soleil ! 6+6 b
Ô France ! Entends chanter | les voix libératrices ; 6+6 a
L'avenir est prochain | qui, d'un doigt enchanté, 6+6 b
Ferme tes nobles cicatrices 8 a
D'où jaillira pour tous | la jeune liberté ; 6+6 b
65 Et si, que ce penser | sur les lâches retombe ! 6+6 a
On doit voir brusquement | s'éteindre ton flambeau, 6+6 b
Ô France ! Descends dans la tombe, 8 a
Et meurs libre ! Ton sort | n'en sera pas moins beau ! 6+6 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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