Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
FRA_1/FRA7
Anatole FRANCE
Les poèmes dorés
1873
Les sapins
On entend l'Océanheurter les promontoires ; 6+6 a
De lunaires clartésblêmissent le ravin 6+6 b
l'homme perdu, seul,épars, se cherche en vain ; 6+6 b
Le vent du nord, sonnantdans les frondaisons noires, 6+6 a
5 Sur les choses sans formeépand l'effroi divin. 6+6 b
Paisibles habitantsaux lentes destinées, 6+6 a
Les grands sapins, pleins d'ombreet d'agrestes senteurs, 6+6 b
De leurs sommets aiguscouronnent les hauteurs ; 6+6 b
Leurs branches, sans fléchir,vers le gouffre inclinées, 6+6 a
10 Tristes, semblent porterd'iniques pesanteurs. 6+6 b
Ils n'ont point de ramureaux nids hospitalière, 6+6 a
Ils ne sont pas fleurisd'oiseaux et de soleil, 6+6 b
Ils ne sentent jamaisrire le jour vermeil ; 6+6 b
Et, peuple enveloppédans la nuit familière, 6+6 a
15 Sur la terre autour d'euxpèse un muet sommeil. 6+6 b
La vie, unique bienet part de toute chose, 6+6 a
Divine voluptédes êtres, don des fleurs, 6+6 b
Seule source de joieet trésor de douleurs, 6+6 b
Sous leur rigide écorceest cependant enclose 6+6 a
20 Et répand dans leur corpsses secrètes chaleurs. 6+6 b
Ils vivent. Dans la brumeet la neige et le givre, 6+6 a
Sous l'assaut coutumierdes orageux hivers, 6+6 b
Leurs veines sourdementaniment leurs bras verts, 6+6 b
Et suscitent en euxcette gloire de vivre 6+6 a
25 Dont le charme puissantexalte l'univers. 6+6 b
Pour la frcheur du sold' leur pied blanc s'élève, 6+6 a
Pour les vents glacials,dont les tourbillons sourds 6+6 b
Font à peine bougerleurs bras épais et lourds, 6+6 b
Et pour l'air, leur pâture,avec la vive sève, 6+6 a
30 Coulent dans tout leur seind'insensibles amours. 6+6 b
En souvenir de l'âge leurs aïeux antiques, 6+6 a
D'un givre séculaireétreints rigidement, 6+6 b
Respiraient les frimas,seuls, sur l'escarpement 6+6 b
Des glaciers roulaientdes îlots granitiques, 6+6 a
35 L'hiver les réjouitdans l'engourdissement. 6+6 b
Mais quand l'air tiédiraleurs ténèbres profondes, 6+6 a
Ils ne sentiront pasleur être ranimé 6+6 b
Multiplier sa vieau doux soleil de mai, 6+6 b
En de divines fleursd'elles-mêmes fécondes, 6+6 a
40 Portant chacune un fruitdans son sein parfumé. 6+6 b
Leurs flancs s'épuiserontà former pour les brises 6+6 a
Ces nuages perduset de nouveaux encor, 6+6 b
En qui s'envolerontleurs esprits, blond trésor, 6+6 b
Afin qu'en la forêtquelques grappes éprises 6+6 a
45 Tressaillent sous un grainde la poussière d'or. 6+6 b
Ce fut jadis ainsique la fleur maternelle 6+6 a
Les conçut au frissond'un vent mystérieux ; 6+6 b
C'est ainsi qu'à leur tour,pères laborieux, 6+6 b
Ils livrent largementà la brise infidèle 6+6 a
50 La vie, immortel dondes antiques aïeux. 6+6 b
Car l'ancêtre premierdont ils ont reçu l'être 6+6 a
Prit sur la terre avare,en des âges lointains, 6+6 b
Une rude natureet de mornes destins ; 6+6 b
Et les sapins, encorsemblables à l'ancêtre, 6+6 a
55 Éternisent en euxles vieux mondes éteints. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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