Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
GAU_7/GAU281
Théophile GAUTIER
ESPAÑA
édition Maurice Dreyfous
1845
ESPAÑA
A ZURBARAN
Moines de Zurbaran,blancs chartreux qui, dans l'ombre, 6+6 a
Glissez silencieuxsur les dalles des morts, 6+6 b
Murmurant des Pateret des Ave sans nombre, 6+6 a
Quel crime expiez-vouspar de si grands remords ? 6+6 b
5 Fantômes tonsurés,bourreaux à face blême, 6+6 c
Pour le traiter ainsi,qu'a donc fait votre corps ? 6+6 b
Votre corps, modelépar le doigt de Dieu même, 6+6 c
Que Jésus-Christ, son fils,a daigné revêtir, 6+6 a
Vous n'avez pas le droitde lui dire : Anathème ! 6+6 c
10 Je conçois les tourmentset la foi du martyr, 6+6 a
Les jets de plomb fondu,les bains de poix liquide, 6+6 b
La gueule des lionsprête à vous engloutir, 6+6 a
Sur un rouet de ferles boyaux qu'on dévide, 6+6 b
Toutes les cruautésdes empereurs romains ; 6+6 c
15 Mais je ne comprends pasce morne suicide ! 6+6 b
Pourquoi donc, chaque nuit,pour vous seuls inhumains, 6+6 c
Déchirer votre épauleà coups de discipline, 6+6 a
Jusqu'à ce que le sangruisselle sur vos reins ? 6+6 c
Pourquoi ceindre toujoursla couronne d'épine, 6+6 a
20 Que Jésus sur son frontne mit que pour mourir, 6+6 b
Et frapper à plein poingvotre maigre poitrine ? 6+6 a
Croyez-vous donc que Dieus'amuse à voir souffrir, 6+6 b
Et que ce meurtre lent,cette froide agonie, 6+6 c
Fasse pour vous le cielplus facile à s'ouvrir ? 6+6 b
25 Cette tête de mortentre vos doigts jaunie, 6+6 c
Pour ne plus en sortir,qu'elle rentre au charnier ; 6+6 a
Que votre fosse soitpar un autre finie. 6+6 c
L'esprit est immortel,on ne peut le nier ; 6+6 a
Mais dire, comme vous,que la chair est infâme, 6+6 b
30 Statuaire divin,c'est te calomnier ! 6+6 a
Pourtant quelle énergieet quelle force d'âme 6+6 b
Ils avaient, ces chartreux,sous leur pâle linceul, 6+6 c
Pour vivre, sans amis,sans famille et sans femme, 6+6 b
Tout jeunes, et déjàplus glacés qu'un aïeul, 6+6 c
35 N'ayant pour horizonqu'un long cltre en arcades, 6+6 a
Avec une pensée,en face de Dieu seul ! 6+6 c
Tes moines, Lesueur,près de ceux-là sont fades. 6+6 a
Zurbaran de Sévillea mieux rendu que toi 6+6 b
Leurs yeux plombés d'extaseet leurs têtes malades, 6+6 a
40 Le vertige divin,l'enivrement de foi 6+6 b
Qui les fait rayonnerd'une clarté fiévreuse, 6+6 c
Et leur aspect étrange,à vous donner l'effroi. 6+6 b
Comme son dur pinceaules laboure et les creuse ! 6+6 c
Aux pleurs du repentircomme il ouvre des lits 6+6 a
45 Dans les rides sans fondde leur face terreuse ! 6+6 c
Comme du froc sinistreil allonge les plis ; 6+6 a
Comme il sait lui donnerles pâleurs du suaire. 6+6 b
Si bien que l'on diraitdes morts ensevelis ! 6+6 a
Qu'il vous peigne en extaseau fond du sanctuaire, 6+6 b
50 Du cadavre divinbaisant les pieds sanglants, 6+6 c
Fouettant votre dos bleucomme un fléau bat l'aire, 6+6 b
Vous promenant rêveursle long des cltres blancs, 6+6 c
Par file assis à tableau frugal réfectoire, 6+6 a
Toujours il fait de vousdes portraits ressemblants. 6+6 c
55 Deux teintes seulement,clair livide, ombre noire ; 6+6 a
Deux poses, l'une droiteet l'autre à deux genoux, 6+6 b
A l'artiste ont suffipour peindre votre histoire. 6+6 a
Forme, rayon, couleur,rien n'existe pour vous, 6+6 b
A tout objet réelvous êtes insensibles, 6+6 c
60 Car le ciel vous enivreet la croix vous rend fous ; 6+6 b
Et vous vivez muets,inclinés sur vos bibles, 6+6 c
Croyant toujours entendreaux plafonds entr'ouverts 6+6 a
Éclater brusquementles trompettes terribles ! 6+6 c
Ô moines ! maintenant,en tapis frais et verts, 6+6 a
65 Sur les fosses par vousà vous-mêmes creusées, 6+6 b
L'herbe s'étend : — Eh bien !que dites-vous aux vers ? 6+6 a
Quels rêves faites-vous ?quelles sont vos pensées ? 6+6 b
Ne regrettez-vous pasd'avoir usé vos jours 6+6 c
Entre ces murs étroits,sous ces vtes glacées ? 6+6 b
70 Ce que vous avez fait,le feriez-vous toujours ?… 6+6 c
mètre profil métrique : 6+6
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