Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
DSA_1/DSA14
Alfred de ESSARTS
LA COMÉDIE DU MONDE
1851
XIII
CONFIDENCE
 Cinq heures du matin.Au rendez-vous fidèle 6+6 a
— Car un mot suffisaitpour enflammer son zèle 6+6 a
— Paul Firmin côtoyaitla rive de l'étang : 6+6 b
Charmante promenade, tout en méditant, 6+6 b
5 Il pouvait évoquer,selon sa fantaisie, 6+6 a
Tantôt l'être adoré,tantôt la poésie. 6+6 a
Il marchait lentement,le front baissé, distrait. 6+6 b
Le sable du sentiersous sa botte craquait. 6+6 b
Les saules agitaientleur longue chevelure 6+6 a
10 Sous le vent printanierqui rend un doux murmure. 6+6 a
Et les fleurs exhalaient,au soleil matinal 6+6 b
Qui séchait leur corolle,un parfum virginal. 6+6 b
Le jeune homme pensait,lorsqu'il vit Amélie 6+6 a
Arriver lentementsous sa mélancolie. 6+6 a
Elle dit aussitôt :
15 « — Monsieur, je viens ici 6+6 b
Pour vous ; car j'ai comptésur votre honneur.
— Merci. 6+6 b
Vous avez eu raison ;et plût au ciel, Madame, 6+6 a
Que vous m'eussiez admisà lire dans votre âme. 6+6 a
Ce front si pur jadisaurait moins de pâleur ; 6+6 b
20 Vous ne porteriez pasle poids de la douleur. 6+6 b
— Firmin, vous savez donc…?
— J'ai deviné d'avance. 6+6 a
Vous avez un secret…L'amitié vous devance 6+6 a
Quand vous venez à moipour me le confier. 6+6 b
Ne prenez pas le soinde vous justifier, 6+6 b
25 Dit-il, en la voyantrougir, toute confuse. 6+6 a
Dans vos tristes erreursma raison vous excuse. 6+6 a
Je l'ai connu par vousce tourment de l'amour : 6+6 b
Chacun de nous lui paieun tribut à son tour. 6+6 b
— Qu'ai-je entendu ! Firmin,oh ! m'auriez-vous aimée ! 6+6 a
30 — Oui, mais ma passiondemeura renfermée ; 6+6 a
Et si je vous l'apprends,c'est afin d'ajouter, 6+6 b
Madame, que sur moivous pouvez bien compter. » 6+6 b
 Émue, elle pressales deux mains du poëte. 6+6 a
Il attendait l'aveuMais elle était muette ; 6+6 a
35 Et son secret fatalque ses yeux révélaient 6+6 b
Ne pouvait plus franchirses lèvres qui tremblaient. 6+6 b
 Firmin eut pitié d'elle,et dit :
« — Par artifice 6+6 a
Un homme s'est saiside votre cœur novice. 6+6 a
Il a fort bien jouéson rôle ; suborneur 6+6 b
40 Qui vous cachait l'abîme tombait votre honneur. 6+6 b
Vous avez plaint d'abordet puis aimé cet homme. 6+6 a
— Mon Dieu ! Firmin !…
Est-ilbesoin que je le nomme ? 6+6 a
Je savais sa pensée,et j'en avais frémi. 6+6 b
Que faire ? Vous eussiezrepoussé votre ami ; 6+6 b
45 Ou bien, si par hasardj'avais pu vous apprendre 6+6 a
Le danger, j'eusse étépour vous tel que Cassandre, 6+6 a
Cet oracle fâcheuxque chacun repoussait 6+6 b
Quand le sombre avenirpar sa voix menaçait. 6+6 b
Avouez tout, Madame :il vous trahit sans doute. 6+6 a
50 Parlez, ne craignez rien ;le ciel seul nous écoute. 6+6 a
 — Oh ! c'est affreux !… Avoirtout donné, tout perdu 6+6 b
Pour un lâche imposteur…Cela m'était bien dû. 6+6 b
J'ai forfait aux serments,à mes devoirs de femme ; 6+6 a
J'en suis punie. Et vous,pauvre Firmin
— Madame, 6+6 a
55 Je suis le moins à plaindre ;et cependant l'enfer 6+6 b
Est, je crois, préférableà ce que j'ai souffert. 6+6 b
D'un regard désoléje suivais votre chute ; 6+6 a
Contre vous, contre moije soutenais la lutte 6+6 a
Si vous m'eussiez donnévotre amour, j'eusse fui ; 6+6 b
60 J'eusse fermé les yeuxlorsque le ciel t lui. 6+6 b
Non, je ne voulais pasde ce trésor immense 6+6 a
Tout sage que j'étais,je gardais ma démence. 6+6 a
Devant l'indigne Arthurun sentiment jaloux, 6+6 b
Quand je rêvais l'exil,me rapprochait de vous. 6+6 b
