Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
DSA_1/DSA20
Alfred de ESSARTS
LA COMÉDIE DU MONDE
1851
XIX
LETTRE DE PAUL FIRMIN
A LA COMTESSE AMÉLIE
« Je vais partir, je vais chercher une retraite 6+6 a
Où n'arrive jamais la rumeur inquiète, 6+6 a
Où ne fermente point la passion sans frein 6+6 b
De ce siècle méchant, de ce siècle d'airain. 6+6 b
5 Je vais fuir les regards… Que ne m'est-il possible 6+6 a
D'échapper à mon cœur, de le rendre insensible, 6+6 a
De le pétrifier dans l'éternel oubli, 6+6 b
Ce sépulcre où vivant l'on est enseveli ! 6+6 b
Mais j'emporte avec moi le ver qui me torture, 6+6 a
10 Et reste pour moi-même une triste pâture. 6+6 a
Il faut souffrir, il faut se souvenir toujours, 6+6 b
Se retourner et voir dans le lointain les jours, 6+6 b
Voir ces fêtes d'hier, ces splendides demeures 6+6 a
Où le plaisir actif précipitait les heures : 6+6 a
15 Car en les maudissant on les regrette encor, 6+6 b
Et de l'excès du mal on se fait un trésor. 6+6 b
Amélie, ô madame, ô vous sœur en souffrance, 6+6 a
Nous ne franchirons plus le seuil de l'espérance ; 6+6 a
Et la vie, achevée au milieu d'un sanglot, 6+6 b
20 Pour nos sombres destins a dit son dernier mot. 6+6 b
Je me souviens du temps où, belle et radieuse, 6+6 a
Vous traversiez le flot de la foule envieuse ; 6+6 a
Où vos pas, vos regards, votre voix, tout était, 6+6 b
Pour qui vous contemplait, pour qui vous écoutait, 6+6 b
25 Un sujet d'admirer cette brillante étoile 6+6 a
Pour laquelle jamais le ciel n'aurait de voile. 6+6 a
Et moi je me disais : « Je serai dans son ciel 6+6 b
« Comme un astre jumeau, protecteur, fraternel ! » 6+6 b
Il est loin cet éclat, il est fini ce rêve ; 6+6 a
30 Sous un nuage épais notre course s'achève… 6+6 a
Du moins si votre cœur soudain s'est égaré, 6+6 b
Dieu vous pardonnera : car vous avez pleuré ; 6+6 b
Car vous avez tendu, comme la Madeleine, 6+6 a
Vos bras vers sa bonté de pitié toujours pleine. 6+6 a
35 Dieu, qui compte les pleurs et pèse le remord, 6+6 b
Vous a purifiée en face de la mort. 6+6 b
Est-il bien vrai ? Jamais, jamais dans cette vie 6+6 a
Je ne la reverrai, mon étoile ravie ? 6+6 a
Jamais je ne pourrai m'écrier : « La voilà, 6+6 b
40 Telle qu'en sa bonté Dieu me la révéla ! » 6+6 b
Oh ! pourquoi le tombeau d'Arthur ou bien du comte 6+6 a
Ne recouvre-t-il pas ma dépouille et ma honte ! 6+6 a
Oui, ma honte… Et pourtant, vous pouvez le savoir, 6+6 b
J'ai toujours immolé mon bonheur au devoir. 6+6 b
45 Mais faut-il, au moment où luit votre auréole, 6+6 a
De ma souffrance à moi vous dire une parole, 6+6 a
Vous dire que je pleure, hélas ! en regrettant 6+6 b
Celle que je dois fuir, celle que j'aimais tant ? 6+6 b
Deux morts sont entre nous, — entre nous un abîme… 6+6 a
50 Désirer, espérer, ce serait presque un crime ; 6+6 a
Et je ne le veux pas… et je fuis pour jamais… 6+6 b
Je ne murmure plus ! — Non, non, je me soumets. 6+6 b
O ma sœur ! ô ma sœur ! vous avez votre tâche 6+6 a
Et vous avez promis de veiller sans relâche, 6+6 a
55 D'être des malheureux et la mère et l'appui… 6+6 b
C'est un rayon divin qui dans votre âme a lui ; 6+6 b
C'est l'inspiration d'une bonne pensée, 6+6 a
Goutte d'un parfum pur dans votre âme versée. 6+6 a
Vous allez donc vouer à ce rude labeur 6+6 b
60 Qui vous prend la beauté mais qui vous rend l'honneur, 6+6 b
Vous allez donc vouer tant de jeunes années, 6+6 a
Fleurs brillantes hier et maintenant fanées. 6+6 a
Celui qui vous aimait et qui mourut par vous, 6+6 b
Dans les cieux vous rendra l'estime de l'époux. 6+6 b
65 Chaque effort, chaque épreuve et chaque sacrifice 6+6 a
Diminuera pour vous le poids de la justice. 6+6 a
Oh ! suivez ce chemin de sang et de sueur ; 6+6 b
A votre Gol gotha montez avec ardeur : 6+6 b
Je ne veux plus avoir désormais dans ma vie 6+6 a
70 Une félicité qui vous serait ravie ; 6+6 a
Mais supportons les jours qui nous restent comptés ; 6+6 b
Sans murmure acceptons ces deux éternités ; 6+6 b
Purifions nos cœurs dans l'ardente prière… 6+6 a
Le ciel nous ouvrira sa porte hospitalière, 6+6 a
75 Lorsque brisant nos fers et relevant nos fronts, 6+6 b
Où l'on ne souffre plus nous nous retrouverons. 6+6 b
— C'est maintenant le rêve où mon âme se plonge, 6+6 a
O ma sœur ! tout le reste est néant et mensonge. 6+6 a
Vivons pour mériter la palme des élus. 6+6 b
80 Adieu… vous qu'ici-bas je ne reverrai plus ! » 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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