65 J'ai bien souffert ! vingt foisde mon secret farouche 6+6 a
Le mot mystérieuxs'est posé sur ma bouche ; 6+6 a
Et quand j'allais parler,un mouvement d'effroi 6+6 b
— J'ajouterai : d'honneur —se réveillait en moi. 6+6 b
Je me disais : Non, non,tout aveu serait lâche ; 6+6 a
70 Mon lot est de veiller,de veiller sans relâche, 6+6 a
De garantir le nom,le bonheur d'un vieillard. 6+6 b
Hélas ! mon œuvre est vaine,et j'ai parlé trop tard ; 6+6 b
Je n'ai rien empêché,mon âme est asservie, 6+6 a
Et sans vous garantirj'ai gêné votre vie. 6+6 a
75  — Quoi ! vous m'aimiez ainsi,triste et silencieux !… 6+6 b
Ah ! que ne peut-on lireun secret dans les yeux ! 6+6 b
Je serais digne encorde moi-même et du comte ; 6+6 a
J'eusse été votre sœursans remords et sans honte. 6+6 a
Oh ! s'écria Firmin,le regard inspiré, 6+6 b
80 Je ne suis plus à plaindre,et tout est réparé ; 6+6 b
Car vous avez comprisma souffrance, Madame ; 6+6 a
Votre pitié — ce baumeest entrée en mon âme 6+6 a
Oui, j'eusse été pour vousun frère dévoué 6+6 b
Qu'ai-je dit ! je l'étais,je le suis. — Ce roué, 6+6 b
85 Cet Arthur a jetédans nos jours le désordre : 6+6 a
Serpent qu'on réchauffaitet qui songeait à mordre. 6+6 a
C'était par le respect,par l'adoration 6+6 b
Que j'eusse témoignéde mon affection. 6+6 b
Vous voir et vous servir,me rendre nécessaire, 6+6 a
90 Être plus qu'un amant,être un ami sincère, 6+6 a
— Vous consacrer mes soinsjusqu'au dernier instant, 6+6 b
C'était mon vœu ; pour vousje serais mort content ! 6+6 b
Mais vous vous détournezvous êtes bien rêveuse ! 6+6 a
 — Je suis, Firmin, je suis,hélas ! bien malheureuse. 6+6 a
95 Oh ! vous l'aimez toujours,lui qui put vous trahir ! 6+6 b
— L'aimé-je ?… je ne sais…Je voudrais le haïr, 6+6 b
— La haine dans l'amour,quel contre-sens étrange ! 6+6 a
— Je rêve à l'avenir,dans l'espoir qu'il me venge. » 6+6 a
 Firmin resta muet,tout bas épouvanté 6+6 b
100 De ce bizarre aveupar la douleur dicté. 6+6 b
La comtesse sentitqu'invoquer sa défense 6+6 a
C'était faire à Firminune nouvelle offense ; 6+6 a
Elle pencha la têteet se mit à pleurer 6+6 b
Et lui, de ces beaux pleursil semblait s'enivrer ; 6+6 b
105 Car jamais Amélie,en ses jours de conquête, 6+6 a
Quand l'éclat du plaisirlui montait à la tête, 6+6 a
N'avait eu plus d'attraitsqu'en ce moment de deuil 6+6 b
son cœur succombaitsous l'amour et l'orgueil. 6+6 b
— « Vous ne savez pas tout !… le lâche qui m'outrage 6+6 a
110 A de mon déshonneurgardé le témoignage. 6+6 a
— Comment ?
Il a de moides lettres…
O mon Dieu ! 6+6 b
— Je voulais les reprendre ;Arthur s'est fait un jeu 6+6 b
De ma prière.
Ainsi,vos lettres ?…
Il les garde. 6+6 a
Il les rendra, Madame.
O Firmin, prenez garde. 6+6 a
Soyez prudent.
115 Eh quoi !trembleriez-vous pour lui ! 6+6 b
— Pour vous, le seul amiqui me reste aujourd'hui. 6+6 b
Faut-il que votre zèleau danger vous expose ! 6+6 a
Il n'est pas de dangerdans une bonne cause. 6+6 a
Je soutiens une femme
Elle est coupable.
Eh bien ! 6+6 b
120 Le Christ a pardonnéje pardonne en chrétien. 6+6 b
Je ne vois plus la faute,et je vois la faiblesse. 6+6 a
A moi vos intérêts.Souffrez que je vous laisse 6+6 a
J'ai hâte de partir.Oh ! puisse le passé 6+6 b
Comme votre secretun jour être effacé. 6+6 b
Employez la douceur.
125 — Pas d'égards pour un trtre 6+6 a
Qui fut aimé de vouset put vous méconntre ! 6+6 a
Un dernier mot, de grâce ;ayez surtout bien soin… » 6+6 b
 Paul ne répondit pas,il était déjà loin. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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